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Communalisation générale : Allons-y mais avec précaution !

Publié le lundi 19 septembre 2005 à 06h39min

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A écouter les uns et les autres, surtout la classe politique dans toutes ses tendances, on ne voit que la présidentielle de novembre 2005. Dans les débats il n’est question que de la candidature de Blaise Compaoré, des affaires d’argent et récemment du sondage du Centre pour la gouvernance démocratique sur les intentions de vote des Burkinabè à la prochaine élection présidentielle.

Cette échéance électorale, aussi importante soit-elle, ne devrait pas éclipser autant les élections municipales de février 2006.

La rencontre des 16 et 17 septembre derniers à Ouagadougou, la première du genre, entre députés et conseillers municipaux sur la place et le rôle des élus dans l’émergence d’une nouvelle citoyenneté est à saluer, ne serait-ce que pour la pertinence du sujet de leurs débats. Ce qui nous intéresse surtout, c’est la question de la décentralisation, de la communalisation générale du pays qui sera en vigueur l’année prochaine avec ses inévitables difficultés. On pourrait bien rétorquer qu’une entreprise politique d’une telle ampleur ne saurait s’opérer sans problèmes majeurs.

Pour sûr, une communalisation réussie peut transformer qualitativement la société burkinabè sur les plans politique, économique et social. C’est une des raisons pour lesquelles la politique de décentralisation doit être plus présente dans les débats. Elle devrait d’autant plus l’être que la communalisation du pays a commencé depuis la période coloniale à travers Bobo-Dioulasso et Ouagadougou. Elle touche aujourd’hui environ une cinquantaine de centres urbains pour près de 2 225 000 habitants. L’objectif final est d’atteindre toutes les populations burkinabè, donc de donner la possibilité aux citoyens depuis la base de créer l’environnement dans lequel ils veulent vivre à partir des réalités de leurs terroirs, de leurs zones. Les intérêts locaux devraient être mieux défendus

La volonté de l’Etat de réussir existe. Mais il y a les difficultés à la communalisation. A la lumière de la gestion de certaines communes urbaines, on se rend compte que le processus est de plus en plus connu et accepté. On se rend aussi compte que les partenaires restent toujours disponibles. Mais jusqu’à quand ? Le plus préoccupant, c’est l’insuffisance des ressources humaines et financières face aux nombreuses charges et obligations. Tout aussi préoccupant est le poste peu enviable de maire dans des communes où le putsch est le moyen le plus utilisé pour l’alternance. Cette situation mérite qu’on s’y intéresse car elle est la traduction de l’immaturité de certains conseillers municipaux pour lesquels la gestion de la commune doit générer, entre autres, des intérêts particuliers.

A ces difficultés s’ajoutent bien d’autres, telle la pauvreté de la population qu’on ne peut démocratiser encore moins partager. Une commune matériellement et financièrement dépourvue peut-elle bénéficier de la sollicitude des autres ? Ne doit-on pas craindre que l’Etat ne touche au budget de certaines communes ? Comment intégrer développement national et régional en tenant compte des disparités économiques sans frustrer quiconque ?

L’analphabétisme est aussi un problème parce que les populations ont besoin de s’approprier le concept de la décentralisation ou de manière précise de la communalisation, ceci pourrait éviter de conduire à la tête des communes des "potentats locaux" avec toutes les dérives que cela peut engendrer.

L’énumération de toutes ces difficultés nous conduit à nous poser ces questions : n’allons-nous pas trop vite dans notre processus de décentralisation ? La communalisation générale sera-t-elle viable sans un minimum de ressources humaines et financières ? Peut-on et doit-on compter sur des bailleurs de fonds pendant longtemps pour un projet d’une telle ampleur ? Toutes ces interrogations sont liées à nos appréhensions mais aussi à notre souhait de voir ce projet aussi noble dans ses objectifs se concrétiser.

Pour que le processus de décentralisation, dont la pertinence n’est plus à démontrer, suive, il faut que l’Etat reste vigilant. S’il est admis qu’une politique de décentralisation bien pensée peut qualitativement transformer la société burkinabè, il faut bien y aller mais avec précaution pour éviter les tâtonnements ou les marche-arrières. Le plus long chemin commence toujours par un pas dit-on, fut-il difficile à franchir.

Bessia BABOUE
Sidwaya

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