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Diaspora burkinabè au Gabon : Des roses et des épines

Publié le mercredi 24 juin 2009 à 04h29min

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Après la vague des années 70, le Gabon attire de nouveau des jeunes burkinabè. Il est devenu ce qu’on peut appeler l’Italie-bis puisque la majorité des immigrés burkinabè dans ce pays sont d’ethnie bissa.Dans cette aventure humaine, il y a des roses. Mais là où il y a des roses, il y a des épines.

Sawadogo X est un jeune de Nanoro. Son rêve, immigrer au Gabon. Après avoir réuni la modique somme de 300 000 F CFA, il se rend au Bénin et s’achète un billet d’avion pour Libreville. Malheureusement, de Libreville, il ne saura rien puisque son séjour s’est limité à l’aéroport Léon M’ba. Faute de document en règle, il a été ramené au Bénin le vendredi 19 juin par Air Burkina. Un rêve brisé. Peut-être qu’il va rebeloter, peut-être pas. Comme lui, beaucoup de jeunes rêvent de quitter le pays à la recherche d’un Eldorado parfois imaginaire. Le pays de Omar Bongo Ondimba, le Gabon, attire les jeunes burkinabè depuis les années 70 où le pays avait besoin de main d’œuvre pour développer son économie. Aujourd’hui, avec ses 1,5 million d’habitants et son sous-sol riche, le Gabon continue d’attirer les populations Ouest-africaines dont des Sénégalais, des Béninois et des Burkinabè.

Si officiellement, il y a 14 000 Burkinabè au Gabon, la réalité est tout autre. Selon le délégué général des Burkinabè au Gabon, Joseph Kouan Keïta, plus de 30 000 Burkinabè vivent au Gabon dont la majorité n’a pas de carte consulaire. Certains arrivent dans des conditions dramatiques parfois sans aucun document officiel, a-t-il expliqué. Depuis un certain temps, le phénomène connaît une recrudescence.

“Chaque jour que Dieu fait, un jeune burkinabè débarque à Libreville”, reconnaît Jean-Paul Koudougou, un Burkinabè résidant au Gabon.
Wendé Kaboré , jeune enseignant à Tenkodogo, plusieurs fois félicité par le ministère de l’Enseignement de base, a tout laissé tomber pour rejoindre le Gabon.
“J’ai quitté le pays à cause de la forte pression familiale qui s’exerçait sur moi, depuis la crise ivoirienne où j’ai été obligé d’accueillir les enfants de mes frères décédés” , a-t-il avoué. Et d’affirmer que sa situation actuelle lui permet d’apporter une réponse adéquate aux sollicitations familiales diverses. La majorité des arrivants est d’ethnie bissa. Jean-Paul Koudougou qui est lui-même de cette communauté, reconnaît que le Gabon est plus que l’Italie-bis. Le Gabon, à son avis, serait la première destination des Bissa. “Beaucoup de nos jeunes frères ayant quitté le Gabon pour l’Italie sont revenus”, affirme-t-il.

Quoi faire à Libreville ?

On retrouve les Burkinabè dans presque tous les secteurs d’activité. Gardiens de nuit ou vigiles, chauffeurs, couturiers ou commerçants, chacun fait ce qu’il peut pour tirer son épingle du jeu. “Peu importe le métier qu’on exerce, on s’en sort mieux qu’au pays”, a déclaré Abel Kéré qui a rejoint son frère aîné à Libreville en 2005.
En effet, ce ne sont pas des exemples de réussite qui manquent. Des exemples qui feraient venir l’eau à la bouche de potentiels aventuriers. Jean-Paul Koudougou fait partie de ceux qui ont réussi l’aventure. Il a débarqué à Libreville en 1985 et a commencé comme chauffeur dans une société. Après avoir gravi tous les échelons, il est aujourd’hui propriétaire d’une société dénommée SOLIMAR, spécialisée dans le transport et la vente de matériaux de construction.

