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Vallée du Sourou : L’urgence d’une reforestation

Publié le mercredi 22 juillet 2009 à 01h43min

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Du 13 au 15 juillet 2009, les membres du groupe de plaidoyer sur la déforestation sur la vallée du Sourou ont effectué une mission exploratoire dans la zone. La visite a permis au groupe de plaidoyer de constater la situation réelle qui prévaut sur le site aménagé de la vallée du Sourou.

La situation à la vallée du Sourou présente des motifs sérieux d’inquiétudes. Les conditions de vie y deviennent de plus en plus difficiles. On se demande comment sera encore la situation dans l’avenir si rien n’est fait. C’est du reste, le constat fait par le groupe de plaidoyer sur la déforestation à la vallée du Sourou. Constitué il y a à peine un mois, le groupe de plaidoyer a effectué du 13 au 15 juillet 2009, une mission exploratoire dans la zone. L’objectif est de permettre aux membres du groupe de se construire un argumentaire à partir des constats de la situation réelle qui prévaut sur le site de la vallée du Sourou.

Le groupe s’est donc rendu compte, à l’issue des observations et des échanges avec divers acteurs, que la situation est préoccupante. En effet, que ce soit du côté des autorités administratives que de celui des populations locales, tout le monde est unanime qu’il faut agir pour corriger les lacunes et éviter le pire.
Végétation quasiment inexistante, faune et flore sérieusement menacées, conflit animaux/populations, rendements agricoles s’amenuisant au fil du temps, etc. La liste des désolations est longue.

La rencontre avec les populations locales dans le village de Gouran, le 15 juillet 2009, a été une occasion de témoignages patents. "Nous assistons tristement aux effets néfastes dus aux multiples changements de notre environnement. Nous nous interrogeons sur l’avenir de nos enfants et de nos petits enfant", a laissé entendre un septuagénaire sur un ton de désolation. Le vieillard a expliqué les changements par la disparition de certaines espèces animales ou végétales. Les propos du vieux sont soutenus par un pêcheur : "Avant, il suffisait de parcourir une petite distance et on a une quantité de poissons suffisante. Aujourd’hui l’on peut faire toute une journée sans avoir la moitié", a-t-il souligné avant d’ajouter que certaines espèces de poissons ont même disparu. Les pêcheurs ont également dénoncé les nouvelles méthodes de pêche qui ont des conséquences sur l’activité. Il s’agit par exemple, de l’usage des filets hors norme. De même que les pêcheurs, les chasseurs aussi se plaignent. "Les gibiers ont disparu. Ils ont fui parce que la forêt qui constituait leur abri n’existe plus. Ils sont allés ailleurs certainement", s’est exprimé le président des chasseurs de la zone. Pour lui, leur activité risque de disparaître si rien n’est fait.

A Gouran, les paysans de la vallée du Sourou ont évoqué leur situation qui n’est plus des plus reluisantes. "Nous n’avons plus les rendements que nous avions il y a quelques années. Pourtant nous déployons davantage d’énergie par rapport aux années antérieures", a déploré Jean Dramane Drabo, président d’une coopérative agricole. Pour ce producteur, la souffrance des populations est due à l’insuffisance de bonnes terres. Toute chose qui oblige les paysans à utiliser massivement de l’engrais. Les femmes ne sont pas en marge des souffrances. Présentes à la rencontre de Gouran, les ménagères, les dolotières, les transformatrices et vendeuses de poissons, etc., ont évoqué leurs préoccupations.

Il faut reboiser

C’est ainsi qu’une transformatrice et vendeuse de poissons a touché du doigt le manque de bois de chauffe. Sa préoccupation est partagée par une ménagère et une dolotière. "Pour avoir de bois pour nos travaux, il faut se déplacer très loin, avec la probabilité de se faire chasser ou de se faire agresser...", a affirmé avec amertume, une dame.
Tout au long des échanges, il ressort que la végétation, du moins, l’environnement à la vallée du Sourou a subi une agression sévère, suite à l’aménagement de la zone. Cet aménagement, nous l’avons constaté, n’a épargné aucun arbre. "L’aménagement a tout rasé", n’a cessé de répéter une responsable du ministère de l’Environnement et du Cadre de vie. Du coup l’absence de la flore pose problème. Outre les préjudices cités plus haut, il y a les conflits entre certains animaux et les humains. En effet, les agressions des populations par des mammifères comme les hippopotames sont récurrentes.

La dernière en date remonte à janvier 2009, où deux personnes ont été mortellement agressées par l’un de ces gros mammifères amphibies. En plus, n’ayant pas d’herbes à brouter (les hippopotames sont des herbivores), ces animaux s’en prennent aux cultures. Ce qui n’est pas sans désagrément pour les producteurs. Face à une telle catastrophe, que faire ? Avons-nous demandé aux populations locales et aux autorités. Pour leur part, les populations proposent, entre autres, le reboisement dans la zone. Elles disent être disponibles à planter des arbres à condition d’avoir un appui des autorités et des Organisations non gouvernementales (ONG). Le président du groupement des producteurs du village de Gouran Guiri Layonnon est catégorique : "Nous allons sensibiliser ceux que nous trouverons en train de détruire les quelques arbres qui restent. Mieux, nous nous adonnerons à la plantation d’arbres si nous sommes soutenus", a-t-il déclaré.

