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Kourittenga. Commune de Pouytenga : La marche contre le maire étouffée mais les problèmes demeurent

Publié le mardi 21 octobre 2008 à 03h19min

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Le marché de bétail de Pouytenga

La marche meeting des syndicats et associations de marchés de Pouytenga contre leur maire Prosper Yaméogo annoncée pour le 14 octobre 2008 dans ladite ville, n’a finalement pas eu lieu. Elle a été ajournée sine die. Il reste à affronter les problèmes.

De mémoire de plusieurs observateurs, jamais une histoire de marche meeting n’a créé autant de frayeur et de panique. Du haut-commissariat du Kourittenga au gouvernorat, les autorités n’ont ménagé ni effort ni recours pour faire ramener les organisateurs de la marche à de meilleurs sentiments. Chez les syndicats, l’on ne comprenait trop pourquoi tant d’acharnement sur eux pour renoncer à la marche. Pour eux, il n’y avait pas de quoi paniquer. « Nous ne voulons de mal à personne. Nous voulons juste exprimer notre mécontentement en marchant ». Mais du côté des autorités provinciales, « Il fallait vaille que vaille étouffer cette marche aux conséquences incertaines pour la ville de Pouytenga ». Le week-end du vendredi 10 au dimanche 12 octobre n’a donc pas été du tout repos pour les autorités.

Si ce ne sont pas les instigateurs de la marche qui sont reçus dans le bureau du haut-commissaire, c’est le haut-commissaire lui-même qui les rejoint à Pouytenga. Le gouverneur également a dépêché un émissaire. Des personnes ressources de la province sont aussi mises à contribution à l’image du vieux richissime Athanase Kaboré de Pouytenga. Mais jusqu’au 13 octobre 2008 au matin, les organisateurs de la marche demeuraient dans leur position. Pas question de suspendre la marche. Au même moment, l’on annonçait une contre marche programmée pour le lendemain par des partisans du maire. Alors, pour parer à toute éventualité, le préfet de Pouytenga fit diffuser un communiqué interdisant toute marche jusqu’à nouvel ordre. Le même soir, sur les radios FM, les organisateurs annoncent la suspension de la marche.

Beaucoup de griefs contre le maire

Le mardi 14 octobre 2008 (jour présumé de la marche), aux environs de 9 heures, nous sommes reçus au fief des organisateurs de la marche. Entouré des premiers responsables des cinq syndicats et associations initiateurs de la marche, El Hadj Issaka Balma président des commerçants et exportateurs de bétail de Pouytenga, explique : « Entre le vendredi 10 et le dimanche 12 octobre, nous avons été reçus à maintes reprises par le haut-commissaire de la province dans son bureau qui nous a demandé de surseoir à la marche.

Le haut-commissaire nous a rejoints à Pouytenga pour tenir le même langage. Le gouverneur de la région nous a envoyé un même message. Le gouverneur a appelé au téléphone pendant 50mn notre doyen Athanase Kaboré. Le commandant de compagnie de la gendarmerie de Tenkodogo s’est dépêché lui-même et a échangé avec nous de 14H à 18H. Notre doyen Athanase Kaboré nous a suppliés de suspendre la marche. Nous sommes des humains, des burkinabé. Voyez ! Il n’est pas facile de repousser toutes ces demandes de pardon formulées par des hautes personnalités respectables de notre région ». A les entendre, la marche est suspendue, ils vont d’abord croiser les bras et attendre les promesses de solutions des autorités administratives et politiques au niveau provincial et régional. « Si rien ne bouge d’ici à là, alors, personne ne pourra nous arrêter ».

Mais que reprochent-ils au maire Prosper Yaméogo au juste ? « Le problème n’est pas politique mais psychologique » précisent les syndicats. Quand aux griefs, la liste est longue. « Par notre silence complice, par notre inactivisme coupable infantile, nous bitumons une voie dangereuse pour cette chère commune » lit-on dans le message qui devrait être livré lors de la marche. Les cinq syndicats et associations reprochent au maire Prosper Yaméogo des délits tels que « détournement de biens et deniers publics, malversation, corruption, concussion, prêts irréguliers des fonds de la commune, spéculation sur l’affectation de terrains publics, achat de deux voitures à 48 millions ». Ils en veulent aussi au maire de faire des spéculations dans les établissements publics de la commune.

