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Résilience de l’hôpital Yalgado face aux catastrophes : Le diagnostic d’Atina YARGA

Publié le mardi 13 juin 2017 à 16h28min

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Résilience de l’hôpital Yalgado face aux catastrophes : Le diagnostic d’Atina YARGA

Atina YARGA a défendu avec succès son mémoire intitulé : « la résilience de l’hôpital public face aux catastrophes : cas du Centre hospitalier universitaire Yalgado OUEDRAOGO » pour l’obtention du diplôme d’Administrateur des hôpitaux et des services de santé à l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM) le jeudi 08 juin 2017, sous la direction de Monsieur Benjamin P. BAMOGO, Coordonnateur du projet de construction et d’équipement du centre de cancérologie de Ouagadougou.

L’impétrant a rappelé que, chaque année, les catastrophes surviennent dans de nombreuses régions du monde. Qu’elles soient naturelles ou d’origine anthropique, elles fauchent des vies, occasionnent des blessures graves et réduisent à néant des années de travail. Récemment encore, le Sri Lanka a été frappé par des inondations faisant 180 morts, la Russie par des vents violents avec plus de 10 morts et la Côte d’Ivoire par des pluies diluviennes avec 8 morts.

Au Burkina Faso, la situation n’est guère reluisante. Deux scénarii se présentent : le premier est le scénario de l’hôpital victime des catastrophes naturelles avec des inondations à répétition au CHU-YO notamment le 1erseptembre 2009, le 23 septembre 2013 et le 10 juillet 2016. En effet, du bilan de ces catastrophes à l’échelle du pays de 2009 à 2016, on note 350 651 sinistrés, 61 morts, 1 porté disparu et 63 blessés ainsi que des dégâts qui donnent le tournis. Par exemple, les inondations du 1er septembre 2009 ont affecté le Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo (CHU-YO) à 90% de sa fonctionnalité et occasionné des pertes estimées à plusieurs dizaines de milliards. Le second scénario est celui de l’hôpital gestionnaire des catastrophes d’origine anthropique. Le bilan de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, de la tentative de coup d’Etat du 16 septembre 2015 et de l’attentat terroriste du 15 janvier 2016 fait ressortir 69 morts, 739 blessés dont 303 admis au CHU-YO soit 41% de l’ensemble des blessés.

La problématique de son étude est partie de deux constats : il y a une récurrence des catastrophes naturelles au CHU-YO qui affectent la structure de ses bâtiments, la fonctionnalité du matériel médico-technique et qui désorganisent les soins ; et la prise en charge des blessés des catastrophes d’origine anthropique comporte des insuffisances. Non seulement, peu de place a été accordée à la perspective diachronique dans les recherches sur l’hôpital public face aux catastrophes naturelles mais aussi, les catastrophes d’origine anthropique, dans un contexte sécuritaire dégradé (comme ce fut le cas dans notre pays), n’ont pas été abordées par ses prédécesseurs. En outre, le CHU-YO est déjà sous pression en temps normal, qu’en serait-il en cas de catastrophe, s’est-il interrogé ?

La question principale de sa recherche a été la suivante : le CHU-YO est-il préparé à répondre efficacement aux risques de catastrophes, devenues ces dernières années, de plus en plus récurrentes ? De cette question principale a découlé une hypothèse principale à savoir que la faible capacité de gestion des catastrophes par le CHU-YO est due à un ensemble de vulnérabilités qui l’affectent avant, pendant et après les catastrophes.

On peut également retenir de l’étude qu’elle est rétrospective (2009 à 2016) à visée analytique avec une méthode mixte à dominance quantitative. Un volet qualitatif qui a permis d’approfondir les données quantitatives recueillies. Notons également que l’impétrant a fait des efforts sur le plan méthodologique en réalisant un stage de terrain du 06 septembre au 03 octobre 2016 au CHU-YO ; une pré-enquête les 07 et 08 mars 2017 au Centre hospitalier universitaire Pédiatrique Charles De Gaulle et l’enquête proprement dite (y compris des prises de vues et des images d’archives) qui a été menée du 14 mars 2017 au 07 avril 2017 au CHU-YO.

A l’issue de cette recherche qui a touché 137 personnes dont 124 personnels de santé pour les questionnaires et 13 personnes pour les guides d’entretien (04 responsables du CHU-YO, 05 personnes ressources extérieures, 03 blessés de l’insurrection populaire et 01 blessé de la tentative de coup d’Etat), il a abouti à trois principales conclusions : il n’y a pas de problème d’appropriation des enjeux de la gestion des catastrophes par les agents au CHU-YO. Ce qui est en soi un pas vers la résilience. Toutefois, des goulots d’étranglement subsistent et tiennent en des limites structurelles (comment protéger les bâtiments contre les catastrophes), fonctionnelles (comment protéger le matériel contre les catastrophes), organisationnelles (comment faire face aux catastrophes) corrélées à une faible participation de l’Etat et de la commune de Ouagadougou aux côtés du CHU-YO. Son hypothèse principale est donc confirmée. C’est dire que le CHU-YO n’est pas résilient face aux catastrophes, qu’elles soient naturelles ou d’origine anthropique.