Quant aux autorités locales, elles sont conscientes de la situation. Le 14 juillet 2009, le groupe de plaidoyer les a rencontrés dans les locaux de l’Autorité de mise en valeur de la vallée du Sourou (AMVS), sise à Niassan. A cette réunion, étaient présents ou représentés les maires, les préfets, l’AMVS, des cadres des ministères en charge de l’Environnement et de l’Agriculture, etc.
Pour tous ces invités, l’aménagement de la Vallée du Sourou a connu des failles qu’il faut corriger. Pour ce faire, le reboisement demeure l’une des corrections qu’on peut y apporter. Le reboisement pourrait consister à planter des arbres au bord des champs.

Selon le Directeur des affaires administratives et financières (DAAF) de l’AMVS, Issaka Zampaligré/représentant le directeur général, le volet environnement n’est pas occulté par l’autorité. "Dans un premier temps, nous avons pris en compte les volets hydraulique et agricole qui étaient vraiment des besoins pressants sans toutefois oublier l’environnement", a-t-il soutenu. Pour étayer ses propos, le DAAF cite la sensibilisation des producteurs entamée depuis un certain temps.
Lors de la rencontre avec les autorités à Niassan, le directeur exécutif de Naturama, Idrissa Zèba, a évoqué certaines actions menées par l’ONG dans la localité depuis une dizaine d’années.

Il s’agit d’actions de reboisement, de dénombrement et de recensement d’espèces d’oiseaux, d’activités rémunératrices de revenus au profit des femmes, etc. Pour M. Zèba, la protection de l’environnement est un aspect important pour Naturama. En rappel, l’idée d’un groupe de plaidoyer sur la déforestation à la vallée du Sourou est une initiative de l’ONG les Amis de la nature, Naturama. Le groupe de plaidoyer est constitué d’une vingtaine de personnes. Les membres sont issus de la société civile, de la presse, du ministère de l’Environnement et du Cadre de vie, du ministère de l’Agriculture, des instances de Naturama, d’organisations relais de Naturama à la vallée du Sourou et des personnes ressources. Lmission exploratoire permet donc au groupe d’avoir des arguments pour le plaidoyer, à même de convaincre les décideurs.

Alban KINI (alban_kini@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 22 juillet 2009 à 12:26 En réponse à : Vallée du Sourou : L’urgence d’une reforestation

    Lorsque le DAF de l’AMVS affirme que l’environnement n’est pas laissé en reste, je suis désolé de lui répondre qu’il ne dit pas la vérité ou qu’il parle de ce qu’il ne sait pas. A la création de l’AMVS (1985-86), un Comité Technique Interminitériel de Gestion (CTIG) avait été créé pour aider à gérer durablement les investissements prévus. C’est ce CTIG, dont nous étions membre au titre du Ministère de l’Environnement, qui a exigé la prise en compte des aspects environnementaux dès la conception des projets d’aménagements : valorisation du bois de défiche, sauvegarde d’îlots boisés, plantation de brise-vents dans les plaines irriguées, délimitation et mise en défens d’une zone tampon pour réduire l’érosion et l’envasement du lac et servir de pâturage à la faune amphibie, maintien d’un débit "sanitaire" en aval, suivi de la qualité de l’eau, de la flore et de la faune aquatique dans le lac et en aval du barrage, etc. Il fallait voir le tollé que les propositions de l’environnementaliste ont soulevé de la part de certains agronomes pour lesquels planter des brise-vents (et de façon générale épargner des arbres) dans un périmètre irrigué était "agronomiquement" irrecevable ! Le premier et finalement le seul résultat que nous avons pu arracher a été la plantation de brise-vents dans le permier périmètre pilote de 50 ha à Débé, financé par l’Union Européenne. Depuis lors, les changements intervenus à la tête de l’AMVS ont permis de renforcer la vision "anti-arbres" (et finalement "anti-environnement") dans tous les projets d’aménagement qui ont suivi.L’argument premier avancé est que cela accroît les coûts d’aménagement ou encore, pour ces agronomes puritains formés à l’école traditionnelle, que cela attire les oiseaux granivores. Aujourd’hui plus de 3.800 ha sont désepérément nus, soumis au vent et à une évaporation incroyable en saison sèche, avec les oiseaux granivores en plus ! Pendant la saison sèche, les berges en décrue du Lac de barrage sont aujourd’hui permanemment occupées par le bétail la journée, tandis que la nuit, ce sont les pêcheurs qui sont dans l’eau. Les hippos privés de pâturage et de quiétude n’ont tout simplement plus d’espace vital ; ils ne peuvent donc que s’attaquer à ces pêcheurs de nuit lorsque, affamés, on les empêche en plus de "dormir". La responsabilité de l’AMVS dans cette situation est donc totale puisque c’est elle qui détermine en dernier ressort les choix techniques d’aménagement. Je ne connais aucun bailleur de fonds qui refuse des choix techniques écologiquement plus durables au motif qu’ils côutent plus chers : ce sont nos experts nationaux, sensés éclairer les décisions des politiques, qui assument donc les choix d’amenagement faits jusqu’ici dans la vallée du Sourou.
    Ce débat vient donc à point nommé, au moment où d’autres grands aménagements sont prévus (plus de 2000 ha à Di par le MCA et au moins la moitié de cette superficie à Dangoumana par la BID et autant par la Banque Mondiale à travers le PAFASB). Selon les informations dont nous disposons, le MCA a décidé pour sa part d’assumer pleinement la prise en charge de ces impacts environnementaux par des mesures de compensation ou d’atténuation appropriées. En sera-til de même pour les autres aménagements ? C’est la responsabilité de l’AMVS qui est engagée.

    F. G. HIEN
    Ecologue
    06, BP 9248, Ouagadougou 06
    Tel 70208206

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