« S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
L’Office national des télécommunications (ONATEL) traverse, depuis quelques jours, une crise liée à un mouvement d’humeur de ses agents. Une situation qui a des répercussions sur les prestations de l’entreprise et qui alimente, de ce fait, les causeries au sein des populations. A travers cet entretien, le secrétaire général du Syndicat national des télécommunications (SYNATEL), Soulemane So, en dit un peu plus sur ce bras de fer qui oppose le personnel à la direction générale.
Lefaso.net : Depuis quelques jours, le torchon brûle entre la direction générale et le personnel. Concrètement, quelle est la pomme de discorde ?
Soulemane So : C’est la mauvaise gestion de l’entreprise depuis sa privatisation qui est dénoncée, décriée par les travailleurs. Et nous pensons qu’un audit des dix ans de privatisation de l’ONATEL permettrait de connaître les tenants et les aboutissants qui ont fait perdre à l’Etat, plus de six milliards FCFA. Pour en venir au dernier élément qui a occasionné ce mouvement d’humeur, nous disons que c’est une attitude de mépris, de non-considération que le directeur général a eue à l’endroit des travailleurs concernant les négociations sur la plate-forme déposée après le XVIII congrès ordinaire.
De quoi est-il question dans cette plateforme ?
Soulemane So : La plateforme revendicative résume les préoccupations de l’entreprise. Il y a des points qui portent sur la gestion elle-même de l’ONATEL, l’amélioration des conditions de vie des travailleurs. En ce qui concerne le premier point, nous demandons à la direction générale de permettre à l’ONATEL de survivre à la concurrence. Ce qui passe nécessairement par la dotation des travailleurs en outils de travail, en matériels logistiques et en équipements conséquents pour pouvoir effectuer convenablement leur travail. Aujourd’hui, dans le secteur de la télécommunication, nécessairement, si vous voulez être compétitif, il faut investir en achetant des équipements performants mais également en donnant la formation aux travailleurs et en dotant le personnel d’outils de travail. Donc, le premier point de la plateforme porte sur ça.
Vous avez d’autres points qui parlent également de l’externalisation que nous constations dans les entreprises de télécommunications. Pour notre part, nous estimons que pour les métiers permanents, il faut plutôt recruter des gens et leur donner du travail décent au lieu de les externaliser et se retrouver avec des gens qui, non seulement, ne sont pas à la hauteur des efforts qu’ils peuvent produire, mais également pour lesquels on ne peut pas avoir une garantie de sécurité liée à la précarité du travail.
Nous avons l’autre volet important qui est l’amélioration des conditions de vie et de travail. A ce niveau, nous avions deux points qui portent sur la rémunération, notamment la refonte de la grille salariale et l’augmentation de salaire. Malheureusement, sur ces points également, le directeur général reste jusqu’à présent très évasif et il nous avait demandé 45 jours au moins pour pouvoir mener une étude. Il a reçu les résultats de l’étude mais c’est pour s’asseoir discuter avec les travailleurs, qu’il trouve d’autres préoccupations qui sont plus urgentes. Et c’est ce que les travailleurs n’arrivent pas à comprendre et qu’ils dénoncent à travers ce mouvement d’humeur.
Pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d’entreprendre une telle action ?
Soulemane So : Non, notre lutte ne date pas d’aujourd’hui. Depuis 2006, nous avons toujours dénoncé la mauvaise gestion de l’entreprise. En 2008, nous avons été en sit-in, même d’une durée plus longue que ce présent sit-in pour demander les mêmes choses. Egalement, nous avons approché les autorités et nous avons produit un mémorandum qui a été adressé au Premier ministre en son temps, Luc Adolphe Tiao. Par ailleurs, en 2011, nous nous sommes battus pour dire que les problèmes qui n’ont pas trouvé de solution en 2008 doivent nécessairement être résolus. Malheureusement, on a trouvé des semblants de solutions pour une partie de la plateforme et on nous a convaincus qu’il allait y avoir des négociations par la suite sur une partie qui était la plus importante des préoccupations. Hélas, il n’y a jamais eu ce respect d’engagement pris par la direction générale dans la convention. Nous avons encore mené des actions. Mais, comme vous le savez, les travailleurs ont des pouvoirs qui sont limités, en ce sens que souvent ils vont vous dire de vous contenter de réclamer l’amélioration des conditions de vie parce que la direction est l’affaire de ceux qui détiennent le capital. Nous disons non, car si l’entreprise doit péricliter aujourd’hui, les premiers qui vont en souffrir ce sont les Burkinabè, en commençant, bien entendu, par les travailleurs que nous sommes.
