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Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

Publié le vendredi 4 août 2023 à 11h41min

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Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

Dans cette tribune adressée au Président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré, Maître Arnaud Ouédraogo l’interpelle sur sa responsabilité sur la Justice. L’homme de droit rappelle au Chef de l’Etat le serment qu’il a prêté devant le Conseil constitutionnel qui lui l’absout d’avoir renversé l’ordre constitutionnel. Et en contrepartie, explique-t-il, la Justice est devenue la branche sur laquelle il est assis et qu’il ne doit pas scier. L’intégralité de son analyse dans la suite de la Tribune.

Monsieur le Président du Faso,

Je voudrais m’adresser à vous en toute responsabilité et avec ma plus parfaite considération. En tant que gardien de la République, je suis dans le devoir de prendre la parole quand la Justice est en cause.

De mon humble expérience en tant que serviteur de la Justice, je peux vous assurer que la mystique de la Justice est supérieure à toutes les autres mystiques. Ceux qui vivent au quotidien dans l’intimité de la Justice vous diront que c’est avec tremblement qu’ils la servent.

Lorsque vous leviez la main droite pour jurer devant le Conseil constitutionnel, vous accomplissiez un acte profondément sacré. La main levée vers le ciel est une survivance du lien entre les institutions de la République et le divin.

Le magistrat Antoine GARAPON décrit parfaitement cela dans son Essai sur le rituel judiciaire : « Celui qui prête serment donne sa personne en otage à la divinité contre la reconnaissance de la vérité de ses propos ».

Toutes les fois que vous serez face à un choix difficile, rappelez-vous les valeurs cardinales qui ont fertilisé le parcours et le destin de ce peuple : Unité nationale, Intégrité, Liberté, Vérité, Justice, Refus du pouvoir personnel, Autorité de la loi, Respect de la vie, Respect de la parole donnée. Ce sont ces valeurs cardinales qui font de nous un peuple. Sans elles, le sens de toute chose est perdu.

Alors, je vous en conjure : ne laissez personne vous faire croire qu’une autre mystique pourrait prévaloir sur votre serment et sur la mystique de la Justice. Je sais que des hommes vous poussent à la faute mais ils vous trompent comme ils ont trompé vos prédécesseurs. Ce serait une erreur dans laquelle je ne vous engagerai jamais.

Le peuple burkinabè est le peuple le plus charmant au monde. Je l’ai servi avec fierté. Mais c’est un peuple qu’il est difficile de cerner « politiquement ». N’oubliez pas que des gens ont acclamé vos prédécesseurs dans leur erreur jusque à la chute. La politique a rendu tout le monde hypocrite. Au point que la vérité passe pour un délit.

S’il y avait un seul exorcisme à faire contre la malédiction qui semble suivre tous ceux qui s’asseyent sur le trône au Burkina Faso, ce serait le droit et la justice qui offriraient le moyen de cet exorcisme dans la République. Tout le reste est inconsistant.

On sait que chaque régime politique a deux temps. Le premier temps est le temps de l’euphorie des promesses. Le second temps révèle les contradictions entre les intentions et les actes ainsi que le choc des égos. C’est pourquoi je vous engage à faire l’autocritique de votre régime sans vous enfermer dans des certitudes. C’est le meilleur moyen d’arrêter, une fois pour toutes, l’interminable « syndrome de la rectification ».

Par votre serment devant le Conseil constitutionnel, qui vous a absout d’avoir renversé l’ordre constitutionnel, vous ne tenez plus votre pouvoir des armes. En contrepartie, la justice est devenue la branche sur laquelle votre pouvoir est assis. Alors, ne sciez pas la branche.

Je vous parle en toute sincérité.

Me Arnaud OUEDRAOGO
Avocat

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Vos commentaires

  • Le 4 août 2023 à 14:57, par A qui la faute ? En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    «  le Conseil constitutionnel qui lui l’absout d’avoir renversé l’ordre constitutionnel  »
    ça c’est une information. ça veut dire que les gens assassinés pendant les coups d’Etat c’est un cadeau que la justice fait aux différents putschistes ?
    Aidez-moi à comprendre

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  • Le 4 août 2023 à 15:02, par Leduc En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Maître OUEDRAOGO a été, comme à son habitude, clairvoyant et profond. Vous aurez joué votre partition.

    Maintenant, en dépit du fait que je soutienne le capitaine TRAORE et la transition qu’il dirige, je suis certain que, s il permet ou se permet de saboter la justice malgré ces interpellations, il va décevoir et sera lui-même déçu. Pourtant je ne souhaite pas qu’il connaisse ce sort, non seulement pour le fait qu’il ait décidé de sacrifier sa jeunesse pour son pays mais aussi pour l espoir qu’il suscite pour le pays et son peuple. Alors il faudrait qu’il corrige sa première grosse erreur en faisant réintégrer la guérisseuse. L intérêt d une seule personne ou les égos de quelques individus ne sauraient amener un chef d État à sacrifier sa nation. Si cela arrivait, on reconnaîtra l erreur d avoir crû trop tôt en lui.

