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Comoé : Des villageois demandent la division de Niankar en deux

Publié le vendredi 28 décembre 2007 à 13h16min

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Depuis quelque temps, la commune de Banfora procède à l’installation des Comités villageois de développement (CVD) dans les villages rattachés à sa collectivité. Si, jusque-là, tout se déroulait sans encombres, ce ne fut pas le cas le 22 décembre 2007 à Niankar. Là-bas, le processus a été émaillé de querelles entre les habitants, à telle enseigne qu’une partie du village demande la partition. Celle-ci envisage d’ailleurs de déposer une requête auprès de l’autorité compétente à cette fin.

Niankar, localité située dans l’un des bassins de la Comoé, dans la partie sud de Banfora, à une quinzaine de kilomètres, comprend quatre principaux quartiers que sont Tchikontara, Kentara, Kamombara et Sapola. A l’issue des élections municipales d’avril 2006, le village s’est retrouvé divisé en deux blocs de bords politiques différents diamétralement opposés. L’un des blocs est composé des deux premiers villages précités et s’est affiché RDB (Rassemblement pour le développement du Burkina), sous la houlette du vieux Séko Soulama, et le second composé de Kamonbara et Sapola penche pour le CDP avec pour maître à penser Badaye Sirima, ex-délégué du village.

Les deux blocs se sont partagés les deux sièges de conseillers municipaux. C’est cette rivalité politique entre les deux camps qui semble être transposée sur les élections pour la mise en place du Comité villageois de développement (CVD) le 22 décembre 2007. Des échos qui sont parvenus à Banfora après l’opération de vote, il ressort que suite à l’extraction de votants jugés trop jeunes pour accomplir l’acte dans le camp de Tchikontara, les habitants de ce quartier n’auraient pas participé au vote jusqu’à la fin. A cette extraction de votants jugés jeunes, Tchikontara ajoute d’autres irrégularités telles les menaces proférées contre certains éleveurs et l’indifférence de la mission venue de Banfora pour la supervision des votes. Afin de nous faire une idée de la situation nous nous sommes rendu à Niankar le mardi 25 décembre 2007, jour de Noël. Nous y avons rencontré les protagonistes de la crise née du vote du 22 décembre 2007.

Une vieille rivalité

La première personne rencontrée a été le responsable des éleveurs, Dembo Diallo, établi dans le village depuis 1973. Celui-ci s’est montré très réservé sur la question car, a-t-il dit, lorsque vous demandez la terre dans un village, il faut savoir comment vous comporter sinon on peut vous "serrer". Selon lui, les élections se seraient bien passées, même s’il dit ne s’être pas rendu sur les lieux du vote. "Personne ne nous a dit de ne pas aller voter mais c’est moi-même qui n’ai pas voulu m’y rendre", ajoute-t-il avant de conclure que certains éleveurs étaient sur les lieux. Toutefois, Dembo Diallo reconnaît qu’il existe, depuis longtemps, une rivalité entre les deux blocs de quartiers. Cette rivalité, selon lui, risque de compromettre le développement du village.

Le vieux Séko Soulama, par ailleurs chef coutumier du village et conseiller municipal RDB, était entouré de quelques notables du village. Leur position est sans équivoque : "Nous voulons que le village soit divisé en deux parties et que chaque partie prenne son autonomie". Ainsi, disent-ils, chacun se mettra au sérieux pour le développement de son camp. Ils donnent plusieurs raisons pour justifier leur voeu. Les hommes de Séko Soulama affirment que le bloc de Kamombara ne participe jamais aux travaux d’intérêt commun du village, leur laissant toujours les charges. Ils en veulent pour preuve la réfection de l’école et la construction d’un pont dans le village.

A cela sont venus s’ajouter certains aspects du vote du 22 décembre. "Les habitants de Kamombara ont menacé de saccager les installations des éleveurs, considérés comme des étrangers installés sur leurs terres, si ceux-ci, à défaut de s’abstenir, ne votaient pas pour leur candidat. Et sous le regard de la mission venue de Banfora superviser le vote, des enfants de moins de 18 ans ont voté dans le camp de Kamombara alors que chez nous, elle (la mission) a tenu à les extraire des rangs selon le vieux Séko et les siens." Selon les notables, les habitants de Kamombara ne se mettent pas au travail, une fois élus à un poste de responsabilité dans le village. C’est pour toutes ces raisons que les autres disent ne pas être prêts à travailler avec le bureau qui a été installé, d’autant plus qu’il est constitué uniquement de membres venant du bloc de Kamombara. Aux dires du chef coutumier, les habitants de Tchikontara ont quitté le lieu de vote après que le droit de voter a été refusé à certains d’entre eux sous prétexte qu’ils étaient jeunes.

Le vote n’est pas sujet à caution

Le camp de Sirima Badaye dit pourtant avoir proposé une composition de bureau consensuelle. Chaque bloc, ce faisant, devait proposer six personnes, soit trois par quartier. Ces douze membres allaient donc se réunir pour élire un président et attribuer les autres postes du bureau du CVD. Mais, fait savoir le camp de Badaye Sirima, les habitants de Tchikaontara n’en ont pas voulu. Se fiant à leur large domination lors du scrutin municipal, ils croyaient remporter le vote et faire de Abdoulaye Amos Soulama, fils du chef coutumier, le président du CVD. "Nous pensons qu’il ne faut pas concentrer les responsabilités du village dans un seul bloc", disent Sirima et les siens.

Lors des municipales, le vieux Séko Soulama et Massefa Soulama, élu président du CVD, avaient arrêté des clauses nous apprend-on. Massefa Soulama, qui était deuxième sur la liste après le vieux Séko, devait être le candidat quand viendra le moment de mettre en place le bureau du CVD. "Alors, pourquoi le vieux Séko refuse-t-il cette clause aujourd’hui et ambitionne de placer son fils à ce poste ?" s’interroge Badaye Sirima, pour qui le vote du 22 décembre s’est très bien déroulé. Il ajoute, par ailleurs, que les enfants de Tchikontara n’ont pas été les seuls écartés. "De notre côté également, dit-il, nous avons nous-mêmes écarté les enfants. Nous n’avons menacé aucun éleveur de déguerpissement non plus" fait-il savoir. "Présentement, nous allons nous atteler à la sensibilisation pour fléchir les positions restées figées au sortir des votes afin qu’ensemble, nous travaillions pour le développement du village" conclut Massefa Soulama, élu président du CVD.

La mise en place des CVD se présente comme un événement majeur. Il convient de sensibiliser les populations pour qu’elles connaissent les tenants et les aboutissants. En attendant, le bureau du CVD de Niankar démarre visiblement avec des difficultés. Séko Soulama et ses hommes exigent la partition du village et ont déjà rédigé une correspondance qu’ils comptent adresser aux autorités. Y aura-t-il une reprise des votes afin d’éviter la partition ? La question reste posée.

Par Mamoudou TRAORE

Le Pays

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