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Baworo Seydou Sanou, gouverneur du Centre-Est : "La période de désunion des fils de Koudougou est révolue"

Publié le vendredi 15 février 2008 à 09h24min

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Baworo Seydou Sanou

Afin de nous imprégner des grands chantiers prévus pour être réalisés au cours de l’année 2008 ainsi que des perspectives d’emploi pour la jeunesse du Centre-Ouest, nous avons rencontré le gouverneur de ladite région, Baworo Seydou Sanou. D’autres sujets de grande importance tels que la situation agricole et le bitumage de certains axes routiers de la région ont été également abordés avec le gouverneur à travers une interview que nous vous proposons.

"Le Pays" : Pouvez-vous nous faire un bilan de l’année écoulée au plan régional ?

Baworo Seydou Sanou : L’année 2007 a été extrêmement riche en événements aussi bien heureux que malheureux. Au plan politique, nous avons participé à l’organisation des élections législatives qui se sont très bien déroulées dans notre région. Au plan socio-économique, il y a eu la tenue des Nuits atypiques de Koudougou (NAK), la préparation de la Semaine régionale de la culture que nous avons décentralisée à Sapouy dans le Ziro, la Journée du poulet à Poa, la fête de l’igname à Léo, la Journée des fruits et légumes à Réo, etc. Ces foires sont des occasions de promotion de nos produits agropastoraux. Au plan économique, on peut noter le lancement de l’exploitation de la mine de zinc de Perkoa ainsi que le lancement d’un certain nombre de programmes tels que le PAFASP, le PNGT2, etc. Au plan administratif, l’année 2007 a été une année de renforcement d’un certain nombre d’acquis, notamment les cadres de concertations régionales de développement, l’exécution de certains projets d’envergure nationale que nous avons relayés avec succès. A titre d’exemple, le recensement général de la population, l’organisation des manifestations marquant le 20e anniversaire de la démocratie de notre pays, le 47e anniversaire de l’indépendance nationale. Nous avons aussi connu des événements malheureux tels que l’effondrement de l’école bilingue (NDLR : il a causé la mort de 4 élèves), les inondations pendant l’hivernage qui ont causé beaucoup de sinistres et d’énormes préjudices à nos populations.

Quels sont les grands chantiers prévus pour 2008 ?

Les grands chantiers sont déjà en cours que nous allons renforcer. En particulier, il y a le renforcement de la décentralisation avec l’appui aux collectivités territoriales, notamment les communes rurales qui ont exécuté leurs premiers budgets, ainsi que le renforcement des capacités des organisations des producteurs.

Nous avons aussi en chantier l’organisation d’une rencontre de tous les acteurs économiques étatiques et non étatiques de la région pour qu’ensemble nous réfléchissions sur l’appui que chacun peut apporter au développement de la région. Nous allons continuer aussi à renforcer les capacités des cadres de concertations, aussi bien au niveau provincial que régional.

Etes-vous d’avis avec ceux qui pensent que la nomination de Tertius Zongo, fils de la région, va relancer le secteur socio-économique du Centre-Ouest ?

Personnellement, je ne suis pas de cet avis parce que j’estime qu’un Premier ministre est un homme investi de la confiance du chef de l’Etat pour mettre en oeuvre un programme de gouvernement. Par conséquent, il ne peut pas le faire uniquement pour sa région. Par contre, les filles et les fils de la région qui sont ses frères et soeurs doivent faire bloc derrière lui pour que la nouvelle vision qu’il veut imprimer à la marche des choses puisse se faire avec succès. Il peut favoriser un certain nombre de choses mais je ne pense pas qu’il puisse apporter des financements spéciaux pour le développement économique et social de la région parce qu’il est un fils de la localité.

Qu’attendez-vous de vos administrés pour cette année 2008 ?

J’attends de mes administrés, qui sont pour l’essentiel des acteurs du monde rural, qu’ils oeuvrent au renforcement et au développement de l’agriculture, qu’ils adhèrent à l’ensemble des politiques et stratégies de développement économique et social mis en oeuvre, en particulier l’immense réforme de l’éducation en cours et qui ne peut réussir qu’avec la mobilisation et la participation des citoyens de ce pays. Nous attendons également d’eux qu’ils travaillent à plus d’engagement au niveau de la région et à plus de cohésion, sans laquelle il ne peut y avoir de paix sociale qui, associée à la cohésion, est gage de tout développement. Nous attendons d’eux qu’ils s’investissent pour que l’esprit de civisme dont nous travaillons au renforcement puisse connaître des acquis en 2008.

Le 11-Décembre a été célébré en 2007 avec faste dans les chefs-lieux de régions, dont celui du Centre-Ouest. Quelle appréciation en faites-vous ?

J’apprécie positivement la décision du gouvernement qui a voulu que le 11-Décembre soit commémoré avec plus d’éclat. C’est une occasion de souvenirs mais aussi pour magnifier les efforts que nos devanciers ont fournis. Comme cela a été annoncé au cours du Conseil des ministres, c’est un départ pour que tous les cinq ans nous puissions le faire de façon particulière, et rien ne devrait pouvoir nous en empêcher parce que c’est l’occasion pour nos enfants et la jeunesse de se dire que la fête nationale n’est pas uniquement un symbole mais revêt certains aspects qu’ils doivent savoir et dont ils doivent s’imprégner.

