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"Géopolitique du Burkina Faso" : Le pays des Hommes intègres passé à la loupe

Publié le lundi 6 octobre 2008 à 09h44min

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"Géopolitique du Burkina Faso" est une nouvelle publication dans laquelle le Pr Jacques Barrat, Me Derek El Zein et Nicolas Lambret offrent une lecture des grands défis humains, géographiques et économiques auxquels le Burkina est confronté. L’ouvrage a été présenté à Ouagadougou, ce jeudi 2 octobre 2008, au public par ses auteurs et sous le patronage du ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique, le Pr Joseph Paré.

"Géopolitique du Burkina Faso" propose au public une lecture des forces et faiblesses du Burkina et les grands enjeux humains, géographiques, sociologiques, historiques et économique, du pays des Hommes intègres. C’est en substance ce qu’offre cet ouvrage de 294 pages qui a été présenté aux lecteurs et à la presse, ce jeudi 2 octobre 2008 à Ouagadougou. Une œuvre aussi complète sur le Burkina, écrite par un collectif d’universitaires français, peut paraître fortuit. Mais pour le directeur de cette publication, le Pr Jacques Barrat, il n’en est rien. "Le Burkina Faso est un pays que je connais bien que j’aime bien. Je pense le connaître assez bien pour être en mesure d’écrire un ouvrage bien documenté et sérieux sur ce pays", a soutenu celui qui clame son "africano-optimisme".

Il veut, par cet écrit, montrer aux Français que le Burkina Faso n’est pas la caricature qu’on en fait. En plus, "lorsqu’on veut avoir une idée sur ce pays, on a peu de témoins et peu de personnes à qui s’adresser", a-t-il rappelé. "Géopolitique du Burkina Faso" est, en effet, une œuvre qui explore l’histoire de notre pays depuis la période précoloniale (avec les empires mossi) et coloniale jusqu’à nos jours. Les auteurs font le point de tous les régimes d’exception et démocratiques qui se sont succédé au Burkina. Pour eux, après une longue période de tâtonnements après les indépendances, le pays a retrouvé des couleurs, ces deux dernières décennies. Sur le plan culturel, avec le FESPACO, le SIAO, la SNC…
Ils estiment avec certitude que le pays rayonne. Et ce rayonnement s’avère même bien supérieur à ce qu’on serait en droit d’attendre d’un Pays moins avancé (PMA).

"Le Burkina Faso, un exemple à suivre"

En outre, sur le plan humain, selon le Pr Jacques Barrat, le Burkina Faso grâce au dynamisme, au courage et au sérieux de ses habitants, héritiers des valeurs de l’ancien empire mossi, se présente comme "une nation solide, raisonnable et fiable".

Au terme des 15 chapitres que contient l’ouvrage, Jacques Barrat et ses coauteurs démontrent le rôle diplomatique déterminant que joue le Burkina depuis quelques années maintenant dans la résolution des conflits qui ont déstabilisé l’Afrique subsaharienne. Sur le plan démocratique, avec l’adoption d’une constitution en juin 1991, "le Burkina est un Etat qui se rapproche de l’Etat de droit (…) Et je voudrais que tous les pays africains suivent l’exemple de ce pays", affirme Jacques Barrat.

Cependant, "Géopolitique du Burkina Faso" ne se contente pas seulement de peindre le Burkina Faso sur un ton chatoyant et mirifique. Dès l’introduction, il est révélé que le pays des Hommes intègres "compte parmi les pays les plus pauvres de la planète". Cette situation est due aux problèmes pérennes liés à un climat qui se dégrade d’année en année, un réseau hydrographique qui ne favorise pas l’irrigation et à des sols trop souvent ingrats. Bref, pour les auteurs, la pauvreté reste généralisée, le sous-emploi est un fait patent, la santé et la nutrition laissent à désirer…

De plus, "l’éducation est sans doute le problème numéro un pour des Burknabè", écrivent-ils. En dépit de ces chapelets de contraintes, le Pr Jacques Barrat estime que le Burkina s’en sort malgré tout, et ce, grâce au courage, à la détermination de sa population et à la clairvoyance de ses dirigeants.

