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Gnagna : "Le département de Coalla en panne"

Publié le jeudi 16 septembre 2004 à 06h57min

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Le département de Coalla, situé à environ 50 km de Bogandé, a du mal a frayer les chemins du développement. Des associations se battent bec et ongles pour relever le défi mais "les structures étatiques, elles, commencent à voler en éclats". C’est du moins ce qu’affirme Bernard Banga, l’un de nos lecteurs originaires de cette zone.

"Coalla, un gros village traversé par une rivière aux enjeux économiques multiples n’a pas les attributs d’un vrai département. Aujourd’hui, son vrai problème, c’est ce manque cruel de voies de communication qui mine depuis plus de 30 ans son développement. Dans un pays pauvre comme le Burkina où nos autorités peinent à retrouver des bailleurs de fonds, ses dignes fils ont ensemble décidé de voler de leurs propres ailes. Pour le prouver, ils sont mobilisés plus que jamais derrière deux associations de développement. Mais quel autre espoir peut-on attendre dans ce département où les structures étatiques mêmes commencent à voler en éclats ?

On salue honnêtement cette conscience aiguë qui a animé la volonté des fils de Coalla à se mobiliser derrière des associations à but humanitaire. Situé sur les rives du Sahel, Coalla, un département durement affecté par la désertification est à 50 km au nord de Bogandé. Le dimanche dernier, après un entretien qui allait durer près de 3 h 10 mn et consacré uniquement au développement de Coalla, Diabouga Y. Paul et Sebgo Edmond, respectivement présidents des "associations Tin -Tani pour le développement" et associations Tin yenga Niyemba "sont restés unanimes : l’idée de créer une association à Coalla a pu germer en 1976.

A l’époque, l’arrondissement de Coalla regroupait Coalla, Liptougou et Manni qui deviendront plus tard des départements entiers. A la faveur de cette nouvelle division territoriale chaque département devait créer sa propre structure. Ainsi naissait à Coalla "l’association des ressortissants de Colla pour son développement (ARCODDEP).

Au départ, sa clef de voûte fut la sensibilisation. C’est pour faire entendre sa philosophie aux populations. Au moins, cette associations a réalisé des actions concrètes. On peut citer la construction du Collège d’enseignement général de Coalla dont le coût s’élève à vingt millions (20 000 000 ) de F CFA, le logement du directeur, l’équipement au complet, les latrines, à l’exception d’un don en nature (des ouvertures) fourni par l’Etat, une vaste campagne de sensibilisation a également été menée dans le volet social (scolarisation, santé,etc.).

Mais pour des besoins de sensibilisation en langue gourmantché, ARCODDEP deviendra "association Tin-Tani pour le développement "qui signifie "unisssons-nous" en langue gourmantché. Grâce au dynamisme débordant de son ancien président, Madiéga Georges (actuellement à Toulouse en France), cette association a pu élargir d’autres espaces d’action avec la créationn d’une nouvelle association dénommée "association Tin-Yenga Niyemba" qui signifie dans la même langue " même terre, les mêmes hommes".

Actions concrètes

La particularité de cette associations est qu’elle a une dimension internationale. Elle est en partenariat avec Tin-Yenga Niyemba Via Niéba de France. Comme actions concrètes, on peut également citer la construction d’une banque de céréales dans les villages tels que Tenkouori, Bambré, Douayana, Djidjémba, Tindangou, Bani. Notons surtout que chaque banque est dotée d’un fond de roulement d’un montant de 450 000 F CFA ; la constructions d’une école à trois classes équipement, cantine scolaire, trois moulins pour les mêmes villages cités, fourniture de médicaments aux CSPS de Tenkouri, Bani, Soula, Djidjémba, Takou, un dispensaire à Coalla, réalisation de 4 forages, prêts annuels aux femmes (50 000/femme), dotations de 20 tonnes de céréales, près de 70 élèves parrainés etc.

