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Gaoua : Le chef de canton en colère

Publié le mardi 30 août 2005 à 07h33min

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Le chef de canton de Gaoua, Adama Oussé Yari, est mécontent du comportement de certains "trouble-fêtes trop zélés". Ces derniers s’immiscent, dit-il dans les fonctions régulières qui lui sont dévolues. Pour éviter que les dérapages ne s’accentuent, il a décidé d’adresser cette lettre ouverte au gouverneur de la Région du Sud-Ouest.

Il me revient que des individus se disant appartenir à un conseil des sages ont lancé des invitations aux chefs de terre de la commune de Gaoua et des villages régis par la préfecture. A moins que l’autorité préfectorale ait donné un avis favorable, j’invite les auteurs, en ma qualité de chef de canton, à annuler sans condition leur démarche consistant à n’en point douter, à de l’immixtion et de l’empiétement dans les fonctions régulières dévolues au chef de canton chef coutumier que je représente légitimement et loyalement.

A ma connaissance, il n’existe pas de façon officielle une direction des coutumes au Burkina Faso a fortiori à Gaoua.
La convention des chefs coutumiers et traditionnels du Burkina Faso à laquelle j’ai adhéré, ignore cette dénomination anti-statutaire et illégale.
Au-delà, le conseil des sages derrière lequel les pêcheurs en eau trouble se replient pour entreprendre leur travail de sape, ne sont pas habilités à convoquer les structures spécifiques que sont les prêtres de la terre du Coutumat en dehors du siège de la chefferie du canton sans avoir préalablement recueilli l’avis de celui qui en est investi légitimement.

Si les trouble-fêtes trop zélés ne le savent pas, qu’ils soient informés que de par leur acte, ils commettent une infraction pénale pour usurpation et empiétement dans les fonctions des coutumiers ne relevant pas de leur compétence.

Est-il besoin de rappeler que la coutume fait partie, avec la doctrine, la pratique extrajudiciaire, les sciences auxiliaires du droit, des sources non formelles dites sources réelles du droit civil ?
Voltaire disait dans une de ses boutades : "lorsqu’on voyage à cheval, on change plus souvent de coutumes que de cheval". C’est pour cela qu’il ne convient pas de concocter une direction qui régirait les coutumes qui ne se ressemblent pas. Aussi, je dis que la procédure relève plutôt d’une utopie.

Par ailleurs, l’un des critères d’un conseil est d’avoir de l’admonition. Il en va de même pour son sage qui devrait être circonspect, raisonnable, sensé, sérieux au moins.

L’un et l’autre des critères énoncés se superposent parfaitement parce qu’ayant la même valeur morale : la réflexion mûrie. C’est pourquoi un fou ne peut être ni conseiller ni sage.

La velléité du soi-disant conseil des sages n’est pas une surprise. Ce conseil qui entretient une politique basée sur l’ethnicisme est en train de faire ses preuves par une prise de position visant à défier l’unité, l’union séculaire des populations qui ont une histoire ; et comme une autorité ne doit pas assister béatement au déchirement des populations qui se proclame à cause d’un comportement de quelque autorité irresponsable, il y a lieu de se lever et de dire quelque chose pour apaiser et dissiper l’imbroglio confectionné pour servir une cause.
Veuillez agréer, Monsieur le gouverneur, l’expression de mes sentiments profondément respectueux et dévoués.

Yari Oussé Adama

Chef de canton de Gaoua, chef coutumier et traditionnel

Commandeur de l’ordre du mérite

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 1er septembre 2005 à 11:12, par Bagalé En réponse à : > Gaoua : Le chef de canton en colère

    Mr Yari Oussé,
    J’ai hesité à vous repondre. Mais compte tenu de l’amalgame que vous faites entre le droit civil et la coutume, je me dois de vous dire que nos traditions ne reconnaissent pas de chef de canton. Je suis bobo et comme tel je sais que les lobis constituent une société acéphale. Tous les chefs de cantons et tous ceux qui s’en prévalent n’ont été que de piètres colabos du colons. Et c’est ça le problème, après avoir fait subir brimades et humiliations à leurs supposés sujets leurs descendants devraient avoir la descence sinon l’humilité de ne pas chercher à perpétuer un système avilissant.
    Savez-vous pourquoi la chefférie ne pourra jamais mobiliser à l’Ouest ou au Sud-ouest les populations pour le développement ? C’est justement à cause des soit-disants chefs de cantons. Natif de Koumi par exemple, je souffre des prétentions du chef de canton de Dioulassoba de se présenter comme représentant des Bobos. Chaque village bobo a son chef et des liens séculaires de respects mutuels existent entre celui du village de Sya et celui de mon village Koumi. Il n’a jamais été question de chefferie centralisée comme chez les mossés. Au moment où les honnêtes citoyens se battent pour construire la Nation burkinabè, toutes ces gesticulations visant à perpétuer une ère retrograde doivent être combattues. Pour que chacun puise toute l’énergie nécessaire de son patrimoine, renforçons nos vraies structures traditionnelles et coutumières. Comment voulez-vous que quelqu’un qui ignore tout de l’initiation au Dô chez les Bobos ou du Djôrô chez les lobis puissent prétendre être leur Chef !!!

  • Le 3 juillet 2010 à 22:52 En réponse à : Gaoua : Le chef de canton en colère

    BIEN MERCI pour ta contribution combien importante et si pertinente que je ne vais rien y ajouter. Le chef de canton n’a pas droit de cite dans nos sociétés dites acephales. Le chef de canton a été une creation de toute piece du colon afin de disposer d’un relais (vous parlez de collabo) parce que le chef de terre ou de village n’avait pas le pouvoir centralisé (comme chez les mossis par exemple) dont eux ils voudraient le doter pour exploiter les populations. Dans certains cas le chef de terre et le chef de canton seront la meme personne (collaboration soit par choix soit par ruse) sinon la generalité c’est la separation (un chef de terre qui est chef traditionnel reconnu par les populations et un chef de canton, choisi par le colon et parfois non reconnu tout simplement par les populationns et qui n’a qu’un role administratif). Les chefs de terre ont souvent refusé ouvertement de collaborer. Sans savoir de quoi il est question dans le fonds j’adhere a votre analyse et cela fait plaisir de voir que c’est quelq’un d’autre qui vienne nous remettre les choses dans leur bon droit. Au moins cela veut dire que toutes les sociétés n’ont pas ooublié leur culture ete traditions. Bien MERCI

    SOME

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