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Face à face Président du Faso – Paysans : Les vérités de Mamadou Cissokho

Publié le mardi 3 mai 2016 à 10h42min

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Face à face Président du Faso – Paysans : Les vérités de Mamadou Cissokho

La 19e journée nationale du Paysan a refermé ses portes le 30 avril 2016. Bien connu pour son franc parlé, Mamadou Cissokho, président d’honneur du réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) n’a pas manqué de dire certaines vérités lors du face à face entre le président du Faso et les paysans.

Dès l’entame de son discours Mamadou Cissokho s’évertue à expliquer aux participants la fracture entre les paysans et les Etats. Cette fracture a bien une histoire et elle a commencé au temps de la colonisation. A ce moment, « les enseignants disaient aux élèves : Si tu ne travailles pas bien à l’école tu vas cultiver », a-t-il rappelé. L’autre fracture concernait le sentiment qu’avait le paysan lorsqu’on lui demandait ce qu’il faisait comme métier. Selon M. Cissokho, celui-ci avait un statut dévalorisé au point qu’il pensait qu’il n’était « rien ».

Le respect : une dette de l’Etat envers les paysans

Autre fait souligné par celui qui ne mâche pas ses mots, ce sont les programmes d’ajustement structurels qui ont rompu la confiance entre l’Etat et les paysans, qui fournissaient pourtant l’essentiel du produit intérieur brut. « C’est avec la daba qu’ils ont envoyé les enfants à l’école […] C’est le coton qui a payé les salaires, qui a construit les routes », a-t-il précisé. Pour toutes ces raisons, Mamadou Cissokho pense que le paysan mérite bien plus de respect et de reconnaissance. Une reconnaissance qui sonne comme une dette de l’Etat envers « ceux qui ont inventé la fertilité des sols quand rien ne poussait au Burkina Faso pendant la sécheresse ».

Ne plus être utilisé

« Nous sommes la majorité de ce pays et nous avons un seul principe de partenariat. Nous ne voulons jamais et nous ne serons jamais une charrette qu’on utilise et qu’on dépose. Nous sommes maitres de notre devenir », a clamé haut et fort Mamadou Cissokho. Pour lui, la confédération paysanne du Faso (CPF) tout comme les autres organisations « ne se mettent jamais dans la dynamique de remplacer qui que ce soit » car le principe premier demeure « le respect et la reconnaissance de l’autorité de l’Etat ».

« On vous a élu pour que vous soyez à notre service et celui qui accompagne ne saurait être devant », a clarifié M. Cissokho. Il espère que les études de mise en place de la future banque de l’agriculture, annoncée par le Premier ministre Paul Kaba Thiéba, se feront avec les paysans. « On ne fait pas d’étude sur la banque agricole ; c’est nous qui ferons la banque agricole avec nos idées et nos propositions ».

« La troisième guerre mondiale se fera autour de l’alimentation et de l’eau », a prédit le président d’honneur de la ROPPA convaincu que la première souveraineté est alimentaire. « Aujourd’hui, nous sommes dépendants. Si je vois mon cousin Peulh qui boit du lait en poudre en provenance d’Europe, je me demande à quoi sert le Peulh dans nos pays ? C’est eux qui doivent nous donner le lait », maintient Mamadou Cissokho.

Retirer la terre pour la remettre à ceux qui la travaillent

Il s’est dit indigné de voir qu’il y avait plus de murs que d’arbres de Ouagadougou à Tenkodogo en passant par Zorgho et Koupéla. « J’ai vu des murs de 1km, de 500m. Le béton, on ne va pas le manger. Il faut que le gouvernement prenne des dispositions pour dire à la Nation que notre avenir, c’est de protéger les terres agricoles. On ne peut pas laisser les gens qui ont de l’argent mettre des murs autour des meilleures aires du pays. C’est un danger », a-t-il lancé. A ce propos, le président du Faso a déclaré par la suite que l’Etat prendrait des dispositions pour retirer les terres à tous ceux qui ne les mettent pas en valeur.

Appel à l’union

« Notre maison est malade, il y a des failles, il y a des conflits et nous devons avoir le courage de les régler », a soutenu Mamadou Cissokho car un mouvement durable est un mouvement qui accepte l’autocritique. Pour lui, les paysans devront s’unir pour prendre leur destin car « il y a de l’avenir pour l’agriculture burkinabè ».

Hermann Frédéric Bassolé
Lefaso.net

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