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Mouhoun : Les musulmans enterrent la hache de guerre

Publié le lundi 9 janvier 2006 à 07h24min

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Divisée par des querelles intestines pendant 15 ans, la
communauté musulmane du Mouhoun a enfin décidé d’enterrer
définitivement la hache de guerre. A cette veille de la Tabaski,
nous avons échangé avec son président sur divers sujets. Pour
El Hadj Adama Sidibé Sow, l’islam est un mode de vie.

"Le Pays" : Quels sont vos voeux pour cette nouvelle année qui
commence ?

El Hadj Adama Sidibé Sow : A la veille de la Tabaski, je formule
des voeux de bonheur, de prospérité pour toute la province. Je
souhaite que les autorités qui nous commandent soient en paix
pour que cela se répercute sur l’ensemble des populations. Je
leur souhaite aussi une bonne santé, parce que c’est la santé
qui fait le bonheur de tous. Lorsqu’il y a la santé, cela est
déterminant pour ce qu’on doit entreprendre. Je souhaite
également que le nouveau gouvernement puisse prendre nos
préoccupations en compte. Je souhaite enfin que les
musulmans du Mouhoun soient beaucoup plus unis. C’est vrai
que l’unité est retrouvée mais mon voeu est de voir cette unité se
renforcer et devenir définitive ; que nous ne soyons plus en
désaccord les uns envers les autres, car l’islam est une religion
de paix.

Sous quel signe sera placée la fête de la Tabaski ?

La paix, la fraternité et la concorde. Parce que c’est l’occasion
pour nous de se souhaiter la bonne fête, de pardonner
mutuellement nos rancoeurs et tout ce qui s’ensuit. Je pense
que si nous arrivons à nous pardonner mutuellement, l’année
sera gagnée.

Peut-on s’attendre à vous voir prier demain dans un lieu de
prière commun ?

La déchirure garde encore des stigmates qu’il faut panser
progressivement. Certains se sont détachés avec une certaine
rancoeur si bien que ce n’est pas avec un bâton magique qu’on
pourra faire marcher les choses. Il faut aussi reconnaître qu’en
dehors de Ouaga et Bobo, il n’y a pas de place officielle digne de
ce nom pour les prières à l’occasion des fêtes. Qu’à cela ne
tienne, nous travaillerons de sorte à avoir cette place officielle où
la prière sera dirigée par le grand imam et où les autorités
pourront venir prier en toute quiétude. Des critères objectifs
nous permettront de déterminer ces lieux.

La réconciliation entre musulmans du Mouhoun est-elle une
réalité ? Si oui quels sont les engagements que les uns et les
autres ont pris pour enterrer définitivement la hache de guerre ?

Elle est une réalité depuis un certain temps dans la mesure où
la formation du bureau est issue d’un consensus. Les imams
s’étaient déjà retrouvés pour dégager un compromis. Des
décisions ont été prises et le bureau de la communauté a été
mis en place. Le problème était à leur niveau et chacun allait de
son côté. Les cérémonies religieuses se faisaient à la limite par
ethnie. Maintenant que l’unité est retrouvée, toutes les
cérémonies se font de façon collégiale. Après 15 ans de
division, nous croyons avoir rattrapé le bon bout pour enterrer
définitivement la hache de guerre. Surtout que la génération
montante le veut. Je crois que ce sont des intellectuels mûrs ; ils
semblent être en mesure de comprendre mieux l’islam que les
autres. Le Mouhoun est une région de paix, de ce fait, il faut
savoir se comporter et se supporter mutuellement.

Quels sont vos projets à court, moyen et long terme ?

L’islam est la religion présente à 60% dans la province, voire la
région. Malheureusement, nous n’avons pas de structures
conséquentes. J’entends par-là des medersas, des écoles, des
collèges. Il serait souhaitable que nous puissions en avoir. Cela
permettra de suivre le progrès. Les projets pour nous, ce sont
les écoles, au niveau primaire et secondaire. Nous espérons,
pourquoi pas, avoir des bourses pour l’université. Ce sera une
bonne chose. En plus de cela, il serait bon que nous ayons un
complexe islamique où on peut avoir une mosquée, un
dispensaire, un orphelinat et une medersa. En somme des
structures de bienfaisance pour secourir les nécessiteux.

Comment allez-vous y parvenir ?

Nous allons nous organiser pour frapper à différentes portes.
Nous avons des enfants qui peuvent nous aider à atteindre un
tant soit peu nos objectifs. Il y a l’ambassadeur du Burkina en
Libye qui fait déjà beaucoup pour nous. Il a été un grand artisan
dans cette réconciliation. Il a doté les mosquées de matériels
de sonorisation et courant décembre, il nous a donné des
ouvrages sur l’islam. Il nous a même promis des ordinateurs et
une bibliothèque. Nous avons toujours été associés à ces dons.
Nous avons un autre fils en Arabie Saoudite qui est aussi de
bonne volonté pour nous aider à renforcer la cohésion.

Notre pays a amorcé un processus de la communalisation.
Quel rôle va y jouer la communauté musulmane du Mouhoun ?

Elle est prête à aider le gouvernement dans ce sens. Soyez
rassurés que la communauté musulmane du Mouhoun jouera
sa partition.

Quelles sont vos difficultés ?

Elles sont surtout d’ordre financier et infrastructurel. Ce sont
des oeuvres sociales qui intéressent la population. Lorsque
vous venez en aide à un homme souffrant, il vous reste
reconnaissant. Nous avions des difficultés qui ont été aplanies,
parce que chacun est content de revenir à la maison commune.
Nous avons, à l’occasion du nouvel an, constitué une délégation
pour saluer les autorités politiques, administratives,
coutumières et religieuses. Nos hôtes ont été sensibles et se
sont réjouis de cette union.

Votre coup de coeur ...
Nous avons passé 15 ans dans le désordre. Maintenant que
l’union est faite, je souhaite que les uns et les autres
comprennent que ce qui s’est passé doit servir de leçon, et que
l’on sache que l’islam est une religion de paix, d’amour.
Maintenant, il faut que les uns et les autres fassent preuve de
bonne volonté afin que nous continuions dans cette lancée.
L’islam est un mode de vie. Si on s’y attache, si on l’applique, il
n’y a pas de raison qu’on échoue. Tous les musulmans sont
des frères. A partir du moment où nous sommes des frères, il y
a un comportement qu’il faut savoir garder.

Propos recueillis par Serge COULIBALY
Le Pays

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