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Décentralisation : Le nouvel hôpital de Tenko sort de terre

Publié le lundi 24 août 2009 à 00h06min

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Des camions, communément appelés 10 tonnes, qui sortent d’un grand chantier pour y revenir des heures plus tard, chargés de sable. Quand on est en partance pour Garango, à un kilomètre après le gouvernorat à droite, l’endroit s’étend à perte de vue et on pourrait bien se demander ce qu’on fait sur ce site grandiose. Eh bien, il s’y construit le futur centre hospitalier régional de Tenkodogo (CHR).

Jour et nuit, des ouvriers se relaient pour faire avancer les travaux en vue de respecter le délai d’exécution qui est de 20 mois (octobre 2010). L’entreprise chargée de mener à bien ce gigantesque projet n’est autre qu’Azimmo, bien connue dans le domaine de la construction au Burkina. Cet établissement sera bientôt le fleuron sanitaire de la province du Boulgou, surtout que l’actuel CHR est, de nos jours, dépassé avec un matériel vétuste.

Le centre hospitalier doit être, par excellence, un lieu qui répond aux attentes d’une population donnée. Mais au Burkina Faso, ce n’est pas toujours le cas, et on ressort généralement de tel ou tel autre établissement sanitaire insatisfait de sa prestation. A dire vrai, le problème se pose avec acuité, et les patients sont souvent obligés de faire avec. Bon an, mal an, le gouvernement s’efforce néanmoins, avec ses partenaires, de soulager un tant soit peu les populations en faisant construire des hôpitaux dignes de ce nom.

A Tenkodogo, dans la province du Boulgou, c’est ce qui est en train de se faire ; et, dans le courant de l’année 2010, c’est d’un centre hospitalier régional flambant neuf que la population bénéficiera. Mais pour le moment, elle ne sait pas à quoi ce centre de santé ressemblera. Toutefois, les Tenkodogolais et les habitants des villages environnants attendent impatiemment sa finition. Dans cette région à forte population, ce nouvel hôpital constituera, sans conteste, un vrai soulagement, surtout que l’actuel CHR, situé au centre-ville, passe déjà, aux yeux de certaines personnes, comme un établissement hospitalier dans lequel les conditions d’accueil et les soins laissent à désirer.

En effet, il y arrive qu’on vous fasse reprendre un examen de sang parce que les appareils, entre-temps, ne répondent plus ou qu’il y a eu une panne d’électricité. Le premier cas est le plus fréquent ; et si vous faites partie des malades hospitalisés, il faut beaucoup prier pour vous en sortir, puisque la morgue n’est pas loin. Ce CHR n’inspire donc plus confiance, mais on s’y rend quand même faute de choix.

Histoire d’un CHR

Comme d’autres centres du pays, celui de Tenkodogo a son histoire. Dans la « vieille cité », il était jadis un centre médical construit en 1959. Par la suite, il a été un service déconcentré jusqu’en 1979. De 1974 à 1975, le centre hospitalier régional de Tenkodogo était animé par l’ONG « Frères des hommes ». En 1980, il fut érigé en hôpital départemental relevant de la direction départementale de la santé publique du Centre-Est.

De 1978 à 1989, l’établissement a été soutenu par une ONG italienne dénommée Collège universitaire des aspirants médecins missionnaires (CUAMM). Depuis 1990, le kiti no AN VII-322/PF/SAN-AS du 18 mai 1990 a octroyé au CHR le statut d’établissement public à caractère administratif, doté d’une personnalité morale et d’une autonomie financière. En 2002, la loi no 035-2000 AN du 26 novembre crée la catégorie des établissements publics de santé. C’est après qu’un décret, le 191/PRS/PM/MFB du 29 avril 2004, portant statut général des établissements publics de santé, érigea les CHR et CHU en établissements publics de santé.

Ce centre hospitalier, qui a fait son petit bonhomme de chemin, a une capacité hospitalière de 190 lits, mais ne dispose actuellement que de 167 lits opérationnels. Dans la répartition des lits par service, la médecine en compte 51, la pédiatrie 33, la gynéco obstétrique 32, la chirurgie 30, les urgences médicales 14, la psychiatrie 5 et l’ophtalmologie 2. Il ressort des activités cliniques que, pour l’année 2008, le CHR a reçu 18 799 consultants. Mais ces deux dernières années, la consultation a connu une forte baisse ; et cela pourrait s’expliquer par la dynamisation du système de référence/ contre référence.

