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<I>Une lettre pour Laye</I> : Premier avertissement au gouvernement

Publié le vendredi 10 juin 2005 à 08h15min

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Cher Wambi,

Alors que dans les alentours de Dori et de Gorom-Gorom dans le Sahel burkinabè la saison agricole s’est déjà installée et les pluies sont quasi quotidiennes, chez nous dans les régions du Plateau central et du Centre, et même dans celle des Hauts-Bassins, le ciel se fait de plus en plus avare.

D’ailleurs je ne t’apprends rien puisqu’à ce qu’on dit, à Laye, vos champs sont désespérement nus. Après le démarrage timide des activités du Programme saaga, il ne nous reste plus qu’à implorer bon Dieu et les ancêtres de nous sortir de l’impasse.

Mais y a-t-il encore aujourd’hui au village des sages capables d’accomplir les rites censés favoriser une bonne pluie ? Je me souviens que jadis à Laye, quand les pluies se faisaient rares, les anciens sortaient le "tiibo" pour les provoquer.

Qu’en est-il de nos jours ? Chez les Bobo, qui malheureusement traversent la même passe que les Mossis, le procédé est tout autre. En effet, selon mon ami Doti Bruno Sanou, historien et coordonnateur du Centre africain de recherche pour une pratique culturelle du développement (CAD), dont j’ai pu lire les explications dans L’Observateur Paalga n°6409 du jeudi 09 juin 2005, "à Sagassiamasso, lorsqu’il ne pleuvait pas, une famille était chargée d’aller chercher une sorte de plante qu’on malaxait pour attirer la pluie. Là-bas, l’autre façon de faire tomber la pluie consistait aussi à mettre le feu sous la marmite, à la tourner ensuite pour faire monter la vapeur ; et au même moment, les nuages montaient pour provoquer la pluie".

Et de conclure, cher cousin, que ce sont là des pratiques en relation avec l’être supérieur. Aujourd’hui, a-t-il confessé, "nous n’avons plus cette capacité, en tant que citoyen du 21e siècle, d’entrer en rapport avec ces puissances supérieures".

Je me souviens aussi, cher cousin, que par le passé, en ces périodes critiques, les catholiques faisaient des rogations et les musulmans organisaient une lecture cyclique du Coran. Hélas, les temps ont changé et comme l’a dit quelqu’un, "plus personne n’est propre, au sens moral et spirituel du terme". Mais, cher cousin, ne perdons pas de vue les changements climatiques, qui conditionnent notre environnement.

C’est un problème planétaire, qui n’épargne donc aucun pays. Si les braves paysans sont préoccupés par l’absence de pluies, les élèves en fin de cycle dans les différents établissements du territoire national, eux, sont confrontés aux examens. C’est ainsi que depuis le 8 juin dernier, ceux du primaire sont allés à l’assaut des épreuves du Certificat d’études primaires (CEP) et du concours d’entrée en sixième, qui vont sanctionner la fin de l’année scolaire 2004-2005.
Chacun récoltera ce qu’il aura semé, et à l’année prochaine.


En attendant, cher cousin, il y a quelque dix jours, le grand chancelier des Ordres nationaux, le colonel Mamadou Djerma, remettait aux premiers responsables du ministère de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation (MEBA) des symboles de l’Etat destinés aux directeurs des écoles primaires du Burkina Faso, histoire de stimuler l’instruction civique dès le bas âge.

Si cette initiative est à saluer, il faut aussi déplorer le zèle et le marketing politique complice qui l’ont accompagnée. Qu’on distribue à nos établisements les couleurs nationales (drapeau) en quantité industrielle, les armoiries de l’Etat, des copies du ditanyè (l’hymne national), ou de la carte du Burkina, rien à y redire, cher cousin. Mais qu’on les inonde d’effigies du chef de l’Etat, cela ne répond à aucune logique et c’est mal venu. Car les symboles de l’Etat demeurent, mais le chef de l’Etat, qui ne saurait être confondu à un symbole, mais plutôt à une institution, peut changer du jour au lendemain.

