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Xe Sommet de la Francophonie : "Ouagadougou, rendez-vous de la dignité et de la décence "

Publié le vendredi 11 juin 2004 à 08h50min

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A quelques mois du Xe Sommet de la Francophonie qui se tiendra en novembre à Ouagadougou, le ministre d’Etat, Youssouf Ouédraogo, président du Comité d’organisation fait le point des préparatifs de cette rencontre des délégations de 56 Etats et de diverses structures francophones. Il évoque également son périple européen et asiatique, et se prononce surtout sur les capacités d’accueil du Burkina Faso.

Sidwaya (S). : Quel est l’état actuel des préparatifs à cinq (5) mois du Sommet de la Francophonie ?

Youssouf Ouédraogo (Y.O). : Cela fait plus d’un an que nous travaillons pour la réussite du Xe Sommet de la Francophonie qui se tiendra à Ouagadougou en novembre prochain. La préparation d’un tel événement est très louable. Parce que le sommet va réunir 56 chefs d’Etat et de gouvernement avec des délégations importantes. En plus de ceux-là, il y aura l’Association des maires francophones (AIMF), le Forum francophone des affaires (FFA), l’Union de la presse francophone (UPF), des délégations de la CEDEAO, de l’Union africaine (UA) et l’ONU... C’est pourquoi le gouvernement a tout de suite mis en place un grand comité national d’organisation.

Il a également procédé à une répartition des tâches dans tous les secteurs liés au Sommet. Ceux-ci portent sur les infrastructures, la santé, l’accréditation, l’accueil, la restauration, l’hôtellerie... Mais, il ne faut pas oublier surtout le thème. Car, en vérité, on n’invite pas les chefs d’Etat au Burkina Faso pour les mettre uniquement dans de bonnes conditions. Le président du Faso a proposé à ses pairs de se réunir autour d’une préoccupation majeure qui est celle "du développement durable et de la solidarité francophone".

En effet, depuis la création de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) en 1970, l’ancêtre de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le ciment s’arrêtait à l’idée de fédérer tous les pays du Sud et du Nord qui ont en partage le français. Il s’est agi de créer un certain rôle géopolitique en cultivant la solidarité dans les domaines culturel, technique, éducationnel, etc. Des sommets comme celui de Hanoï au Vietnam ont été importants parce qu’ils ont eu des volets politique et institutionnel donnant à la Francophonie, une voix, le secrétariat général et un visage, l’OIF.

L’Institution est devenue un espace géographique grand, politique capable de peser sur les affaires du monde. Si le Burkina Faso a proposé le thème du développement durable, c’est parce que depuis le premier sommet à Versailles (France) jusqu’à celui de Beyrouth (Liban) en 2002, l’on a traité des thèmes purement sectoriels. Le Sommet de Ouagadougou veut faire la synthèse de toutes les réflexions qui ont été menées sur la Francophonie.

Il est alors convenu que le problème qui préoccupe aujourd’hui toute la communauté francophone, c’est la lutte contre la pauvreté et l’assurance du développement durable. Ce combat interpelle une fois encore, une affirmation accentuée de la solidarité dans le monde francophone. Le sommet du millénaire a défini en 2000, ce que doit être la lutte contre la pauvreté à travers des objectifs précis. A Ouagadougou, la Francophonie marquera une rupture fondamentale pour afficher une volonté de redevenir la carte vitale d’un monde de perdition en donnant un peu plus de confiance aux populations.

S. : Sur ce chemin de l’organisation et des préparatifs, où en êtes-vous avec les financements annoncés et quel est le coût du sommet ?

Y.O. : Après tous les arbitrages, le budget du sommet se chiffre autour de sept (7) milliards. Le budget est bouclé depuis longtemps, non seulement à travers la contribution nationale, mais aussi et surtout, le concours financier des partenaires au développement. La France a accordé cinq (5) millions d’euros, le Canada, quatre millions. Ces conventions couvrent différents volets de la mise en œuvre du sommet, de la logistique à la préparation thématique.