Cette dynamisation, selon le rapport d’activités 2008, est due aux différentes sensibilisations menées à tous les niveaux à l’endroit de la population sur le respect du circuit du malade dans l’offre de soins et aussi l’amélioration de la couverture sanitaire au premier échelon par le biais des CSPS (Centre de santé et de promotion sociale).

L’année écoulée, l’hôpital a comptabilisé 10 195 hospitalisés contre 9193 en 2007 soit une hausse de 10, 89%. Lors de cette même année, les 10195 patients ont totalisé 29 963 journées d’hospitalisation, ce qui donne une moyenne de quatre journées d’hospitalisation par patient, avec des extrêmes de deux jours à six jours. La chirurgie a enregistré un nombre plus élevé de séjour moyen. Ceci se justifierait par le fait que la prise en charge des pathologies chirurgicales nécessite beaucoup plus de temps. Le taux de mortalité (7, 83%) était élevé comparativement à celui de 2007 (6,52%). La mise en place récente des tableaux de bord des services permettra une surveillance rapprochée de cet indicateur.

Au regard de ce tableau de bord, on ne peut pas dire que tout est négatif, mais, comme indiqué plus haut, ce centre hospitalier régional n’est plus commode pour recevoir les malades, les examiner et les traiter convenablement. Quand on fait le tour des locaux, tout est devenu vétuste, même le matériel médico-technique.

38 ouvrages ont pris forme

Quittons un moment ce CHR aux murs décrépis, mais qui reste, tout de même utile, pour nous rendre à Katanga au secteur, 1 où on est en train de bâtir le nouvel hôpital dans le royaume de Zungran-Tenga. C’est sur un site de 16 hectares, et il sera entièrement clôturé. Le lancement des travaux a eu lieu le 2 mars 2009 et, depuis lors, Azimmo, l’entreprise adjudicataire, s’attelle à un long travail pour qu’il devienne une réalité.

Signalons au passage que c’est suite à un appel d’offres international lancé par l’Etat burkinabè, à travers le ministère de la Santé, et au cours duquel elle compétissait avec Sol Confort et Décor (SCD) et Desimone, une société italienne, qu’elle a décroché le marché. Le financement est assuré conjointement par l’Etat burkinabè (13,7%) et la Banque africaine de développement (86%.). Selon le directeur général des marchés extérieurs d’Azimmo, Mamoudou Traoré, le coût global de sa réalisation est estimé à 6 milliards et demi de FCFA (hors taxes, hors douane). C’est une forte équipe d’ouvriers, toutes qualifications confondues, qu’il a déployée à Tenkodogo.

A voir le matériel roulant (camions, pelles chargeuses, bétonnières à toupie d’une capacité de 5 m cubes béton et véhicules de liaison), on sent qu’Azimmo ne lésine pas sur les moyens pour qu’aboutisse le projet. En témoigne les tas de parpaings, de fers, de ciments, de graviers, de briques pleines, de planches, de poteaux d’échafaudage, etc. visibles sur le chantier. Bref, le décor habituel de ce genre de site.

Pour les fondations des différents bâtiments, nous a confié Traoré, « dès le début des travaux, l’entreprise a passé une commande de 500 tonnes de ciment au Togo ». Aujourd’hui, l’achat du ciment se fait à Ouaga, chez des fournisseurs qui leur livrent 80 à 120 tonnes par semaine.

En cette saison des pluies, l’entreprise aurait pu aller à Bagré pour se ravitailler en eau mais pour que les travaux avancent à un bon rythme, elle a préféré édifier sur place un forage d’une capacité de 9 mètres cubes/heure, avec une zone reboisée. Il est équipé d’une pompe électrique et d’un bassin d’une capacité de 100 mètres cubes pour un coût de 4 millions de FCFA. Azimmo, qui tient à faire honneur à ses engagements, a opté, comme d’habitude, pour la sous-traitance. Des lots ont été confiés à des tâcherons, mais sous le contrôle de l’entreprise. Huit d’entre eux sont de la région. C’est au total plus de 200 ouvriers qui y travaillent et la plupart résident à Katanga.

Le chef de ce vieux quartier (Katanga) s’est vu attribuer le bâtiment des consultations externes. Pour Mamoudou Traoré, cela a permis de créer des emplois dans la province ; et quand sa société est sur un chantier de construction, il en est toujours ainsi, assure-t-il. Et de préciser que l’outillage – les règles, les brouettes, les pelles, les pioches, les vibreurs – a été acheté par Azimmo elle-même pour permettre aux tâcherons de travailler sans problème. Au fur et à mesure qu’ils sont payés, on leur retient quelque chose et, à la fin du chantier, ce petit matériel leur reviendra. Apparemment, toutes les conditions sont réunies pour que l’entreprise mène ce chantier à terme. Il y a quelques jours, lorsque nous étions à Tenkodogo, 38 ouvrages avaient déjà pris forme. Parmi eux, l’administration, les urgences médicales, la pédiatrie, la banque de sang, le bloc opératoire, l’atelier de maintenance, l’hospitalisation-maternité, etc.

