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<I>Une lettre pour Laye</I> : Le berger et sa brébis

Publié le vendredi 24 juin 2005 à 07h49min

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Cher Wambi,

C’est un ouf de soulagement que les Ouagalais ont poussé à leur réveil le matin du mardi 21 juin dernier.
La capitale venait, en effet, d’être arrosée dans la nuit qui a précédé par une grosse pluie bienfaisante. A ce qu’on me dit, aucun village du Kadiogo n’en a été épargné et les mares débordent aujourd’hui au grand bonheur des bêtes.

Enfin la saison s’est installée dans la région du Centre, entend-on dire par-ci, par-là, car on se demandait bien de quoi demain serait fait si jamais le ciel restait sourd à nos supplications. Malgré tout, pour ne pas te le cacher, lourde sera à porter notre croix en cette entame de la campagne agricole, du fait du déficit céréalier.

Non seulement les prix du mil, du sorgho, du maïs ont connu une hausse vertigeneuse, mais encore le marché céréalier est désespérément vide.

Sais-tu que dans les environs un sac de 100 kg de maïs ne peut s’obtenir à moins de 25 000 FCFA ? Je me demande ce que vont devenir nos vieilles et vieux parents qui ne jurent que par le tô. Devrait-on se résoudre à ne consommer que les vieux stocks de riz asiatique qu’on nous déverse chaque jour que Dieu fait ?

Là aussi, cher cousin, si ta poche ne pèse pas lourd, tu ne peux pas te payer le luxe d’un 50 kg de riz. Et que font nos dirigeants dans tout ça, me demanderas-tu ?

J’ai ouï-dire rien qu’hier que le gouvernement a manifesté le besoin d’acheter 5 000 tonnes de céréales. Juste de quoi nourrir un poulailler, à comparer avec les besoins réels des populations burkinabè.

En toute honnêteté, cher cousin, il faut qu’en toute humilité ceux d’en haut, qui ignorent encore la famine, parce que repus depuis la nuit des temps, fassent appel à l’aide internationale comme d’autres autour de nous l’ont déjà fait. Il n’y a aucune honte à cela !

Sinon, il va falloir se résoudre à traquer les commerçants véreux, ces affameurs du peuple qui gardent jalousement les vivres dans les magasins, attendant les moments propices pour spéculer. Mais serons-nous jamais entendus, cher cousin, quand on sait que nos politiciens, toutes tendances confondues, sont beaucoup plus préoccupés par les échéances électorales qui se profilent à l’horizon que par la campagne agricole et le déficit céréalier ? Touchons du bois.


Descente de têtes couronnées, de cavaliers et de griots sur Ouagadougou à partir du mercredi du 29 juin prochain ; tant l’événement que l’ambiance méritent d’être vécus cher cousin, et je me convaincs déjà que tu seras des nôtres à l’occasion, malgré les angoisses de la saison hivernale.

C’est en effet la date choisie par le Mouss-Tansoaba pour venir manifester sa gratitude au Moogho Naaba. Tu veux savoir qui est le Mouss-Tansoaba ? Et bien, c’est le chef suprême des armées du royaume mossi, le synonyme du connétable chez nos grands parents les Gaulois.

Pour faire actuel, je te dirais que c’est le ministre de la Défense du Moogho Naaba, qui a été investi, on se rappelle, le 1er mai 2001 sous le nom de règne de Naaba Guiguemdé, avant d’intégrer son palais à Tansobentenga, à une vingtaine de kilomètres à l’est de Ouagadougou le 26 mai de la même année.

Pour sacrifier à la tradition, il fera donc le pèlerinage de Ouagadougou à la tête de sa cavalerie. Un tel événement n’a plus été vu sous nos cieux depuis 1934, du temps de Mouss-Tansoaba Naaba Ligdi. C’est une véritable fête culturelle qu’il nous sera donné de vivre du 29 juin au 1er juillet. Avis aux férus de l’histoire et aux amis de la culture.


Cher cousin, dans ma dernière lettre je t’ai fait l’écho des péripéties par lesquelles le nouveau chef de Komtoèga, Naaba Sêbdo, est passé avant de s’asseoir sur son trône. Cela m’a valu la lettre ci-après adressée au directeur de publication de l’Observateur Paalga par Sébastien P. Yoda. Lis-donc :

"Monsieur le Directeur,

Dans votre édition n°6415 du vendredi 17 au dimanche 19 juin 2005, votre rédaction s’est fait l’écho d’une intronisation d’un chef de Komtoèga, nommé Naaba Sebgo le mardi 7 juin dernier par le Mogho Naaba Baongho.