Face à cette situation, l’auteur a fait de nombreuses suggestions à trois acteurs. A l’endroit du Ministère de la Santé, il propose entre autres d’élaborer un plan spécial de mise à niveau du matériel médico-technique du CHU-YO. A l’endroit de la Commune de Ouagadougou, il suggère de mettre un accent particulier, lors du curage des caniveaux, sur les zones inondables comme le CHU-YO. A l’endroit du CHU-YO, il préconise de motiver les équipes travaillant en situation de catastrophes et d’accélérer la finalisation du plan blanc.

En rappel, le jury était constitué de : Dr Félicité W. NANA, Présidente ; M. Benjamin P. BAMOGO, Directeur de mémoire ; M. Bassidou SARE, Membre. Si l’auteur a réalisé un brillant travail qui lui a valu la note de 16/20, il faut reconnaître quelques limites. En effet, il a principalement axé son travail sur le discours des acteurs hospitaliers. Aussi, les prochaines études pourraient-elles mettre l’accent sur certaines sources documentaires telles que les rapports de réunions de crise, les rapports de gestion de catastrophe ainsi que l’appréciation de la prise en charge médicale.

Tout compte fait, Atina YARGA a le mérite d’avoir mené cette recherche qui constitue un retour d’expérience de la gestion des catastrophes successives au CHU-YO et qui invite surtout l’ensemble des acteurs à se donner la main pour lever les obstacles à la résilience de cet hôpital public face aux catastrophes. Bonne suite de carrière à l’impétrant qui invite à garder à l’esprit cette pensée de Léonard De VINCI : « Celui qui craint le danger saura l’éviter ».

Correspondance particulière
Contact de l’auteur : burkimdi@gmail.com

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Vos commentaires

  • Le 14 juin 2017 à 07:57, par Pyramide sanitaire En réponse à : Résilience de l’hôpital Yalgado face aux catastrophes : Le diagnostic d’Atina YARGA

    Les CHU Sanou Souro de Bobo et Yalgado de Ouaga,sont 2 hôpitaux de référence au plan national. On doit évacuer dans ces hôpitaux des malades dont les soins dépassent les compétences des CSPS et CMA. De même, les cas de grossesse à risques avec des femmes souffrant de pathologie délicate peuvent être transférés dans les maternités de ces 2 hôpitaux. Cependant, les femmes qui ont un suivi normal sans risque de leurs grossesses peuvent faire leurs accouchements dans des CSPS ou CMA dans les périphéries des villes de Bobo et Ouaga. Les hommes et les femmes doivent faire l’effort de comprendre ainsi la pyramide sanitaire du Burkina pour éviter de causer trop d’affluence inutile dans les CHU de Bobo et Ouaga. Les responsables des services de santé devraient aussi assurer la maintenance régulière de leurs groupes électrogènes dans les CMA pour sécuriser les interventions chirurgicales en cas de coupure d’électricité. Pour ce faire, il conviendrait que des mesures de souplesse et de célérité soient accordées aux services de santé pour les dépenses d’entretien et de fonctionnement des équipements médicaux. Ce sont là de vrais problèmes à résoudre pour un meilleur fonctionnement de nos services de santé. Il ne s’agit pas d’occulter ces problèmes objectifs pour viser des règlements de comptes entre personnes car, il faut éviter de causer des encombrements inutiles des hôpitaux qui ont des capacités limitées de place. Les autorités sont bien au courant de ces réalités et la solution réside à la mise à disposition des moyens financiers et matériels nécessaires aux hôpitaux. De même, les problèmes de reins sont devenus une affaire de santé publique qui mérite beaucoup de moyens. La direction générale du CHU Yalgado a fourni de gros efforts pour faire passer le nombre de générateurs pour la dialyse de la dizaine à la vingtaine courant 2013/2014.Compte tenu du cout élevé d’un générateur et ses accessoires qui avoisine la vingtaine de millions de FCFA, l’appui de bonnes volontés au CHU Yalgado qui est le seul centre d’hémodialyse pour le traitement des maladies rénales au Burkina sera très utile. C’est ainsi qu’il convient de saluer le don de générateurs par la LONAB à Yalgado. C’est le lieu également de féliciter et encourager les généreux donateurs du CHU Yalgado qui sont entre autres Abdoul Service, le Port Autonome de Cotonou, dont les appuis contribuent à renforcer les conditions de soins aux malades. Merci au récent donateur Sahel industries pour les eaux minérales et les poubelles pour l’hôpital Yalgado. Et les récents équipements de dialyse offerts par Orange sont d’un grand intérêt dans la prise en charge des maladies de reins.

  • Le 14 juin 2017 à 09:10, par Bonne chance En réponse à : Résilience de l’hôpital Yalgado face aux catastrophes : Le diagnostic d’Atina YARGA

    Toutes nos félicitations à l’impétrant qui est l’un des meilleurs étudiants de sa promotion. Bonne chance pour la suite de ta carrière.

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