Certains vous accusent de n’avoir pas déposé de préavis de sit-in …
Soulemane So : C’est vrai, il faut déposer un préavis. Mais pour ce mouvement d’humeur, nous n’avons pas eu le temps de le faire parce que le directeur Mohamed Naîni ne nous a pas laissé le choix. Nous sommes déterminés à nous battre aux côtés des travailleurs pour que le directeur général revienne à la table des négociations.
Et cela pour combien de temps ?
Soulemane So : Le temps qu’il faudra.
Avez-vous conscience de l’impact de votre action sur le citoyen lambda ?
Soulemane So : Oui, nous avons conscience que le sit-in en cours a des effets sur nos clients. Mais, la population doit comprendre que la responsabilité incombe au premier gestionnaire de l’entreprise qui doit nécessairement résoudre le problème qui prévaut à l’ONATEL. Les travailleurs ne demandent même pas qu’il y ait une satisfaction totale sur tel ou tel point de leurs revendications, ils demandent juste que le directeur général entame une franche négociation avec leurs responsables. C’est à l’issue de cela qu’on pourra finalement décider s’il faut lever le sit-in ou pas. Toutefois, nous sommes ouverts au dialogue. Par ailleurs, nous tenons à rassurer nos clients que toute panne qui viendrait à survenir n’est pas due à l’action des travailleurs. Les pannes surviennent chaque jour, même quand nous sommes en activité (…).
… En termes financiers ?
Soulemane So : Seule la direction générale est en mesure de répondre à cette question. Mais, ce qui est sûr, rien ne peut se gagner, syndicalement parlant, sans consentir à des sacrifices. Aujourd’hui, nous sommes conscients que nous sommes dans la concurrence mais est-ce pour autant qu’il faut se laisser endormir ? Certainement pas !
Mais ne craignez-vous pas une réaction de l’opinion ?
Soulemane So : Si ! Et c’est d’ailleurs pourquoi nous interpellons la population car, la lutte que nous sommes en train de mener n’est pas seulement pour les Burkinabè qui travaillent à l’ONATEL mais pour tous les Burkinabè. Nous sommes leurs yeux dans l’entreprise. Par conséquence, ils doivent nous soutenir, de sorte à ce qu’on puisse vraiment arriver à ce que cette mauvaise gestion prenne fin et qu’il y ait la dignité burkinabè qui s’exprime à l’ONATEL. J’insiste, le tort qu’ils sont en train de faire au Burkinabè (parce qu’ils sont Burkinabè dans l’entreprise), doit être même une préoccupation pour l’ensemble de la population. L’Etat aussi doit prendre ses responsabilités. Car, elle (entreprise) est en train d’être vidée de sa substance. La qualité du service se dégrade, les clients souffrent avec les services de l’ONATEL. Il n’y a plus d’embauches, les compétences locales sont brimées et nous avons des présomptions de fuite énormes de capitaux. Nous sommes conscients que l’entreprise a été privatisée, mais le peuple burkinabè a toujours 26% de part d’actions. Rien que pour cela, il a son mot à dire.
Est-ce que vous êtes entrés en contact avec votre ministère de tutelle pour une sortie de crise ?
