2013 : 53 dents

Le miroir est poli qui luit en silence
Qui réfléchit sans énoncer de sentences
Il est vil le pouvoir presse-citron
Qui épluche le journaliste en lambeaux
Il est vil le boss marmiton maton
Equarrisseur du revendicateur par morceaux
Elle est vile la chefferie agenouillée
Sourde au cliquetis des armes scélérates
Il est vil le notable appareillé
Des demi-vérités de savants pirates
Il est vil le ministre apeuré
Ecœurant lesté de consignes disparates
Il est vil le conseiller désespéré
Distillant ruses et mensonges par cataractes
Il est vil l’universitaire décadent
Le verbe haut et le poil frémissant
Il est vil le parlementaire pétaradant
Le geste onctueux et l’œil demi-sang
Il est vil le préjudice des ans
Prébendes et tiroir-caisse fumants
Il est vil le comptable pédant
Logorrhée étranglant mère et enfant
Il est vil l’officier se trompant de repas
Occupé à charcuter des rêves
Il est vil le fils distribuant le trépas
Nuit et jour, matin et soir, sans trêve
Elle est vile la chorale des nervis commissaires
Credo ondoyant et poignards dans les viscères
Il est vil le policier luisant de noirceur
Zébu musclé, ennemi juré des penseurs
Il est vil l’homme d’affaires se frottant les mains
La glaire chargée de mystères fétides
Il est vil le marchand sans frein
Complice compétent en toutes turpitudes
Il est vil le marabout sans âme
Diablotin psalmodiant dans la pénombre
Il est vil le sorcier des décombres
Détroussant les porte-monnaie et les dames
Il est vil le magistrat torturant le dogme
Misérable érudit affichant du flegme
Il est vil l’avocat au verbe venimeux
Le geste enchanteur, la robe frappée de plis terreux
Elle est vile cette cité pétrie de torpeur
Ingurgitant goute à goutte la terreur
Il est vil ce peuple de l’indignité
Cédant chaque soir un pan de sa liberté
Le miroir est joli qui sourit sans vengeance
Large œilleton qui fouille nos consciences
Sayouba Traoré, Journaliste, Ecrivain