La cérémonie de présentation du livre, a vu la participation d’un nombre important d’universitaires burkinabè. Parmi eux, figurait le Pr Albert Ouédraogo de l’Université de Ouagadougou qui a assuré la critique de l’œuvre pour le public. Il a reconnu que l’ouvrage est un repère pour une bonne connaissance du Burkina Faso et permet d’entrevoir l’avenir.
Comme toute œuvre humaine n’est jamais parfaite, déclare Albert Ouédraogo, le document présente des insuffisances et des prises de position, notamment dans sa partie historique qui pourrait faire l’objet de controverse. Pour lui, il s’y dégage un anti-sankarisme et "tout porte à croire que les régimes (surtout révolutionnaire) qui se sont succédé n’ont rien apporté de tangible au pays. Les anciens chefs d’Etat méritent du respect".

"Je ne suis pas un idéologue"

A cette critique, Jacques Barrat répliquera qu’il a écrit ce qu’il savait avec le maximum d’objectivité possible. "L’ouvrage que nous présentons aujourd’hui contient 270 notes de bas de pages, autant de références et un nombre considérable d’autres écrits de plusieurs auteurs sur le Burkina", clame le Pr Jacques Barrat, avant de conclure "c’est une œuvre d’universitaires. Je suis incapable d’être un idéologue. Si j’ai fauté idéologiquement, j’assume et je suis prêt à réécrire ce que j’ai écrit".

Le ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique, le Pr Joseph Paré, présente aussi à la cérémonie a reconnu que certains chapitres du document, notamment l’historique, peuvent être sujet à polémique car l’histoire n’est jamais d’accord sur tous les éléments ou sur le contenu des événements. Pour lui, "il n’empêche que l’essentiel est dans cet ouvrage et il pose les jalons de la construction de la nation burkinabè".

Qu’à cela ne tienne. Etudiants, élèves, chercheurs, ont désormais entre les mains une œuvre qui leur permettra une connaissance complète du Burkina Faso. Le Pr Jacques Barrat n’entend pas s’arrêter en si bon chemin.

"Géopolitique du Burkina Faso", qui s’inscrit donc dans la collection "Géopolitique du XXIe siècle" et dirigée par lui-même, inaugure une série d’autres ouvrages à paraître également sur l’Albanie, la Bulgarie, le Liban et d’autres pays africains comme le Niger, le Mali et le Sénégal. L’objectif étant de fournir une analyse géopolitique des grands espaces économiques et culturels, ainsi que des principales constructions politiques des nations du monde.

Sié Simplice HIEN (hiensimplice@yahoo.fr)

Sidwaya


Géopolitique du Burkina Faso
Jacques Barrat, Derek El Zein, Nicolas Lambret

Editeur : SEM
Paris, septembre 2008, 290 p. , 25 euros

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Vos commentaires

  • Le 18 janvier 2009 à 15:52, par niinasooba En réponse à : "Géopolitique du Burkina Faso" : Le pays des Hommes intègres passé à la loupe

    Je pensais trouver dans cet ouvrage une véritable étude universitaire sur la géopolitique du Burkina Faso, puisque les auteurs sont des professeurs reconnus (comme c’est d’ailleurs lourdement rappelé dans l’ouvrage). En commençant à parcourir ce livre, dès les premières pages j’ai eu comme un sentiment bizarre. Dès les premières pages en effet, les auteurs rappellent aux lecteurs que cet ouvrage a reçu l’aval de Monsieur Blaise Compaoré, président actuel du Burkina Faso et d’ajouter qu’il a offert une aide importante dans sa réalisation. Dans ce court passage, M. blaise Compaoré reçoit sa bonne dose de flatteries.