Soulemane So : La réponse est oui. Notre ministère de tutelle nous a rencontrés, le vendredi dernier pour s’enquérir vraiment de ce qui se passe à l’ONATEL. Et sans détour, nous lui avons fait le point. Toute chose qui a permis de lever certains points de blocage. Il est question notamment de la remise d’une copie du rapport intégral au SYNATEL par la direction générale. Egalement, le ministère est resté dans cette dynamique et nous a rencontrés le 27 septembre pour encore inviter la direction générale à accepter venir sur la table de négociations pour permettre le déblocage total de la situation. Mais, c’est le directeur général qui a opposé un mutisme sinon, nous pensons que le ministère (ministère du développement de l’économie numérique et des postes) a fait des démarches qui pouvaient permettre à ce qu’on sorte de cette situation.
Qu’envisagez-vous, si toutefois vous n’êtes pas entendus par votre premier responsable ?
Soulemane So : Au niveau syndical, nous avons plusieurs moyens de lutte. Actuellement, c’est un sit-in. Il y a aussi la possibilité d’aller en grève, de manifester publiquement sur la voie, interpeller la population encore une fois et le gouvernement sur ses responsabilités. Tout cela reste des perspectives à envisager et on se donnera les moyens d’interpeller même Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL.
Votre mot de fin ?
Soulemane So : Nous savons que le mouvement que nous menons actuellement a des conséquences sur les populations. Nous nous en excusons et demandons leur compréhension parce que, nous sommes en train de mener un combat pour la dignité des Burkinabè au sein de l’entreprise. Si cela venait à aboutir, ça permettra à ce qu’on puisse faire des recrutements pour offrir de l’emploi aux jeunes. Si Maroc Télécom respecte ses engagements contenus dans le contrat de cession, effectivement il pourra donner du travail aux jeunes. Nous sommes en train de mener un travail dans lequel l’Etat tout entier va retrouver sa dignité parce que, tel que ça se passe, c’est comme si le gouvernement qui a des parts dans l’entreprise n’a aucune possibilité d’interpeller tel ou tel acteur de la direction.
Interview réalisée par Aïssata Laure G. Sidibé
Lefaso.net
Vos commentaires
1. Le 29 septembre 2016 à 10:44, par Adamou En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
"Si cela venait à aboutir, ça permettra à ce qu’on puisse faire des recrutements pour offrir de l’emploi aux jeunes. Si Maroc Télécom respecte ses engagements contenus dans le contrat de cession, effectivement il pourra donner du travail aux jeunes. Nous sommes en train de mener un travail dans lequel l’Etat tout entier va retrouver sa dignité "
je suis un citoyen et je dit alors, bravo et bonne suite !Bon courage ! je suis à 100% avec vous.
2. Le 29 septembre 2016 à 10:58, par Voltaïque En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
Quel drôle de syndicaliste incivique qui respecte pas la réglementation qui ne sait pas faire là part des choses il croit que l’état avec ses 26% peut contrôler la boîte. Depuis la privatisation de l’ONATEL en 2006 ce syndicat n’a pas pu faire aboutir la rétrocession de la part du capital qui devrait revenir aux travailleurs à un prix reduit. Les travailleurs de la Sonatel du Senegal et ceux de Malitel-Sotelma du Mali ont eu 10% de leur Société lors de la privatisation de leur société ; ce sont les travailleurs burkinabé qui se sont fait rouler dans la farine avec des exigences toujours maximalistes etnon raisonnables : ils voulaient les actions sans débourser un copeck alors que la pratique courante le travailleur achete l’action avec une décote entre 20 et 30 %. Cette boîte à encore beaucoup d’effort à faire du fait du passif "public" et de l’effectif pléthorique dont a hérité le repreneur. En 10 ans que l’effectif soit passé de 1338 à 821 pendant que le bénéfice est passé de 10 à 24 milliards est une bonne chose parce que l’ONATEL a encore beaucoup à faire en matière de rentabilité. En 2015 au Senegal la Sonatel sans ses filiale à fait 86 milliards de bénéfice, Ikatel au Mali 92 milliards, Orange Guinée Conakry 39 milliards pendant que notre Onatel Nationale traîne à 24 milliards. Les travailleurs de l’onatel doivent comprendre qu’avec la privatisation le paradigme a changé de fonctionnaire improductif sans objectif de performance il doivent devenir des travailleurs du privé avec des objectifs de rentabilité dans un environnement fortement concurrentiel ; c’est sur que la mutation est difficile. A mon humble avis le syndicat doit se cultiver sur l’état de l’art en matière technologique et les tendances mondiales ainsi que le système de renumeration dans les multinationales et éviter de mener des combats d’arrière garde.