Aujourd’hui, c’est le beau Blaise qui préside aux destinées de cette institution, demain ça peut être Hermann l’aristocrate, Me Sankara avec ses moustaches de chef mongole ou pourquoi pas Issa "la bagarre" ? Alors, M. le grand chancelier, en cette veille de campagne électorale, merci de nous épargner ce coup de pub pas du tout innocent.

Ce n’est pas Mathieu Rakiswiligri Ouédraogo, le premier des maîtres, qui nous en voudra pour ça. Pendant que nous y sommes, Blaise a-t-il été informé de ce coup de pouce inespéré ?


Le lundi 6 juin dernier, au cours d’une conférence de presse, Me Bénéwendé Stanislas Sankara, président de l’UNIR/MS et député, annonçait sa démission de l’Assemblée nationale. C’était vraiment un coup de tonnerre dans un ciel serein, ce d’autant plus que peu de personnes s’y attendait. Après donc trois années passées à l’hémicycle, Bénéwendé Sankara s’en va pour, dit-il, "se consacrer pleinement à la présidentielle 2005".

Maintenant qu’il a rendu le tablier de l’hémicycle, pourra-t-il, après trois ans de législature, être remplacé ? Et qui sera l’heureux élu ? Feuilletant le code électoral, j’ai lu que "...chaque liste électorale comprend un nombre de suppléants égal au nombre de sièges à pourvoir. En cas de vacance de siège à l’Assemblée, il est fait appel aux suppléants dans l’ordre de leur inscription sur la liste des suppléants. Des élections partielles peuvent être organisées en cas de besoin, sauf dans le dernier tiers de la législature".

Comme tu le constates, cher Wambi, 3/5 ans, ce n’est pas le dernier tiers de la législature, ce qui signifie que dans les prochains jours, la procédure sera engagée pour pourvoir au remplacement de Bénéwendé Stanislas Sankara. Qui pourrait être l’heureux élu ?

A ce qu’on dit, sauf erreur ou omission, il pourrait s’agir d’Alphonse Ouédraogo, cadre de banque de formation, ancien chef de l’agence BIB de Kaya, cadre dans l’ONG Entreprendre, et qui, maintenant, travaillerait à son propre compte.

Et si pour une raison ou pour une autre, Alphonse Ouédraogo est indisponible, le siège pourrait être occupé par Boureima Ouédraogo, tailleur à Gourcy.

C’est dire que le duo Tahéré Ouédraogo et Mandé Issouf du CDP, qui s’étripait à Gourcy, va désormais s’entendre pour s’occuper de ce nouveau venu qui pourrait être Boureima Ouédraogo. Si donc, bien des personnes ont été surprises d’apprendre cette démission, d’autres par contre disent que cela n’a vraiment rien de surprenant, ce d’autant plus que n’étant plus député, Bénéwendé Sankara va se réinscrire sur le tableau du barreau burkinabè.

Et c’est vraiment un secret de polichinelle que de dire que, siégeant à l’Assemblée nationale, Bénéwendé, qui est un avocat dont le cabinet marche, perdait au change. Et ce ne sont certainement pas les 190 mille et quelques francs d’indemnités journalières de session du Parlement panafricain (dont le siège est en Afrique du Sud) qui pourront le dissuader de rendre le tablier.


T’en souviens-tu, dans une de mes correspondances, je te parlais de ces sunnites des confins du Kénédougou qui s’obstinaient à refuser la vaccination de leurs enfants.

Hé bien, au dernier passage des agents vaccinateurs lors des Journées nationales de vaccination (JNV) 2005, le 18 mai dernier, ces sunnites de Dar Es Assane, village situé au nord du Kénédougou, non loin de la frontière malienne, ont fait encore parler d’eux.

