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Accès à l’eau potable : Pissila dans la psychose d’une pénurie

Publié le jeudi 4 mars 2010 à 01h53min

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L’eau potable reste toujours une denrée rare à Pissila, localité située dans la province du Sanmatenga, à 130 kilomètres au Nord-Est de Ouagadougou. Le système d’Adduction en eau potable simplifié (AEPS) installé en avril 2009 ne parvient pas à offrir l’or bleu à toute la population. Face aux réelles difficultés d’accès à l’eau potable, les autorités locales joignent leur voix à celle de leurs administrés pour crier au secours.

L’avènement du Système d’adduction en eau potable simplifié (AEPS) à Pissila n’a pas totalement étanché la soif des douze mille (12 000) habitants de cette commune rurale de la province du Sanmatenga.

Ce précieux outil qui a suiscité un soulagement à son installation s’accompagne aujourd’hui de crainte. « Nous souffrons énormément du manque d’eau ici. Actuellement, ça va, mais revenez dans un ou deux mois, vous serez édifiés. En ce moment, la difficulté d’avoir de l’eau potable s’accentue davantage », lance, toute désespérée, Mariam Soulba, une jeune fille résidente dans la zone Nord du village de Pissila.

Au milieu de ses camarades, elle fait le pied de grue à la borne-fontaine n°6 du village. Le risque de manquer de l’eau à ce point de ravitaillement pousse les habitants à se réveiller tôt. Zalissa Sawadogo, gérante de la fontaine n°9 au secteur n°1 de Pissila, confirme : « Mon travail démarre à 5 heures du matin. Souvent ce sont les femmes elles-mêmes qui viennent me réveiller. Elles préfèrent venir tôt puisqu’à une certaine heure, il n’y a plus d’eau dans les robinets et il faut attendre le lendemain matin ».

La disponibilité de l’eau potable constitue une préoccupation majeure aussi bien pour les populations d’eau que pour les autorités municipales. Le manque d’eau se matérialise par l’insuffisance et l’éloignement des sources d’approvisionnement. Les habitants de la localité ont souvent recours à l’eau de puits et des cours d’eau (barrage et marre) pour s’approvisionner. Toute la commune rurale de Pissila (de plus de 50 villages) ne dispose que de 260 ouvrages hydrauliques pour plus de cent mille (100 000) habitants. Une bonne partie de ces ouvrages est actuellement en panne.

Le maire, Emmanuel Nabasnogo Bamogo et son premier adjoint, Arouna Ouédraogo, avouent que l’approvisionnement en eau potable constitue l’un des problèmes majeurs auxquels est confronté leur conseil municipal. Selon le bourgmestre, des villages entiers ne bénéficient d’aucun forage à l’heure actuelle. Même s’il renchérit que les choses ont un peu évolué depuis l’installation du premier conseil municipal, en juin 2006.

« Lorsque nous arrivions à la tête de la commune, il y a environ quatre ans, il n’existait qu’une adduction en eau potable, appartenant au Programme de développement local du Sanmatenga (PDLS). Malheureusement, les forages de ce projet étaient non seulement insuffisants, mais souvent en panne », indique le maire. Emmanuel Bamogo ajoute que solliciter l’aide de partenaires pour remédier au problème était une exigence. Un appel au secours a été ainsi lancé.

La salutaire et insuffisante contribution des AEPS

Le secours face au manque d’eau est venu de l’Agence française de développement (AFD). Grâce à l’intervention du gouvernement, par le biais du ministère de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques (MAHRH), le soutien à l’accès au liquide précieux s’est concrétisé par la construction d’un château d’eau alimentant neuf (9) bornes-fontaines dans le village de Pissila.

Le système, appelé Adduction en eau potable simplifié (AEPS), fonctionne à l’aide d’un groupe électrogène. Ce groupe permet d’alimenter le château d’eau à partir d’un forage et desservir les neuf bornes- fontaines.

Pissila est l’une des premières localités du pays à en bénéficier depuis avril 2009. Cette commune a d’ailleurs servi de rampe de lancement , le 4 juin 2009, de quinze (15) AEPS dans trois régions : le Sahel, le Centre-Nord et l’Est, par le premier responsable du MAHRA, le ministre Laurent Sédogo. Bien que la construction de l’AEPS ait atténué le problème de l’eau, elle ne l’a pas définitivement résolu. Les neuf bornes-fontaines situées toutes au centre-ville parviennent difficilement à approvisionner conséquemment une population estimée à douze mille (12 000) âmes. L’offre demeure insignifiante, entraînant une dure corvée chaque matin.

« Le château d’eau ne peut fournir que 50 m3 d’eau par jour alors que la demande en eau potable de toute la ville s’élève à plus de 300 m3 par jour », souligne le maire.

La solution passe nécessairement par l’érection au moins d’un autre château, avec un débit plus fort que celui existant. En attendant ce salut, les femmes sont contraintes d’écourter leur sommeil. Souvent à quatre heures du matin, les femmes s’attroupent autour des bornes-fontaines, bien avant que les fontainières n’ouvrent les bornes- fontaines à l’heure officiellement indiquée de six(6) heures. Quant à l’heure de fermeture, elle est dépendante de la disponibilité de l’eau dans le château. Généralement, à partir de 9h 30 ou 10h, les robinets sont à sec et il faut attendre le lendemain matin.

L’AEPS de Pissila est gérée par le Projet production internationale (PPI) avec la participation de la mairie qui a contribué à recruter le personnel (essentiellement de femmes) pour la gestion locale des AEPS. On les appelle les « fontainières ». Le seul homme du lot, le gardien du groupe électrogène, perçoit mensuellement 15 000 F CFA tandis que les neuf (9) fontainières sont rémunérées en fonction de la quantité d’eau vendue. En effet, chacune reçoit le dixième de sa recette.

