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Youssouf Ouédraogo : « Dans la résolution d’un problème comme la crise ivoirienne, la vitesse n’est pas la plus importante »

Publié le jeudi 25 mars 2004 à 17h55min

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Le 15 mars dernier, le ministre d’Etat, chargé des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Youssouf Ouédraogo, et M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie de la République française, ont une signé une convention précisant les modalités de l’intervention de la France dans l’organisation du Xe sommet de la Francophonie.
A l’occasion de cet événement, le ministre Youssouf Ouédraogo a été interrogé par la presse internationale sur l’état des préparatifs de ce grand événement et aussi sur des questions d’actualité de la diplomatie burkinabè.

A huit mois de la tenue du sommet, comment se passe son organisation ?

Pour le moment, le comité organisateur est à pied d’œuvre sur l’ensemble des dossiers. Que ce soit les infrastructures d’accueil, la préparation thématique, ou les raccordement avec les différents partenaires, notamment l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), avec son principal opérateur qu’est l’Agence Intergouvernementale (AIF), il y a une parfaite synergie d’action. Des missions régulières sont effectuées à la fois par l’Agence que par les différents pays partenaires (France, Canada et autres) pour nous appuyer et s’assurer que cette préparation, nous ne la faisons pas en solo, nous la faisons en convergence avec les partenaires multilatéraux et bilatéraux.

En ce qui concerne la préparation thématique, il faut rappeler que le thème retenu est : « Francophonie : espace solidaire pour un développement » car nous souhaitons que Ouagadougou soit le point de départ d’une nouvelle dynamique de ce que la Francophonie est capable de faire pour changer l’espace, à la fois en terme de solidarité (humaine, éthique et politique) mais aussi en terme de développement durable, tel que défini par le consensus de Johannesburg comme étant un point focal global, qui intègre l’ensemble des préoccupations des populations de l’espace francophone, en particulier du Sud où l’école, la santé, l’habitat continuent d’être des problèmes très importants.

La Francophonie ne peut pas porter et être un espace géopolitique utile s’il n’y a pas une prise de conscience de ce qu’il est indispensable que les objectifs du Millénaire pour le développement, à savoir l’éducation pour tous, la santé pour tous, soient réalisés d’ici à 2015. Et il y a du travail à faire car quand on regarde les tendances linéaires, il n’est pas tout à fait évident qu’en 2015, dans l’espace francophone, chaque enfant en âge d’être scolarisé, puisse aller à l’école.
Ouagadougou doit être le signal d’un nouveau pacte que la Francophonie lance pour revoir tous les indicateurs et réaffirmer les engagements pour que la Francophonie soit le véritable pole d’un développement durable et d’une nouvelle solidarité pour notre monde et pour toute l’humanité.

Les sommets de la Francophonie se suivent et se ressemblent quasiment ; est-ce que Ouagadougou sera le sommet qui restera dans les sommets comme le plus utile possible ?

P-A. Wiltzer, A. Diouf et Y. Ouédraogo

Les différents sommets, de Versailles à Beyrouth, ont porté sur des thèmes spécifiques. Si bien que cela a contribué à façonner à la fois l’identité de la Francophonie, notamment au plan institutionnel et à dégager un profil politique, à travers des thèmes sectoriels. Ouagadougou a choisi de faire une synthèse de l’ensemble des thématiques en choisissant le développement durable dans la solidarité. Pour la première fois, la Francophonie va se doter au sommet de Ouaga d’un cadre décennal qui va dégager les stratégies les plus importantes à déployer pour permettre à l’institution, à la fois de consolider son positionnement géopolitique et également d’être à même de résoudre les problèmes de développement durable.

Ce ne sera donc pas un sommet comme tous les autres, mais un nouveau point de départ où il y aura à la fois une interpellation et l’engagement pour tout le monde, pour tous les chefs d’Etat de s’aligner sur un pacte de progrès et de croissance pour la Francophonie.

Que pense le gouvernement burkinabè de la décision de la Côte d’Ivoire « d’ivoiriser » les emplois ?

