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<I>Une lettre pour Laye</I> : Issaka Korgo relaxé

Publié le vendredi 6 octobre 2006 à 08h33min

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Cher Wambi,

A l’instar des fourmis ailées qui ont envahi la cité, annonçant l’épilogue de la saison d’hivernale, les oiseaux migrateurs, eux, nous gratifient chaque jour de leur éternel défilé, d’un pôle à l’autre de la planète.

Pour ma part, je joins ma voix à toutes celles qui, aujourd’hui, reconnaissent et saluent les efforts que vous consentez pour accomplir votre sacerdoce, celui de nourrir à satiété aussi bien les millions de Burkinabè que tous ceux qui ont choisi de résider dans notre cher Faso.

Cette année, en tout cas, vos efforts ont été récompensés par l’abondance de pluies jamais égalée sous nos cieux ces dernières années. Oui, et il pleut toujours au Burkina en ce mois d’octobre, comme l’attestent les relevés de la semaine du jeudi 28 septembre au mercredi 04 octobre 2006, que nous devons aux services de l’ASECNA : Dori = 0,6 mm ; Ouahigouya = 11,1 mm ; Ouagadougou-aéro = 10,2 mm ; Dédougou = 57,3 mm ; Fada N’Gourma = 14,6 mm ; Bobo-Dioulasso = 46,4 mm ; Boromo = 26,3 mm ; Pô = 67,8 mm ; Gaoua = 91,3 mm ; Bogandé = 39,7 mm.


Maintenant, tout autre chose, cher cousin, pour répondre à tes fréquentes interrogations et te rassurer.

Le dimanche 18 septembre 2005, alors qu’il se rendait à Fada N’Gourma pour des raisons familiales, Alain Ludovic Tou, alors ministre de l’Emploi et de la Jeunesse, était victime d’un accident grave, nécessitant une évacuation sanitaire d’urgence. Depuis, que de versions et de commérages dans la cité, certains le donnant pour frappé de mutité à vie.

Eh bien, si sur certains aspects de sa santé, même les médecins restent prudents à se prononcer, sur la locution par contre, même des profanes sont unanimes : Ludo n’a pas perdu l’usage de la parole. J’en ai eu la certitude en joignant le couple en début de semaine. Et si je dis couple, il s’agit d’Alain et de son épouse Aïsha qui est à son chevet depuis son évacuation.

Tous les deux disent avoir le moral au regard des témoignages de solidarité multiformes qu’ils enregistrent quotidiennement. En tout cas, s’il est un souhait que nous puissions émettre, c’est que le malade, qui est actuellement en rééducation, recouvre au plus vite la santé.


Cela dit, cher Wambi, tu as sans doute entendu parler de l’histoire d’Issaka Korgo, cet entrepreneur originaire de Kaya, qui faisait la pluie et le beau temps, et à qui le journal L’Evénement a consacré tout un dossier dans son édition n°100 du lundi 25 septembre 2006. Le chapeau introductif du papier était on ne peut plus éloquent : "En 1998, il était en location. En 2003, il a acheté la maison et met son co-locataire dehors. En 2005, il imite la signature du ministre des Finances et s’octroie de faux marchés publics à coup de milliards", écrit en effet le bimensuel qui parle de fortune spontanée, de témérité à toute épreuve, d’arrogance, de corruption tous azimuts, de complicité à presque tous les niveaux (DAF des ministères, direction des marchés publics, ministère des Finances), sans oublier de solides relais au palais de justice pour s’assurer la protection du parapluie judiciaire.

Si fait que, pour l’Evénement, les poursuites judiciaires engagées par l’Etat contre le D.G de la SO.KO.COM pour "faux et usage de faux en écriture publique" n’iront pas loin. "Dans le pire des cas, tranche le journal, il goûtera aux désagréments de la prison juste pour un bout de temps et il ressortira pour poursuivre ses activités".

De fait, cher cousin, l’affaire est passée le 28 septembre dernier devant le Tribunal correctionnel de Ouagadougou au cours d’une audience en citation directe. D’entrée de jeu, le présumé a certes reconnu les faits, mais à l’issue de débats ésotériques dont les juristes ont le secret ; les avocats de la défense (Maîtres Prosper Farama et Dieudonné Bonkoungou) ont demandé la relaxe pure et simple de leur client dans la mesure où tous les éléments constitutifs de l’infraction n’étaient pas réunis.

