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Promotion des droits de l’enfant : La Fondation éducation et coopération fait le bilan de ses actions au Yatenga en 2019

Publié le dimanche 29 décembre 2019 à 20h22min

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Promotion des droits de l’enfant : La Fondation éducation et coopération fait le bilan de ses actions au Yatenga en 2019

A la faveur de cette fin d’année 2019, nous avons tendu notre micro à M. Edouard N’deye, directeur-pays Burkina -Niger de la Fondation éducation et coopération (Educo). Cette ONG de parrainage d’enfants qui s’engage désormais vers l’action humanitaire intervient depuis 2004 dans la province du Yatenga. Des actions menées en faveur des droits de l’enfant en passant par le bilan d’exécution des activités, les perspectives et les nouvelles orientations de la structure ont été au centre des échanges que nous avons eus avec M. N’Deye dont la structure a pour vision de garantir « un monde où tous les enfants jouissent pleinement de leurs droits et vivent en toute dignité »

Lefaso.net : Quelles sont les activités réalisées par EDUCO en 2019 ?

Edouard N’deye : Au terme de cette année, nous pouvons avoir un motif de satisfaction en ce sens que nous avons pu dérouler la presque totalité de notre programme d’activités de 2019 dans un contexte où l’accessibilité des zones d’intervention a été problématique.

La totalité du programme Education, du programme Protection, les activités du projet sur la cohésion sociale et du projet d’état civil pour les populations, l’accompagnement des partenaires avec qui nous travaillons sur le terrain ont pu être réalisés malgré les difficultés d’accès dans une partie de la région du Nord. En outre plusieurs activités conformément au plan stratégique de l’ONG ont été exécutées dans les domaines du parrainage d’élèves, de la résilience, de la nutrition, etc.

Au niveau de l’éducation, qu’est-ce qui a été fait ?

Nous avons bouclé totalement 4 complexes scolaires. Il y a un 5e complexe scolaire notamment l’école de Bourbo, qui n’est pas encore achevé faute du respect du cahier de charges et du calendrier par l’entrepreneur. Nous sommes sur ce cas précis en procédure de résiliation du contrat et par la suite nous allons le réaffecter à un autre entrepreneur afin de diligenter les travaux pour que les enfants aient accès à leur école.

Nous déplorons cette situation où malheureusement certains entrepreneurs manquent de sérieux une fois que le marché leur a été attribué. Nous avons passé de 9 heures à 4 heures du matin dans la procédure de passation du marché avec des maires et des communautés éducatives où les infrastructures devaient être livrées en juin. Certaines ont pu être livrées en août et d’autres en septembre, il ne reste que le chantier de l’école de Bourbo qui est toujours en souffrance.

Dans l’accompagnement nutritionnel des élèves dans les écoles, nous avons par contre eu un peu de soucis avec les vivres compte tenu de la fluctuation des écoles non fermées ou fermées. Il fallait faire un point précis sur la situation exacte des écoles fonctionnelles et s’assurer que les vivres ne soient pas perçus comme un danger pour les écoles ouvertes. Nous sommes en train de finaliser la livraison des vivres et tout le paquet. En la matière, à Sénéguéga, Oula, Namissiguima, Ouahigouya, nous avons pu dérouler nos activités, par contre dans les communes comme Barga et Koumbri, nous avons été obligés de lever un peu le pied eu égard à la situation sécuritaire.

Et sur le plan de la santé ?

E.N : Dans ce secteur nous avons nos réalisations d’appui classique aux districts sanitaires de Ouahigouya, Thiou et Sénéguéna. Aujourd’hui nous avons un grand renfort avec le projet que nous développons avec l’Union européenne sur la maîtrise de la dynamique démographique appelé « Projet de Population ». Un projet qui accompagne les CSPS (Centre de santé et de promotion sociale), les districts sanitaires sur les questions de planning familial et la santé sexuelle et reproductive. C’est un projet qui se déroule bien dans les régions du Nord, du Centre-Nord et du Sahel.

Quand vous faites le bilan de vos activités en termes de protection des droits de l’enfant, est-ce que vous sentez que les choses s’améliorent ?