Un gâteau échappant à la mairie

La vente de l’eau est règlementée. La struture des prix est la suivante : un bidon de 20 litres à 15 F CFA, deux bidons de 20 litres valent 25 F CFA, le fût de 200 litres fait 110 F CFA. Le mètre cube (m3) d’eau coûte 500 F CFA dont 50 F CFA reviennent à la vendeuse. Parmi les vendeuses, une s’illustre par ses recettes : Zalissa Sawadogo. Elle encaisse souvent 7 500 à 10 000 F CFA par jour. Les autres « fontainières » ont des recettes journalières inférieures à 5 000 F CFA.

La société PPI étant basée à Ougadougou, a désigné une résidante, en la personne de madame Adissa Sawadogo, comme responsable de l’AEPS de Pissila. Elle a entre autres pour tâche, de collecter les recettes auprès des vendeuses, de veiller au bon fonctionnement du groupe électrogène. « Au début de la mise en service de l’AEPS, nous collections les recettes quotidiennement.

Quelques mois après, nous le faisions hebdomadairement. Maintenant, cette collecte se fait deux fois par mois, soit chaque deux semaines », a soutenu Adissa Sawadogo. Et d’ajouter que la somme totale réunie chaque quinze jours varie entre 200 000 et 350 000 F CFA. Elle précise que cette somme est reversée à la caisse populaire de la ville au compte de PPI, propriétaire de l’AEPS.

La mairie de Pissila ne perçoit rien de ces recettes. Une situation que le maire Bamogo déplore : « Nous voudrions qu’une partie de la somme perçue de la vente d’eau nous revienne. Ne serait-ce que 1% ». Et son premier adjoint, Arouna Ouedraogo, d’avancer : « Actuellement, nous n’avons rien des recettes, mais nous espérons qu’à l’ avenir, les choses vont changer dans le bon sens ». Tous deux estiment qu’actuellement, leur mairie est à une phase d’apprentissage et elle pourrait peut-être plus tard se charger de la responsabilité de gérer l’AEPS. Pourtant, du côté du Projet production international (PPI), l’on est formel.

« Tout se passe conformément au contrat signé avec la mairie. Dans ce contrat il n’est établi nulle part qu’un pourcentage devrait être reversé à la commune », martèle le directeur général de PPI, Cyrille Nyaméogo. Des usagers n’hésitent pas à critiquer le fonctionnement de l’AEPS. Ils regrettent surtout le fait que les robinets ne sont pas fonctionnels 24 heures sur 24. Ils demandent aux autorités municipales et à PPI de consentir des efforts afin de rendre l’eau disponible à tout moment.

L’agent de PPI responsable des AEPS de la région du Centre-Nord, Joséphine Souma Ninon reconnaît que seuls les systèmes de Pissila et de Korsimoro enregistrent des résultats positifs. « Les six autres sont nuls. Certaines mêmes n’arrivent pas à fournir 15 m3 d’eau par mois », regrette Mme Ninon. Les responsables de PPI expliquent le faible débit du forage AEPS de Pissila, par la situation géographique de la localité. Aussi, n’écartent-ils pas l’idée de construire d’autres forages ou château d’eau dans la commune.

Alban KINI (Alban_kini@yahoo.fr)


La commune rurale de Pissila en chiffres

La commune rurale de Pissila située à 130 km de Ouagadougou sur la route nationale n°3 (route Kaya-Dori), est la 2e plus vaste commune de la région du Centre-Nord, après celle de Kaya. Sa superficie est de 1678 km2, soit une densité de 60 habitants au km2 selon le recensement général de la population et de l’habitat (RGPH 2006)).

La commune compte 57 villages et 108 conseillers municipaux dont 28 femmes. La population totale est de 100 353 habitants dont 45 367 hommes et 54 986 femmes. La commune compte de 260 ouvrages hydrauliques (forages) dont 43 sont en panne, soit 347 habitants par forage.

A.K.

Source : Conseil municipal de Pissila

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 4 mars 2010 à 03:43 En réponse à : Accès à l’eau potable : Pissila dans la psychose d’une pénurie

    POUVEZ VOUS IMAGINER QU’EN 2010 UN PEUPLE À 130 KM D’UNE CAPITALE OU CIRCULE DES VOITURE DE PLUSIEURS MILLION MANQUE D’EAU POTABLE. c’est PATHÉTIQUE ET HONTEUX. QU’EN PENSE LES BURKINABÉ VIVANT À L’EXTÉRIEUR. ET SI SANKARA RESSUSCITAIT ?
    COURAGE À CEUX QUI DISENT QU’ON A ÉVOLUE, MOI J’AI HONTE ET UNE BOULE À L’ESTOMAC

    • Le 28 janvier 2011 à 18:35, par saw edmo En réponse à : Accès à l’eau potable : Pissila dans la psychose d’une pénurie

      la honte de constater la triste réalité de Pissila (mon pauvre village) est générale ! c’est l’extrême d’une misère à côté d’une bourgeoisie exubérante et insultante à une centaine de km. pour un village victime de son ignorance. qui donne ses voix lors des élections à ses boureaux, qui attise le feu qui le consumera petit à petit, qui aiguise enfin l’épée qui l’étranglera.
      il y’a donc d’homme avisé issu de ce harlem ? si ! mais le vampire a frappé à la porte de plusieurs. l’ élite sont touchée par le système.à qui la faute ? en tout cas pas à moi. on nous traite d’aigris, nous les étudiants, sans expérience. dans tous les cas c’est pas rare en Afrique. la Côte d’Ivoir, le Gabon, le Togo, le Senegal... la politique de la poche. chacun pense à lui même, c’est-à-dire au ventre de sa femme et de ses enfants.

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