Je crois que les manifestations de ce genre marquent positivement la jeunesse. Ce sont des objectifs que nous devons être fiers d’avoir atteint à travers l’organisation de ce 11-Décembre, quels que soient les moyens qu’on a pu mobiliser à cet effet.

La province du Boulkiemdé fait partie des provinces déficitaires sur le plan agricole. Quelles sont les mesures prises pour pallier cette situation ?

Les mesures prises sont des mesures préconisées au niveau du gouvernement qui visent, dans un premier temps, à pallier les difficultés de la période de soudure qui sera très longue. Il s’agit de mettre à la disposition des populations des céréales à prix social pour leur permettre de s’approvisionner et, surtout, d’éviter un dérèglement sur le marché des céréales par la rétention des stocks qui seraient au niveau des commerçants. Cette opération est capitale pour l’administration ainsi que la population. Elle est déjà en cours au niveau des COPROSUR (NDLR : Comités provinciaux de secours d’urgence) pour permettre aux familles qui sont dans le besoin de pouvoir accéder aux céréales. Les autres mesures concernent l’ensemble des dispositions prises pour permettre aux producteurs de mettre à profit la longue saison sèche pour organiser des activités de production à travers des projets de petite irrigation, en particulier les projets de maraîchage. La région du Centre-Ouest est une localité où le maraîchage est une activité extrêmement importante et qui s’exerce notamment en période de contre-saison. Nous encourageons fermement donc les producteurs à s’investir en cette période dans ces activités de production qui vont permettre de générer des ressources à même de les aider à traverser la période de soudure et même faire face à un certain nombre de difficultés qu’ils résolvaient en ayant une saison normale.

On sait que les régions ont maintenant des budgets. Quel est celui qui a été alloué à la vôtre ?

La région en tant que collectivité territoriale est différente de la région en tant que circonscription administrative. Nous assurons, bien sûr, la tutelle des collectivités territoriales pour le compte du ministère de l’Administration territoriale et celui de l’Economie et des Finances. Mais nous n’avons pas de budget, nous fonctionnons sur des crédits délégués à partir du niveau central. Avec le processus de décentralisation, les patrimoines ainsi que l’ensemble des ressources des régions ont été répartis entre les deux types de collectivités que sont les communes et les régions en tant que collectivités territoriales. C’est la région en tant que collectivité territoriale qui a un budget dont l’ordonnateur est le président du Conseil régional.

Dans le cadre de la décentralisation, est-ce que le transfert de compétences est effectif au niveau du Centre-Ouest ?

Le Cadre stratégique de mise en oeuvre de la décentralisation a préconisé des échéances au terme desquelles un certain nombre de compétences doivent être transférées aux collectivités territoriales. Tout ne peut pas être transmis immédiatement, il faut un échéancier. Au niveau des communes urbaines, le transfert de compétences est effectif concernant un certain nombre de domaines de compétences. Il y a ce qu’on appelle les blocs de compétences, dont le transfert de compétences et de ressources est en train de s’opérer au profit des communes urbaines. Ainsi, l’éducation de base, les sports, la gestion des forêts villageoises et certains domaines sociaux, qui font partie des blocs de compétences, sont en train d’être transférés aux communes urbaines.

Il est prévu, conformément à la Stratégie de mise en oeuvre de la décentralisation, que d’ici à 2010 l’ensemble des compétences soient dévolues aux collectivités territoriales aussi bien aux communes urbaines que rurales. Mais en attendant, cela se fait de manière progressive. Au niveau de la région du Centre-Ouest, les communes urbaines ont déjà reçu les textes qui consacrent le transfert des compétences pour un certain nombre de domaines. Ces textes sont actuellement en cours de mise en oeuvre.

Koudougou a longtemps souffert de la désunion de ses fils. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Il y a eu effectivement des périodes qui ont mis à rude épreuve la cohésion sociale et la bonne entente entre les filles et fils de la région. Mais aujourd’hui, cette période est révolue. Beaucoup d’efforts ont été faits de la part des filles et fils de la région et surtout de cette ville de Koudougou pour pouvoir recréer cette atmosphère de fraternité et de convivialité. Cela s’est traduit à beaucoup d’occasions où nous avons vu les violences que les gens font sur eux-mêmes, les efforts que l’ensemble des couches sociales font pour pouvoir dépasser cette période et faire en sorte que la cohésion, l’unité et la bonne entente qui sont les préalables à toute activité de développement puissent se réaliser. Nous sommes fiers de constater qu’aujourd’hui les questions sur lesquelles il y avait souvent des achoppements n’en font plus l’objet. Un certain nombre de cadres de concertations permettent aux filles et fils de la région, de la ville de se retrouver et de discuter. La responsabilisation des communautés par le biais de la décentralisation a favorisé cette cohésion. On peut dire que la cohésion sociale et la paix sont revenues et que les gens ont compris que l’essentiel, c’était de se donner la main pour construire ensemble la région, et nous les accompagnons dans cette nouvelle dynamique. Nous ne cesserons de leur dire que ce qui peut les unir est mille fois plus important que ce qui peut les diviser.