La différence de salaire entre expatriés et nationaux est courante dans toutes les multinationales et les organismes internationaux, le fixe est une technologie onéreuse en déclin sur laquelle les opérateurs n’investissent plus. La réduction des coûts amène toute les entreprises à externaliser des services et dans les secteurs des Tic et telecom avec l’automatisation des processus on a plus besoin de pléthore d’ouvrier mais des agents pointus. L’initiative d’embaucher ou pas n’est pas du ressort du syndicat. En général dans les secteurs des télécoms s’agissant du personnel le turn-over est très élevé il n’y a que les bras cassé qui passent le temps à pleurnicher sur leurs sorts les agents excellents se font débaucher par la concurrence avec de meilleures conditions. Les travailleurs de l’Onatel ont de la chance de n’avoir pas subit après la privatisation une cure de licenciement pour ramener l’effectif à des ratios acceptables pour le secteur des telecom.
3. Le 29 septembre 2016 à 11:19, par SAWADOGO ABDOUL-AZIZ En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
je suis un citoyen et je vous félicite pour initiative.
la jeunesse dont nous somme nous souffrons dans ce Burkina diplômé mais sans travaille pourquoi cela.tu cultive du mais sur ton propre champ mais tu pourra jamais en consomme.
nous disons non à cela.je vous remercie beaucoup mes chers parents.que dieu vous bénisse tous.
4. Le 29 septembre 2016 à 12:28, par Moussa Rouamba En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
c’est des vieux syndicats nostalgique qui refuse d’admettre que la boite a ete privatisee et que les vieilles pratiques ne peuvent plus prosperer.aucun syndicat de n’importe quelle boite privee ne peut se comporter de cette manière dans ce pays.s’ils sont vraiment soucieux de l’emploi des jeunes,ils doivent tout faire pour léguer a ceux ci une boite qui marche dans la paix et dans la cohesion.
5. Le 29 septembre 2016 à 19:15, par la bâtardise ne gagnera pas En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
Internaute 2 dit voltaïque, si tu es un apatride, il faut te taire. Là où un pourcent des intérêts du peuple burkinabé, il sera défendu.
6. Le 29 septembre 2016 à 22:21, par diko abdoulaye En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
Merci SG SYNATEL ; pour votre patriotisme, votre esprit de discernement , en somme votre BURKINDI qui n’est pas marchandage.,TOUNE NINA POUKAMI PILI PABE SAAMI -GONGA.
7. Le 29 septembre 2016 à 22:41, par DIAWARA FAMARA En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
La dignité et les compétences nationales des travailleurs de LONATEL doivent être respectées par ces capitalistes voraces, donc qu’ils cessent de traiter ces dignes fils du BURKINA comme des esclaves car rien ne vaut la dignité d’un n’être humain.
8. Le 29 septembre 2016 à 23:04, par MILOGO NESTOR En réponse à : « S’il le faut, nous nous donnerons les moyens d’interpeller Maroc Télécom sur la situation qui prévaut à l’ONATEL », Soulemane So, secrétaire général du SYNATEL
Il est important que le peuple et l’ensemble des clients de LONATEL soutiennent cette lutte qui est la leur qui est une lutte patriotique ; malgré le prix a payer. Car depuis 2006 cette societé n’est leader que sur papier. A COMPETNCE EGALE SALAIRE EGALE et cela , ILS NE MOURONT PAS !!!!!!!!!