Je passe sous silence votre 1er paragraphe, consacré à un cours d’histoire sur la chefferie en pays bissa, pour m’intéresser à l’essentiel de votre écrit que je trouve curieusement bien tendancieux de la part d’un quotidien prestigieux comme l’Observateur Paalga et pour cause :

1 - Vous écrivez sans ambages et je cite : "Hélas, un autre fils de Komtoèga, Sébastien Yoda qu’il s’appelle, qui s’est découvert subitement un destin nabal, s’est décrété lui aussi chef, sans avoir même au préalable fait acte de candidature »

Sur ce point, je voudrais vous faire remarquer qu’il est curieux que vous fassiez de telles affirmations sans avoir cherché à vérifier les choses sur le terrain à Komtoèga ; et pire, je suis nommément cité comme quelqu’un qui "s’est décrété lui aussi chef" et là encore sans preuve et sans avoir pris la précaution minimale de chercher à me contacter pour confirmation ou infirmation.

2 - Pour votre gouverne, je porte à votre connaissance que l’intronisation de chef à Komtoèga obéit à des rites précis avant d’arriver chez le Mogho Naaba, ce qui n’a pas été le cas présentement. Par ailleurs sans préjudice de l’évolution de la situation, je vous remettrai en temps opportun tous les éléments du dossier. Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de mes salutations distinguées."

Sébastien P. Yoda

Tél : 70 20 07 90


Ouagadougou, capitale des rencontres internationales ? Point de doute là-dessus cher cousin, et c’est peut dire.

A l’initiative de l’Institut Afrique moderne (IAM) établi au Burkina Faso et que préside M. Zéphirin Diabré, Administrateur associé du PNUD, et de la Fondation pour l’innovation politique (France), une conférence internationale réunira, du 29 au 30 juin 2005 au siège de l’UEMOA à Ouagadougou, une cinquantaine d’économistes et des praticiens du développement pour plancher sur "Les acteurs méconnus du développement".

Cette conférence internationale entre dans le cadre du lancement des activités de l’IAM, créé il y a un an, et sera placée sous la co-présidence de M. Alain Juppé, ancien premier ministre français, et de M. Thomas Sanou, président du Conseil économique et social (CES) du Burkina Faso. Si tu l’ignorais encore, cher cousin, l’Institut Afrique moderne est un "think tank", cest-à-dire un centre de réflexion, qui agit comme un centre d’études, de recherches et de plaidoyer sur les politiques économiques en Afrique.

Et la conviction de ses concepteurs est qu’il faut doter le continent africain d’un instrument moderne de réflexion, d’analyse et de proposition sur les questions économiques et sociales, dans le souci d’influer sur les politiques mises en œuvre par les Etats pour lutter contre la pauvreté et promouvoir le développement durable.

Comme dit plus haut, l’invité de marque de cette conférence internationale est M. Alain Juppé que d’aucuns qualifient de fils préféré de Jacques Chirac, le président français.

Pour les hautes fonctions qu’il a occupées dans l’Hexagone (député de la Gironde, député européen, maire adjoint de Paris, ministre délégué au Budget et porte-parole du gouvernement, ministre des Affaires étrangères, secrétaire général du Rassemblement pour la République (RPR), maire de Bordeaux, président du RPR, ses avis compteront certainement dans l’ébauche de programmes cohérents à mettre à la disposition des décideurs.

Il mettra à profit ce séjour burkinabè pour aller à la découverte de l’Afrique et de ses hommes qui comptent beaucoup dans ses ambitions politiques.


Retour au village, cher cousin, pour voir de quoi l’actualité est faite. J’espère que le petit Ragnoudou est admis à son CEP, lui qui, depuis quelques mois, passait de longues heures à étudier ou du moins à réviser ses leçons à la lumière d’une lampe tempête. Si tel est le cas je lui présente mes félicitations ; si mon temps me le permet, je passerai cet après-midi le chercher pour qu’ensemble on aille à Zecko.

Sûrement que ce village te dit quelque chose, toi qui as parcouru pas mal de départements du Sanmatenga et qui connais Mané comme Laye. Pourquoi j’y vais ? Simplement pour communier avec la population, qui célèbre le 40e anniversaire de son école. Une grande occasion de retrouvailles, surtout pour les anciens, en l’occurrence la première promotion, qui suivit les premiers cours sous un hangar avec des briques en guise de bancs.

Au nombre des manifestations, patronnées par le ministre de l’Enseignement de base, Rakiswiligri Mathieu Ouédraogo, et coparrainées par Mme Alice Tiendrébéogo qu’on ne présente plus et Moret de la Représentation suisse aux Nations unies, une remise de matériel didactique et de vivres aux écoliers, une conférence-débat, une plantation d’arbres, la pose de la première pierre d’une nouvelle école et, fait important, l’immortalisation du premier instituteur de l’établissement, feu Moumouni Ouédraogo.

Cela consistera à l’affichage du portrait de cet inoubliable disparu dans la salle du CP1. Si tu ne le sais pas, Moumouni Ouédraogo est le géniteur de Me Abdoul Ouédraogo, que d’ailleurs les anciens élèves appellent affectueusement Bouba comme le faisait son père de son vivant.


A présent cher cousin, voyons ensemble ce que contient cette semaine le carnet secret de Tipoko l’Intrigante.

- Raïssa Ouali ; ainsi s’appelle la gonzesse qui s’est adjugé la couronne 2004 de Miss Burkina. Belle, elle est, dit-on ; mais son trophée n’a point mis du temps à prendre la rouille. Passe encore que le verdict du jury ait été connu quelque 72 heures avant le concours.