Je crois qu’il a été indiqué par la Côte d’Ivoire que cette décision ne concernait pas la CEDEAO, ni l’UEMOA. Nous avons des engagements communautaires, à savoir qu’il y a la libre circulation, le libre emploi, la libre entreprise, des personnes et des biens ; des engagements auxquels la Côte d’Ivoire a librement souscrit. Dans la mesure où les autorités ivoiriennes ont précisé que cette mesure ne concerne ni la CEDEAO, ni l’UEMOA, nous n’avons pas de problème.

Est-ce pour la CEDEAO l’occasion de réaffirmer ses grands principes en matière d’établissement et de circulation ?

Tout à fait. Il faut le dire, car je crois qu’on ne le dit pas assez, la CEDEAO a fait un grand travail ces dix dernières années, à la fois pour la libre circulation mais aussi pour aider à la résolution des conflits. Parlant de la Côte d’Ivoire, il faut rappeler que la CEDEAO a déployé des forces pour que ce pays, et l’ensemble de la sous-région, retrouve la paix et la sérénité ; bien sûr avec l’appui de la communauté internationale.

Est-ce que le Burkina Faso est inquiet du retard pris dans le désarmement ?

Je crois qu’il faut se garder de penser que lorsque l’on s’engage dans la résolution d’un problème, c’est la vitesse qui est la plus importante. Ce qui est le plus important, c’est la résolution globale des problèmes, à la fois pour que les pays, leur sous région, retrouvent la paix et la sécurité. Quel que soit le retard pris, si le cheminement convient, ou permet, de réaliser les objectifs fixés, c’est l’essentiel, car une chose est de signer des accords de paix, une autre est de les appliquer au quotidien. Il faut parfois du temps pour réaliser certaines choses ; il ne faut donc pas mettre de l’impatience dedans.

Ce qui est important, c’est que les lignes de force des accords de Linas-Marcoussis puissent être mis en œuvre, avec l’appui de tout le monde. Il y a des Casques bleus qui vont arriver d’ici à deux mois et cela doit permettre de donner un environnement plus stable et favorable à la mise en application de tous ces accords, avec bien sûr, le soutien de la CEDEAO.

Pourquoi le Burkina Faso ne veut pas envoyer de contingents pour les Casques bleus en Côte d’Ivoire ?

Nous avons indiqué que nous pensons, dans le cas d’espèce, qu’il était bon que les Casques bleus viennent de pays d’autres régions pour permettre de garder et de garantir la plus grande neutralité et efficacité.

La justice burkinabè vient de décider la mise ne liberté de quatre personnes précédemment soupçonnées d’avoir participé à une tentative de coup d’Etat ; est-ce que cela veut dire que la justice fonctionne bien ou alors, était-ce des arrestations arbitraires ?

Je n’ai pas besoin de vous dire qu’en démocratie qui s’instaure véritablement, il y a le principe de la séparation des pouvoirs : lorsque la justice travaille et fonctionne bien, tout citoyen pris dans un processus d’examen quelconque, s’il est vraiment innocent, la justice qui est libre et indépendante, proclame cela ; c’est ce qui vient d’être fait.

Propos recueillis par Cyriaque Paré
Ambassade du Burkina à Paris


Cinq millions d’euros pour l’organisation du sommet

La convention signée le15 mars 2003 par les ministres Youssouf Ouédraogo et Pierre-André Wiltzer, représentant respectivement le Burkina Faso et la république française, précisent les modalités de l’aide d’un montant de 5 millions d’euros (soit un peu plus de 3 milliards de FCFA) apportée par la France à l’organisation du Xè sommet de la Francophonie.

Les volets de l’organisation pris en compte par cette aide sont :
-  le Centre International de Presse pour laquelle une salle polyvalente d’un montant d’un demi milliard de FCFA sera construite ;
-  la fourniture de moyens de transport à travers la location de quelque 240 véhicules destinés aux chefs de délégation et aux délégations officielle et non officielles ;
-  la sécurisation de la fourniture électrique de certains sites du sommet par la location de groupes électrogènes ;
-  la formation de personnels chargés du protocole et de l’accueil ainsi que de la sécurité.

Par ailleurs, aux termes de cette convention, la France participera à l’environnement culturel du Xè Sommet à travers, entre autres, la diffusion de films français et africains francophones, la danse contemporaine et la création musicale.

C. Paré

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