Pour venir à bout de leur résistance et faire vacciner leurs rejetons, qu’ils avaient cachés sous les lits, dans les greniers et en brousse, le haut-commissaire du Kénédougou, Alassane Sinaré, a eu recours à la force. En effet, soutenus par le commissaire de police Mathias Nikièma et ses hommes, les agents vaccinateurs ont pu ainsi faire leur travail. En définitive, ce sont 110 bambins qui ont reçu leur dose, au grand dam des parents, pour qui, cela n’est que sacrilège.


"Monsieur Kilimité Théodore Hien, officier militaire, est nommé gouverneur de la région de l’Est". En même temps qu’il consacrait le retour de "Careca", qui n’est jamais en fait aussi proche de la gestion des affaires de l’Etat que quand il semble s’en être éloigné, le Conseil des ministres en sa séance du mercredi 8 juin 2005 annonçait l’éviction d’un autre soldat, le commandant Kam Victor Emmanuel. Comme pour respecter la donne ethno-régionaliste, c’est un de ses parents du Sud-Ouest qui l’a remplacé.

Mais qu’a bien pu faire le chef d’escadron Kam pour que le colonel Hien hérite de son gouvernorat ? Cher Wambi, la question mérite d’autant d’être posée que, comme tous les douze autres gouverneurs, il a été officiellement installé il y a à peine 6 mois de cela. Un semestre pour se faire éjecter, c’est, tu t’en doute, trop court, de sorte que tout le monde se perd en conjectures. Sauf, faute grave en effet, on se demande quel besoin avait le gouvernement de procéder à ce changement.

Cher cousin, moi aussi j’ai été intrigué par ce déboulonnage express et j’ai voulu en savoir plus. J’ai ainsi appris de sources proches du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD) qu’il est reproché au commandant déflaté sa gestion du gouvernorat et des difficultés relationnelles avec certains de ses proches collaborateurs, notamment des hauts-commisssaires.

"En réalité, ce sont des problèmes qui existent, à des degrés divers, dans d’autres gouvernorats, mais peut-être que chez lui c’était trop criard", m’a laissé entendre mon informateur. Par cette éviction rapide, les autorités auraient donc voulu donné un signal fort en direction des "treize souris" de nos régions (pour reprendre un titre de l’Observateur paalga lors de leur nomination) afin que celles qui sont tentées de ronger le peu qui existe y lise leur sort et s’assagisse. A bon grignoteur...


A présent, cher cousin, je t’invite à lire le carnet secret de Tipoko l’Intrigante.

- Le 9 juillet prochain, l’ambassadeur des USA au Burkina Faso, S.E. Anthony Holmes, fera ses adieux à notre pays. Après près de 3 ans de services au "Pays des hommes intègres", le diplomate américain s’en va pour... prendre la présidence du syndicat des ambassadeurs américains. En effet, il y a quelques semaines de cela, Anthony Holmes a été élu à ce poste par ses collègues ambassadeurs de toute l’Amérique. De retour donc à Washington, il ira de temps en temps défendre au Congrès les rares revendications de ses pairs, vu qu’aux USA, il n’y a quasiment pas de grève.

- Le Burkina Faso a été félicité par le département d’Etat américain pour son action en faveur de l’éradication du trafic des enfants. C’est Condoleezza Rice, en personne, qui l’a annoncé le 3 juin dernier dans le rapport sur le trafic des personnes 2005 (Trafficking in Persons Report (TIP). En plus du Burkina, l’Ouganda, le Mali et le Sénégal sont cités.

- Que se passe-t-il à l’Association des jeunes musiciens du Burkina (AJMB) ? Très dynamique, cette association présidée par le reggeaman Dick Marcus est dans la tourmente depuis quelques temps. Des artistes reprocheraient au président des malversations de l’ordre d’un million de FCFA et d’avoir renouvelé le bureau de l’association à vase clos avec « quelques amis ».

Les plaignants ont donc porté, à l’unanimité lors d’une assemblée générale, Jeanne Bicaba à la tête d’une nouvelle structure car, d’aucuns trouveraient le J de l’AJMB, qui veut dire jeunes, trop discriminatoire. Et cette structure, qui attend son récépissé, a pour intention de demander des comptes à Dick Marcus sur le million introuvable. Affaire donc à suivre.