Mais de là à mentir éhontement qu’elle est étudiante en Arts et Communication à l’université de Ouagadougou alors qu’elle ne fréquente que le secondaire, il y a vraiment de l’imposture quelque part. Mais que disent les critères du concours Miss Burkina dans tout ça ? Réflexion faite, la taco à elle offerte est le juste prix de cette farce qui n’honore point ses acteurs.

- La prolifération des églises, temples, mosquées semble répondre à un besoin croissant des âmes en détresse sous nos cieux. A telle enseigne que même des "entrer-coucher" sont transformés en lieux de culte. Si nombre de fidèles y trouvent effectivement une certaine tranquillité, un réconfort moral, il y a lieu de déplorer les plans diaboliques qui habitent certains de leurs bergers ou de leurs pasteurs, pour qui les fidèles du sexe faible deviennent des proies faciles. Mais à qui la faute quand on a la liberté de "prier" dans les lieux obscurs, pour ne pas dire dans la clandestinité jusqu’à une heure indue ?

Les fidèles catholiques de la Patte d’Oie, à Ouagadougou, en savent en tout cas quelque chose : le berger d’un groupe de prière charismatique n’y a trouvé de proie appétissante que sa propre brebis, brisant au passage un foyer dont il était pourtant le conseiller spirituel et l’un des témoins du mariage. Ces exemples sont légion dans la cité, où, au nom d’Allah et Jésus, on abuse des âmes fragiles. Où va-t-on donc, bonnes gens ?

- Sale temps pour les pirates. Hier dans la matinée, 25 équipes de la gendarmerie ont simultanément effectué des descentes dans 15 endroits à Ouaga et 10 autres à Bobo-Dioulasso pour traquer ces chenapans qui ruinent les artistes et les rongent, tel un cancer, à petit feu.

Et si avant on se contentait de saisir les supports (K7, CD, DVD...) en épargnant les grossistes et détaillants des œuvres piratées, l’innovation a consisté ce coup-ci à embarquer aussi bien les marchandises que les marchands, qui répondront bientôt de leur forfait devant la justice. Car après l’enquête préliminaire de la gendarmerie, le procureur du Faso sera saisi pour la suite à y donner.

- Encore une démission du Front des forces sociales (FFS) ! Après les adieux de Chériff Sy au parti de Norbert Michel Tiendrébéogo pour des raisons qu’on ignore toujours, c’est le tour aujourd’hui de Sora Karfa, secrétaire national à l’organisation, de faire ses valises pour d’autres cieux. Pour des raisons personnelles, dit-il dans sa lettre de démission, adressée le 22 juin dernier au président national du FFS. Décidément !

- L’UNICEF et les Forces armées nationales accompagneront, pendant ces vacances, les enfants du CERESSE pour l’organisation d’une campagne de sensibilisation à travers le football et la culture, sur le thème "La citoyenneté en milieu jeunes", une manifestation nationale qui regroupera plus de 300 enfants issus des casernes, des quartiers et des provinces environnants de Ouagadougou. Voila un thème intéressant pour les enfants et même les adultes.

Comme l’année dernière, la cérémonie sera sans doute parrainée par Mme Monique Ilboudo, ministre de la Promotion des Droits humains, et Mme Joan French, Représentante résidente de l’UNICEF ; deux institutions qui luttent pour l’amélioration des conditions de vie des enfants et des jeunes.

- L’Abbé Edouard Yaro, un jeune prêtre burkinabè, nous convie à un concert dédicace de son premier album, « Ma mission », le vendredi 24 juin 2005 à l’ATB à Gounghin à partir de 20h30mn. Prendront part à ce concert : Djata, l’abbé Joseph Kinda, les chorales francophones des paroisses de Dapoya et de Gounghin.

- Accra, la capitale ghanéenne, abrite depuis le 20 juin dernier le Congrès mondial des communicateurs catholiques, où le Burkina Faso est fortement représenté.
Que dire, sinon que c’est l’une des plus grandes manifestations des journalistes du monde. De sources proches du Congrès, le Burkina Faso a été préféré au Canada pour abriter le prochain congrès de l’Union catholique international de la presse (UCIP) en 2007.

De même, notre confrère Alexandre Le Grand Rouamba des éditions "Le Pays", président de la sous-section nationale des communicateurs catholiques, aurait été élu président de la section africaine par 22 voix contre 5. Félicitations aux délégués burkinabè, dont le travail en sous-terrain aura permis de battre le candidat nigérian.

Tipoko l’Intrigante n’apprend rien d’elle-même, elle n’invente jamais rien. Tipoko l’Intrigante est un non-être. Elle n’est ni bonne en elle-même, ni mauvaise en elle-même. Elle fonctionne par intuition, car "l’intuition c’est la faculté qu’a une femme d’être sûre d’une chose sans en avoir la certitude..."

Ainsi va la vie.
Au revoir.

Ton cousin,
Passek Taalé.

L’Observateur

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