LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Ports de Lomé et de Téma : Les transporteurs burkinabè face à une féroce concurrence

Publié le lundi 21 mai 2007 à 07h04min

PARTAGER :                          

Les ports de Lomé au Togo et de Téma au Ghana sont le point de convergences d’importantes quantités de marchandises burkinabé depuis que la crise ivoirienne. Mais une féroce concurrence, parfois déloyale, est livrée aux transporteurs burkinabè représentés par l’OTRAF (Organisation des transporteurs routiers du Faso). Une situation rendue encore plus précaire par le mauvais état du parc automobile burkinabè.

A Lomé et à Téma, les ports sont l’épicentre de l’activité économique. On comprend donc l’attention particulière que les autorités attachent aux performances de ces structures en vue d’attirer chaque jour plus de clients. Et le Burkina pèse lourd dans la balance. Au Togo, il est le premier client du port et de la SAGA avec 341 000 tonnes de marchandises importées en 2005. D’où les clins d’œil faits à ce pays. Yves Maillot est le directeur transit de SAGA Togo. Il vit donc du fret qui passe par le port de Lomé dont ses bureaux sont contigus.

Il n’hésite pas à jouer les VRP du port dirigé par un officier supérieur de la marine dont il loue les efforts en vue de satisfaire les importateurs et exportateurs burkinabè. La SAGAelle-même multiplie les initiatives pour garder ce fret si précieux. Le record de transit time (temps mis entre l’arrivée de la marchand au port et son déchargement au Burkina) que détient sa société est, selon M. Maillot, la preuve de son intérêt pour les opérateurs économiques burkinabè.

Mais il ne peut réussir ce transit time de 16 jours en moyenne (contre 20 à 27 pour Téma et 22 pour Abidjan, selon M. Maillot) s’il n’est pas entouré de partenaires sérieux, en l’occurrence les transporteurs à qui revient la responsabilité de convoyer la marchandise en toute sécurité et dans les délais requis à destination. Et c’est là qu’entre en scène, notamment, l’Organisation des transporteurs routiers du Burkina (OTRAF) à qui la SAGA confie le transport jusqu’au Burkina de son fret. "Nous avons de très bonnes relations avec l’OTRAF", confie Yves Maillot.

Le chef de service Transit et hinterland de la SAGA et de la SDV, Abel Sanou, est encore plus précis sur les relations qui lient sa société à l’OTRAF : "Nos rapports sont précis avec l’OTRAF. A partir de la règle selon laquelle 70% des marchandises doivent être traitées par le pays d’accueil, l’OTRAF, le CBC (Conseil burkinabé des chargeurs) et le syndicat togolais (UNATROT) se réunissent pour la répartition du fret. L’OTRAF centralise alors l’ensemble des données sur les transporteurs et nous fait des offres". La SAGA et la SDV, deux filiales du groupe français Bolloré, traitent exclusivement en effet avec l’OTRAF dont les membres, selon Abel Sanou, sont animés d’un "sentiment patriotique très fort".

Défendre les intérêts des "BF"

Animée par une équipe de cinq personnes, la représentation OTRAF de Lomé a pour rôle premier de défendre les intérêts des transporteurs burkinabè, en veillant à ce que tout le fret qui leur revient de droit ne leur échappe pas. La représentation est coordonnée par un personnage jovial et dynamique, toujours accroché au portable pour répondre aux multiples sollicitations qui l’assaillent, Check Batibié de Yaguibou. En même temps que le port de Lomé, il coordonne aussi celui de Cotonou.

Présent à son poste depuis 1987, il connaît le monde du fret comme sa poche. Voici comment il définit les missions de sa structure : "L’OTRAF est au Togo depuis 30 ans en même temps que la Chambre de commerce. A l’époque, elle s’appelait Syndicat national des transporteurs de Haute-Volta. Nous avons des bureaux à l’intérieur et à l’extérieur du port. Nous représentons tous les transporteurs burkinabè sans distinction. L’essentiel pour nous, c’est l’étiquette "BF" sur le camion qui nous oblige à lui prêter notre concours. Nous avons un registre dans lequel sont enregistrés tous les camions. L’Union des chauffeurs routiers du Burkina (UCRB) détient aussi un registre pour noter l’ordre d’arrivée des camions. C’est leur représentant, Marcel Souley, qui fait l’appel quand on a besoin de véhicules.

Une fois l’appel fait, l’agent de l’OTRAF fait une demande de bon de chargement qu’on envoie à l’UNATROT qui confirme. C’est au vu des demandes de bon de l’OTRAF et de l’UNATROT que le Bureau de fret délivre un bon de chargement définitif. Une fois en possession de ce dernier document, le chauffeur pénètre dans le port pour procéder au chargement". A toutes les étapes de la procédure, le transporteur qui possède une remorque s’acquitte de divers frais dont 10 000 F CFA à l’OTRAF, 10 000 au CBC, 2 000 à l’UNATROT, 1 000 à l’URCB et 1 000 à l’URT (Union des routiers togolais). Pour le chargement des camions citernes, les transporteurs versent 500 F CFA à l’OTRAF, 1 000 à l’UCRB, 2 500 au CBC et 1 000 à l’URT.

