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Vie chère : Une trêve sociale, ce n’est pas trop demander !

Publié le mardi 20 mai 2008 à 11h30min

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Un choc pétrolier des plus sévères, une crise alimentaire mondiale, un dollar instable, l’année 2008 n’est pas rose pour l’économie planétaire. De fait le baril de pétrole brut a établit un nouveau record à 126,98 dollars US ce mardi 13 mai. Une fluctuation à la hausse qui n’est pas prête de s’arrêter car certains experts n’excluent pas le prix record de 200 dollars le baril du brut d’ici fin 2008.

Concomitamment à un pétrole si cher, sévit une flambée jamais égalée des prix des produits alimentaires. La tonne de riz, aliment de base pour presque 50% de la population mondiale, se négocie actuellement suivant les qualités, entre 750 et 1000 dollars. Mais après le cyclone ravageur qui a frappé la Birmanie, l’un des pays exportateurs de la denrée, les experts craignent de nouvelles hausses du prix du riz. Du reste, anticipant sur une pénurie probable de la denrée, des pays exportateurs comme le Pakistan, l’Inde ou le Cambodge ont fermé leur marché aux exportateurs. Ces interdictions d’exporter du riz aggravent les tensions du marché international des céréales. Sur le plan financier, le dollar US, la monnaie de référence de l’économie mondiale continue sa fluctuation dévaluante face à l’Euro. Cela n’est pas pour rassurer les marchés boursiers, les investisseurs et les ménages. Toute chose qui fait évoluer le ralentissement de la croissance mondiale vers la récession notamment aux Etats - Unis où la crise financière liée aux crédits immobiliers à risque n’est pas totalement résorbée.

Le moins qu’on puisse dire c’est que dure, dure est la conjoncture économique mondiale. Les responsables syndicaux burkinabè n’ignorent pas cela. L’expliquent-ils objectivement à leurs bases ou se contentent-ils d’adhérer aux coups de gueule simplistes du genre : « ils n’y a pas d’argent ? Qu’ils (les gouvernants) se débrouillent, qu’ils ramènent au pays ce qu’ils ont détournés ». On ne fonde pas des actions de revendication, des grèves et des négociations sur de telles légèretés de monsieur tout le monde. Le partenariat social gouvernement syndicat ne doit pas être un vain mot. Il a besoin de plus de consistance et d’engagement de chaque partie pour que, au-delà des intérêts catégoriels bien compris, il tienne pour primordial la sauvegarde de l’intérêt national. C’est une question de responsabilité citoyenne, de maturité individuelle pour éviter d’être un mouton de panurge, à la remorque des événements, les nerfs à fleur de peau, prompt aux manifestations de rue quand le sérieux de la situation exige la sérénité et la réflexion prospective.

Pour sérieuse, la conjoncture économique mondiale l’est vraiment pour les pays en voie de développement comme le Burkina. En effet, dès le mois de janvier, le très sérieux Forum économique mondial de Davos qui réuni chaque année la crème des décideurs économique et politique de la planète l’avait prédit : l’année 2008 présente le niveau le plus élevé d’incertitudes économiques et politiques dans le monde depuis 10 ans. Ces incertitudes liées à des risques pour le système financier, pour l’accès à la nourriture et à l’énergie se confirment au fil des mois renvoyant les experts à leurs calculettes pour revoir, mois après mois, le taux de croissance de l’économie mondiale à la baisse.

Mais en vérité, ce n’est pas seulement les variables de mesure de l’économie mondiale qu’il faut revoir. C’est aussi et surtout les théories économiques, les pratiques sur les marchés internationaux et les choix de production qu’il faut revisiter. Faut-il continuer d’aduler le tout libéral et l’omnipotence du capital financier privé quand l’un et l’autre sous leur meilleur auspice, l’économie de marché, se révèlent incapable de résoudre le problème le plus primaire du genre humain : se nourrir décemment ?

La mondialisation et les règles de l’OMC ne montrent-elles pas déjà leurs limites quand des entorses aussi flagrantes que le protectionnisme nationaliste revient rapidement face aux difficultés économiques ? De fait, en lieu et place d’une concertation régionale, continentale voire mondiale pour envisager des solutions communes à même de juguler la vie chère, chaque pays est laissé à lui-même face à ses difficultés propres. Or des solutions parcellaires ne sont pas à mesure de résorber la vie chère.

En l’absence donc d’une solidarité internationale digne du nom, les Burkinabè feraient bien de promouvoir une solidarité nationale agissante. Endiguer l’impact de la vie chère sur le vécu des citoyens doit être perçue comme l’affaire de tous, y compris des syndicats. Ce n’est pas seulement une affaire de Blaise Compaoré et de son gouvernement. Chaque citoyen peut et doit apporter sa pierre, aussi petite soit-elle. A l’Etat de favoriser l’approvisionnement du marché national en denrées alimentaires à de meilleurs coûts, d’encourager une plus grande productivité de l’agriculture et le développement de sources d’énergie alternative au pétrole. Aux partenaires sociaux notamment les syndicats, d’éviter les revendications populistes, les débrayages improductifs, les troubles à l’ordre public. Le Burkina a besoin d’une trêve sociale pour relever par le travail, le défit de la prospérité économique, seul gage de meilleures conditions de vie pour tous.

Djibril TOURÉ

L’Hebdo

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