Ses employés dont 7 permanents et une soixantaine de non-permanents sont à majorité burkinabè.
Il a, par ailleurs, fait venir d’autres jeunes qui évoluent dans le même secteur d’activité que lui. Sont de ceux-là, les frères Kéré, Emmanuel et Abel qui travaillent pour leur propre compte.
Joseph Kouan Keita, lui est un gourou du transport terrestre et maritime. Même s’il reconnaît que ses affaires ne marchent plus comme avant ces derniers temps, monsieur Keita ne demeure pas moins un grand opérateur économique. Un autre gourou qui ne passe pas inaperçu à Libreville, est Adama Yaméogo, propriétaire d’une entreprise de construction de bâtiments et de travaux pratiques (Bati-confort).

A côté de ces exemples, figurent d’autres moins reluisants. Le vieux Koa Kienou après avoir travaillé dans une grande société de télécommunications, se trouve dans une position qui l’empêche de prendre une retraite bien méritée.
Certains jeunes, dont la plupart sont en situation irrégulière faute de carte d’identité, sans un niveau minimum d’instruction, se retrouvent à faire des basses besognes.

Le retour au Faso

En effet, selon Joseph Kéita, certains jeunes Burkinabè s’adonnent à des cambriolages. Toute chose qui n’est pas sans conséquences sur l’image des Burkinabè qui, pourtant, jouissaient d’une bonne réputation depuis les années 60 au Gabon.
Ce qui force l’admiration au sein de cette communauté burkinabè au Gabon, c’est surtout son attachement au pays. Tous autant qu’ils sont, rêvent de revenir au pays après avoir amassé suffisamment de sous. Construire un logement au pays est l’obstination de ces bravers aventuriers. Emmanuel Kéré, lui qui a rejoint Libreville en 1992, vient au moins deux fois par an pour investir dans l’immobilier et le transport. Tout comme lui, beaucoup ont construit des immeubles à Ouaga 2000 ou à Tenkodogo.

En plus des investissements que chacun fait dans sa localité, des jeunes Burkinabè, en attendant le retour au bercail, se sont réunis au sein d’une association (AJBG) et tentent de promouvoir la culture burkinabè au Gabon à travers l’organisation de la fête nationale du Burkina au Gabon, et de concerts, animés par des artistes du terrain.
Toute chose qui leur permet d’être proches des leurs, même à des milliers de kilomètres.

Fatouma Sophie OUATTARA, Envoyée spéciale à Libreville

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 25 juin 2009 à 14:15, par le citoyen En réponse à : Diaspora burkinabè au Gabon : Des roses et des épines

    Merci pour cet article qui nous dépeint un tant soit peu la situation de nos frères au Gabon. En fait j’ai eu un ami gabonnais venu étudier au BF et qui ne tarissait pas d’éloges à notre endroit vu le niveau de modernisme (en effet beaucoup de ses conpatriotes croient encore que le BF est une "brousse" sans aucun confort pour le "moderne"). VOus aurez compris qu’ils se trompent : la preuve : beaucoup de gabonnais viennet aujourd’hui qui pour étudier, qui pour faire des affaires. Il faut en fait dire que le fait de rester dans son pays pour y travailler pour un jeune burkinabè dépend du type de politique menée par les gouvernants. Si ce dernier organise un cadre qui rassure davantages les jeunes, il n’y a pas à risquer parfois sa vie en voulant regarder par dessus le mur ce qu’il y a chez le voisin. Non, notre pays n’est pas pauvre. C’est dans l’esprit qu’on est pauvre. Ensuite il faut reconnaître qu’il est aussi bien d’aller chercher fortune ailleurs pourvu qu’on respecte les lois du pays hôte et les moeurs de sa population. Aussi honte à ceux qui ne font pas honneur à leur pays en se livrant à des actes indignes d’un burkinabè. Cependant l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Parfois la tentation est vite arrivée de coller certaines mauvais actes à l’étranger de façon systématique comme on le voit dans un certain pays où une des ethnies du BF n’est pas en odeur de sainteté. Triste constat et quelle erreur !! Car chaque peuple a ses brebis gâleuses au sens propre comme au sens figuré.

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