On parle depuis longtemps de bitumer certaines grandes voies dans votre région, qui devraient relier d’autres régions. Qu’en est-il exactement ?

Nous avions, à un moment donné, axé la réflexion sur la question du désenclavement de la région. C’est une préoccupation majeure des populations au même titre que les questions d’éducation, de santé et d’approvisionnement en eau potable.

Le bitumage de certains axes routiers s’avère nécessaire pour le développement de la région et son ouverture sur d’autres régions. Au moment des débats sur le Millenium challenge account (MCA), qui est un appui attendu de la coopération avec les Etats-Unis, certains axes routiers avaient été identifiés et soumis à l’appréciation. Il s’agit de l’axe Yako-Koudougou-Sabou-Léo, de l’axe Koudougou-Dédougou et de l’axe Koudougou-Réo- Didyr-Toma-Tougan. Il y a, bien sûr, d’autres axes aussi importants à l’intérieur de la région. Si tout va bien, il n’y a pas de raison que dans la mise en oeuvre des projets soumis au Millenium challenge account, ces axes ne connaissent pas de réalisation. Je ne saurais vous dire avec assurance à quelle période le bitumage va débuter mais nous avons bon espoir et nous pensons que ce projet va connaître bientôt son exécution. Nous avons par ailleurs reçu le ministre des Infrastructures et du Désenclavement ici, à Koudougou, qui nous a assurés que le bitumage de l’axe Koudougou-Dédougou était imminent car toutes les conditions étaient réunies pour le démarrage des travaux. Il y a, bien sûr, les autres routes comme Koudougou-Réo-Didyr. Avec l’exploitation de la mine de zinc de Perkoa, nous pensons que le bitumage de cette route pourrait être plus rapide. Nous croyons fermement qu’au cours de cette année 2008, la région connaîtra le démarrage des travaux de bitumage.

Quelle est la situation des axes routiers de la région à l’heure actuelle ?

Avec les inondations passées, certains axes routiers de la région ont été fortement dégradés ainsi que des ouvrages. Mais des efforts ont été faits par le gouvernement pour rendre ces axes carrossables de nouveau. C’est ainsi que l’axe Koudougou-Sabou-Léo, qui était à un moment donné impraticable, a été rechargé. Maintenant on se demande si cette route va supporter le trafic durant toute la période de l’hivernage.

Avec la fermeture de Faso Fani et l’affaiblissement du trafic ferroviaire, quelles sont les perspectives d’emplois qui peuvent s’offrir à la jeunesse du Centre-Ouest ?

Si le trafic ferroviaire n’est pas tout à fait repris, il y a quand même que la gare ferroviaire continue d’être une escale pour le transport des marchandises sur la Côte d’Ivoire. S’agissant de Faso Fani, l’usine textile a été reprise par une autre société, à savoir Fasotex, qui, aujourd’hui, a l’ambition d’aller au-delà de ce que faisait Faso Fani. Fasotex veut faire non seulement de la filature, mais aussi du tissage et bien sûr de la teinture.

Je crois que cela va générer beaucoup d’emplois. Mais tous les emplois qui seront créés ne seront pas uniquement pour les jeunes de Koudougou ni du Centre-Ouest. La politique actuelle d’encadrement et d’accompagnement de la jeunesse dans les activités du ministère de la Jeunesse et de l’Emploi met l’accent sur l’auto-emploi. C’est ce qui nous a valu ici d’obtenir un guichet unique de Fonds pour le financement des projets et des activités de jeunes. Ce guichet permettra à la jeunesse d’accéder à des financements pour créer ses propres emplois. Il y a aussi le PAFASP qui permet le développement des activités agropastorales, dont un certain nombre d’opportunités d’emplois. Nous avons aussi l’exploitation prochaine du zinc de Perkoa dont les travaux actuels sont la construction de la mine. L’exploitation de cette mine va créer également des emplois pour la jeunesse. C’est dire donc qu’il y a de l’espoir, même si beaucoup d’efforts restent à faire. Avec la confiance réinstaurée ici à Koudougou, beaucoup d’opérateurs économiques sont en train de revenir et nous pensons qu’ils vont délocaliser certaines de leurs activités ici à Koudougou avec des opportunités de création d’emplois.

En guise de conclusion ?

Je voudrais saisir cette opportunité pour non seulement remercier le journal "Le Pays" qui nous a chaque fois offert l’occasion de pouvoir nous exprimer dans ses colonnes, mais aussi féliciter l’effort fourni par la presse dans notre pays. Je profite souhaiter une bonne et heureuse année aux filles et fils ainsi qu’à l’ensemble des citoyens de la région. J’adresse à tous des voeux de santé, de paix, de bonne entente et de succès dans tout ce que nous entreprendrons ensemble dans le cadre du renforcement des acquis de 2007.

Propos recueillis par Dabadi ZOUMBARA

Le Pays

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