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Crise à l’université de Ouagadougou : Une succession de maladresses

Publié le lundi 7 juillet 2008 à 13h00min

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Le pouvoir burkinabè a eu la main lourde. Très lourde, trop lourde. En effet, il n’y a pas eu de demi-mesure dans le bras de fer qui a opposé la présidence de l’Université de Ouagadougou aux étudiants. Le ministère de tutelle des pensionnaires de Zogona a sorti la grosse artillerie, en procédant purement et simplement à la fermeture du temple du savoir et en privant les étudiants de tous les avantages liés à leur statut.

L’Université de Ouagadougou et celle de Ouaga 2 baissent donc les rideaux jusqu’à nouvel ordre. C’est une autre aventure dans laquelle se sont engagés les protagonistes, et en dépit des dénégations des autorités, c’est la pire des solutions.
Sauf miracle, en effet, les universités de Ouagadougou s’acheminent vers l’année invalidée, une situation aux conséquences désastreuses pour le système éducatif.

Alors, fallait-il en arriver à cette solution extrême ? Certainement pas, car dans cette affaire les protagonistes ont surtout fait preuve de mauvaise volonté. Guidés par leur orgueil, ils ont monté les enchères jusqu’au point de non-retour, alors qu’on créditait le gouvernement de lucidité pour éviter cette catastrophe. Les condamnations à des peines assorties de sursis des étudiants accusés de marche illégale et de destruction de biens publics avaient fait espérer que le pouvoir s’engageait dans la voie de l’apaisement. Finalement, ce sont les faucons qui ont dicté leur loi.

C’est pourquoi, s’il faut reprocher aux étudiants leur facile tentation à recourir à la grève alors que celle-ci devrait être une arme de dernière minute, on peut tout autant reprocher à la présidence de l’Université et au ministère en charge de l’Enseignement supérieur d’avoir manqué de tact dans la gestion de cette crise. Ainsi, si le reproche est fait aux structures estudiantines de ne pas respecter les textes de la république, le cas des responsables de l’université est encore plus grave. Ils peuvent être tenus coupables de la présence sur le campus des forces de troisième catégorie avec un respect approximatif de la procédure, avec pour conséquence l’usage d’armes à feu qui ont fait de nombreux blessés. Inutile de rendre la soldatesque responsable, car elle a agi en conformité avec sa mission.

En effet, quand l’armée est appelée à la rescousse, c’est que les deux premières forces ont été débordées. Si donc la police et la gendarmerie n’étaient pas capables de contenir les étudiants, c’est qu’il y avait vraiment péril en la demeure... ce qui était loin d’être le cas à l’Université de Ouagadougou, pour que les militaires utilisent leur arsenal de guerre pour rétablir l’ordre. Il est regrettable que le Professeur Jean Koulidiati ait été défaillant dans le management de sa toute première difficulté, alors que le gouvernement avait fondé beaucoup d’espoir sur lui pour apaiser le climat social sur le campus universitaire de Zogona.

La tentative de diabolisation dont est l’objet l’Aneb, l’une des structures syndicales les plus remuantes, ne produit que l’effet inverse. Vouloir tout ramener à la manipulation politicienne est une grave fuite en avant qui ne fait que compliquer les données du problème, rendant encore plus difficile la recherche de solutions. Si le pouvoir pense pouvoir gagner du temps en remettant les problèmes à plus tard, le ministre Joseph Paré sait certainement mieux que quiconque qu’il ne dispose d’aucun répit. Il faut maintenant craindre que l’arrivée de nouveaux bacheliers qui gonflera les effectifs et par conséquent reposeront l’insuffisance des infrastructures d’accueil n’en rajoute à la crise.

Koulidiati, en bon Gourmantché, a tout intérêt à taper le bon sable, s’il ne veut pas que ses jours soient comptés à la présidence de l’Université, en dépit du supposé ou réel lien solide qui le lie au grand manitou.

Adam Igor

Journal du jeudi

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