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Conflit au CDP de Dapelogo : La goutte d’eau qui fit déborder le vase

Publié le mardi 9 novembre 2004 à 06h17min

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Le 6 novembre 2004, le bureau CDP de la section provinciale d’Oubritenga a tenu à Ziniaré une rencontre avec la sous-section CDP du département de Dapélogo, le fatherland du président Blaise Compaoré. Le principal point inscrit à l’ordre du jour de cette réunion était la crise née de la mise en place du bureau de la cellule départementale du CDP de Dapélogo.

Le Congrès pour la démocratie et le progrès, parti majoritaire, se porte mal à Dapélogo, département relevant de la province d’Oubritenga dans la région du Plateau central, situé à 35 kilomètres sur l’axe Ouagadougou - Kongoussi.

Pour cause, comme nous l’écrivions dans notre rubrique hebdomadaire « Une lettre pour Laye » du 5 novembre dernier, la population conteste le choix de trois personnes pour diriger la sous-section CDP dudit département. Afin de trouver une solution à cette crise, le bureau de la section provinciale du CDP de l’Oubritenga a convoqué, le 6 novembre à Ziniaré, les militants des 29 villages de Dapélogo.

Pour la circonstance, environ 500 habitants de Dapélogo ont bravé les intempéries des pistes rurales, avec leurs vélos, pour se retrouver à Ziniaré et dire non selon eux « à l’arbitraire ».

Alors que les militants s’attendaient à assister en direct à la concertation, la grande majorité apprendront sur place, à leurs dépens, que ne seront admis à la réunion que tous ceux qui étaient munis d’une convocation. Et pour certainement parer à tout dérapage, un léger dispositif sécuritaire, d’environ 13 policiers, avait été placé devant la Maison des jeunes et de la culture qui devait abriter les échanges.

Les militants qui restés dehors, tout anxieux, sont allés s’amasser du côté droit de l’axe Ouaga-Kaya. A côté de cette masse se trouvait un autre groupe d’à peu près 20 personnes, assises tout timides au pied d’un mur en face du bitume.

Renseignement pris, la foule nombreuse représentait le camp des plaignants dont le chef de file a pour nom Saïdou Ouédraogo, plus connu sous le surnom de Kadhafi. L’autre groupe serait du camp de Sabné Kouanda, celui-là même qui est mis en cause dans cette crise.

Quelques minutes avant la réunion, qui était prévue pour 10 heures, Kadhafi rejoint la foule. « Des gens m’ont appelé, confie-t-il à la foule, pour me signifier que moi Kadhafi, j’ai ameuté la population de Dapélogo pour venir se bagarrer à Ziniaré ici.

En réponse, je leur ai dit que tous ceux qui viennent en mon nom aujourd’hui ne portent ni gourdin, ni couteau, ni hache. Aussi voudrais-je vous demander de faire preuve de sagesse pour ne céder à aucune provocation et donner raison à ceux qui ont intentionnellement distillé cette information. A la fin de la réunion, je reviendrai vous faire le bilan ».

Quelques minutes après 10 heures, tous ceux qui avaient reçu une convocation se sont retrouvés en salle pour la réunion. Au présidium, le secrétaire général de la section CDP d’Oubritenga, Dominique Konseibo, assisté de Maïmouna Sawadogo et d’Etienne Zoungrana, tous les deux membres du bureau provincial. A la vérification des présences environ 4 absents enregistrés dans le camp de Koanda et un du côté de Kadhafi.

La justification de la rencontre

Le débat a été introduit par le secrétaire général provincial du CDP. Il a commencé par situer le contexte de la réunion après qu’il a rappelé aux différentes parties certaines dispositions régissant la conduite du parti. Notamment celle relative à la mise en place des structures, qui a connu une modification suite au congrès d’août 2003 du parti ; en ce qui concerne la désignation des membres qui, contrairement au passé, se fait maintenant par consensus. C’est ainsi qu’ils ont été désignés, dira-t-il, et ignoreraient les critères qui ont présidé à leur choix.

Le choix à problème

Selon M. Dominique Konseibo, c’est suivant cette procédure, qu’ils ont porté leur choix, après sondage, sur Eloi Ouédraogo, Jean Nicaise Sankema et Mme Koula née Tapsoba Rosine. Ce bureau aurait été validé par le bureau politique national et à ses dires, conformément aux textes qui régissent le parti, les militants ne doivent pas contester la décision.