    Plus loin les auteurs effectuent quelques rappels sur le Burkina, sa géographie, sa population, etc.
    " [...] les peuls descendent des Touarèg du nord-est [...]" p.39
    Cheikh Anta Diop doit se retourner dans sa tombe, tout comme la plupart des chercheurs toutes disciplines confondues. Puis plus lons lorsqu’il s’agit d’analyser la culture Burkinabè, on aperçoit une courte partie sur le cinéma Burkinabè. Quelle riche idée ! Il est vrai que le cinéma burkinabè et les cinémas africains en général sont très en marge des études universitaire, notament du point de vue géopolitique, mais il est intéressant de noter l’ironie d’une note de bas de page " [...] citons pour être tout à fait complet, S. Pierre Yamégo [...] " et après la liste de ses films primés dans des grands festivals de film, oublient lamentablement le dernier film de Yaméogo, Delwende, qui reçu le prix un certain regard au festival de Cannes en 2005. Oui, ils sont tout à fait complets...Pour continuer à être complet, les auteurs avancent aussi, dans le domaine du cinéma, la date de 1968 pour la cration du festival de cinéma qui se déroule en Tunisie, les Journée Cinématographique de Carthage...qui est créé en 1966. Deux ans d’erreur, ce n’est surement pas bien grave pour un continent sans histoire...

    Toujours sur la culture Burkinabè, "l’impact des élites culturelles du Burkina, en dépassant les frontières du pays, a fait de ce dernier, le nouveau Quartier Latin de l’Afrique". Il me semble que dans cette phrase nous pouvons observer trois énormités intellectuelles justement. D’abord cette comparaison, sur un ouvrage concernant l’Afrique est tout à fait déplacée et démontre de manière exemplaire la vision franco-centrée de cette étude. Ensuite il apparait évident qu’après avoir encensé le président de Faso, les auteurs font une nouvelle fois preuve d’une absence catastrophique de neutralité et affiche leur parti pris pour la glorification du Burkina Faso et de son gouvernement. La troisième erreur méthodologique dans cette affirmation est évidement la place hégémonique donnée à la culture burkinabè. La culture burkinabè est effectivement depuis longtemps une priorité gouvernementale et pour un pays qui compte parmi les plus pauvres du monde, la culture occupe une place de premier ordre dans les revenus du pays, et elle rayonne de part le monde. Mais affirmer que le Burkina Faso est le nouveau Quartier Latin de l’Afrique est tout à fait scandaleux dans le sens où cela rejette les autres pays au rang de "province" ou de "banlieues" de la culture. Les maliens, les sénégalais, les camerounais et tous les africains doivent se sentir extraordinairement bafoués par une telle affirmation, qui, comme pendant l’exposition coloniale, tente de hiérarchiser les cultures...

    Si l’on peut penser que les dernières remarques sont de l’ordre du détail, les auteurs marquent encore leur allégeance au régime Compaoré lorsqu’à la page 78 il est écrit "comme s’accordent à dire les observateurs du monde entier, la liberté d’expression qui règne depuis deux décénnies y est pour beaucoup", à propos de l’exportation de la culture burkinabè. Oui la liberté d’expression règne depuis vingt ans dans ce pays, c’est à dire depuis 1987, l’assassinat de Thomas Sankara par les actuels membres du régime. Date à partir de laquelle Blaise Compaoré s’est attaché à éliminer toute existence de dénonciation. Il n’est plus à rappeler le rôle de la sphère présidentielle dans l’assassinat de Norbert Zongo, qui doit se retourner dans sa tombe lui aussi avec pareille déclaration. SamsK le Jah entretenu dans le précédent numéro de billet d’Afrique et d’ailleurs, ne pourra que confirmer, malheureusement, ce que je dis. D’ailleurs, les auteurs trouvent juste de qualifier l’assassinat de N. Zongo "d’égarement du régime".

