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7 Novembre 1982 : Un putsch anticipé

Publié le mardi 17 août 2010 à 23h51min

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L’année 1982 marque un tournant dans la vie de la Haute Volta. Deux générations de militaires que tout oppose prennent ensemble le pouvoir. Le premier groupe constitué par des officiers conservateurs avaient un environnement favorable avec un Houphouët au sommet de sa puissance. Le deuxième groupe réunissant de jeunes officiers progressistes n’avaient pour eux que l’enthousiasme de la majorité des burkinabè. Tous c’est joué sur un rien. Mais peut-être la pauvreté du pays a été un atout pour les révolutionnaires avant que les gardiens du temple ne se ravisent quelques années après pour la fin tragique de l’expérience. Retour sur les péripéties qui ont abouti au 7 novembre, prélude à la révolution d’août

L’avènement du 7 Novembre 1982 qui a consacré l’arrivée au pouvoir du médecin commandant Jean Baptiste Ouédraogo (JBO) est la conséquence d’une crise au sein du Comité militaire de redressement pour le progrès national (CMRPN). C’est la non application des décisions du Conseil des Forces Armées qui avait mis en place une commission ad hoc qui a été la cause du renversement du régime. A la base du putsch, il y avait Pierre Ouédraogo, Jean Claude Kamboulé et le futur président du Conseil du salut du peuple (CSP), Jean Baptiste Ouédraogo. Le groupe de putschistes était dirigé à Bobo par Blaise Compaoré et Jean Baptiste Boukary Lingani. Au fur et à mesure que ce groupe s’élargissait, se posait un problème de sécurité.

Le coup d’Etat du 7 Novembre a été anticipé en raison des problèmes de sécurité, alors même que des questions importantes d’organisation interne n’avaient pas été tranchées. Boukari Kaboré dit le Lion du Bulkiémdé qui en était membre du CSP, affirme que ce sont les sous-officiers qui ont fait pression pour que le putsch ait lieu le 7 novembre parce que le commandant de la garnison de Ouahigouya soupçonnait que quelque chose se tramait. Il avait instruit un sous officier de lui faire un rapport. Le cercle des putschistes se réunit dans la nuit du 5 novembre, rencontre au cours de laquelle Thomas Sankara confie son scepticisme sur le niveau de préparation politique des putschistes. Sa crainte était que cela ne joue sur la cohésion du groupe après le succès du complot. Mais la situation commandait une action urgente. C’est ainsi que la majorité opta pour l’anticipation. Sankara est pressenti pour diriger le groupe.

Jean Claude Kamboulé en était un fervent défenseur. Ce dernier connaissait suffisamment le capitaine Sankara. Il n’avait d’yeux que pour lui pour tenir les rênes de l’Etat, assure le médecin commandant Jean Baptiste Ouédraogo, témoignage tiré du livre "Burkina Faso, Cent ans d’histoire, 1895-1995, tome 1". Le Lion du Boulkiémdé abonde dans le même sens. Il avance l’argument que Sankara avait déjà fait ses preuves à Pô avec ses commandos. Il avait par ailleurs donné un autre visage à la localité. Son passage au ministère de l’Information comme secrétaire d’Etat et les résultats obtenus en si peu de temps constituaient un argument supplémentaire en faveur de Sankara. Mais à la surprise générale, confie le médecin commandant Ouédraogo, Sankara disparaît le jour j à 2 heures du matin pour ne réapparaître qu’à 5 heures du matin au quartier général du nouveau régime avec le texte de la proclamation. Problème, il refuse de prendre la tête du mouvement comme c’était convenu.

Kamboulé lui fait remarquer que tout a été fait parce que l’on comptait sur lui. Selon le Président Ouédraogo, Sankara est resté campé sur sa position de refus. Après avoir obtenu l’adoption du texte de la proclamation, Sankara propose Somé Yorian pour diriger la junte. Ce choix surprenant se heurte à l’opposition de ses frères d’armes qui tiennent Yorian pour un homme de droite, incapable de mener à bien leurs objectifs. C’est aussi l’avis du groupe des sous officiers. Devant l’impasse, chaque groupe est prié d’aller se concerter. Entre officiers, Jean Baptiste Ouédraogo demande des comptes à Sankara. Ce dernier explique que sa proposition de mettre Yorian à la tête de l’Etat est sous tendue par le souci de la cohésion dans l’Armée. Pour Sankara, le colonel Yorian pouvait faire l’unanimité dans les Forces Armées voltaïques.

Mais manifestement, le choix de Yorian ne passe pas. Malheureusement, il avait déjà été mis au courant que c’est lui qui a été pressenti. C’est au capitaine Henri Zongo qu’est revenu la délicate charge de lui expliquer le retournement de situation. C’est ainsi que l’on décida de procéder à l’élection de celui qui sera Président. Trois propositions étaient avancées : Général Tiémoko Marc Garango, colonel Yorian et le commandant Jean Baptiste Ouédraogo. A l’issue des votes, c’est Jean Baptiste Ouédraogo qui l’emporte. Ainsi, il a été porté à la tête de la Haute-Volta le 13 novembre 1982. Le Président Jean Baptiste Ouédraogo affirme que : "c’est parfaitement conscient d’une situation, longuement analysée avec Thomas Sankara, que nous avons réalisé le coup d’Etat, convaincu que Thomas serait notre chef. Tout ce qui s’est passé, par la suite, l’a été par sa volonté.

Notre mouvement qui était resté homogène de la conception à la réalisation du coup d’Etat sera ébranlé par les divergences politiques et idéologiques avec la nomination du premier ministre en la personne de Thomas Sankara." Le Président JBO accuse le Parti Africain de l’Indépendance (PAI) dont l’amitié avec l’aile gauche dans l’Armée ne souffrait d’aucun secret, d’être à la base de beaucoup la zizanie entretenue chez les militaires. Il soupçonne même Sankara et ses compagnons de recevoir des consignes de ce parti. Deux membres du PAI participeront au gouvernement du CSP1 : Ibrahima Koné au ministère de la Jeunesse et de Sport et Emmanuel Dadjoari au département de l’Education nationale n

Merneptah Noufou Zougmoré

L’Evènement

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