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Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

Publié le mercredi 19 mai 2021 à 15h10min

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Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

Selon un rapport de l’Organisation des Nations-unies pour l’éducation, la science et la culture, en Afrique subsaharienne, une fille sur dix ne va pas à l’école pendant son cycle menstruel. Ce qui correspond, d’après certaines estimations, à 20% du temps scolaire perdu sur une année. Nombre de filles abandonnent aussi complètement l’école lorsqu’elles sont en règles. Plusieurs facteurs expliqueraient cet abandon, notamment le manque d’installations, d’informations ou de produits d’hygiène dans les écoles. Selon Aminata Diallo, la coordonnatrice de l’association Maïa, la solution, c’est la gestion de l’hygiène menstruelle. Cette expression désigne l’accès à des informations, une préparation et un soutien adaptés qui permettent aux jeunes filles de gérer leurs menstruations de manière hygiénique, avec dignité et en toute sécurité.

Elle a ainsi expliqué sans ambages que les menstruations pouvaient empêcher les filles d’aller à l’école et qu’il fallait y remédier pour leur permettre de poursuivre leurs études. « Depuis 2003, notre association travaille sur la santé sexuelle et reproductive. Elle a eu à mener plusieurs activités en direction des jeunes scolarisées des différents établissements scolaires de Bobo-Dioulasso. En 2010 pour la première fois, elle a commencé à parler des menstrues au niveau des écoles primaires de la ville, parce qu’on s’est rendu compte à quel point c’était important de parler de sexualité. Nous avons constaté que les jeunes filles qui avaient leurs règles au niveau du primaire ne recevaient pas d’informations de la part de l’enseignant, ni de leur mère », a déploré Aminata Diallo, coordonnatrice de l’Association Maïa.

Aminata Diallo, la coordonnatrice de l’Association Maïa

C’est ainsi qu’à travers son association, madame Diallo s’efforce de faire progresser la gestion de l’hygiène menstruelle. Elle explore des interventions susceptibles d’améliorer l’accès aux installations d’assainissement, la sensibilisation à l’hygiène et la lutte contre l’absentéisme scolaire des jeunes filles. C’est dans cette logique qu’elle a organisé, le samedi 15 mai 2021, une rencontre d’échanges avec des institutrices de la ville de Bobo-Dioulasso. Cette rencontre avait pour objectif de « démythifier » les règles. Elle visait à sensibiliser les participants qui, à leur tour, devront donner l’information juste aux jeunes filles sur la gestion de leurs menstrues, afin qu’elles n’aient plus peur ou honte pendant leurs périodes. « Les jeunes filles doivent avoir accès à des produits d’hygiène et à des informations précises sur leur santé menstruelle. Elles ne devraient plus ressentir de honte ou de stigmatisation lorsqu’elles ont leurs règles. Nous voulons éviter que ces jeunes filles abandonnent l’école avec l’apparition des premières règles », a-t-elle laissé entendre.

Nathalie Kaboré, formatrice en santé sexuelle et reproductive à l’Association Maïa

À l’en croire, l’association a déjà travaillé avec des mères sur la problématique. « Ces mères nous ont expliqué pourquoi elles ne pouvaient pas parler des menstrues et de l’hygiène des menstrues à leurs filles. Donc nous les avons sensibilisées et formées. Aujourd’hui nous sommes avec les institutrices. Nous les formons pour qu’elles puissent former des groupes de travail avec les jeunes, pour leur parler des menstrues afin de pouvoir démythifier tout ce qui est préjugé. Elles vont pouvoir donner l’information juste à ces filles pour qu’elles puissent être prêtes le jour où elles auront leurs règles », a souligné la coordonnatrice de l’Association Maïa.

Des institutrices prennent part à la rencontre d’échanges sur la gestion hygiénique des menstrues des jeunes filles

Les différents établissements auront chacun une institutrice qui, après chaque cours, pourra recevoir les enfants pour échanger avec elles. Celles qui ont notamment besoin d’une oreille attentive, celles qui ont besoin de quelqu’un, à qui expliquer leurs problèmes. Elle a par ailleurs poursuivi en disant que les écoles ne sont pas dotées d’installations adéquates pour permettre à ces jeunes filles de mieux gérer leurs menstrues. « Ce qui fait que très souvent les filles peuvent passer toute la journée à l’école sans pouvoir se soulager parce qu’elles n’ont pas des toilettes adaptées », a déploré Aminata Diallo. C’est pourquoi, elle a lancé un appel à l’endroit des responsables d’établissements, afin qu’ils tiennent compte de ces aspects, en séparant les toilettes des filles de celles des garçons. Et surtout à disponibiliser l’eau pour leur permettre de se nettoyer chaque fois.

Les participantes apprennent à faire des couches avec des « vieux pagnes en coton »

Les menstrues bien gérées améliorent la fréquentation scolaire des filles
Cette formation a été assurée par Nathalie Kaboré, formatrice en santé sexuelle et reproductive à Maïa. Selon elle, le but de cette formation avec ces instructrices est de leur donner des rudiments nécessaires, afin d’amener les jeunes filles à être assidues au cours, à ne pas avoir peur lorsqu’elles auront leurs règles. Car elle estime que les menstrues bien gérées améliorent la fréquentation scolaire des filles. « La démythification des règles suppose un travail d’écoute, de non jugement. Il faut valoriser l’enfant qui a eu le courage de venir vers vous pour exprimer son problème. Il faut rassurer l’enfant en lui disant que c’est normal d’avoir des règles. Maman a des règles, mamie aussi en avait et la petite sœur aura, donc c’est normal. Il faut éviter des expressions qui touchent à la sensibilité de l’enfant, pour qu’elle ne soit pas choquée », a souligné la formatrice, Nathalie Kaboré.