Le sommet en lui même va être géré avec des moyens modernes, tenant compte des technologies de pointe en information et en communication. Les prises de parole et les interventions seront par exemple, gérées par ordinateur. D’autres pays francophones tels la Belgique, la Suisse, le Vietnam, Monaco ont également apporté leur soutien à l’organisation du sommet. Ce rendez-vous sera l’occasion de l’expression de la diversité culturelle. Elle se manifestera tout ou long de la rencontre. Cet environnement culturel sera plus poignant en vue de faire comprendre à la communauté francophone que sa véritable force réside dans la culture de ses peuples.

Nous bénéficions aussi de l’appui de certains pays non francophones, mais qui sont des amis traditionnels du Burkina Faso. Ce sont l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, le Koweït, le sultanat d’Oman, etc. Ces pays apportent leur contribution sous diverses formes. D’ailleurs, l’hôtel qui est en train d’être construit est une grande participation de la Libye à ce sommet.

L’après-sommet est aussi important et les projets que l’on met en place doivent être structurels. Des réalisations qui soient capables de générer des activités et des services qui peuvent bénéficier à l’économie nationale.

Des travaux sont entrepris à la salle de conférence de Ouaga 2000 pour donner de "la couleur" au sommet. Cette reprise donnera à la fois, de la consistance et du format à cette salle qui abritera la cérémonie d’ouverture. Beaucoup de changements y seront faits.

S. : Qu’est-ce qu’un sommet comme celui de la Francophonie peut concrètement apporter à l’économie du Burkina Faso ?

Y.O. : Avant même sa tenue, le sommet a déjà apporté quelque chose à l’économie nationale. Depuis un an, l’ensemble des missions qui viennent à Ouagadougou, les colloques et les réunions qui s’y tiennent, génèrent des devises. Ce n’est pas le Burkina Faso qui paie les frais de séjour des missionnaires et des participants aux rencontres préparatoires du Sommet de la Francophonie. Ceux-ci laissent de l’argent dans les hôtels, les restaurants. Ils achètent également des produits burkinabè.

Au-delà de cet aspect capitaliste, ces missionnaires et ces participants connaissent désormais mieux le Burkina Faso et deviennent ses défenseurs à l’extérieur. Cela contribue à créer des amitiés et augmente le nombre de sympathisants du pays. En somme, une rencontre comme celle de la Francophonie décloisonne son organisateur et le restitue dans le cours de la mondialisation.

Les retombées économiques sont si évidentes. Les milliards qui sont accordés par les pays tiers pour l’organisation du Sommet vont en réalité, dans les caisses de l’économie. Le centre de presse qui sera construit, servira à d’autres manifestations après le sommet. Il est en de même des infrastructures qui viendront aider le Burkina Faso dans ses capacités organisationnelles et créer en même temps, des emplois. Les maisons TV5 qui sont en train d’être édifiées, constituent des axes de perpétuation de ce Sommet de la Francophonie. Il s’agit de mettre à la disposition des populations des espaces où elles peuvent se rencontrer et échanger sur des préoccupations communes. Ces maisons leur permettront à travers les images de s’ouvrir au monde et s’apercevoir du regard des autres.

L’écrivain Jacques Lessaune disait que "le sens premier de la mondialisation c’est que partout dans le monde, tout le monde connaît le mode de vie des autres". Malheureusement, si l’on ne dispose pas des moyens de communication, on restera en marge des enjeux de la globalisation. Et les maisons TV5 viennent corriger cet état de fait chez nos populations.

S. : Beaucoup de personnalités afflueront sur Ouagadougou lors de ce Xe Sommet de la Francophonie. Les conditions et les capacités d’hébergement sont-elles réunies pour accueillir ce beau monde ?