Dans ces actions de développement, "l’assocation des jeunes élèves de Coalla" (AJEC) n’est pas en reste. Dans cette mission de sauvetage, pendant ces vacances encore, elle était sur le terrain pour des sensibilisations et des plantations d’arbres devant lesquels elle ne cache plus sa détermination malgré les difficultés qu’elle éprouve à faire entendre sa philosophie.
Voici des actions qui ont agréablement surpris les populations au moment où les dirigeants des associations pensent qu’il faut couper le mal à la racine : la réalisation d’un barrage à Coalla. Dans cette localité, c’est un vrai problème qui retient présentement le souffle.

Concernant ce barrage qui tarde à voir le jour, un projet de gestion des ressources naturelles de Coalla a été initié. Disons que "Hydraulique sans Frontière (une ONG française)", en collaboration avec des nationaux, a déjà fait une étude de faisabilité sur le terrain. Pour la gestion de ces ressources qui doivent coûter plus de 3 milliards, 5 volets sont concernés. Il s’agit du volet socio-économique ; activité de production et contraintes ; état de la pauvreté ; état de l’environnement et moyens de communication. C’est le volet le plus important.

Alors, dans une peine qu’ils parviennent difficilement à maîtriser, les dirigeants des associations diront que compte tenu de quelques contraintes budgétaires, les financements sont encore à rechercher. Le projet est donc pour le moment en pointillé. En attendant, Coalla demeure ce que l’on sait : le département de mille maux. Son sort est lié à cette rivière (la Faga) qui se jette dans le Niger. A cause de cette grande rivière, Coalla est une localité où les voies de communication font cruellement défaut. Traditionnellement, à chaque saison hivernale, il est difficile d’accès, ce qui le coupe des autres départements de la Gnagna.

"Ils sont venus pour servir l’Etat mais
ils ont rebroussé chemin"

Ces graves problèmes paralysent surtout les activités socio-économiques. Mais le cas le plus décevant, c’est les évacuations sanitaires. Depuis le départ d’Air Secours International (ASI), Bogandé (ville la plus nantie en infrastructure sanitaires dans la région) n’a plus de pont aérien. Actuellement, toute les évacuations sanitaires se font au moyen d’une pirogue. Dans cet enfer de Coalla (large de 1200 mètres), certains préfèrent laisser mourir leurs malades. Car l’autre voie qui contourne la rivière et rejoint Ganta, Yalgo, Taparko et Bogandé est longue de 123 km.

L’Administration qui vit également les mêmes maux est en souffrance présentement. Connaissant la mésaventure de l’ancien préfet qui a failli se noyer dans l’une des rivières, tous ceux qui l’on remplacé évitent de prendre les risques de répondre aux convocations à Bogandé en période de crues. Si l’on excepte le cas du préfet, un agent vétérinaire a été noyé à Gongorgou (une autre rivière près de Coalla) alors qu’il était en mission. Autant dire que Coalla est une arrière prison du Burkina. Un autre cas aussi catastrophique, c’est le CEG qui, après quelques années de fonctionnement, a fermé ses portes. Actuellement, il est envahi par des herbes s’il n’est pas un nid de malfrats. Après un cambriolage tout récemment, ses ouvertures ont été emportées.

A Coalla, par manque de logement, des professeurs ont été contraints de vivre en communauté dans une unique salle aménagée et si ce n’est pas le cas, il fallait s’abriter sous des toits de case pour accomplir cette noble mission qu’est l’enseignement. C’est ce calvaire qui les a obligés à prendre la poudre d’escampette. Les quelques rares professeurs qui y étaient ont rejoint Manni, l’autre "Suisse" de la région où il fait bon vivre. Des gendarmes et policiers qui ont débarqué pour la première fois dans cette localité pour servir l’Etat ont rebroussé chemin le lendemain. Peut-on dire dans ce cas que ce département n’est pas en panne ?"

Bernard BANGA
Le Pays

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