- Nous sommes dans un monde où beaucoup de gens souvent arguent manquer de temps pour prier ou ne prient que quand ils sont face à un problème. Dieu est alors vu comme un pompier. Pour l’abbé Paul Oula Traoré, il faut apprendre aux enfants à prier, à aimer la prière. C’est pour cela qu’il vient de publier à leur intention un livret de prières, "Je m’émerveille avec Jésus". Ce "missel" de 36 prières pour enfants s’adapte à toutes les situations de la vie d’un enfant, à son vécu quotidien et à la situation du monde qui l’entoure : guerre, famine, entente dans la famille, voyages, jeux, échecs scolaires, joies, peines...

Cet ouvrage enseigne aussi aux enfants l’œcuménisme, le dialogue interreligieux, la tolérance religieuse, l’amitié entre chrétiens et musulmans. C’est ainsi qu’il y a une prière pour les musulmans en fête. L’œuvre est préfacée par l’archevêque de Bobo-Dioulasso, Mgr Anselme T. Sanon. "Je m’émerveille avec Jésus" se vend à 1 000 FCFA à la librairie Jeunesse d’Afrique, à la chapelle de la paroisse Jean XXIII à Ouagadougou, et dans les paroisses de l’archidiocèse de Bobo-Dioulasso. Un cadeau de fête que l’on peut offrir à nos enfants, neveux, petits cousins, filleuls, bref à tout enfant.

L’abbé Paul Oula Traoré est prêtre à la paroisse Saint-Vincent-de-Paul à Kolo (Bobo). Il a déjà publié en 2004 un premier livret de prières intitulé "Notre Père : prier avec les mots de Dieu, méditer avec les maux des hommes".

Tipoko l’Intrigante n’apprend rien d’elle-même, elle n’invente jamais rien. Tipoko l’Intrigante est un non-être. Elle n’est ni bonne en elle-même, ni mauvaise en elle-même. Elle fonctionne par intuition, car "l’intuition c’est la faculté qu’a une femme d’être sûre d’une chose sans en avoir la certitude..."

Ainsi va la vie.

Au revoir.

Ton cousin

Passek Taalé.

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 10 juin 2005 à 18:41 En réponse à : > <I>Une lettre pour Laye</I> : Premier avertissement au gouvernement

    Qu’il me soit permis de contester une partie de la lettre de Passek Taalé :
    "Qu’on distribue à nos établisements les couleurs nationales (drapeau) en quantité industrielle, les armoiries de l’Etat, des copies du ditanyè (l’hymne national), ou de la carte du Burkina, rien à y redire, cher cousin. Mais qu’on les inonde d’effigies du chef de l’Etat, cela ne répond à aucune logique et c’est mal venu. Car les symboles de l’Etat demeurent, mais le chef de l’Etat, qui ne saurait être confondu à un symbole, mais plutôt à une institution, peut changer du jour au lendemain."
    Je suis d’accord que cela est inopportun, en cette période préélectorale, de mener une telle opération. Et cela devient encore plus suspect venant de Mathieu qui s’est illustré à plusieurs occasions en faisant "la prodada" de son candidat non encore déclaré.
    Cependant, il est difficile de nier que le chef de l’Etat, qu’il soit blaise compaoré ou tout un autre, symbolise l’Etat. Et quand on demande au président de fournir une photo officielle, ce n’est pas pour faire sa promo. Partout dans le monde, le président a une photo officielle qui trône dans beaucoup d’endroits (bureaux de l’administration publique par exemple).
    Là où on pourrait vous donner raison aussi sur l’inopportunité de l’action en question, c’est que, sur l’actuelle photo officielle du PF, il ne porte pas les attibuts de son pouvoir. Ce qui fait qu’on pourrait dire qu’on a distribué des photos de blaise compaoré, et non celles du PF. En ce moment, le reproche doit être fait à la présidence du Faso pour avoir fourni une telle effigie, ou à la chancellerie pour avoir accepté une telle image comme photo officielle.

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