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Séraphine Ouédraogo, maire de Boulmiougou : "Je n’ai jamais empoisonné Johanny Ouédraogo"

Publié le lundi 12 juin 2006 à 08h19min

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Séraphine ouédraogo, maire de Boulmiougou

Nombreux sont ceux qui ne s’attendaient pas à ce qu’elle rebelote, tellement les contestations étaient nombreuses dans l’arrondissement de Boulmiougou. Mauvaise gestion des lotissements, empoisonnement présumé de son challenger, marches et meetings de protestations... Mais Séraphine Ouédraogo a été réélue. Comment se sent-elle après être sortie du creux de la vague ?

Dans cette interview, l’ancien-nouveau maire passe au crible les problèmes liés à l’attribution des parcelles et accuse ses détracteurs d’avoir fomenté un coup contre elle. « On se connaît sur le terrain ; on sait qui fait quoi et qui pousse qui à faire quoi », affirme-t-elle, ragaillardie. A ceux qui l’accusent d’avoir tenté d’éliminer son concurrent, Johanny Ouédraogo, elle répond, catégorique : « Je ne l’ai pas empoisonné. Je ne peux pas tuer une mouche, à plus forte raison une personne ».

« Le Pays » : On dit de vous que vous êtes l’un des maires les plus contestés de la commune de Ouagadougou. Ne vous sentez-vous pas gênée d’être réélue ?

Séraphine Ouédraogo : Absolument pas. Ma réélection est la preuve que je ne suis pas contestée. Les populations sont allées aux urnes, elles ont choisi librement leurs représentants, sans contrainte aucune. C’est au contraire une fierté pour moi d’avoir eu leur confiance.

Il y a tout de même de graves problèmes dans les opérations de lotissement...

Il y a des problèmes et il y aura toujours des problèmes dans l’attribution des parcelles. La gestion de la terre est très délicate. Cependant, nous devons œuvrer à minimiser les problèmes. Les difficultés se situent à deux niveaux : certains n’ont pas encore eu leurs parcelles. Nous ferons en sorte qu’ils soient satisfaits. Il y a ensuite ceux qui en ont eu mais qui estiment qu’ils ont été lésés. A ce sujet, nous nous sommes rendus sur le terrain pour voir si leurs plaintes étaient fondées. Mais ce n’est pas le cas. Certains résidents écrivent dans les journaux, parlent à la radio, mais ce qu’ils disent est en déphasage avec la réalité.

Les contestations ont pourtant souvent dégénéré en violence. A quoi cela est-t-il dû ?

Le problème, c’est que nous avons fait beaucoup de lotissements en même temps. Le suivi de ces opérations est donc difficile. Nous formons certes une équipe, mais certains à qui nous avons fait confiance nous ont trahis. Tous les problèmes tournent autour de cela. Mais n’exagérons pas ; certains font trop de bruit pour rien. Ils se plaignent alors que la réalité est tout autre.

On vous accuse d’avoir empoisonné un membre de votre parti avant votre élection. Qu’en est-il ?

J’ai été très désagréablement surprise d’apprendre la nouvelle. Ce jour-là, nous sommes allés prendre un pot ensemble. Ce n’est que le lendemain, vers 11 h 30 mn, que j’ai été informée par une tierce personne qu’il semblerait que j’ai empoisonné Johanny Ouédraogo. Nous ne sommes pas à notre première sortie. Nous le faisons régulièrement en groupe pour échanger sur certaines questions. Moi, Séraphine Ouédraogo, je ne peux pas tuer une mouche, à plus forte raison une personne. Ceux qui me connaissent savent que je ne peux pas faire cela.

A ceux qui estiment que je voulais le faire pour conserver mon fauteuil de maire, je leur ai toujours répondu qu’au fronton de la mairie, ce n’est pas écrit Séraphine Ouédraogo. J’ai remplacé quelqu’un, et je suis tenue un jour de partir. Certains ont estimé qu’il était mon challenger et que j’ai voulu l’éliminer. C’est archifaux. Lui-même peut témoigner. Il sait que je ne suis pas ce genre de personnes et je ne le serai jamais. Ma foi religieuse ne me l’autorise pas.

Il y a pourtant une forte rumeur selon laquelle le jeu politique était tellement corsé que vous avez voulu, coûte que coûte, l’éliminer pour demeurer à votre poste...

Quand dame rumeur vous devance, c’est très difficile de réparer le préjudice. C’est comme de l’eau qu’on verse sur le sol ; elle est difficile à ramasser. Je tiens à rassurer les gens que Séraphine Ouédraogo reste Séraphine Ouédraogo. Je n’ai jamais empoisonné, ni tenté d’empoisonner quelqu’un, directement ou indirectement.

Quelles sont vos priorités pour ce nouveau mandat ?

Le mandat 2006-2011 sera axé sur deux points majeurs : l’essor de l’arrondissement et l’épanouissement des résidents. Dans un premier temps, nous allons œuvrer à consolider nos acquis. Certaines infrastructures nécessitent d’être réhabilitées et rénovées afin qu’elles soient plus fonctionnelles. Nous allons ensuite poursuivre les opérations d’attributions de parcelles dans les zones nouvellement loties. Nous allons viabiliser aussi ces zones.

