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Migration au Burkina : Y a-t-il une politique en la matière ?

Publié le jeudi 13 avril 2006 à 08h37min

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Après le thème sur le secteur informel, la télévision Canal 3 a choisi cette fois de débattre, avec ses invités, au Centre culturel français de Ouagadougou, de la migration au Burkina Faso. Une émission riche en enseignements, qui avait l’allure d’un débat entre opposition et pouvoir.

"Le Burkina Faso et le monde. La migration et la diaspora". Tel était le libellé du thème de l’émission télévisuelle de Canal 3, animée par Remy Dandjinou.

Autour de la table, il y avait d’un côté des professeurs d’université, notamment Albert Ouédraogo, Dieudonné Ouédraogo et Ram Christophe Sawadogo, qui avaient à peu près la même vision, et de l’autre, Lompo Jamano de la Commission nationale de l’intégration, Sibiri Michel Ouédraogo, secrétaire permanent du Burkinabè de l’étranger, et Martial Ouédraogo, rapatrié de Côte d’Ivoire devenu chef d’entreprise.

Tout comme leur disposition autour de la table avec l’animateur au milieu, il y avait jusqu’à la fin de l’émission deux camps. Les enseignants d’université jouaient leur rôle d’intellectuels et les autres, donnaient l’impression d’être venus pour défendre les autorités burkinabè sur un sujet où elles n’ont pas véritablement fait grand chose : la politique de migration, le vote des Burkinabè de l’extérieur, etc.

Le thème comportait, trois volets, à savoir : l’émigration, la diaspora et le retour au bercail de nos ressortissants à l’étranger.

C’est le Pr Dieudonné Ouédraogo qui a ouvert le bal par un bref aperçu historique sur l’émigration, qui a connu "un choc" sous la colonisation. L’on retiendra de son intervention que 6 à 7 millions de Burkinabè vivent à l’étranger, dont la moitié en Côte d’Ivoire.

Ces migrations ont des retombées économiques pour notre pays. Et Ram Christophe Sawadogo d’indiquer que de 1975 à 1992, 22 milliards de FCFA étaient en moyenne rapatriés annuellement au Burkina et qu’il y a eu des années où l’on a recueilli entre 50 et 60 milliards de francs. Jamano Lompo, document à l’appui, ajoutera que le chiffre oscille entre 31 et 55 milliards.

Des visions divergentes

Le débat devient houleux avec la question de la politique de migration et le vote des Burkinabè de l’étranger. Alors que Lompo, Sibiri et Martial tentent d’expliquer que le gouvernement mène des actions dans ce sens, Albert Ouédraogo reste intransigeant et démontre que ces actions ponctuelles ne constituent nullement une politique.

Il a indiqué qu’un atelier avait déjà été initié sur le sujet, mais que le projet a, entre temps, disparu. Pour avoir vécu en Côte d’Ivoire et fort de l’expérience du Tocsin, Albert Ouédraogo disposait de beaucoup d’éléments d’appréciations sur la situation de nos compatriotes à l’extérieur.

Ses explications et ses arguments semblaient convaincre l’assistance au regard des réactions des uns et des autres. Surtout des femmes rapatriées de Côte d’Ivoire, présentes dans la salle.

Ram Christophe Sawadogo soutiendra son collègue en soulignant qu’il faut reconnaître qu’il y a énormément d’insuffisances à corriger pour asseoir une véritable politique de la migration.

Même débat houleux et même attitude des deux camps quand il s’est agi du vote de nos compatriotes vivant hors du territoire national. Tandis que Sibiri Michel Ouédraogo et Lompo évoquaient des difficultés d’ordres financier, matériel et sécuritaire, Albert Ouédraogo soutenait que des pays moins nantis que le Burkina l’ont fait.

Le dernier point abordé était le retour des migrants. Quelle est leur place dans la société burkinabè ? Le constat a été fait qu’une fois de retour, on les désigne par le terme péjoratif de Kaoswéogo (celui qui a duré en brousse ou dans la forêt, en mooré). Le terme "diaspo", fréquent sur le campus, qui qualifie les étudiants burkinabè venus de la Côte d’Ivoire, a également été critiqué.

Albert Ouédraogo a martelé que cette appellation est à proscrire, car dangereuse pour la paix. Il en veut pour preuve les nombreux conflits à l’université de Ouaga entre les "diaspo" et les "tenga". "Dans 10 ans, ces gens-là peuvent constituer l’élite", prévient-il.

Le migrant, qui est parti sans rien, revient au pays avec des connaissances qui ne sont pas souvent valorisées. D’où la nécessité de mettre en place une politique qui prenne en compte tous ces aspects afin que des rapatriés puissent devenir chefs d’entreprise comme Martial Ouédraogo.

Adama Ouédraogo Damiss

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 17 avril 2006 à 14:35, par Armand En réponse à : > Migration au Burkina : Y a-t-il une politique en la matière ?

    Personnellement je trouve aussi que l’Etat burkinabé n’a aucune politique en matière de migration.Nous étudiants vivant hors du Burkina avons eu un débat recemment avec notre ambassadeur en place ici et il n’avait qu’un seul argument : le Conseil Supérieur des Burkinabés de l’Etranger(CSBE), structure dont la plupart n’avait jamais entendu parlé.Pour toutes les autres questions il ne fesait que tourner autour du pot. En lisant l’article je suppose que c’était assez dure pour ceux qui avait la charge de défendre l’Etat.La vérité est qu’il n’ya pas de politique de migration.Comment peut-on défendre une chose qui n’existe pas. Il vaut mieux reconnaitre ses tords et se servire des critiques pour mieux faire.

    • Le 17 avril 2006 à 19:49 En réponse à : > Migration au Burkina : Y a-t-il une politique en la matière ?

      Mon frere, le sous developpement de nos pays, et du Burkina en particulier, est largement du au sous emploi de nos ressources et opportunites. Et s’agissant de politique de migration au Burkina, les chiffres crevent les yeux mais les autorites semblent avoir d’autres chats a fouetter. Si les autorites du pays ne s’en soucient pas c’est qu’il y a de l’ignorance ou de la mauvaise volonte quelque part. Et je dirai qu’il y a meme comme une certaine injustice a negliger cette diaspora Burkina qui participe enorment de fait a la construction du pays. Le cas de la participation au vote, au moins dans certains pays ou le nombre des Burkinabes est tres important, est une violation de leurs droits civiles et politiques qu’on ne cesse de justifier par des raisons financieres.

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