Nous avons fêté les 30 ans de la Convention internationale des droits de l’enfant le 20 novembre 2019. Beaucoup de choses ont été faites dans le sens de l’amélioration des droits de l’enfant. La communauté internationale a adopté un instrument juridique que beaucoup d’Etats, le Ghana en premier, y compris le Burkina Faso ont ratifié. Cet instrument a rendu contraignante la protection des droits de l’enfant.

Ceci a permis de mettre en place des mécanismes et des budgets dont les acteurs bénéficient pour travailler sur la protection et le respect des droits de l’enfant. Les droits de l’enfant en général sont inhérents à la marche de toute société. On ne peut jamais atteindre d’idéal absolu mais nous devons nous entendre sur une base, un standard minimum sur la protection des droits de l’enfant. Nous pensons personnellement que les standards minimum sont en train d’être améliorés.

Aujourd’hui avec la situation d’insécurité nous avons beaucoup plus besoin de renforcer la prévention et surtout la protection des droits de l’enfant. Quand un village est attaqué ou toute une communauté est déstructurée, le réflexe doit être "qu’allons-nous faire des enfants" ?. Ce sont eux qui sont sans défense et donc vulnérables. Quand on puise dans nos fondements culturels, nous nous rendons compte que l’enfant a toujours été protégé. Face au danger le réflexe a toujours été de mettre le « biiga » (enfant en langue nationale mooré) à l’abri d’abord.

C’est dire que nous avons beaucoup à prendre dans le mécanisme culturel de nos sociétés pour renforcer la protection des droits de l’enfant. Nos sociétés ont, d’ailleurs toujours été naturellement protectrices. Ce qui est important, c’est comment organiser la responsabilité parentale et communautaire et renforcer l’obligation étatique en matière de protection des droits de l’enfant. C’est le combat que mène Educo aux côtés de l’Etat. Je crois que lentement mais sûrement d’excellentes choses se font en matière de protection des droits de l’enfant.

Vous venez de dire que vous avez levé le pied à Barga et à Koumbri. Est-ce à dire qu’aucune activité ne s’y mène ? Quel est l’impact de cette situation d’insécurité sur vos activités ? Y a-t-il des stratégies à long terme pour y remédier ?

Nous sommes une ONG de développement à la base où nous intervenons dans les villages dans le sens de l’amélioration des conditions de vie des populations, jusqu’au jour où nous n’y avons plus accès. Nous sommes contraints de revoir notre stratégie en l’orientant vers l’action humanitaire. Et le principe, c’est la neutralité, l’impartialité, l’humanité car notre préoccupation essentielle reste les populations. On touche les communautés pas comme on aurait voulu, mais on arrive à travailler un peu. C’est dommage la situation que nous vivons mais dans les normes l’action humanitaire doit être permise pour les ONG comme Educo qui travaille sur le terrain et apporte de l’assistance nécessaire aux populations. Nous osons croire que l’action humanitaire va de plus en plus être facilitée pour que nous travaillions dans la quiétude.

Comment appréciez-vous votre collaboration avec les structures déconcentrées de l’Etat en matière d’accompagnement ?

Nous accompagnons à travers la mise en place d’activités. C’est notre leitmotiv et nous avons poursuivi cette dynamique en 2019. Nous avons permis le suivi d’un certain nombre d’activités sur le terrain dans le domaine de l’éducation, la protection de l’enfant, l’agriculture et la gouvernance. Avec les collectivités locales, il y a certaines qui sont un peu déstructurées mais il y a un minimum de services qui se déploient dans certaines zones. Nous leur apportons un appui pour que les activités puissent se mener tranquillement dans nos zones d’intervention.

Lefaso.net : Quelques exemples d’appuis ?

Nous avons des protocoles d’accords avec certains services qui renferment beaucoup d’activités. Notre stratégie, c’est de passer par certains services pour les renforcer et les accompagner dans le travail qu’ils font. A titre d’exemple dans la réalisation des complexes scolaires, les quatre (4) étaient dans la commune de Séguénéga. Le suivi des travaux, la contractualisation jusqu’à la livraison ont été faits avec la collectivité locale.

Votre fondation depuis deux (2) ans a créé son bureau national à Ouagadougou, alors qu’elle était basée à Ouahigouya. Qu’est-ce qui explique cela ?