Au cours du mandat écoulé, nous n’avons pas pu le faire parce que tout le monde n’avait pas eu sa parcelle. Cette fois, nous allons créer des routes après avoir terminé l’attribution des parcelles. Nous allons aussi œuvrer pour qu’il y ait de nouvelles infrastructures sociosanitaires, éducatives et sportives sur les réserves administratives. Ces réserves n’existaient pas encore parce que l’attribution des parcelles n’était pas terminée.

Nous allons également mettre l’accent sur les infrastructures en matière de voirie et d’assainissement. A ce sujet, nous avons déjà eu l’appui de l’Agence française de développement (AFD). Pour relever ces défis, nous privilégierons l’approche participative. Les populations seront donc impliquées dans la prise de décision.

Nous allons également miser sur l’information et la communication. Cela nous a manqué au cours du mandat écoulé. Si bien que nous faisons beaucoup de choses intéressantes mais l’opinion publique l’ignore. On a l’impression qu’à Boulmiougou, la mairie ne travaille que sur les lotissements.

Nous avons déjà identifié les préoccupations des femmes et défini des actions à mener pour les satisfaire. Tout cela est contenu dans un document intitulé « Plan d’actions pour le renforcement de la participation des femmes au processus de développement de l’arrondissement/2001-2006 ». Nous allons réactualiser ce document et le mettre en œuvre.

La jeunesse sera aussi l’une de nos priorités. Nous allons l’impliquer davantage dans nos activités.

En faisant une rétrospective du mandat 2001-2006, que regrettez-vous ?

J’ai très sincèrement regretté le fait que des gens aient intenté un « coup d’Etat », de façon gratuite contre moi, alors que j’étais allée me soigner à l’extérieur du pays. Ils ont raconté partout que l’attribution des parcelles était mal faite et qu’il fallait par conséquent me remplacer. Mais qui est responsable de la mauvaise gestion des lotissements ? Est-ce le maire Séraphine Ouédraogo seul ? Non. C’est l’ensemble du conseil municipal. Qui a été traîné à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) ?

Ce sont les mêmes qui crient sur tous les toits qu’ils ont été lésés alors qu’ils sont eux-mêmes responsables de leur situation. C’est dommage. Si on veut me destituer parce qu’on me reproche quelque chose de grave, je suis d’accord. Mais vouloir le faire parce que Séraphine Ouédraogo ne laisse pas les gens guidés par des intérêts personnels faire ce qu’ils veulent, relève de la mauvaise foi. Nous allons davantage œuvrer pour plus de transparence dans l’attribution des parcelles.

Il y a aussi ceux qui écrivent dans les journaux, organisent des marches pour insulter. Ce sont les mêmes personnes qui font du bruit à Boulmiougou. C’est une dizaine de personnes avec quelques têtes pensantes derrière. Ils allument chaque fois le feu et s’éclipsent.

S’ils protestent de façon continue, c’est parce qu’il y a éventuellement des problèmes cruciaux à résoudre...On se connaît sur le terrain. On sait qui fait quoi, qui pousse qui à faire quoi.

Vous voulez dire que tout cela est intentionnellement fait pour vous nuire ?

Absolument. Je sais qu’il y a des problèmes effectifs. Mais comment comprendre que des gens qui ne logent même pas à Boulmiougou, qui sont hors des zones de lotissement et de l’arrondissement, organisent des marches concernant les zones nouvellement loties ?

Ils sont nombreux ceux qui ont payé mais qui n’ont pas encore leurs parcelles. Quelle garantie leur donnez-vous ?

Si vous allez sur le terrain, vous verrez qu’il y a 8 000 parcelles complémentaires dans l’objectif de les satisfaire. Mais les gens sont pressés. Ce n’est pas de notre faute si la bande verte a été rétablie. Je ne sais pas où se trouvent les limites de cette bande. Cela a été décidé par les techniciens qui ont en charge cette question. Nous avons ainsi perdu environ 6 000 parcelles. Il y a également AZIMO qui a avalé une partie de nos parcelles. Il y a donc un manque à gagner. Est-ce de ma faute ? La situation est en train de se normaliser. D’ici un an, personne ne parlera d’affaire de parcelles à Boulmiougou.

Promis ?

C’est promis ! D’ici fin 2006-mi 2007, les opérations de lotissements seront terminées. Nous allons nous occuper d’autres choses.

Comment aimeriez-vous voir votre arrondissement au terme de votre mandat, en 2011 ?

Je souhaite que tous ceux qui ont payé, notamment les résidents de l’arrondissement, aient un logement et un minimum de cadre agréable de vie. Je souhaite aussi que les routes soient bitumées. Et puis, il y a la route nationale 1, devenue l’avenue Boulmiougou, qui est très étroite. Nous allons la revoir pour qu’elle soit plus praticable. . Nous espérons traduire ce rêve en réalité d’ici la fin de notre mandat.

Propos recueillis par Hervé D’AFRICK

Le Pays

P.-S.

Lire aussi :
Municipales 2006

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