A cette cérémonie tout aussi symbolique du 8 juillet 2008 à l’ambassade de notre pays en France, Bernard Kouchner, le ministre français des Affaires étrangères, n’a pas trouvé mieux que d’envoyer son chef adjoint du Protocole. Malgré tout, le service Presse de l’ambassade du Burkina à Paris a eu la politesse d’immortaliser l’événement à travers un article paru dans les médias, notamment dans notre édition du week-end et qui disait entre autres : « En recevant les copies figurées des mains de l’ambassadeur Tiao, M. Nicolas de La Grandville lui a souhaité la bienvenue au nom du ministre des Affaires étrangères. Il l’a félicité pour sa nomination en qualité d’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Burkina Faso auprès de la République française ».

No comment. Pendant qu’on y est, Bernard Kouchner aurait pu confier cette mission à un stagiaire du ministère que ça n’aurait étonné personne outre mesure. Imaginons un peu qu’au Pays des hommes intègres, un diplomate français qui doit y installer ses pénates soit reçu par l’adjoint du protocole du ministère des Affaires étrangères du Burkina Faso. Certains pourraient penser que nous cherchons des poux sur des crânes rasés, puisqu’il ne s’agit là que d’une remise de copies figurées de lettres de créances. Mais, avouons tout de même que l’on aurait pu trouver mieux que cet obscur agent du Quai d’Orsay qui n’avait d’autre choix que d’exécuter la mission à lui confiée.

Vraiment, ces Blancs-là ne nous respectent pas, ne nous rendent même pas la politesse. Combien de fois le ban et l’arrière-ban de la presse nationale a été invité à Kosyam pour faire le pied de grue parce que le président du Faso reçoit un sous-fifre venu de chez les Gaulois. Tous y passent et sont reçus avec tous les égards qui ne sont même pas souvent dus à leurs rangs : consultants, conseillers et conseillers spéciaux, experts, émissaires et autres ministrions.

Autres lieux, autres mœurs. En Europe et en Amérique, combien de fois un chef d’Etat rase les murs avant d’être reçu par son homologue qui ne prend même pas la peine d’aller l’accueillir à sa descente d’avion. L’exemple de cet immeuble d’hôtes, située en face de la Maison-Blanche où des dirigeants étrangers végètent avant que Bush ne daigne leur envoyer un sous-secrétaire, est édifiant. Si cette attitude pouvait être une occasion pour Blaise Compaoré de faire passer au tamis ces nombreux demandeurs d’audience, d’illustres inconnus venus de l’Occident qui se pressent au portail de la présidence ce serait déjà bon. S’il n’a rien d’autre à faire et qu’il reçoit ces visiteurs parce qu’il s’ennuie, comme le disait quelqu’un, il n’a qu’à dire, on va lui trouver du travail.

Car en se foutant ainsi de nos représentants, ces messieurs se moquent du même coup de la République et de nous tous. Il est vrai que la main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit mais ça fouetterait tellement notre orgueil national si on pouvait appliquer à ces gens qui nous méprisent tout le principe de réciprocité. Et on rêve de ce jour béni où le représentant de cette « douce et généreuse » France sera reçu par Séraphin Bayala, le directeur adjoint du protocole d’Etat.

Issa K. Barry

L’Observateur