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TIEBELE : Le Maire et des guides touristiques à coûteaux tirés

Publié le jeudi 16 octobre 2008 à 00h33min

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Le 8 octobre 2008, des jeunes natifs de Tiébélé dans la province du Nahouri ont été cités à comparaître à l’audience du Tribunal correctionnel de Manga pour fait de "rébellion". Le plaignant n’est autre que la Mairie de ladite localité représentée par le Maire Pascal Batinan lui-même qui, contre toute attente, a demandé un renvoi du dossier pour se constituer un conseil. Demande qui lui a été accordée, et l’audience est reprogrammée pour le 29 octobre prochain.

Ils sont au nombre de 9, tous natifs de Tiébélé et guides touristiques pour la plupart. Ils ont pour noms Modeste Poadiagné, Youssouf Mission, Hermann Nassara, Aziz Houssalé, Amoukita Anazan, Koubati Akorabou, Apouri Yada, Simplice Ouélé et Paul Dimdam. Leur crime, comme le stipule la convocation à eux remise, c’est "d’avoir dans le courant du mois de juillet 2008, résisté en réunion avec violences ou voies de fait à un représentant de l’autorité publique agissant pour l’exécution des ordres ou ordonnances émanant de cette autorité ou des lois et règlements". Avant le jugement, nous avons rencontré les différentes parties, le Maire, les guides et certains témoins. Les jeunes guides incriminés rejettent les accusations, surtout celle de rébellion qui leur sont adressées. Ils disent déplorer le fait que le Maire veuille "couper leur pain".

Car, font-ils remarquer, ils sont plus d’une centaine à Tiébélé à vivre de cette activité de guide touristique et que grâce à elle, beaucoup d’entre eux ne vont plus à l’aventure mais préfèrent rester au village. Pour eux, il y a sûrement quelque chose derrière cette accusation. Ils disent être convaincus que l’histoire des taxes touristiques, actuel sujet d’achoppement, n’est que la partie visible de l’iceberg voire, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Et le Maire de confier "qu’il n’y a rien d’autre qui l’oppose à ces jeunes et de préciser que ce sont de petites mésententes entre l’exécutif municipal et des individus à propos de la mise en oeuvre de la taxe touristique de 1000 F CFA instituée par le Conseil municipal".

Selon certains témoignages recueillis sur place, il ressort qu’il y a des antécédents entre ces jeunes et le Maire et que c’est la présente affaire qui a tout gâté entre eux. "... les jeunes guides ont demandé au Marie de revenir sur sa position, ils ont fait des propositions selon lesquelles, au lieu que ce soient les touristes qui paient directement les taxes, que ce soient les organisateurs, les guides qui le fassent. Ce qui permettrait d’organiser le tourisme dans la commune. Un répertoire de tous les guides a été proposé, auxquels la Mairie va octroyer des badges en contrepartie de certains frais. Et les sites touristiques accueillant les touristes devaient, dans les propositions, payer eux aussi des taxes et épargner les touristes qui paient déjà et les guides et la visite des sites.

Tout cela a été rejeté en bloc par la Mairie pour mettre sa mesure à exécution...", a confié un des membres de la délégation venue de Tiébélé pour suivre l’audience. Et un autre d’ajouter : "les gendarmes couchés que le Maire a fait bâtir sur la route n°25 causent beaucoup de désagréments aux usagers, et les touristes aussi ont commencé à se plaindre de la taxe qu’on leur fait payer. Les jeunes sont allés voir le Maire pour qu’il fasse quelque chose. Il ne les a pas écoutés et ils sont allés détruire ces gendarmes couchés. C’est là que le 1er adjoint au Maire est allé voir les jeunes de son quartier, ceux de Tiabo, Koubounga, Piou, Kasséré et Mankane pour leur dire de se mettre sur leurs gardes afin d’attendre les jeunes de Korabié pour les massacrer ; beaucoup s’y étaient opposés.

Une rencontre a eu lieu entre tous les jeunes et l’on a pu préserver la paix dans le village. C’est après cela que la gendarmerie a invité certaines personnes à venir s’expliquer pour ce qui s’est passé. Pour nous, l’affaire était close. Le Maire a refait ses gendarmes couchés puis implanté une plaque où il est écrit "Halte péage visite touristique". Les gens ont dit que si le Maire continue sur cette lancée, il risque de tuer le tourisme dans le village. C’est ainsi que l’affaire est restée là. Ils ont commencé à vendre leurs tickets et personne ne parle jusqu’à ce que les 9 jeunes soient convoqués ici pour une audience.

C’est une fois au Tribunal qu’on nous parle de rébellion. Rébellion par rapport à quoi ? On attend l’audience pour savoir exactement de quoi il s’agit". Bref, une fois les personnes incriminées, le témoin et le Maire à la barre, le bourgmestre a, contre toute attente, demandé le renvoi du dossier afin de se constituer un conseil ; les incriminés ayant le leur à leurs côtés, en la personne de Me Roland Bouda. Le procureur a regretté que ce soit sur place que le Maire veuille se constituer un conseil, idem pour le conseil des 9 incriminés qui n’a trouvé d’inconvénient à la requête du Maire si tel est son désir. C’est alors que le président du tribunal, Arsène Hien, a renvoyé l’audience pour le 29 octobre prochain.

Par Nouffou ZONGA (Envoyé spécial à Manga)

Le Pays

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