Ils citent comme exemple, le collège d’enseignement général (CEG) construit par l’ONG Plan à Balkiou où au lieu de 14.500F les élèves paient 52. 000 F comme frais de scolarité cette année scolaire. Selon toujours les syndicats plaignants, le maire aurait soutenu que la réfection du parc de bétail a coûté deux millions cinq cent mille (2. 500. 000F) francs. Ce qu’ils contestent. « Une tonne de ciment, du bois et du fer ne pourraient excéder la somme de cinq cent mille (500 000) francs. Il (le maire) raconte aussi que le pont de Balkiou a coûté 39 millions. Or, nous savons que c’est 22 millions ». Les syndicats se disent aussi offensés par des propos injurieux que le maire tient régulièrement à leur endroit sur les antennes des radios FM. Mais, ce qu’ils ne peuvent pas pardonner au maire, c’est surtout « l’attribution anarchique des hangars du parc de bétail et le mot d’ordre les interdisant de percevoir des taxes ». Les syndicats invitent quiconque qui le voudrait de venir à Pouytenga faire des investigations.

Des solutions à l’horizon

Pour le maire Prosper Yaméogo, les remous qui secouent sa ville ne sont autres choses que les défis de la décentralisation. « C’est normal que qu’il y ait des contestations aux décisions d’un maire. C’est la démocratie » soutient-il. Concernant les accusations de détournements et autres dont on l’accuse, le maire s’en moque. « La commune n’avait pas de régie. C’est moi qui l’ai créée. Je n’attribue pas les marchés.

Comment puis-je détourner de l’argent ». Pour Prosper Yaméogo, les syndicats sont mal placés pour l’accuser de détournement. « Il y a le contrôle financier, l’inspection d’Etat, la Cour des comptes pour cela ». A propos de l’interdiction aux syndicats de prélever des taxes. Le maire persiste et signe. « Je ne peux pas enfreindre à la loi et leur permettre de prélever des taxes. Non ». Selon le maire, près de huit (08) syndicats et associations de la ville se sont rangés et ont cessé de prélever des taxes. Alors pourquoi ce sont ces cinq syndicats qui persistent, s’interroge-t-il. Des propos injurieux dont on l’accuse, le bourgmestre de Pouytenga soutient que personne ne pourra l’empêcher de cracher la vérité. « On me connaît pour mon franc parler ». En deux ans et demie, Prosper Yaméogo déclare avoir mieux fait pour le développement de la ville que ses prédécesseurs.

Il en veut pour preuve la construction de la clôture de la mairie et les bâtiments pour le service de l’état civil, la réalisation de ponts de franchissement dans la ville etc. « Moi je suis arrivé trouver une dette de la commune s’élevant entre 250 millions à 270 millions que nous avons travaillé à éponger ». Pour lui, ces mouvements d’humeur qui secouent Pouytenga ne sont l’œuvre que de quelques individus. Mais où mettez-vous la grande masse de la population dans tout cela ? S’interroge-t-il. « Je n’ai jamais reçu de plainte venant de la grande masse silencieuse ». Prosper Yaméogo regrette d’être souvent pris dans l’étau qui l’empêche de travailler. « A moindre chose, on veut te rappeler, qu’on t’a élu et si tu ne te plies pas, on t’éjecte ».

Pour Prosper Yaméogo, il faudra une relecture du code électoral pour que les maires soient élus au suffrage direct afin de leur permettre de disposer d’un peu plus de liberté et d’autonomie face aux pressions de tout genre. Sur cette querelle avec les syndicats, le maire dit être disposé s’asseoir et discuter avec les intéressés. Dans sa lettre réponse, il les a du reste invités « à déposer auprès de son cabinet leurs différentes revendications pour examen en vue de rechercher ensemble des solutions ».
Ce que les syndicats ont vite fait en déposant leur plateforme auprès du haut-commissaire de la province qui a déclaré attendre que la tension s’apaise avant de convoquer une rencontre de concertation avec le maire pour examiner les revendications des syndicats.

Onésime Aké Loba LANKOANDE , AIB/Koupéla

Sidwaya

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