    En plus, au delà de ces considérations et même si le Gouvernement a décidé de défendre ses seuls intérêts ou ceux de quelques individus, sachant bien que les mêmes causes produisent les mêmes effets, comment il peut déjà oublier ce qui a entraîné ou précipité la chute du président DAMIBA.

    Sachons qu aucun dirigeant n est aussi fort pour ne pas chuter. Il faut simplement qu’il évite les erreurs grossières.

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  • Le 4 août 2023 à 15:04, par Mon Faso En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Merci bien, Maitre pour la pertinence de l’analyse. Si jamais ce scandale judiciaire (affaire guérisseuse de Komsilga) n’est pas réglé, cela sera le 2eme scandale majeur au compte du régime de IB. le 1er étant le massacre de Karma

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  • Le 4 août 2023 à 15:37, par LE FORGERON En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Bonjour,

    Nous pensons qu’il va falloir une réforme profonde de notre justice car il y a trop de problèmes dans ce domaine qui engendre la corruption et une grande délinquance des jeunes. Les reformes pourraient être :
    1- recruter beaucoup de magistrats afin d’accélérer la procédure judiciaire et du même coup réduire le temps de traitement des dossiers à juger. Exemple vous pouvez trouver des gens déposés à la MACO pendant 1 à 3 mois sans jugement. Ce n’est pas normal car la plupart sont des jeunes (bras valides) qui doivent travailler pour le développement de la Nation. Celui qui veut peut aller vérifier cela à la MACO avec les GSP. Et le comble ces derniers après jugement sont condamnés avec sursis ou souvent même blanchis alors qu’ils ont déjà purgé la prison ferme avant leur jugement. Cela entraine la révolte de ces jeunes. Ce retard se justifie souvent par le nombre croissant de dossiers à traiter par un nombre très réduit de magistrats. Par conséquent il faut recruter beaucoup de magistrats car il y a des jeunes étudiants qui ont la maîtrise en droit qui sont au chômage.
    2- Informatiser le processus judiciaire depuis la réception de la plainte jusqu’à la délibération finale en passant par l’affection du dossier, le suivi des délais de traitement qui doivent être définis en fonction des degrés de fautes. Exemple tout mandat de dépôt ne doit pas faire 25 jours sans jugement car les enquêtes doivent suivre et vite le processus. Après les 25 jours sans jugement le mandat de dépôt est annulé et l’individu bénéficie automatiquement de liberté provisoire pour vaquer à ses occupations en attendant le jugement. Car l’individu qui en prison ne peut plus exercer son commerce s’il est commerçant ou ses activités agricoles s’il est agriculteur. Par conséquent sa famille souffrira s’il est père de famille ou bras valide de la famille. L’informatisation permettra de savoir combien de dossiers chaque magistrat traite par période donnée et les magistrats qui trainent avec les dossiers. Car si nous prenons un dossier qu’on doit juger comme un projet alors plus le projet dure, le coût du projet augmente du côté de l’état et du côté de la famille de l’individu déposé à la MACO. Sa famille met de l’essence pour le rendre visite et laisser le travail pour ce déplacement et autres. C’est cette lenteur qui entraine la corruption car chacun veut avoir son dossier programmé le premier. Les pauvres seront toujours en dernière position car n’ayant pas beaucoup d’argent prendre prendre les bons avocats.
    3- rendre publique le code pénal et les autres lois concernant la justice dans les différentes langues locales à la RTB, les différentes presses publiques et privées. Car la phrase, "nul n’est censé ignorer la loi" ne tient pas dans un pays où presque la moitié de la population est analphabète.
    4-commencer à sanctionner ouvertement les erreurs de jugement (retirer certains magistrats, avocats, et autres qui commettent des fautes répétitives de jugement). Par exemple : si un juge délibère et donne un mauvais verdict une fois, deux fois, trois fois alors la quatrième fois sera son dernier jugement car on doit le démettre de ses fonctions de magistrat. Il en est de même pour les procédures judiciaires car nous ne pouvons pas comprendre que des (deux) gens qui ont fait les mêmes études de droit : un suit les procédures et lance un "mandat d’arrêt international" et l’autre vient démontrer que le premier n’a pas bien suivi la procédure et annule le mandat d’arrêt international et il n’ y a pas de sanction pour le premier. C’est une honte pour la justice burkinabè et il faut corriger ces cas d’erreur par des sanctions.
    5- construire dans chaque région une prison de réinsertion comme BAPORO et vider toutes les maisons d’arrêt, MACO surtout de ces jeunes bras valides qui seront volontaires dans ces prisons de réinsertion afin de les former dans les métiers comme l’élevage, l’agriculture, la maçonnerie et autres , et réduire la durée de leur peine. Exemple si c’était un an de prison ferme alors on fait 6 mois de réinsertion dont 4 mois de travaux pour l’état et 2 mois de travaux pour son capital de réinsertion dans la vie active. Nous sommes sûr que beaucoup de jeunes prisonniers seront volontaires et partiront dans ces maisons de réinsertion. Et cela pourra nous conduire vers l’autosuffisance alimentaire car ces jeunes bras valides que l’état nourrit gratuitement travailleront pour la nation et pour eux-mêmes avant de s’installer dans leur propre compte.

