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Koudougou : grève et manif scolaires

Publié le jeudi 13 avril 2006 à 07h52min

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Est-ce le retour des vieux démons ? C’est bien la question qu’on est en droit de se poser quand on considère ce qui s’est passé le mardi 11 et surtout le mercredi 12 avril 2006. Ce mercredi-là, une manifestation des élèves des lycées provincial et municipal s’est transformée en jets de pierres et de gaz lacrymogène, en bastonnade et en courses poursuites. Genèse des événements.

Au départ était l’organisation des examens blancs du BEPC et du bac. Selon la version des élèves, étayée par quelques professeurs, alors que les établissements privés comme Moukassa, Wend Songda, ESPAK, Cours Placide et autres ont organisé leurs examens blancs, les deux établissements publics sus-cités n’ont pas encore fait les leurs.

La raison, l’administration refuserait de satisfaire la requête des professeurs, qui demandent une prise en charge. "Nous n’avons pas exigé quelque chose de spécifique comme de l’argent, nous voulions simplement que le proviseur du lycée provincial nous rencontre afin qu’on puisse définir la nature de cette prise en charge", nous a confié un professeur en précisant que l’administration du lycée provincial de Koudougou (LPK) n’a daigné rencontrer ni les délégués du personnel ni les syndicats d’enseignants, préférant gérer le problème seul.

"L’année dernière, les résultats des examens blancs sont venus à quelques jours des examens proprement dits. Ce qui ne permet pas d’en tirer profit pour faire des réajustements dans les programmes", soutiennent une élève et un professeur du LPK.

C’est partant de ce constat, que les élèves des classes de 3e et Tle du LPK ont pris langue avec leur proviseur pour lui demander de satisfaire la requête des professeurs afin que les examens blancs puissent se tenir.

Le proviseur du LPK a-t-il mal géré le problème ?

Dans cette optique, une rencontre entre les représentants des élèves et l’administration du LPK, le mardi 11 avril, aurait mal tourné et le proviseur de décider sur le champ d’annuler lesdits examens. Un professeur nous a précisé qu’auparavant, le proviseur avait fixé la tenue des examens blancs du BEPC et du Bac à ce même mardi 11 avril alors qu’il n’y avait même pas de sujets d’épreuves dans toutes les matières (trois pour le BEPC et deux pour le Bac) et que les professeurs n’avaient pas non plus adhéré à l’idée.

Certains avaient programmé des cours ou des devoirs. Devant l’annulation des examens, jugée unilatérale par les élèves, ceux-ci décréteront séance tenante une grève de 24 heures ce même mardi et prendront langue avec leurs confrères du lycée municipal de Koudougou (LMK), qui étaient dans la même situation. Décision fut prise de se retrouver le lendemain, c’est-à-dire le mercredi 12 avril, pour une marche jusqu’à la direction régionale du MESSRS du Centre-Ouest où une déclaration serait remise.

Ainsi décidé, ainsi fait. Rassemblement devant le LPK très tôt le matin, bloquant ainsi la nationale 14 et perturbant par conséquent la circulation. Certains usagers témoigneront qu’ils ont été pris à partie quand certains n’ont même pas reçu quelques coups de fouets dont les manifestants se sont munis.

Alertée, la police avait envoyé quelques agents pour raisonner les élèves et rétablir l’ordre. Il faut préciser qu’entre-temps, les autres classes ont été vidées, de gré ou de force, de leurs élèves, qui sont allés grossir les rangs des premiers concernés.

Dans leurs efforts pour libérer la voie, les agents de sécurité se heurteront à la détermination des élèves. Même les sages conseils du directeur régional de la police du Centre-Ouest n’y feront rien. La tension va grimper d’un cran quand les élèves du LMK répliqueront.

Interviendront des jets de pierres et des lancers de gaz lacrymogènes. On ne sait trop qui des élèves et des policiers ont commencé le premier. Ce qui est sûr, chaque partie rejette l’initiative sur l’autre. S’en suivront des courses-poursuites, des coups de matraques et de ceinturons.

Les élèves dénoncent l’intervention de la police et accusent le proviseur du LPK de leur avoir envoyé les agents de sécurité pour les réprimer. Ils nous ont informé que certains de leurs camarades ont été blessés plus ou moins gravement. Là dessus, certains passant nous ont amené voir des groupes de policiers qui "manœuvraient" ou tabassaient copieusement des élèves.

Un manifestant nous a même montré son bras en sang et des traces de coups au dos et à l’épaule. De nombreux vélos abandonnés dans la fuite ont été récupérés et déposés à la direction régionale de la police.

"Notre devoir nous commandait d’intervenir"

Des élèves et professeurs interrogés, tous affirment que le proviseur du LPK a mal géré le problème et que s’il y avait eu la concertation, cette situation aurait pu être évitée. Quand nous l’avons rencontré, le DR de la police a reconnu aussi que le problème était vraiment mineur et que si les élèves les avaient quelque peu écoutés, on n’en serait pas arrivé là.

Il nie avoir été contacté par le proviseur du LPK contrairement à ce qu’avancent certains manifestants. "Notre intervention a été motivée par le fait qu’il y avait trouble manifeste sur la voie publique, qui plus est une route nationale", a-t-il confié tout en précisant que lui-même a essayé de raisonner et de donner des conseils en vain aux élèves qui, du reste, étaient en irrégularité, car n’ayant aucune autorisation de manifester comme le veut la loi.

Il a indiqué que trois élèves ont été appréhendés et mis au violon (deux du LMK et un du LPK). Il nous a montré aussi les vélos qui ont été abandonnés et saisis. "Nous avons agi, car des passants qui ont été malmenés ou fouettés sont venus se plaindre.

En outre, qui peut prévoir les conséquences d’une telle manifestation ? Notre devoir nous commandait d’intervenir, de limiter et prévenir les dégâts", a ajouté le DR de la police de Koudougou.

Vraiment, cette situation est plus que déplorable et en ce début de dernier trimestre scolaire, les scolaires doivent être dans les classes et non dans la rue. Espérons que les élèves sauront raison garder et qu’ils ne mettront pas à exécution leur décision d’en découdre avec les deux proviseurs dès ce jeudi.

Il y a urgence à civiliser le débat et à élargir la concertation entre tous les acteurs et partenaires afin que ce feu ne soit qu’un feu de paille.

En tout cas, les mauvais souvenirs de la grande crise née du drame de Sapouy refont surface et le lacri a refait son apparition à Koudougou. Nous souhaitons ne pas avoir à y revenir.

Cyrille Zoma

Observateur Paalga

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