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Ferdinand Sandwidi, maire de Gounghin : "Les conseillers CDP sont manipulés par des politiciens"

Publié le jeudi 19 octobre 2006 à 07h52min

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Ferdinand K. Sandwidi

Une dangereuse contamination. C’est bien à cela que l’on pense, concernant la situation qui prévaut depuis quelque temps à la mairie de Gounghin, département situé dans la province du Kourittenga. De passage à Ouaga, pour une réunion de l’Association des municipalités du Burkina (AMBF), le bourgmestre Ferdinand Sandwidi s’est longuement expliqué.

Pour lui, les conseillers CDP sont manipulés par des politiciens qui veulent bloquer le fonctionnement de la mairie de Gounghin, tombée dans les mains du PDP/PS.

"Le Pays" : Parlez-nous de votre accession à la tête de la mairie de Gounghin.

Ferdinand Sandwidi : J’ai accédé à la tête de la mairie le 1er juin 2006. La bataille a été suffisamment rude. Il y avait 3 partis au niveau du conseil municipal : le CDP avec 45 conseillers municipaux, le PDP/PS avec 39, et l’UPR qui en a obtenu 3. A l’élection du maire, les gens ont décidé, certains conseillers CDP sans doute, de nous voter. C’est ainsi que nous avons obtenu 45 voix, contre 42 pour le candidat CDP.

Depuis cette date, comment les choses se passent-elles au sein du conseil municipal ?

On a enregistré quelques difficultés. Quand j’ai convoqué la première session le 30 septembre 2006, un seul conseiller CDP s’est présenté. Ce jour-là, nous étions 43 en tout, et j’ai dû reporter la session au 5 octobre 2006, pour espérer avoir le quorum requis. Nous avons, ce jour, enregistré la présence de 44 personnes, et nous avons pu tenir la session pour la 1re fois. Il y avait, pour l’occasion, 3 conseillers CDP en plus des 39 autres du PDP/PS et de 2 de l’UPR.

Qu’est-ce que les conseillers CDP vous reprochent exactement ?

On ne sait pas pourquoi ils boudent les sessions. Mais, ce qu’ils disent dans le département, c’est qu’ils n’aiment pas certains dans mon entourage, et ne voudraient donc pas que je m’installe définitivement à la tête de la mairie. Ensuite, il paraît que la famille régnante pense ne plus pouvoir contrôler le marché de Gounghin parce qu’elle me sait suffisamment rigide en matière de gestion. On me rapporte également que des ressortissants et des politiciens à Ouaga poussent les conseillers CDP à bloquer le conseil municipal pour me contraindre à la démission.

Je crois que s’il y a des problèmes avec mon entourage, ils peuvent être résolus autrement que par le blocage des sessions ou la bastonnade des conseillers. Ensuite, je ne suis pas venu à la mairie pour m’occuper seulement du marché. Il y a beaucoup de priorités en ce qui concerne le développement de la commune de Gounghin.

Il existerait dans votre département une milice qui aurait déjà bastonné des conseillers. Qu’en est-il exactement ?

Nous avons tenu notre 1re session le 5 octobre 2006. Il n’y a eu aucun problème ce jour-là parce que nous avons pratiquement travaillé de 10 h jusqu’à 16h. On s’est donné rendez-vous le lendemain matin pour poursuivre les travaux. Le 6 octobre, les premiers conseillers à arriver sur les lieux de la réunion (six au total) sont tombés dans une embuscade de jeunes gens armés de bâtons, de haches, de coupe-coupe, qui se sont mis à les frapper. Pour eux, la réunion ne devait pas se tenir à la maison des Jeunes de Gounghin.

De qui ont-ils reçu les ordres ?

Ce sont des jeunes du département. On les a vus pour la première fois le 5 octobre 2006 chez le proviseur du lycée, qui est un conseiller municipal CDP et conseiller régional au niveau de Tenkodogo. Cette milice a également pris à partie des professeurs du lycée, qui se sont réfugiés à la police. Ces enseignants sont à Ouaga et ne sont pas encore rentrés. De toute façon, j’ai porté l’information à la connaissance du haut-commissaire du Kourittenga et des autorités locales. D’ici-là, on va certainement y voir plus clair.

Justement, que savez-vous du problème du lycée départemental Saint-Joseph ?

