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Conflits entre populations : La prévention comme arme infaillible

Publié le vendredi 7 juillet 2006 à 08h10min

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La nuit du 30 juin au 1er juillet 2006 est loin d’avoir été celle des plus calmes à la frontière entre le Burkina et le Mali dans la province de la Kossi. Si ce ne fut pas l’enfer, la situation a tout de même été douloureuse pour des populations burkinabè du village de Ouoronkuy et celles maliennes de Wanian.

Le bilan a été triste, des deux côtés, après des affrontements où des armes à feu et des armes blanches ont été abondamment mises à contribution pour faire du mal à l’adversaire. Qu’a-t-il bien pu se passer pour que des hommes et des femmes, sans doute paisibles de nature, se massacrent en cette nuit d’horreurs ? Quel est le démon qui a bien pu s’emparer de ces voisins qui, auparavant, vivaient certainement dans une harmonie qui faisait probablement fi de cette séparation artificielle que les hommes de la ville appellent frontière ? Quel monstre de la division a pu déjouer la vigilance des villageois à la frontière pour endeuiller de part et d’autre, des familles heureuses jusque-là de partager joies et peines quotidiennes ?

C’est tout le problème des Etats africains découpés sans ménagement par des limites imposées sans aucune considération sociologique et historique par les colons. Cette balkanisation aux conséquences nombreuses et tout autant graves, a notamment séparé des familles et des communautés. Celles-ci n’ont d’autre choix, administrativement parlant, que celui d’appeler leur propre frère ou soeur étranger, du fait de sa nationalité. Sinon, le Mali et le Burkina, de même que le Togo et le Bénin pourraient constituer une et unique entité territoriale que personne ne crierait au scandale. Heureusement pour l’Afrique, les populations tiennent très peu compte de ces frontières et vivent toujours comme au sein d’une seule communauté, où tout se partage, même le sel de cuisine.

Malheureusement, tout comme la langue et les dents qui sont contraintes à cohabiter à vie s’entrechoquent de temps à autre, les populations aux frontières connaissent elles aussi des heurts, parfois violents. Du reste, ces violences ne sont pas l’apanage des populations aux frontières et ne doivent donc pas prendre plus d’envergure que les querelles entre habitants de quartiers différents ou entre agriculteurs et éleveurs d’un même pays. Au Burkina, plusieurs conflits de ce genre ont été enregistrés à plusieurs reprises et quand les politiciens se sont mêlés, ils sont passés de phénomènes épisodiques, à des confrontations récurrentes, selon les intérêts en jeu.

Dans tous les cas, qu’ils soient aux frontières ou à l’intérieur des Etats, ces conflits, pour la plupart, pouvaient être étouffés dans l’oeuf. Mais les autorités, si elles n’ont quasiment pas laissé faire, dans bien des cas, restaient pratiquement sourdes aux appels des populations. Combien de fois des gens se sont-ils massacrés à coups de machettes et de gourdins alors qu’on avait la possibilité d’éviter le drame ? A cause de problèmes fonciers, du traçage de pistes rurales ou de pâturages d’animaux qu’on pouvait régler en sensibilisant sur le terrain, on a laissé des localités entières s’embraser, avec à la clé, de nombreux morts et de blessés. Que dire des conflits nés de velléités de certains d’accaparement de la chefferie dans un village ou dans un canton ? Fait déplorable, tout se passe presqu’avec la bénédiction des autorités qui, bien souvent, semblent fermer les yeux, sans doute, pour favoriser tel ou tel clan.

Pourtant, la solution à tous ces conflits existe et leur prise en compte, en amont, est plus facile que la gestion d’affrontements qui ouvrent des plaies difficilement pansables et parfois incicatrisables. Cette solution, c’est la prévention. Nos gouvernants devraient faire preuve d’une capacité d’anticipation plus évidente pour épargner toutes ces souffrances inutiles à nos populations. La prévention et rien que la prévention saine, sans parti pris, doit être le leitmotiv de l’Administration qui doit être toujours au-dessus de la mêlée. Mais maintenant que tout est politisé, plus rien n’est comme avant. Même les arbitrages qui se menaient efficacement pour régler des différends fonciers et des mésententes entre villageois ont disparu au profit de jugements à la hâte, faits à la tête du client.

Si les autorités au plus haut niveau sont inaccessibles aux populations, il faut espérer qu’avec la communalisation intégrale qui vient d’être mise en branle, on ait des maires d’une qualité intellectuelle et morale à même de régler les problèmes de leurs administrés desquels ils sont en principe les plus proches. En tout cas, il est plus qu’urgent de combattre la politique du laisser-faire jusqu’à explosion, car d’autres drames pourraient éclater. Pour l’instant, les villageois burkinabè et maliens en conflit doivent faire preuve de retenue pour que la paix durable revienne. Les gouvernements passent mais les populations sont éternelles.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 9 juillet 2006 à 01:05, par Omar En réponse à : > Conflits entre populations : La prévention comme arme infaillible

    Je souscris entièrement à cette analyse du journal Le Pays. Ce conflit aux conséquences irréparables aurait pu tout simplement être évité si les autorités avaient daigné prendre les mesures adéquates d’autant plus que les pauvres populations ont plusieurs fois alerté le préfet de la localité sur la situation qui se dégradaient.

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