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Les poulets de Yako : "Gouttez et vous reviendrez"

Publié le mercredi 10 août 2005 à 07h50min

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Parmi les mets qu’offre la ville de Yako à tout ses visiteurs, figurent en bonne place les poulets et les pintades. Et aux dires des amateurs, "les poulets de Yako", si vous les gouttez, vous en réclamerez irrésistiblement...

Le visiteur qui traverse la ville de Yako ne peut s’empêcher de jeter un regard attractif sur les vendeurs de gallinacés situés aux abords de la route principale, juste à l’ancienne gare routière. Et si vous ne venez pas à eux, ce sont eux qui vous rejoindront avec une bassine chargée de poulets ou de pintades rôtis, braisés ou grillés.
A peine un véhicule personnel ou de transport a eu le temps de s’immobiliser que les occupants sont envahis par "un essaim" de vendeurs bien décidés à "écouler" leurs marchandises.

Chacun se défend de détenir le meilleur poulet et le moins cher, cuit le même jour, chaque détail étant important. Tout est mis en œuvre pour mettre l’eau à la bouche du client : exposition de poulets les plus gros et les plus gras, fois et gésiers rôtis prêts à être consommés, ... rien ne semble être laissé au hasard car le client devra mordre à l’hameçon.

Les techniques de vente

Parmi les vendeurs qui approchent les clients, Amado Sawadogo semble se distinguer tellement, il n’éprouve aucune difficulté à courir de véhicule en véhicule avec une bassine de poulets rôtis qu’il tient solidement avec son bras gauche. Jeune homme d’une vingtaine d’années, son allure de sportif lui permet d’être alerte et vif. Il prend toujours une avance sur ses collègues lorsqu’un véhicule s’arrête et ne perd pas de temps pour rejoindre un autre véhicule lorsqu’il constate la réticence des clients.

D’un pas rapide et précis, Amado Sawadogo suit avec intérêt le ballet incessant de véhicules venant de Ouagadougou ou de Ouahigouya pour bondir et être le premier sur les lieux "je prends le soin de bien aromatiser les poulets afin de leur donner un goût spécial qui n’existe chez aucun autre vendeur. Cela semble plaire aux clients puisqu’ils en redemandent après avoir goutté", affirme-t-il avec assurance. Sa clientèle, il la recherche auprès des "visiteurs" de passage à Yako.

Les autochtones semblent ne pas se bousculer pour s’arracher ces grillades. Ils préfèrent plutôt acheter les poulets vivants venus des villages environnants pour en faire une soupe. Amado Sawadogo nous a confié avec un large sourire qu’il ne vend plus assez de poulets depuis un certain temps et comptait laisser tomber ce boulot pour aller "se chercher" très prochainement à Kampti. Amidou Sinon, lui, n’utilise pas la même approche que Sawadogo. Perché derrière son matériel de cuisson et occupé à tourner et à retourner les poulets, il attend avec sérénité que les clients viennent à lui. Son expérience de 3 ans dans cette activité lui a développé le flair si bien qu’il sait répérer les clients, les attirer, les captiver avant de les convaincre à acheter ses poulets. Amidou Sinon, très bavard, saisit chaque occasion pour venter les mérites de sa marchandise. Ses poulets sont étalés avec soin après cuisson sans ôter leur tête. Il veut ainsi confirmer à qui vend le savoir qu’il ne vend pas de charognards. "Nous avons été accusés à tort de vendre la viande de charognard, chose que nous n’avons jamais osé faire," déclare t-il.

Cette rumeur a influencé négativement la vente de poulets de Sinon. Il a trouvé cette solution pour rebondir et depuis lors, son commerce aurait pris un nouvel envol. Si cela ne convainc toujours pas les plus sceptiques, Amidou Sinon les dirige vers une concession située derrière eux. C’est là que les poulets et les pintades sont acheminés après l’achat pour leur mise à mort. Un groupe de jeunes visiblement heureux d’exécuter ces tâches, égorge les poulets avant de les passer dans une marmite d’eau bouillante pour être plumés. C’est dans une ambiance bon enfant que ces jeunes s’exécutent tout en fredonnant quelques airs de chanson.

Des prix abordables

Comparativement à Ouagadougou, les poulets de Yako, au vu de leur prix paraissent abordables. C’est le constat dressé par un groupe de colons, présents à Yako pour un camp de reboisement. En effet, les prix varient entre 500 et 1500 francs CFA selon leur forme. Les poulets de 500 francs sont ceux de la veille qui n’ont pu être écoulés. Réchauffés, ils paraissait croustillants.
Le Ouagalais, habitué à payer les poulets à 1500, s’empresse de s’en procurer pour ne pas passer à côté d’une belle occasion. Des réductions de 100 à 300 francs sont faites pour celui qui achète plus d’un poulet. En face des grilleurs de poulets se trouvent les vendeurs de poulets vivants. Eux, les achètent dans les villages environnants et les vendent entre 750 et 1500 francs. Ils n’hésitent pas à crier au premier venu qu’ils feront des réductions considérables.

Ce n’est pas toujours le cas parce que plusieurs clients sont repartis découragé par l’intransigeance du vendeur. Mais lui non plus ne semble pas déçu, se remettant tout de suite à attendre l’arrivée d’un nouveau client. Il y a des prix en dessous desquels le commerçant ne descend plus, et c’est pareil pour tous.

L’appréciation des clients

Les clients en provenance de Ouagadougou, Ouahigouya ou Koudougou, font une brève escale dans un maquis de Yako pour partager 1 ou 2 poulets autour de quelques bouteilles de bierre ou sucreries.
Les cris ainsi que les éclats de rires qui fusaient de certains groupes d’amis ajoutés aux incessants va-et-vient entre la viande de poulet étalée sur une table et la bouche semble confirmer la bonne qualité du menu.

"Le poulet de Yako se laisse savourer" affirme un monsieur d’une trentaine d’années assis confortablement sur une chaise, la main droite préoccupée à manger le poulet tandis que la gauche chassait les mouches qui rodaient autour de son verre de bierre.

"C’est devenu une tradition pour nous de déguster le poulet de Yako avant de reprendre la route pour Ouahigouya" poursuit-il.

Ce sont des groupes d’amis, des familles entières,...venus dans des véhicules personnels ou empruntant les transports en commun qui s’engouffrent dans les maquis avec un sachet de poulets braisés ou rôtis en main. Leur "tort" serait d’avoir goutté une fois le poulet de Yako.

Romaric Doulkom (email : romarikom@yahoo.fr)
Sidwaya

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