    Blaise Compaoré, le facilitateur...c’est par ce titre que commence le chapitre sur le rôle du président du Faso dans le règlement des crises dans la sous-région. Effectivement Compaoré facilite beaucoup des pays comme la Sierra Leone ou le Liberia, la Côte d’Ivoire ou l’Angola, en envoyant des militaires soutenir des gouvernements de tyrans, ou en armant des rebelles, ayant plutôt fait œuvre de déstabilisation de l’Afrique de l’ouest. S’il ne fallait qu’un exemple de soumission à la sphère dirigeante du Burkina pour pouvoir réaliser cet ouvrage, cette dernière citation suffirait.

    Dans cette partie consacrée à la politique Burkinabè, les auteurs critiquent sans nuance la période de la Révolution du 4 août 1983, menée par Sankara et Compaoré. Il est évident que cette période fut une époque où les droits de l’homme souffrirent, où la démocratie fut absente, et le totalitarisme la règle. Mais il faut aussi rappeler que cette période permit au Burkina de devenir auto-suffisant en céréales, dépassant de très loin la moyenne des autres pays sahélien, c’est aussi une période où la femme pu œuvrer pour son émancipation, soutenu par le gouvernement, et bien d’autres points positifs encore. Il est évident que pour un travail de chercheur universitaire, cette critique sans nuance, visant plutôt à glorifier et légitimer le pouvoir actuel, meurtrier de cette révolution. Paradoxe surprenant toutefois lorsqu’il est écrit que le véritable homme pouvant renverser le régime de Jean Baptiste Ouédraogo, précédant la révolution, était Blaise Compaoré.

    Ce livre ne décèle aucune étude de fond, aucune analyse politique véritable et souvent utilise des raccourcis très inspiré par une condescendance trop classique, encore en 2009.
    L’analyse du nombre de logements lotis en rapport avec le sexe du chef de ménage est un de ces exemples. Une légère majorité de ces ménages sont gérés par des femmes, ce qui permet aux auteurs d’affirmer : "Cela démontre s’il en était besoin, les qualités de gestionnaires de femmes Burkinabè". Tout comme l’explication de la devise révolutionnaire "la patrie ou la mort, nous vaincrons !". Les auteurs explique donc cette devise par un proverbe mossi (probablement juste aussi), ethnie majoritaire, ethnie du président, sans référence aucune à la révolution cubaine, quelques années plus tôt, où le commandant Ernesto Che Guevara et Fidel Castro lançaient à chaque meeting, chaque réunion, chaque discours politique de la révolution, la devise suivante : "La patrie ou la mort !". Ces auteurs n’y voient là aucun lien, mais nous sommes en droit d’en douter lorsqu’on sait que le Burkina révolutionnaire était un allié de Cuba et Sankara un admirateur de Ernesto Che Guevara.
    Préjugés, raccourcis et analyse de surface, ne sont pas les apanages de recherches universitaires. Pourtant ici, cette méthodologie est de mise. De là à dire que cet ouvrage est commandé par le régime Compaoré nous ne le pensons pas, mais que les auteurs soient à sa botte, il n’y a pas loin. Dire que cet ouvrage est incomplet, léger et sans analyse, c’est la moindre des choses. Est ce un souhait délibéré ou une soumission ? En tout cas c’est une erreur scandaleuse pour un ouvrage qui se veut exhaustif.

  • Le 25 avril 2009 à 21:59 En réponse à : "Géopolitique du Burkina Faso" : Le pays des Hommes intègres passé à la loupe

    Le livre doit apporter quelque chise au lecteur. A ce titre il est la bienvenue.
    Mais la prétention est grande. Et demander à tous les Pays africains de suivre l’exemple du Burkina Faso est une faute grave . Car c’est un pays qui figure sur la liste des Etats révisionistes de la constitution. la passassion du pouvoir a été faite suite à un bain de sang.....
    L’histoire est têtue mais la psychose deumeure.
    Certes les burkinabais se battent pour vivre et pour faire la courbe journalière.

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