Comme pour apporter d’ailleurs de l’eau à leur moulin, le ministère public qui est censé représenter la société a requis, tenez-vous bien, une peine de 24 mois de prison avec sursis. Et l’Etat dans tout ça ? Eh bien, cher Wambi, en son nom, le cabinet Antoinette Ouédraogo a demandé le franc symbolique au titre des dommages et intérêts. "Scandaleux tout ça" entend-on dire depuis, car, déjà que la réputation de notre justice n’était pas particulièrement reluisante, ce nouvel épisode est la preuve supplémentaire, pour nombre de justiciables, qu’on ne peut décidément rien attendre de bon de cette institution.

Le sieur Korgo savait-il donc de quoi il parlait quand, comme l’a écrit l’Evénement, il conseillait à certains de ses adversaires de ne pas perdre leur temps en allant porter plainte contre lui ? Difficile de ne pas le penser, tout comme il est difficile de ne pas penser que si les choses se passent comme cela, c’est que le bonhomme doit être adossé sur du solide.

Ça semble effectivement scandaleux, cher Wambi, de requérir seulement 24 mois avec sursis dans une telle affaire alors que de nombreux voleurs de chèvres et de poules croupissent dans nos maisons d’arrêt.

Je me suis d’ailleurs amusé à jouer les apprentis juristes et j’ai ainsi découvert qu’une personne autre qu’un fonctionnaire ou un officier public qui commet un faux en écriture authentique ou publique est punie d’un emprisonnement de 5 à 10 ans (article 280 du Code pénal). Rien à voir, comme tu le vois, avec les 24 mois de sursis.

En fait, il semble que cette "magnanimité" du parquet s’expliquerait par plusieurs considérations :
- d’abord, certains faits auraient été grossis (même par le gouvernement), car en réalité, l’accusé n’aurait pas véritablement imité la signature (on le sait, prestigieuse, précieuse et à vocation internationale) du ministre des Finances comme on l’a entendu ;

- ensuite, si l’Etat demande le franc symbolique, c’est qu’il n’aurait pas, à proprement parler, subi un préjudice financier, mais seulement moral (du moins pour l’instant) ; mais c’est oublier que de telles situations portent un coup sérieux à la crédibilité et à l’image d’un Etat, toutes choses qui ne sont pas quantifiables et n’ont donc pas de prix ;
- enfin, la Banque sahélo-saharienne pour l’investissement et le commerce (BSIC) qui a été roulée dans cette affaire ne veut pas porter plainte pour une question d’image et d’intérêts bien sûr. C’est bien connu, l’argent n’aime pas le bruit.

Quoi qu’il en soit, cher cousin, cette histoire sent le soufre dans un "pays des hommes intègres" (mon œil !) déjà pollué par des suspicions sérieuses de corruption à grande échelle.

Alors, sera-ce la descente aux enfers pour le nouveau riche déjà suspendu de l’attribution des marchés publics par le Conseil des ministres du 7 septembre 2006 ou va-t-il s’en tirer à bon compte ? C’est la grande question que je me posais au moment où je t’écrivais cette lettre, le délibéré ayant été mis pour ce jeudi 5 octobre dans l’après-midi.

Aux dernières nouvelles, j’apprends, cher Wambi, que le verdict est tombé comme suit : "Le tribunal relaxe le prévenu pour infraction non constituée, reçoit la Constitution de la partie civile du ministère des Finances et du Budget dans la forme et la rejette dans le fond et condamne l’Etat aux dépens". Les deux parties ont 15 jours pour faire appel.


Sur ce, je m’en vais t’ouvrir maintenant le carnet secret de Tipoko l’Intrigante.

- Depuis un certain temps, le bruit court sur la future libéralisation de la SONABHY. Il s’agira de céder une partie des actifs de la société à des privés. On parle même de l’éventualité de la mise en place de la bio-énergie, avec 30% d’huile de coton dans le pétrole. Bref, il est attendu dans les prochains mois un certain bouleversement dans ce secteur. Et déjà, les gros porteurs se positionnent pour ne pas manquer ce rendez-vous qui reste pour eux une véritable aubaine.


- La 10e édition du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO) se tiendra du 27 octobre au 5 novembre à venir dans notre capitale. En prélude à cette importante manifestation, les prestataires de services se bousculent au portillon, espérant engranger au maximum, financièrement parlant.

Mais si entre certains concurrents l’attribution des marchés s’est déroulée sans trop d’accrocs, tel n’est pas le cas entre la BRAKINA et la BRAFASO pour l’approvisionnement de boissons à la manifestation.

Finalement, après plusieurs coups de gueule et des échanges épistolaires fort nourris, c’est BRAFASO qui aurait eu le marché. Et après les tests nécessaires, la brasserie fondée par Mohamed Sogli entend offrir une bière de qualité à sa clientèle. Rendez-vous est, en tout cas, pris pour 2007.


- Le bonheur des uns fait le malheur des autres, dit l’adage. Et cela se vérifie aisément après la mesure salutaire du gouvernement de revoir à la baisse les prix des hydrocarbures, suite à la fronde sociale et les négociations entreprises avec les syndicats. Du côté de l’Association des revendeurs des "pompes mélangeurs", la colère monte. A l’issue d’une réunion tenue le 4 octobre 2006 au stade du 4-Août, cette association demande au gouvernement de se pencher sur son sort, et pour cause.

Ce cri du cœur du président de l’Association des revendeurs des "pompes mélangeurs" sera-t-il entendu ? Difficile d’y répondre.


- Les municipales 2006 appartiennent aujourd’hui au passé, mais la tempête qu’elles ont générée est bien loin de se calmer, et pour cause. Dans la commune rurale de Tanghin-Dassouri, par exemple, plus d’un retient son souffle après que certains conseillers ont décrété le transfert de la mairie à Bazoulé.

Point besoin de dire que si rien n’est fait et à temps, c’est assurément un autre foyer de tension que les politiciens prétentieux ouvriront dans la région du Centre. Qu’on ne nous dise surtout pas qu’ils n’avaient pas été prévenus.


- Dans la commune rurale de Kossouka, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) a raflé 37 des 39 sièges à pourvoir, laissant l’ADF/RDA et le PDP/PS se partager les deux restants. Mais bien plus tard, certains pontes du parti présidentiel ne trouvèrent pas ce score à la hauteur de leurs ambitions. Ainsi, une offre publique d’achat (OPA) est lancée pour ramener dans leur escarcelle les deux "conseillers égarés".

Aussi nous assure-t-on, malgré les tentatives d’intimidations et de corruption entreprises par un député, le conseiller du PDP/PS tient toujours bon. Mais pour combien de temps, encore que ceux d’en face ne cessent de déployer leurs forces de nuisance ?


- Ce n’est un secret pour personne, depuis le verdict des municipales du 23 avril dernier, le marché des conseillers est ouvert. C’est donc pourquoi la migration dans tous les sens de certains hommes politiques aux idéaux les plus douteux. Mais à quel prix ?

Eh bien, il nous revient que dans la province du Houet, pour obtenir la démission, pour ne pas dire la trahison collective des militants d’un certain parti, on aurait misé tout juste 500 000 FCFA. Somme qui d’ailleurs n’a pu résister à l’appétit de certains rongeurs intermédiaires, puisque chacun des démissionnaires s’en serait tiré avec.... 30 000 FCFA, dans l’attente d’autres faveurs. Mais une attente qui pourrait durer une éternité. N’est-ce d’ailleurs pas le juste prix de la trahison ?


- Aujourd’hui à mille lieux de son Burkina natal, Ouézen Louis Oulon n’en continue pas moins d’engranger des médailles. Depuis les Etats-Unis où il court toujours à la quête de l’excellence, il vient de décrocher la mention spéciale du jury du Grand Prix international de la Radio URTI (Université de la radio et la télévision internationale).

Cette distinction, pour son programme, "La rue, mon dernier refuge", proposé par la Radiodiffusion nationale du Burkina (RNB). Cet énième prix, le troisième, lui sera remis au cours d’une cérémonie organisée le 13 décembre 2006 à Radio France.

Tipoko l’Intrigante n’apprend rien d’elle-même, elle n’invente jamais rien. Tipoko l’Intrigante est un non-être. Elle n’est ni bonne en elle-même, ni mauvaise en elle-même. Elle fonctionne par intuition, car "l’intuition c’est la faculté qu’a une femme d’être sûre d’une chose sans en avoir la certitude..."

Ainsi va la vie.
Au revoir.

Ton cousin,
Passek Taalé.

Observateur Paalga

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