LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Avec de la persévérance et de l’endurance, nous pouvons obtenir tout ce que nous voulons.” Mike Tyson

Billetage septembre 2004 au MEBA : Environ 3000 instituteurs attendent leurs salaires

Publié le mardi 5 octobre 2004 à 06h56min

PARTAGER :                          

La rentrée scolaire 2004-2005 s’annonce sous de mauvais auspices pour de nombreux instituteurs adjoints certifiés (IAC) des promotions 2003 et 2004. Environ trois mille (3000) de ces enseignants payés au billetage à Ouagadougou n’arrivent pas à toucher leur salaire. Aucun maître ne sait quand cette galère prendra fin pour leur permettre de retourner en classe en toute quiétude.

Le communiqué du 24 septembre 2004 du directeur de la solde et de l’ordonnancement invitant les fonctionnaires à la caisse n’a pas entraîné la joie de tous les enseignants du primaire. Environ trois mille (3000) instituteurs adjoints certifiés (IAC) des promotions 2003 et 2004 sont dans l’expectative à Ouagadougou et font le pied de grue à la direction de la promotion de l’éducation des filles (DPEF) pour obtenir leur salaire du mois de septembre.

Des milliers d’élèves ont effectué la rentrée sans leurs maîtres. Ils sont venus des quatre coins du Burkina Faso et même des localités les plus reculées du pays : Banfora, Orodara, Tougan, Gaoua, Nouna, Gorom-Gorom. Certains ont effectué le voyage de Ouagadougou depuis le 26 septembre 2004 comme L. B. Yves Yélémou enseignant à Guiédougou dans la circonscription de Kassoum province du Sourou.

D’autres, en vacances dans la capitale, attendaient de percevoir leur pécule du mois avant de rejoindre leur poste. Malheureusement pour eux, ils sont payés au billetage. Ce système de paiement connaît depuis un certain temps des dysfonctionnements qui causent des désagrements aux maîtres. "Nos salaires sont disponibles. Mais le billetteur refuse de nous payer car il aurait posé un certain nombre de préalables avant de s’exécuter’’, soutient M. Yves Yélémou.

Selon lui, le retard de paiement serait lié à un problème d’ordre matériel dont il n’a pu identifier la nature. Son collègue Félix Zoungrana de Gorom-Gorom souligne que cette situation vient accroître leurs problèmes financiers et mettre en péril l’entame de la rentrée scolaire. "Nous sommes déjà très endettés. S’il faut venir passer des semaines à Ouagadougou sans même savoir quand nous serons payés, c’est grave’’, a-t-il clamé.

Une histoire de coffre-fort qui réveille d’autres problèmes

Du côté du ministère de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation (MEBA), l’on révèle que le retard est relatif à une question de coffre-fort. Le billetteur aurait été l’objet d’un cambriolage et aurait exigé ce matériel pour le stockage de l’argent avant de procéder au paiement. Le ministre en charge de l’Enseignement de base aurait écrit à son collègue des Finances afin que des solutions idoines soient trouvées à une situation qui perdure.

Aucun des billeteurs n’a voulu se prononcer pour confirmer ou infirmer les raisons avancées par le ministère. Au sein des instituteurs, les supputations vont bon train. Chacun va de son commentaire. Les esprits se surchauffent devant une attente qui paraît interminable et surtout sans la moindre explication officielle.

La galère actuelle de ces enseignants semble annoncer une longue absence de ceux-ci des classes dans les différentes écoles du pays. Les nouveaux maîtres que l’on qualifie tantôt d’enseignants PPTE (Programme pays pauvres très endettés), tantôt d’agents contractuels veulent profiter de la situation pour résoudre tous les problèmes qui rendent leur statut "flou’’.

Certains propos n’augurent pas une rentrée scolaire rassurante. "Depuis notre mandatement, il faut venir souffrir à chaque fin de mois pendant dix jours à Ouagadougou sous la pluie et le soleil avant d’obtenir son salaire", relèvent Yves Yélémou et Félix Zoungrana. Ils n’arrivent pas jusque-là à qualifier eux-mêmes le genre de fonctionnaire qu’ils constituent. "Nous étions traités au début d’enseignants PPTE. Lorsque nous avons eu nos décisions d’intégration, on nous a qualifiés d’agents contractuels sans indice. Comment un fonctionnaire peut-il évoluer efficacement dans sa carrière sans indice ?" s’interrogent-ils.

La journée mondiale de l’éducation sera célébrée le 5 octobre 2004 sans la participation d’un grand nombre d’instituteurs car la programmation pour leur paie couvre la période du 1er au 13 octobre 2004. Personne ne veut courir le risque de perdre son pécule. Car le communiqué du directeur de l’Administration des Finances (DAF) du MEBA, M. Isidore Lankoandé leur signifie que les salaires de ceux qui ne se présenteront pas à cette période là seront reversés au Trésor public.

Certaines écoles du pays recevront leurs instituteurs tardivement au mois de novembre 2004. "Avec le prêt que j’ai déjà contracté pour mon transport à Ouagadougou, je ne peux pas rejoindre tout de suite mon poste avec le peu d’argent qui me restera après mon paiement. Je vais alors attendre novembre avant d’y aller", ont indiqué de nombreux instituteurs adjoints certifiés (IAC).

Jolivet Emmaüs Sidibé
PAG BELEGUEM


Une mesure officielle ou une escroquerie passive ?

"Nous ne comprenons plus la décentralisation et la déconcentration que l’on chante à longueur de journée dans notre pays. Pourquoi les billeteurs provinciaux du MEBA ne peuvent pas nous payer dans les différentes localités ?" Ce sont des propos que les instituteurs adjoints certifiés (IAC) tiennent dans leur galère de sans salaire. Ceux-ci se plaignent de payer cher le transport de Ouagadougou pour se soumettre à l’opération de billetage.

Ils dénoncent également la somme de cent (100) francs CFA est prélevé sur chaque salaire pour des raisons qu’ils ignorent. "En province pour prendre ton bulletin seulement, il faut payer cinquante (50) francs. Quand c’est à Ouagadougou, le billeteur retient systématiquement cent (100) francs pour le salaire et le bulletin", ont soutenu L. B. Yves Yélémou et Félix Zoungrana.

La plupart des maîtres affirment être victimes d’un système d’escroquerie qui ne dit pas son nom. Nombreux sont ceux d’entre eux qui ont fourni des documents depuis trois mois pour faire virer leur salaire en vain. Ils estiment que ce refus est fait expressément pour ne pas qu’ils désertent le billetage. " On ne peut rien prévoir sur nos maigres salaires pour appuyer nos dossiers de virement à la solde. Imaginez 100 FCFA par personne sur environ 3000 enseignants. Cette somme peut qu’à même confectionner des coffres-forts. Mais on ne sait pas où elle va" ont-ils dénoncé.

Le MEBA semble ignorer l’existence de tels prélèvements sur les salaires pour le paiement et le retrait des bulletins. Les responsables ministériels évoquent même la rumeur pour justifier de telles accusations bien que les victimes bien que les victimes témoignent à visage découvert. Toutefois, le ministère souligne l’illégalité de telles pratiques et se dit prêt à sévir une fois que des preuves accablant un billeteur seront établies.

JESP
Sidwaya

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique