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Boukary Zibaré, maire de Guiaro : "Nous détenons des documents qui montrent que Kabayaro est une réserve"

Publié le jeudi 31 janvier 2008 à 10h03min

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Boukary Zibaré, maire de Guiaro

"Kabayaro, village de la commune de Guiaro, menacé de disparaître ?" titrions-nous dans la rubrique "Confidences du week-end" du 21 janvier 2008. Pour mieux savoir les raisons de cette menace, nous avons rencontré le maire de la commune rurale dont relève le village en question, Boukary Zibaré, cadre de banque.

"Le Pays" : Votre commune fait face actuellement à une situation de déguerpissement de personnes à Kabayaro. Qu’en est-il exactement ?

Le maire Zibaré : C’est vrai, Kabayaro a été un village pendant un certain temps mais plus pour des raisons d’épidémie, et il n’est pas le seul dans ce cas. Il y a au moins 7 autres entités à son image qui ne sont pas des hameaux. En fait, il n’y a pas de problème avec Kabayaro. Les gens ont pu être compris. Ceux qui habitent ce lieu sont des allogènes qui avaient dit au départ que c’était pour s’installer. Ils pratiquaient leurs cultures le temps qu’ils avaient et repartaient chez eux. Mais à un moment donné, ils ont commencé à s’installer de façon anarchique. Celui qui supervise la zone leur avait clairement signifié au départ que ce n’est pas une zone où il faut s’installer et que c’est une réserve. La zone appartient à l’Etat qui pourra en disposer à tout moment pour une activité quelconque.

Aujourd’hui, la seule ressource de notre commune est la faune. Qui dit faune, dit tourisme. Aujourd’hui, les terres de Kabayaro et autres sont en train d’être dégradées. Il y a la coupe abusive du bois, les feux de brousse, une dégradation à grande échelle. Depuis 2004, il y avait des pourparlers à ce sujet. Mais, comme le projet de mise en valeur de la zone n’était pas arrivé à maturité, on a laissé faire. Mais on ne savait pas que des gens allaient réclamer cette terre comme propriété. On s’est demandé ce qu’il fallait faire avec ces gens quand nous avons reçu des autorités de tutelle une lettre demandant au conseil de se pencher sur la question. Lorsque nous aurons ces terres qui seront aménagées, où les gens vont investir, il y aura des retombées bénéfiques pour les populations, au lieu de laisser des gens pratiquer la culture "sauvage".

Le conseil, en date du 17 novembre 2007, a donc pris ses responsabilités et a délibéré sur cette affaire-là, et a dit que dans la mesure où l’on a besoin des terres pour les mettre en valeur au profit de nos populations, nous leur demandons de déguerpir. Car il y a une ONG qui finance les ZOVIC (zones villageoises cynégétiques de chasse) qui avait identifié la zone pour son activité. Avec les ZOVIC, lorsqu’il y aura une quantité suffisante de gibier, cette partie va dans les ZOVIC. J’ai même demandé à ces gens de se faire recenser afin qu’ensemble, avec le chef de Kombili, nous voyions dans quelle mesure les recaser, mais tous ont refusé de libérer la zone.

Le conseil a décidé qu’au plus tard le 31 janvier, ils déguerpissent. Je les ai fait convoquer et ils m’ont fait savoir qu’ils n’étaient pas contre le principe mais souhaiteraient des arrangements. Je leur ai dit qu’il n’en était pas question. Toutefois, je leur ai donné jusqu’au 28 février pour quitter la zone. Bref, si vous consultez la carte de la province, il n’existe nulle part un village dénommé Kabayaro sur la liste des dix- neuf villages de notre commune. Dans les autres zones, les gens sont partis sans difficulté : Sia, Nessaré et autres. C’est dans la seule zone de Kombili (Kabayaro) qu’il y a problème. On cherche des ressources pour notre développement et pendant ce temps, une zone propice à cela est occupée par des gens qui la détruisent. Je leur avais même demandé de cotiser pour qu’on essaie de reboiser toutes les places qu’ils ont détruites et ils ont refusé de s’exécuter. Pendant ce temps, ce sont des tonnes de coton qu’il récoltent chaque année sans investir même pour la commune. Allez-y et vous verrez que ce sont des ruines.

Mais d’où sont-ils venus, ces habitants ?

Ils sont venus de plusieurs horizons. En fait, à voir de près, Kabayaro est habité par des chefs marabouts qui font de l’exploitation d’enfants. Ce sont des gens qu’il faut dénoncer. Ils sont pour la plupart des mendiants qui se promènent de village en village, cultivent pour les chefs. Des enfants de 8 ans par exemple qui cultivent pour les chefs qui les exploitent à souhait, c’est inadmissible ! Il y a même certains chefs qui possèdent à eux seuls 50 hectares où ils font travailler rien que des enfants. Bref, je ne suis pas là pour leur créer des problèmes. Mais j’invite les autorités en charge de ces questions à se déplacer dans la zone pour voir ce qui s’y passe réellement. En somme, nous détenons tous des documents qui montrent que Kabayaro est une réserve. Il y a 30 ans que la zone a été détectée. Nous sommes venus trouver une situation qu’il faut gérer, et c’est ce que nous sommes en train de faire. C’est tout. Toute la commune est d’accord pour que ces gens bougent de là comme les autres l’ont fait sans anicroche.

Quel est votre cri du coeur ?

Je vous remercie d’être venu chercher l’information à la source. C’est bien qu’il faut informer, mais c’est toujours mieux d’avoir l’information juste avant de la rendre publique. Car dans nos pays, les gens ne vérifient pas l’information et cela crée souvent des malentendus. Je souhaite que dorénavant, on ait des acteurs en face avant de traiter un sujet. Sinon il y a de l’intoxication partout, qui ne fait pas avancer les choses. Bref, Guiaro, notre commune, est potentiellement riche en faune et en flore, mais inexploitées. Je lance donc un appel à toutes les bonnes volontés, notamment les partenaires au développement, afin qu’ils soient davantage regardants sur les jeunes communes que nous sommes.

Par ailleurs, j’exhorte mes frères résidant dans les grandes villes à venir participer à la construction de leur village devenu commune. Il ne suffit pas de rester à Ouaga ou ailleurs et faire croire qu’on aime son village ou sa commune, sans rien faire. Que tous les frères qui se réclament acteurs de développement viennent s’investir. Moi, je me suis engagé à faire quelque chose pour la population. Alors, qu’ils cessent leurs critiques non constructives. On peut au moins comprendre que ces critiques soient faites dans le bon sens.

Quand quelqu’un s’active à vouloir développer sa région, son village, que ceux qui ne peuvent pas le soutenir se taisent et le laissent en paix. Je ne suis pas le seul travailleur de la zone ; il y en a plein dans nos grandes villes. Ils ont peur de venir au village parce qu’ils savent que s’ils viennent, ils ne pourront pas réussir. Ils ne mettent jamais les pieds au village et ils prétendent tout savoir. Ils ne connaissent rien du village (NDLR : le ton monte) . Toutes les semaines, moi, je suis au village car j’ai à coeur le développement. Je vous donne rendez-vous pour les tout prochains mois pour d’autres inaugurations...

Propos recueillis à Boala par Nouffou ZONGA

Le Pays

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