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Commune de Ouahigouya : Le maire démis de ses fonctions et poursuivi en justice...

Publié le jeudi 28 octobre 2004 à 07h42min

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Soupçonné sérieusement de détournement, d’emprunt de fonds sur le dos de la mairie de Ouahigouya, sans respect des procédures légales, de mauvaise gestion de l’opération de lotissement, de concussion, de faux et usage de faux, le maire de Ouahigouya, M. Issa Joseph Diallo vient d’être révoqué avec poursuite judiciaire, par le Conseil des ministres. Est-ce l’aboutissement de la crise larvée au sein du Conseil municipal de Ouahigouya ?

M. Issa Joseph Diallo, le désormais ex-maire de la ville de Ouahigouya n’a plus accès à ses bureaux et à ses attributs de bourgmestre, pour compter de l’après-midi d’hier 27 octobre 2004... La décision a été prise par le dernier Conseil des ministres, au regard de la lettre et de l’esprit des dispositions des TOD (Textes d’orientation de la décentralisation). Notamment, la loi 42 qui a prévu dans ses dispositions, les conditions dans lesquelles le maire d’une ville du Burkina Faso peut être légalement révoqué.

C’est le ministre en charge de l’Administration territoriale, M. Moumouni Fabré, qui a présenté au Conseil des ministres, le rapport qui a donné lieu à cette décision. Un rapport qui, fort des investigations menées par les officiers de police judiciaire et les inspecteurs du ministère de l’Administration territoriale, tant à Ouahigouya qu’à Ouagadougou, n’est pas tendre envers la gestion administrative et financière de la mairie de la capitale de la région du Nord, sous l’ère de Issa Joseph Diallo.

Une gestion qui va de 2001 à 2004, suite à sa prise en main des clefs de l’Hôtel de ville, des mains du député Bernard Lédéa Ouédraogo, non sans murmure.

Au départ de la crise qui vient d’emporter le maire est une lettre de "défiance" de plus de 20 conseillers municipaux de Ouahigouya, pour décrier sa gestion, qualifiée alors de dictatoriale, taylorienne, voire fort malhonnête.

Toute chose qui donne lieu depuis quelques semaines, à de nombreuses querelles et conciliabules, à des débats houleux dans la classe politique, administrative et coutumière de la capitale du Nord Burkina. Désormais, on notait qutre "camps" dans les débats entourant la gestion du maire de Ouahigouya : les pro Issa Joseph Diallo, leurs contempteurs, les acteurs des tentatives de réconciliation et les partisans du "tous sont pourris...".

Dès lors, trois possibilités se présentaient à toute tentative de solutionnement de cette crise.

Primo, le maire rend sa démission, comme ce fut le cas récemment à Ziniaré.

Secundo, les conseillers municipaux abandonnent leur tablier et là, comme à Kongoussi et à Réo, le ministre de l’Administration territoriale met la commune sous tutelle.

Et tertio, comme ça vient d’être le cas à Ouahigouya et il y a quelques mois à Ouargaye, le maire est détrôné de son fauteuil pour malversation, détournement, incapacité d’assurer sa tâche, etc.

Des dessous autant politiques que juridiques...

Maintenant qu’il est déclaré persona non grata à la mairie de Ouahigouya, Issa Joseph et son équipe vont faire l’objet d’enquêtes poussées, notamment en ce qui concerne leur gestion du lotissement de Ouahigouya.

Déjà, selon nos sources, le ministère de l’Administration territoriale a pris des mesures conservatoires visant à empêcher désormais l’ex-maire et son comptable d’avoir accès aux chèques et autres documents administratifs et comptables de la commune dont ils avaient la gestion.

Dès lors, suite aux rebondissements que vient de connaître la crise qui mine la gestion de la mairie de Ouahigouya, l’on pourrait assister à la manifestation de deux hypothèses : l’une juridique et l’autre politique. Car Issa Joseph Diallo peut assigner l’Etat burkinabè en justice, devant le juge administratif, afin de réclamer l’annulation de la mesure du Conseil des ministres. Etant donné que le Burkina se veut un Etat de droit, cette hypothèse n’est pas un leurre, au cas où l’ex-maire de Ouahigouya a des éléments de preuves qui peuvent matérialiser son innocence, sa bonne foi...

Evidemment, comme le notent certains politistes burkinabè, Issa Joseph Diallo pourrait prendre sa revanche en empêchant, avec le soutien de certains conseillers municipaux, l’élection d’un nouveau maire à Ouahigouya. En fait, après avoir été déchu par le gouvernement, il peut se "débattre", question de survie, à travers un combat politique souterrain. D’autant plus que dans la crise que connaît la commune de Ouahigouya, et au-delà des manquements présumés du maire, se profilent ses supposés déboires avec les "partisans" du ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture, M. Salif Diallo. Celui-ci étant par ailleurs le Coordonnateur régional du CDP, parti politique auquel appartient Issa Joseph Diallo.

De même, dans un paysage politique burkinabè où certaines luttes de positionnement se font par moment, de manière encagoulé, l’on ne saurait parier sur la mort politique ou pas du maire déchu...

Mais toujours est-il qu’au plan pénal, il pourrait être poursuivi selon nos sources, pour faits de gestion grave. Il pourrait notamment s’agir de détournement de fonds des contribuables de Ouahigouya, de faux et usage de faux, de concussions avérées, de non-respect des conditions légales d’octroi de marchés, etc.

Par exemple, il est reproché à Issa Joseph Diallo d’avoir fait réparer son véhicule personnel, une Mercedès, aux frais de la mairie, à environ 3 010 354 francs CFA, entre janvier et mai 2004. Et ce, alors que la mairie dispose d’une Mercedès 190, avec un moteur en panne, dont la réparation ne devrait pas excéder environ un million de francs CFA

Voilà qui augure des débats à la frontière entre les sciences politiques et le droit public, sur la question des en-dessous de la crise que connaît la mairie de Ouahigouya.

Ibrahiman SAKANDE (ibra.sak@caramail.com)
Sidwaya

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