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Le président chinois en France : Pour un rééquilibrage des relations internationales

Publié le jeudi 29 janvier 2004 à 06h07min

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Nonobstant les griefs qui les opposent sur leur conception de la démocratie et des droits humains, le président français, Jacques Chirac a reçu en grande pompe, son homologue chinois Hu Juntao, pour une visite d’Etat en France. Une "convergence de vues" parfaite aurait marqué les échanges entre Chinois et Français. Ce qui, dans l’atmosphère délétère dans laquelle s’est déroulée cette visite, demande quelques explications.

Le déclenchement de la campagne d’Irak tout en marquant l’unilatéralisme américain, a montré au reste des "grands" de la planète (Russie, Europe, Chine), le fossé abyssal qui les sépare désormais de"logre" américain. Puissance militairement, l’Amérique l’est elle dont le projet de "bouclier nucléaire" n’a pas d’égal au monde.

De même, en déclarant récemment qu’il s’apprêtait à faire de la lune un "pied à terre" pour conquérir la planète Mars (alors qu’on est sans nouvelle de la sonde européenne envoyée sur la planète rouge) Bush montre aux autres qu’ils ne bossent dorénavant pas dans la même catégorie. Cette toute puissance de l’Amérique, intervient à un moment où l’Europe est en bute à des contradictions internes, sur fond de non-respect du pacte de stabilité.

L’élargissement progressif de l’Europe (de 6 à 25 membres) s’est effectuée, en faisant l’impasse sur l’inadéquation croissante des procédures de décision. L’échec du récent Sommet européen qui devait adopter la nouvelle constitution est symptomatique, de cette assertion. "Sans souffle, sans perspectives émancipatrices, l’Union européenne risque de se transformer en simple gestionnaire administratif du marché" (Le Monde diplomatique de janvier 2004).

La France qui veut se doter d’un "destin mondial", souffre de cette situation et, à défaut de s’en affranchir, veut en alléger le "joug". Seule, elle n’en est pas capable, et son alliance avec l’Allemagne a du plomb dans l’aile du fait du renchérissement de l’euro par rapport au dollar. Ce qui était d’abord perçu comme une tendance passagère, tend à devenir une "habitude" , ce qui a le don d’alourdir le coût des exportations européennes.

La Chine comme arbitre ?

Il faut donc tisser des alliances avec tous ceux que l’unilatéralisme et la "prédation" économique des USA gênent. Pékin est un bon allié pour ce faire, car la Chine voit d’un mauvais œil "l’invasion" américaine en Asie du Sud-Est (Thaïlande, Cambodge...) et Centrale (Afghanistan). Les discussions ont été axées sur comment "combattre l’unilatéralisme", développer les échanges économiques (au passage Juntao a acheté 21 Airbus) et intensifier les échanges culturels pour favoriser la "compréhension".

Ce dernier point n’est pas anodin, car les adversaires de cette visite, avaient pour principal argument le "non-respect" par la Chine des droits de l’Homme. C’est un problème de "compréhension", a rétorqué le président chinois, arguant que son pays respectait les droits humains, dans leur "acceptation chinoise" en tout cas. Les politiques et les éditorialistes peuvent se "ruer" dans les brancards, cela n’a pas empêché Jacques Chirac d’être aux petits soins de son hôte chinois.

Et, pour montrer qu’elle avait envie de jouer à nouveau dans la cour des grands, la France recevait dans le même temps, le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan. Un "adepte" lui aussi du multilatéralisme qui n’a pas manqué de rendre visite aux dirigeants du "Pacte mondial des entreprises", organisation qui prône, "l’éthique" dans les relations économiques internationales. Une autre "pique" en direction des USA qui ne s’embarrasse plus des règles du commerce international.

Cette visite rentre donc dans le cadre de la "guerre" asymétrique que se livrent les super grands, depuis la chute du mur de Berlin et la fin du choc des idéologies.

Elle démontre aussi la force de la Chine, pays le plus promoteur des prochaines décennies. Avec son vaste marché économique (plus d’un milliard de consommateurs) sa poussée technologique (recherche spatiale) et sa "discipline", la Chine se positionne comme la puissance de demain. Son président peut donc se permettre de faire la sourde oreille sur la question des droits de l’Homme, sûr qu’il est de son "incontournabilité" pour l’Europe.

A contrario, la France apparaît comme une puissance "moyenne", incapable de peser seule, comme jadis, sur les relations internationales. L’Afrique n’étant plus sa seule chasse gardée, Paris a besoin de nouveaux horizons pour rebondir. En choisissant la Chine comme "arbitre" du rééquilibrage souhaité, la France a fait le choix de la raison. Reste à savoir si elle a fait le bon choix au vu du fossé qui la sépare de la Chine sur des questions principales d’importance. L’avenir nous le dira.

Boubacar SY
Sidwaya

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