Des problèmes dans la mise en place des structures, il y en a eu dans tous les sept départements que compte la province d’Oubritenga, reconnaîtra-t-il, mais le cas le plus critique est celui de Dapélogo. A la date du 6 novembre, c’était le seul département qui n’avait pas encore fourni la liste complète des membres des comités de base du parti. Sur les 29 villages qui relèvent du département de Dapélogo, six se font toujours attendre.

Le mea culpa de Sabné Koanda

Trois correspondances de Dapélogo sont parvenues au bureau politique national du CDP. Selon le S.G. provincial du CDP, la première correspondance fait cas du refus des délégués choisis par la section provinciale. Dans les deux dernières, les signataires réaffirment non seulement leur rejet des trois personnes retenues, mais dénoncent aussi Sabné Koanda pour avoir injurié la population. Suite à ces correspondances, un ordre est venu d’en haut de convoquer une réunion pour réconcilier les militants.

Après ce développement, M. Konseibo invitera l’assistance à faire preuve de tolérance, à l’image du président qui ne réagit pas aux injures dont il est l’objet chaque jour que Dieu fait. Le pardon, le respect mutuel, la confiance et la solidarité, voilà les valeurs qui doivent guider la conduite de chacun, a-t-il dit.

La parole aux protagonistes

Le premier à intervenir était Sabné Koanda, la principale personne incriminée dans cette affaire. Celui-ci regrettera d’abord l’étalage de la crise du CDP de Dapélogo dans l’Observateur paalga du 5 novembre 2004.

Il dit n’avoir pas pris la peine de répondre au journal, estimant que pour ce dont on l’accuse, les responsables du parti savent qu’il n’y est pour rien. Toutefois, conclura-t-il sa défense, « A tous ceux que j’ai offensé par mes propos, moi Sabné Koanda, au nom de Dieu et du prophète Mohamed, demande pardon ». Son attitude sera saluée par Dominique Konseibo, qui a déclare qu’il a fait preuve de grandeur d’esprit.

Le second intervenant n’était autre que le chef de file des plaignants, en l’occurrence Saïdou Ouédraogo dit Kadhafi. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, a-t-il dit, est venue d’une injure proférée par Koanda à l’encontre de la population. Dans quel contexte cela s’est-il passé ? C’était au cours d’une réunion de remerciement du député Rakoega Joanni Zongo à la population après son élection aux législatives 2002.

A l’issue de la cérémonie au cours de laquelle le député à offert la somme de 175 000 FCFA aux militants, Sabné Koanda a porté à la connaissance de la population le choix des trois personnes ci-dessus citées pour animer la sous-section CDP de Dapélogo. Après cette annonce, il aurait dit : « Maintenant que les noms des trois personnes à la tête de la sous-section sont connus, quel est le chien qui peut à présent aboyer ? ».

C’était devant plus d’un millier de personnes dont des témoins dans la salle, a-t-il dit. Pensez-vous, a-t-il interrogé l’assemblée, que de tels propos sont dignes d’un responsable politique ? Il faut se respecter dans la politique, lancera-t-il.

D’ailleurs, poursuivra Kadhafi, « cet évènement que nous avons organisé n’était pas propice pour annoncer à la population une telle information ». Selon lui, Koanda aurait dû convoquer une autre réunion au cours de laquelle il aurait pu communiquer cela à la population.

Pis, de l’avis de Kadhafi, Koanda ne s’intéresse pas à la vie de Dapélogo. « Le voilà assis », l’interpella-t-il, il ne s’y présente que pour des intérêts électoraux. Une fois qu’il a perdu, il disparaît pour n’y revenir que lorsqu’il y a encore un intérêt électoral. Pour conclure, Kadhafi dit ne pas être contre le pardon de Koanda.

Mais la salle de réunion de la Maison des jeunes et de la culture de Ziniaré n’est pas le lieu indiqué. C’est dans la cour du chef de Dapélogo que l’injure a été prononcée, devant le chef et la population et c’est encore dans ce contexte que Koanda doit revenir demander le pardon. Pour les trois personnes désignées, Kadhafi persiste et signe que la population ne veut pas d’elles.

Tous ceux qui sont intervenus à sa suite ne l’ont pas contredit. Ces derniers estiment que s’ils refusaient le pardon, ils rendraient leurs prières caduques, en tant que musulmans.

Cependant, comme l’a dit leur prédécesseur, ce n’est pas à la faveur de cette réunion que le pardon sera accepté. Eux aussi rejettent en bloc le choix des trois personnes. Quelle sera la suite de cette affaire ? se demande-t-on. Un rapport de la réunion sera fait au bureau politique national à qui revient le dernier mot, selon le S.G provincial du parti.

Hamidou Ouédraogo
L’Observateur

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