Une très bonne initiative, surtout que le président de l’Association jure qu’en payant ses impôts, le contribuable lambda s’enrichit.

Sur la banderole affichée dans la salle de conférences de la Chambre de commerce, des slogans qui laissent plus d’un lecteur incrédule, surtout s’il est un commerçant qui officiait à Rood Woko : Comme, « Payer ses impôts, rien que ses impôts, c’est s’enrichir ». Ou cet autre : « Respecter ses obligations fiscales, c’est éviter les pénalités, c’est s’enrichir ». En somme, des mots d’ordre où le civisme fiscal est associé à l’opulence. Des préceptes concoctés à l’occasion des Journées du civisme, initiées par l’Association professionnelle des experts et conseils fiscaux (APECF).

Dieudonné Yaméogo, ancien DG des Impôts, aujourd’hui président de cette association qui a été créée en 2004, explique leur bien-fondé, en faisant un parallèle avec la célèbre citation, tout aussi sujette à caution, qui stipule que celui qui paie ses dettes s’enrichit : « L’impôt est une prestation prélevée d’autorité. Par conséquent, c’est une obligation, et non payé, il devient une dette vis-à-vis de l’Administration.

Et celui qui ne paie pas à la bonne date encourt des pénalités. Si vous deviez 100 francs et que vous accusez un retard, on vient vous ajouter 100 autres francs de pénalités. Vous devez maintenant 200 francs CFA. Mais si vous aviez payé à temps, vous auriez économisé 100 francs. A notre avis, celui qui s’acquitte de ses impôts à bonne échéance s’enrichit ».

« Feinter les impôts. Le sport favori de beaucoup »

Comme s’ils voulaient donc rendre les contribuables plus riches, l’APECF a décidé de l’organisation de ces Journées du civisme fiscal, du 14 au 16 mars 2007, qui ont démarré sur les chapeaux de roue le 14 mars 2007 avec une conférence de presse portant sur les différentes activités à l’ordre du jour. L’association est composée d’une quinzaine de cabinets de conseils dans le domaine fiscal. Mais le visiteur d’une journée peut bien se demander ce que recherchent ses membres officiant dans le privé à travers cette initiative.

Ne sont-ils pas par ailleurs en train de battre campagne pour l’Administration, qui engrange les sommes dues par les principaux usagers de nos « Hôtels des Finances » et autres « Perceptions » disséminées à travers notre pays ? Le président de l’APECF a une réponse non équivoque pour tempérer cette vision. Lui et les siens ne prêchent pour aucune chapelle et font plutôt une œuvre citoyenne. « Nous ne prenons pas la place de l’Etat. C’est une complémentarité et vous constaterez que pendant la table ronde, l’Administration y sera présente ». Ce n’est donc qu’un sacerdoce.

Ou presque... Si l’on considère que les clients de ces cabinets, spécialisés dans le conseil sur la fiscalité, ne se comptent pas parmi ceux dont le sport favori est de dribbler les impôts. N’est-ce pas pour ces membres de l’association, une manière (détournée ou indirecte) de se faire plus de clients ? Le président de l’association explique avant de concéder : « Nos journées ne sont pas programmées pour cela. Même s’il est évident que plus il y a du civisme, plus les gens feront recours à nous. Ceux qui sont dans l’incivisme fiscal ne nous font pas appel. Nos clients sont en général des contribuables civiques ».

Hier, après la cérémonie d’ouverture, une table ronde a été organisée avec pour thème « Promouvoir le civisme fiscal : quelle contribution des différents acteurs de la vie nationale ? ». Dans l’après-midi du même jour, ont démarré les consultations gratuites qui sont assurées par les membres de l’APECF. Ces audiences se poursuivent en principe aujourd’hui. Que les commerçants et entrepreneurs de tous bords, qui veulent être dans les secrets du dieu Impôts aillent donc consulter. Surtout que c’est un service entièrement gratuit, hors-taxes et hors-douanes.

Issa K. Barry

L’Observateur Paalga