Le clou de cette rencontre a été l’apprentissage à faire des couches pour une gestion hygiénique des menstrues. Toujours, dans le souci d’accompagner ces jeunes filles à mieux gérer leurs menstrues, l’association veut leur apprendre à faire elles-mêmes leurs couches avec des pagnes. « De tous temps, les femmes ont toujours mis des pagnes. Il n’y avait pas de protection moderne. Ici, nous avons amélioré seulement. Les pagnes qu’on utilise sont de vieux pagnes en coton et c’est tout doux. Pourquoi cela ? Parce que nous travaillons avec des filles qui sont en situation de vulnérabilité. Et nous avons essayé dans le passé de donner des protections modernes à ces filles mais cela revenait extrêmement cher. Pour des filles en milieu rural, c’est difficile pour elles d’acheter des cotons tous les mois, ou à une mère qui a quatre ou cinq enfants, c’est un lourd budget. Donc on apprend à ces filles à faire elles-mêmes leurs serviettes hygiéniques, il n’y a rien de tel. Non seulement c’est économique, elles n’auront plus à payer les protections ; de deux c’est écologique, on ne jette pas », a expliqué Aminata Diallo.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 19 mai 2021 à 21:09, par Biata En réponse à : Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

    L’initiative de l’association Maïa est à saluer. Des actions similaires ont été initiées par d’autres associations sur le terrain et c’est à encourager. Le décrochage scolaire des jeunes filles durant leurs règles est un vrai problème à résoudre d’abord par l’éducation intrafamiliale je dirais puis à l’école bien entendu. Mais tout cela est vain si nos autorités éducatives ne prennent pas conscience du problème pour doter les établissements scolaires de commodités salubres.
    Cependant, cette phrase m’interroge : ""Les participantes apprennent à faire des couches avec des « vieux pagnes en coton »"".
    Faut-il encore apprendre au Faso, à des femmes adultes, mères de famille, à faire des couches avec des morceaux de pagne ? Nos grands-mères et nos mères faisaient comment ? Elles ont toujours su gérer leurs menstrues avec leurs chiffons et elles étaient propres malgré les contraintes de leur quotidien. Je pense très humblement que c’est aussi cette éducation et cette transmission intergénérationnelles qui nous manquent de nos jours où nous vivons l’époque des tampax et des tampons... En tout cas, bien du courage dans votre mission d’éducation à l’hygiène et à la santé des jeunens scolaires durant leurs règles. Important !

  • Le 20 mai 2021 à 00:10, par Konate Dotere Patrice Yacinthe En réponse à : Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

    Bonjour, la chaîne au cœur des grands événements ! Je salue cette initiative vraiment d’actualité de nos jours dans nos établissements. En plus de ceci, personnellement j’avais bénéficié quand j’étais lycéen à l’époque au Lycee Ouezzin Coulibaly à une formation intitulée "les pères formateurs"
    A l’issue de laquelle j’ai beaucoup appris à connaître mon propre corps et comment préserver mon ma santé et la santé de mon entourage contre toute possible transmission de maladies sexuellement transmissibles ! Merci beaucoup pour ça l’association MAÏA est une association qui donne une seconde chance de vie à beaucoup de jeunes déscolarisés et dans des conditions précaires !!!
    Je précise bien que je fus un fruit de cette association vraiment bienveillante.

  • Le 20 mai 2021 à 07:29, par sylas En réponse à : Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

    L’Etat ne peut tout faire. Les parents leurs rôles c’est d’éduquer leurs enfants surtout s’il s’agit des choses liées à l’enfance. Pourquoi vous n’associez pas les hommes ! si chaque fois ce sont les Nations unies qui vont venir nous réveiller pour notre devoir, en tant que parents c’est vraiment triste. Qu’a cela ne tienne c’est une bonne initiative et bravo à l’association MAIA !

  • Le 20 mai 2021 à 07:47, par sylas En réponse à : Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

    L’Etat ne peut tout faire. Les parents leurs rôles c’est d’éduquer leurs enfants surtout s’il s’agit des choses liées à l’enfance. Pourquoi vous n’associez pas les hommes ! si chaque fois ce sont les Nations unies qui vont venir nous réveiller pour notre devoir, en tant que parents c’est vraiment triste. Qu’a cela ne tienne c’est une bonne initiative et bravo à l’association MAIA !

  • Le 20 mai 2021 à 09:46, par lapatriote En réponse à : Les menstruations, source d’absentéisme scolaire : Des institutrices optent pour une éducation à la santé génésique des jeunes filles

    Tres belle initiative et beaucoup de courage a cette Association. il faut vivre les contraintes liees aux menstrues pour comprendre la pertinence des actions autour de la question.
    Courage a toutes les femmes en particulier les jeunes filles

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