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Yatenga-Cérémonie rituelle à Kalo : les CRS font le ménage

Publié le mardi 24 août 2004 à 07h04min

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Depuis deux ans, un différend oppose deux communautés (Berbas et Dogons) du village de Kalo (dans le département de Thiou, à 35 km de Ouahigouya) à propos des fétiches traditionnels du "Wendé". Longtemps suspendue, la célébration rituelle des fétiches, organisée le jeudi 12 août 2004, a donné lieu à des échauffourées suite à l’intervention musclée de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS). Bilan : plusieurs blessés et de nombreuses arrestations.

Difficile de déterminer avec exactitude le nombre de blessés suite à l’intervention des éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) lors de la célébration controversée des rites du "Wendé" de Kalo. Deux blessés selon des sources officielles, plusieurs selon des sources indépendantes.

Chasse à l’homme à Kalo

Alerté, nous nous sommes rendu au Centre hospitalier régional de Ouahigouya, où des blessés ont été évacués par les CRS. Dans la salle de réanimation, deux femmes et un jeune homme sont au chevet d’un homme de 40 ans environ, la jambe droite immobilisée.

Renseignements pris, il s’agirait d’un des blessés de Kalo. "C’est un journaliste qui est venu s’entretenir avec toi sur ce qui s’est passé à Kalo" , lui annonce notre accompagnateur. Après quelques moments d’hésitation, la victime rétorque : "Je ne peux rien vous dire ; si vous voulez savoir ce qui s’est réellement passé, rendez-vous à Kalo. Vous verrez les douilles des munitions et vous comprendrez".

Selon un témoin des événéments, il y aurait eu une véritable chasse à l’homme à Kalo. Les CRS auraient chargé les Dogons à l’aide de matraques, de gaz lacrymogènes et de fusils chargés à blanc. La course-poursuite s’est même poursuivie sur les toits des maisons et certains Dogons se seraient réfugiés dans des puits.

Il nous a été signalé qu’un vieillard, blessé et recherché par les CRS, a abandonné sa famille pour se réfugier au secteur 6 de Ouahigouya.

Pour le Toogho Naaba Kugri, premier ministre du Royaume traditionnel du Yatenga, représentant le Naaba Kiiba du Yatenga à ladite cérémonie rituelle, "la répression des CRS fait suite au refus catégorique des Dogons de laisser les Berbas honorer les fétiches du "Wendé".

Munis d’armes à feu de fabrication locale camouflées sous leurs vêtements, de coupe-coupe et de lances, les Dogons ont investi les lieux des fétiches pour empêcher la cérémonie rituelle", relate le Toogho Naaba, avant de poursuivre : "Je leur ai demandé, au nom du Naaba Kiiba, de libérer les lieux du sacrifice, mais en vain".

Le Naaba Kiiba fit appel aux CRS

Toujours selon le premier ministre du royaume du Yatenga, c’est suite au refus d’obtempérer aux trois sommations lancées par les CRS que la sécurité a chargé les Dogons.

Il soutient cependant n’avoir pas été témoin d’usage de fusils chargés à blanc : "Les CRS les ont dispersés à l’aide de matraques et de gaz lacrymogènes. S’il y a eu des tirs à balles à blanc, c’est peut-être lors des courses-poursuites loin des lieux de la cérémonie", a-t-il ajouté.

Quant au nombre de blessés, le Toogho Naaba affirme en avoir vu deux : "L’un a reçu un coup de pierre sur la tête et l’autre a eu une fracture à la jambe en sautant du toit d’une maison. Plusieurs personnes ont été arrêtées et transférées à Ouahigouya".

Interrogé sur l’origine du différend entre Berbas (ethnie des chefs de terre) et Dogons, le Toogho Naaba raconte : "La querelle a commencé il y a de cela deux ans, lorsque les Dogons, immigrés à Kalo, ont commencé à revendiquer la fonction de chef de terre sous prétexte qu’ils sont majoritaires dans le village.

Alors, ils ont décidé d’interdire l’accès des fétiches du "Wendé" aux Berbas. Malgré mes multiples médiations au nom du Naaba Kiiba, poursuit-il, les Dogons ne fléchirent pas. C’est ce refus de se soumettre à la tradition qui a amené le Naaba Kiiba a recourir à la force publique pour l’accomplissement des rites du "Wendé", a-t-il terminé, en nous montrant la lettre du Naaba Kiiba adressée au préfet de Thiou pour demander l’envoi des forces de sécurité.

Alain St Robespierre
L’Observateur Paalga

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