C’est un problème de malversation, qui ne date pas d’aujourd’hui. Jusque-là, je suis le secrétaire général de l’Association des parents d’élèves (APE) du lycée parce que nous n’avons pas encore procédé à la mise en place d’un nouveau bureau. Compte tenu de mes nouvelles fonctions, je laisse les autres travailler. Mais, je connais le fond du problème. Depuis 3 ou 4 ans, l’administration ne reverse pas les cotisations au bureau APE. Il y a donc des millions qui ont été accumulés et qui constituent une dette pour l’administration. Il y a même eu un procès à Tenkodogo où l’intendant a été condamné à payer plus de 2 millions de F CFA.

Mais, jusqu’à présent, il n’a pas versé un sou. Je crois que le trésorier APE a lié sa menace de mort à cela (cf. "Le Pays" n°3728 du vendredi 13 octobre 2006) parce que n’étant pas un élu, il ne peut pas comprendre que la milice venue s’en prendre aux conseillers municipaux (le 6 octobre 2006) dise vouloir l’égorger ainsi que le Dapooré Naaba.

Jusque-là, le problème du lycée n’est pas réglé parce qu’il y a trop de dysfonctionnements. Je crois que le trésorier Ganda Sandwidi a bien fait d’attirer l’attention des autorités sur la gestion de notre lycée. Mais, il faut absolument régler le problème de ces jeunes très liés au proviseur, qui agressent des professeurs et des conseillers municipaux. Nous nous sommes fait le devoir d’informer la police et la gendarmerie.

Quels sont vos ambitions pour la commune rurale de Gounghin ?

Mes ambitions sont nombreuses et ont été consignées dans un programme de développement. Nous avons eu la chance d’avoir été appuyés par des ONG pour ficeler un plan local de développement depuis l’année dernière. Les grandes orientations se résument à l’éducation, la santé, les routes intervillageoises, l’assainissement, etc. Mais je pense qu’on aurait pu tenir des réunions pour rendre consensuel le programme.

Mais pour mettre en route des actions de développement, il faut que tous les conseillers parlent le même langage ! Avez entrepris des négociations avec ceux du CDP pour asseoir un modus vivendi ?

Le blocage, en fait, ne vient pas des conseillers CDP. Il y a des politiciens placés plus haut qui les instrumentalisent. Beaucoup parmi eux sont même prêts à travailler avec moi. Seulement, ils reçoivent des ordres. Des conseillers CDP venaient pour la session le 5 octobre dernier. C’est à quelques mètres de la maison des Jeunes (le lieu de la réunion) qu’on les a obligés à repartir.

Mais nous continuons les démarches pour les ramener à de meilleurs sentiments, malgré les mots d’ordre d’en haut. A ce propos, on cite le cas des responsables provinciaux du CDP et d’un député de la localité. Au niveau de notre parti, le PDP/PS, le député Hyacinthe Sandwidi a vu certains responsables CDP sans que la situation, pour autant, ne soit débloquée, parce que les gens ne disent pas la vérité.

Est-ce que vous êtes optimiste quant à l’avenir du conseil municipal de Gounghin ?

Je suis optimiste parce que les conseillers CDP ont commencé à comprendre et à venir siéger. Mais il faut que tout le monde vienne au conseil municipal pour parler et évoquer ses préoccupations. Je pense qu’on peut s’entendre. Il faut éviter de se laisser manipuler par des politiciens qui n’ont rien à voir avec le développement de notre commune. Certains veulent transformer les habitants en bétail électoral, juste pour se faire réélire. A l’endroit de la population, je souhaiterais que chacun mette de la mesure et de la responsabilité dans ses actes. Il faut que les gens sachent qu’on ne peut bâtir dans le désordre, la colère et la violence.

Par ailleurs, je pense que l’Administration doit rester neutre. Il faut laisser la politique aux politiciens. Autrement, dans les communes où les maires ne sont pas du parti majoritaire, il faut s’attendre à des délégations spéciales. J’espère qu’à Gounghin on n’arrivera pas à de tels extrêmes. Tirant leçon des événements survenus à Pô, où le conseil municipal a été dissous, le gouvernement doit faire quelque chose pour stabiliser la vie des communes.

Par D. Parfait SILGA

Le Pays

P.-S.

Lire aussi :
Municipales 2006

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