Selon l’ingénieur en génie civil de SATA Afrique, Afouda Boladji, Azimmo est à 12% de l’exécution total du projet. Venu spécialement du Bénin, il fait chaque jour le tour du chantier avec cinq autres techniciens supérieurs pour voir si les tâcherons exécutent correctement le travail qu’on leur a confié.

La plupart des bâtiments ont dépassé le cap du chaînage et tout coulage de béton exige leur présence. On s’assure de la bonne exécution du ferraillage puisqu’il ne doit pas coller au coffrage. A côté du chef de file de SATA-Afrique et de ses collaborateurs, le laboratoire national du bâtiment et des travaux publics (LNBTP) s’occupe du contrôle technique et teste, pendant des jours, la résistance de tel ou tel béton.

Les parpaings sont fabriqués en nombre réduit par sac, avec un certain dosage à ne pas dépasser. Entreposés sous un hangar bien couvert, vous pouvez passer deux jours sans finir de les compter. Pour montrer la résistance des briques qu’ils utilisent, le directeur général des marchés extérieurs d’Azimmo en a laissé tomber une devant nous, qui est restée intacte. Une façon, sans aucun doute, pour dire que, sur ce chantier, on applique rigoureusement le cahier des charges. En plus des bâtiments qui sont sortis de terre, la clôture est visible, et son achèvement n’est plus qu’une question de jours.

Deux heures sur le chantier la nuit

Sur ce site, qui se présente bien, on a prévu des boutiques et des parkings dans un rayon de 500 mètres pour éviter le désordre et les nuisances de toutes sortes. Ce qui manque à l’actuel CHR, dont la situation présente beaucoup de dangers pour les malades. Dans ses environs, en effet, on a des mécaniciens, des commerçants, une gare improvisée et surtout ces fameux vendeurs d’essence. Pour le nouveau centre régional, des dispositions ont été prises pour qu’une telle anarchie ne s’installe pas. Qu’il pleuve ou pas, on ne connaît pas de week-end sur le chantier qui grouille toujours de monde, telle une fourmilière besogneuse. L’avant-veille de notre départ, le 4 août 2009, nous étions sur le site dans la nuit pendant deux heures. Le lieu est éclairé et, à côté d’un bâtiment (salle d’hospitalisation), une bétonnière ronronnait. Elle malaxait le béton pour qu’il soit d’une grande qualité. Selon un contrôleur, sa cuvette prend un sac de ciment, une brouette de sable et deux brouettes de gravier. Un peu plus loin, on procède à un dallage ; et c’est une bétonnière à toupie qui est en action. Afouda est là, de même que Mamoudou. Nous sommes à la section pharmacie. L’entrepreneur qui s’occupe de ce travail a pour nom Mahamoudou Ouédraogo dit Koro du Faso. En plus de ce lot, il en a deux autres : la banque de sang et le laboratoire. Le doyen des entrepreneurs emploie 4 maçons et 12 manœuvres. A tout moment, des camions bennes ne cessent de passer.

Nous imaginons qu’avec un tel parc, les stations-service se frottent les mains. Selon Mamoudou Traoré, c’est 700 à 800 litres de gasoil par jour que les camions, les engins et autres consomment. Pour toute réponse concernant cette consommation, il déclare : « Je n’ai pas les chiffres en tête, mais après on peut évaluer ». Progressant vers un autre lieu, je trouve la bétonnière à toupie qui attendait d’accomplir une autre tâche. C’est le bâtiment de la maternité, qui comptera 46 chambres de différentes catégories. Vingt-sept (27) poteaux décoratifs plus 114 poteaux d’un autre genre sont dressés. C’est l’entrepreneur Jean Marie Tiama qui est chargé de ce lot.

Il nous a fait savoir qu’il y a des chambres de 4 lits, d’autres de 2 lits et des individuelles d’un lit. Avec 17 ouvriers permanents qu’il a fait venir de Ouagadougou, il a, encore à son actif, deux autres tranches (l’administration et l’atelier de maintenance). Tiama s’est fixé un délai de trois mois pour terminer son boulot. Le 2 mars 2009 est très important pour Azimmo. Cinq mois après, elle tient la route et l’avancement des travaux est là pour l’attester. 2010 n’est plus loin …

Justin Daboné

L’Observateur Paalga

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