Y.O. : Le Sommet de Ouagadougou ne sera pas celui du grand luxe. Ce n’est d’ailleurs pas le plus important à notre entendement. C’est le rendez-vous de la dignité, de la décence et du respect pour l’Etranger. Nous croyons que ceux qui aiment le Burkina Faso ne le font pas parce que c’est un pays riche. Ils admirent ce pays à cause de sa dignité, de son organisation de son hospitalité. C’est un Etat qui a placé la bonne gouvernance au centre de ses préoccupations. Avec ses faibles moyens, le pays démontre son ardeur au travail. Il confirme qu’en Afrique de l’Ouest, il existe un Etat qui œuvre à l’avancée de l’intégration africaine et des idéaux mondiaux de justice, d’équité et de paix. Ce qui compte ici, ce n’est pas seulement le contenant mais surtout le contenu.

C’est tous ces paramètres qui entraînent un grand nombre de sympathisants et d’admirateurs pour notre pays. Toutefois, nous ferons en sorte que les sites hôteliers notamment celui en construction soient prêts avant le début du Sommet. Il y a certes eu des mutations qui ont entre temps émaillées les échéances de finition, mais le processus de construction suit aujourd’hui sa programmation normale. Et nous avons bon espoir de tenir valablement nos engagements pour la bonne organisation du Xe Sommet de la Francophonie. Pour le centre international de presse, les autorités françaises qui en ont la charge de sa construction ont donné une date précise pour la réception de l’infrastructure.

S. : Quel bilan faites-vous des contacts que vous avez eu avec les partenaires à l’étranger après le long périple en Europe et en Asie ?

Y.O. : C’est vrai que je me suis rendu en Belgique, aux Emirats arabes unis, au sultanat d’Oman, en Arabie Saoudite et en Iran. J’ai adressé le message du chef de l’Etat aux plus hautes autorités de ces pays. Je n’ai pas uniquement parle de la Francophonie. J’ai surtout évoqué le renforcement de la coopération bilatérale entre ces pays et le Burkina Faso.

Et les résultats ont été très positifs. Les échanges ont aussi porté sur le premier Sommet que le Burkina Faso organisera en septembre sur le travail et l’emploi. Cette rencontre s’inscrit dans la lutte contre la pauvreté à travers la réduction significative du chômage. Ce thème mobilise et séduit les partenaires au développement. Il est une volonté de l’Union africaine suite à une proposition du président du Faso. Ce rendez-vous affiche la volonté politique des dirigeants africains. Ceux-ci entendent s’affirmer eux-mêmes en canalisant mieux le soutien que leur apporte la communauté internationale. Désormais, les ressources PPTE serviront à la création d’emplois et participeront véritablement à la lutte contre la pauvreté.

La création d’emploi sera à la base de toutes les initiatives de développement. L’emploi permet non seulement à l’employé d’affirmer sa place dans l’économie de son pays mais aussi de survenir aux besoins de sa famille. Cette situation crée une généralisation du bien être et de l’épanouissement. C’est dire toute l’importance du Sommet de septembre qui bénéficie lui aussi du soutien de nos partenaires. En Iran, nous avons mobilisé du matériel roulant pour plusieurs millions de dollars. Il arrivera incessamment et servira lors des différentes rencontres. Mais, après le Sommet, ce matériel restera pour l’Administration burkinabè.

Voilà pourquoi, j’ai tantôt parlé de projets structurels. Nous dépassons les œuvres spontanées et mettons sur pied des réalisations concrètes, durables pour le bonheur des populations. Vitesse et précipitation ne conduisent pas toujours aux bons résultats. Les travaux de la construction de la bibliothèque de la Francophonie seront lancés lors du Sommet. Cette infrastructure deviendra le symbole de l’ancrage du Burkina Faso dans la Francophonie.

Propos recueillis par Ibrahiman SAKANDE et Jolivet Emmaüs
Sidwaya

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