Educo a une histoire particulière. Nous sommes une ONG internationale qui s’est implantée à Ouahigouya dans le Yatenga en 2004 en tant qu’une structure de parrainage d’enfants. Nos sources de financement étaient destinées à ce volet essentiel du parrainage d’enfants. Nous avons travaillé avec beaucoup de proximité avec les populations et nous avons recensé ce qui est plus avantageux et bien dans ce travail de proximité pour elles. En tant que ONG internationale, nous avons estimé qu’il fallait s’ouvrir.

Une ONG internationale a pour vocation de s’élever pour accompagner les organisations locales qui font d’ailleurs un excellent travail sur le terrain. Pour cela il faut être présent dans les sphères de décision. Nous avons été très récemment à Bruxelles, au cœur de l’Union européenne pour des plaidoyers et pour également nous positionner afin d’influer sur les décisions et nouer des relations au plan national et international. En 2016, nous avons ouvert un bureau de représentation à Ouagadougou avec trois (3) agents.

De nos jours, le bureau compte 20 agents où nous trouvons la direction, les coordinations de programmes, les experts thématiques, certains projets qui ont une envergure plurirégionale. C’était donc important de créer un hub à Ouagadougou. Mais je puis vous rassurer que le Yatenga reste notre épicentre. Les résultats développés au niveau du Burkina, dans la région du Nord plus précisément dans le Yatenga où tout a commencé permettent de nous ouvrir. Nous allons courant janvier 2020, ouvrir le bureau du Niger qui sera rattaché à celui du Burkina Faso. Désormais la délégation du Burkina devient la délégation du Burkina et du Niger.

C’est le développement normal de notre stratégie d’implantation. Pourquoi le Niger seriez-vous tenté de nous demander ? Le Niger forme avec le Burkina Faso et le Mali un triangle où nous vivons les mêmes problématiques liées à l’éducation, à la protection de l’enfant, à la gouvernance, à l’insécurité. Aujourd’hui pour faire beaucoup plus de cohérence dans cette zone, nous avons besoin de prendre en compte ce triangle et d’y apporter notre contribution en matière d’action humanitaire. Educo qui était exclusivement dans cinq (5) communes du Yatenga, est présente dans 3 régions du Burkina Faso et très bientôt au Niger. A Ouagadougou, nous allons commencer à implémenter des projets dans les zones périphériques par le déroulement des activités sur la protection des droits de l’enfant avec des partenaires locaux que nous allons identifier. Ceci grâce à une étude sur la situation des droits de l’enfant que nous venons de finaliser.

Quelles sont les perspectives pour 2020 ?

Nous disposons pour 2020 d’un budget acquis qui tourne autour de quatre milliards CFA. Au niveau du plan stratégique, nous entamons la deuxième année de trois de nos grands projets. L’autre aspect est que nous élargissons notre domaine d’action vers le Niger sans oublier la Boucle du Mouhoun, le Centre-Nord et le Sahel avec des partenaires où nous avons des projets. 2020 marquera un tournant pour nous en ce sens que nous évoluerons vers l’action humanitaire.

A propos, nous venons de finaliser une démarche d’éducation en situation d’insécurité que nous comptons déployer sur le terrain, cela va consister à répondre à des problématique telles que comment renforcer le système éducatif, promouvoir des alternatives d’éducation, etc. C’est pour Educo une année d’alerte pour la centaine d’agents déployée sur le terrain par rapport au nouveau contexte de travail. J’ai l’habitude de dire que nous sommes des impactés de la situation qui nous a du reste trouvés sur le terrain et nous vivons les mêmes réalités que nous impose la situation, nous n’avons pas le choix que de continuer à accompagner les communautés dans cette résilience face à l’insécurité.

Un dernier mot ?

Je ne peux terminer sans rendre hommage aux hommes et femmes de très grande valeur qui travaillent avec nous. Je les appelle des « militants » des droits de l’enfant et non des salariés comme j’ai l’habitude de le dire. Ce sont des engagés pour la cause de Educo au Burkina Faso qui se battent dans le respect de notre vision qui est d’aboutir à « un monde où tous les enfants jouissent pleinement de leurs droits et vivent en toute dignité ».

Je félicite et encourage les braves travailleurs dans leur poste respectif pour l’atteinte des résultats au bénéfice exclusif des enfants. Je voudrais souhaiter une année de paix et de cohésion pour le développement des communautés et des enfants. Que Dieu bénisse le Burkina Faso.

Propos recueillis par Yann NIKIEMA
Lefaso.net

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