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Articles de seconde main : un commerce florissant

Publié le mardi 16 août 2005 à 09h33min

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"France aurevoir", c’est le sobriquet donné aux articles de seconde main en provenance d’Occident. Du matériel électroménager, des sacs, des valises, des jouets pour enfants... inondent le marché burkinabè. Vieux ou neufs, de bonne ou de mauvaise qualité, ces articles font le bonheur de beaucoup de consommateurs au "pays des Hommes intègres".

La rue Didier-Tiendrébéogo sise à la cité an III de Ouagadougou. Dans un coin de cette rue une exposition-vente de produits ou d’articles divers pour le voyage, la maison et également les tout-petits. Des sacs, des valises avec roulettes, des mallettes, des chambres à coucher, des berceaux, des pousse-pousse, des jouets... Ambiance d’une rue commerciale :

"Venez voir" ; " voulez-vous un sac de voyage " ? "Mme, prenez ce sac, il est fait pour vous" ; "ce n’est pas cher". "Le prix c’est 3 500 F CFA à débattre". C’est en ces termes que Salam Simporé accueille ses clients. Un mégot de cigarette entre les doigts, Salam semble plus préoccupé par la vente de ses sacs que par la cigarette qui lui "brûle" les doigts.

D’un geste habituel et banal, il se met à fouiller le tas de sacs exposés au bord du canal bordant la rue Didier- Tiendrebéogo à la recherche de sacs "premier choix" (c’est-à-dire de meilleure qualité). A côté des étals et des sacs de Salam sont amassés des bagages d’un autre genre : des valises munies de roulettes flambant neuves.

C’est le"domaine" de Pascal Nikièma. D’abord méfiant à la vue du matériel de reportage, il a fallu négocier dur pour obtenir des réponses. A propos de son réseau d’approvisionnement, Pascal répond : "Nous avons deux patrons qui vont en Italie, en Allemagne et à Dubaï. Ce sont eux qui nous approvisionnent". Mais Pascal refuse de dire qui sont ses patrons. Cela signifie que les revendeurs comme Pascal ne sont que de simples relais d’un circuit commercial coiffé par deux "gros bonnets" du monde des affaires. En effet, les articles qui y sont vendus ne ressemblent pas souvent à du "France au revoir" . Là-dessus M. Pascal ne mâche pas ses mots. "Il y a parmi nos marchandises des articles que vous ne verrez nulle part ailleurs. Non seulement ils sont uniques mais surtout ils sont neufs".

Salam et Pascal ne sont pas les seuls occupants du "coin". Omar Ouédraogo, lui, y a aussi ses affaires. Des supports pour affiches publicitaires importés d’Espagne semble-t-il s’y négocient à 40 000 F CFA l’unité. "Je dispose d’au moins 200 supports de ce genre", confie Omar.

A une petite distance d’un des supports se trouvent exposés des berceaux (un petit et un grand) joliment habillés. 65 000 F CFA, tel est le dernier prix proposé à un client nommé Mickaïla, à la recherche d’un berçeau pour son nouveau-né."Je suis un de leurs fidèles clients. J’y viens très souvent acheter soit des jouets pour mes enfants, soit des objets pour ma maison", précise Mikaïla.

Edouard Ouédraogo, un autre client est quant à lui intéressé par un sac ou une valise. Pourquoi venir ici et pas ailleurs ? Avons-nous voulu savoir. Et Edouard Ouédraogo de répondre :"Je suis un habitué du coin, j’apprécie leurs marchandises. Elles sont de bonne qualité, en plus, elles sont moins chères. J’y trouve souvent des objets rares".

Des objets rares et moins chers

Les articles sont rares et moins chers certes, mais les clients se comptent sur le bout des doigts, atteste M. Pascal Nikièma. "Il y a des moments où nous faisons de bonnes affaires surtout lors des périodes de vacances au cours desquelles bon nombre de personnes voyagent. Il y a aussi des périodes de vaches maigres". "Ce qui nous amène à "bazarder" les marchandises pour subvenir à nos besoins. Nous travaillons donc souvent à perte. A cela s’ajoutent les dégâts de certains matériels. En effet, les conditions de transport nous lèsent quelquefois, car nous pouvons recevoir des marchandises cassées, avariées ou incomplètes. Cela constitue pour nous une perte énorme", renchérit-il.

Si à la rue Didier-Tiendrebéogo se négocient valises, mallettes, jouets, berceaux... derrière le mur du lycée Marien-N’Gouabi, sur l’avenue Kombemba, c’est une autre ambiance. Là-bas, c’est le Q.G. (quartier général) des appareils électroménagers. Congélateurs, réfrigérateurs, appareils de musique, cuisinières à gaz... toutes marques confondues sont vendus. Dans la petite boutique de Sahabane, il n’y a plus de place où mettre le pied. Là-bas, le matériel de froid se négocie entre 75 000 F CFA et 180 000 F CFA. "C’est du premier choix" lance-t-il comme pour justifier les prix. Sahaban affirme acheter ses marchandises aux ports de Ghana en provenance d’Europe. Bien que se plaignant de l’exiguïté de sa boutique et de la cherté des taxes municipales (50 000 F CFA/an et 3000/mois), le jeune Sahaban reconnaît faire de bonnes affaires. Pour lui, les articles de seconde main sont souvent de très bonne qualité et rivalisent en prix avec le matériel neuf. Un client que nous avons rencontré à la boutique de Sahabane (ayant requis l’anonymat) va loin "les vieilles marmites font toujours de bonnes sauces" confie-t-il pour justifier sa présence en ces lieux.
A quelques pas de la boutique de Sahabane se tient une autre moins grande ; celle de M. Amado Simporé, là une "montagne" d’enjoliveurs se dresse comme si on était devant une usine de fabrique d’enjoliveurs. Pour un enjoliveur il faut selon M. Amado, débourser au minimum 15 000 F CFA.

Et si on organisait le marché ?

Trouver des valises munies de roulettes, des mallettes des chambres à coucher, des réfrigérateurs, ou autres articles à bon prix, aux abords d’une rue paraît salutaire mais, dégager un endroit idéal pour ce genre de commerce ne serait-il pas mieux ? M. Pascal Nikièma le reconnaît. "La mairie de Ouagadougou à plusieurs reprises nous a interpellés du fait de notre installation dite anarchique. Nous avons entamé des démarches dans ce sens, mais jusque-là, elles n’ont pas encore abouti".

Pascal Nikièma salue l’indulgence des autorités municipales grâce à laquelle il peut exercer en toute quiétude ses activités. Salam Simporé lui, invite les autorités municipales à leur trouver un cadre propice ; car affirme-t-il : "nous trouvons notre salut dans cette activité et nous déguerpir sans crier gare serait suicidaire". Cet avis n’est pas partagé par Sahabane Yabré. Pour lui un endroit autre que les abords des grandes voies ne leur permettrait pas de faire de bonnes affaires. Car soutient-il, il faut un lieu attrayant. Et même créer un marché baptisé "France au revoir" ne résoudra pas le problème mais en créerait plutôt d’autres.

A. Verlaine KABORE
Sidwaya

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