    Ces 5 reformes pourraient être un début de résolution du problème de notre justice burkinabè qui traine une lenteur inacceptable car les dossiers trainent pour être jugés. Et cela occasionne des corruptions dans les traitements des dossiers alors qu’il y a beaucoup de jeunes diplômés en maitrise de droit qui chôment.

    Nous pensons aussi que les magistrats doivent nous épargner des grèves inutiles comme celle qui en vigueur. En effet la grève commencée par les magistrats ces derniers temps ne s’explique pas car s’il y a obstruction à la procédure judiciaire alors le magistrat concerné pouvait poser plainte "obstruction à magistrat" contre les personnes concernées au lieu de décréter une grève et bloquer les dossiers qui sont déjà en retard. Les magistrats n’ont pas pensé au dégâts collatéraux ou bien les magistrats veulent faire du chantage ?

    Notre justice a des problèmes sérieux et il va falloir la reformer sérieusement.

    La Patrie ou la mort, Nous vaincrons !!!!!!!!

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  • Le 4 août 2023 à 15:54, par Danton En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Tu sais bien qu’il n’est pas ’’Président du Faso’’, alors comment veux-tu qu’il t’entende ? Pourquoi le Burkinabe même est comme cela ?

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  • Le 4 août 2023 à 17:44, par momine En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    la dame est une proie trop facile que les juges s’acharne pour bondir dessus.il y a des proies difficile a prendre que les juges n’osent s’en prendre.Alors monsieurs les juges ne fermer pas les yeux et les bouches lors qu’il faut s’attaquer a de gros jubiers.c’est ca aussi la justice.

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  • Le 4 août 2023 à 17:57, par Lui En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    "Par votre serment devant le Conseil constitutionnel, qui vous a absout d’avoir renversé l’ordre constitutionnel, vous ne tenez plus votre pouvoir des armes."

    Je ne comprends plus rien dans ce pays. Est ce la peur ou la mauvaise foi ou bien vous faites semblant ? Vous trouvez normal et sans protestation que le plus grand juge d’un pays ait absout quelqu’un qui a violé la loi fondamentale du pays et vous trouvez anormal et illogique ce qui s’est passé au palais de justice. Entre faire un coup d’etat et faire liberer une prisonniere, quel est l’acte qui est plus grave du point de vu penal ? Les militaires qui sont rentrés dans le palais de justice avec des vehicules de guerre pour liberer Adja l’on fait parce qu’ils se disent que ce sont des militaires (ou bien eux) qui ont pris le pouvoir avec des armes pour gerer et les gardiens de la loi l’ont accepté, ce qui est logique !

    C’est pourquoi on dit toujours que toute compromission se paie car ça fera toujours un precedent ! L’habitude est une seconde nature.

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  • Le 4 août 2023 à 18:37, par Victoria En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Mimine , le problème n’est pas que la dame soit une proie facile ou pas mais l’attitude de IB et de son gouvernement face au sujet. C’est une attitude très grave pour un si petit problème.

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  • Le 4 août 2023 à 21:50, par Gilbert Jérémie OKE En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Je partage entièrement l’analyse de Me Arnaud OUEDRAOGO. Le sensationnel doit céder place à la justice. Le président de transition du Burkina Faso nourrit assez d’espoir dans l’émotion â laquelle il faut faire très attention car nos réalités Socio politiques risquent de rattraper cette émotion populaire dans laquelle baigne Monsieur le Président

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  • Le 8 août 2023 à 16:06, par Black En réponse à : Burkina : Me Arnaud Ouédraogo appelle le président Ibrahim Traoré à ne pas scier la branche de la justice

    Internaute Victoria sachiez que IB est le premier juge du BURKINA et il a parlé dans l’intérêt national.ne vous acharnez pas sur le président pour rien.VIVE LE CAPITAINE IBRAHIM TRAORÉ UN VRAI PATRIOTE ET LOYAL QUI SERT LE BURKINA AVEC DIGNITÉ.VIVE LES FDS ET LES VDP QUI SONT EN COMBAT CONTRE L’ENNEMI.

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