Le chargement du fret burkinabè dans le port de Lomé a obéi à une clé de répartition arrêtée de commun accord entre les autorités des deux pays. Le coordonnateur de l’OTRAF explique : "Le protocole d’accord dit que les marchandises en transit au port de Lomé pour le Burkina sont réservées pour 2/3 à nos transporteurs et 1/3 aux Togolais. Mais ce qui est produit localement est réparti à égalité entre les deux parties." Cependant, Check Batibié de Yaguibou émet des réserves quant au respect strict de cet accord : « Le fret qui est bien payé, c’est-à-dire celui qui transite par le port (conteneurs, divers), est très rarement transporté par les Burkinabè. Les camions RT ont la possibilité de nous arnaquer à tout moment car ils prétextent aller au Niger et au Mali alors que leur vraie destination est le Burkina." Pour l’OTRAF, il s’agit de transport frauduleux de fret qui porte un grave préjudice aux Burkinabè. D’où son souhait de voir les autorités burkinabè exercer un contrôle très sévère pour endiguer le phénomène. Dans ce domaine, l’exemple nigérien peut être utile au Burkina.

Au pays de Mamadou Tandja, tout véhicule transportant des marchandises sans le quitus du syndicat nigérien des transporteurs routiers est frappé d’une amende pouvant aller jusqu’à 300 000 F CFA. Le représentant de ce syndicat à Lomé, Harouna Boukari, n’a donc pas de souci à se faire. Il lui suffit de faxer à Niamey les numéros d’immatriculation des camions dûment enregistrés et gare aux fraudeurs qui se feront prendre. "Les cas isolés qu’on attrape, on leur tire les oreilles", soutient-il, serein. Puis d’ajouter : "Si l’OTRAF n’est pas soutenue au pays, elle ne peut pas lutter efficacement contre le non-respect des quotas".

Quand les clandestins entrent dans la filière avec les véhicules RT, ce sont les Burkinabé qui trinquent puisqu’ils doivent attendre plus longtemps au port pour avoir du fret. Le siège de l’Union nationale des transporteurs togolais (UNATROT) est tout proche de celui de l’OTRAF. Les deux structures entretiennent de très bonnes relations et partagent les mêmes préoccupations sur le fret illégalement transporté.

Dans son bureau cossu, le président de l’UNATROT, Agbéré Komalou, est soucieux. L’évasion du fret porte aussi préjudice à son syndicat car des véhicules qui disent charger pour la ville de Korogho déchargent finalement leurs marchandises au Burkina. "La fraude nous embête beaucoup et fait que le quota n’est pas respecté", se plaint M. Komalou qui ne manque jamais l’occasion d’évoquer ce problème de concurrence déloyale avec les autorités de Ouagadougou. Sa satisfaction au président de l’UNATROT, c’est d’avoir un seul interlocuteur avec qui discuter, à savoir l’OTRAF. "On ne peut pas avoir deux ambassadeurs dans un même pays", lâche-t-il.

De leur côté, les chauffeurs évoquent des difficultés propres à leur métier. Pour le cas des Burkinabè, la situation est particulière puisque les chauffeurs, en plus de conduire, sont chargés par leurs patrons de récupérer l’argent du transport. Selon le représentant de l’Union des chauffeurs routiers, Marcel Souley, les relations sont bonnes avec le patronat mais l’on ne manque pas de se dire certaines vérités quand les choses clochent.

Selon Souley, le paiement parfois tardif de certains reliquats pose problème. L’OTRAF, qui est chargée de verser ces sommes est prise entre les procédures des grandes sociétés et l’impatience des chauffeurs et transporteurs à entrer dans leurs fonds. Le représentant de l’OTRAF à Lomé, Paul Kaboré, est donc obligé de talonner les entreprises qui gèrent le fret pour faire accélérer les paiements. Mais il arrive que lui-même soit impuissant, comme ces longs jours fériés de la fin avril et début mai avec les fêtes de l’Indépendance et du 1er mai. A Lomé, il faut aussi compter avec un facteur de taille qui paralyse les activités : les nombreuses coupures d’électricité.

De Lomé à Téma, même combat

En dépit de ces obstacles, l’OTRAF se fait un point d’honneur à satisfaire au mieux les transporteurs. D’abord en suivant pas à pas le véhicule jusqu’à son arrivée à la frontière, ensuite en accourant au secours du camionneur en difficulté. C’est aussi le quotidien des hommes de Cheikh Batibié que d’intervenir partout où un camionneur burkinabè est en difficulté sur les territoires togolais et béninois.

Un chauffeur témoigne : "Je roulais de nuit et en voulant éviter un cycliste, mon camion est entré en collision avec un car de passagers qui venait en face ; le bilan fut de 6 morts. Je me suis évanoui dans le choc et c’est à mon réveil que j’ai compris la gravité de la situation. L’OTRAF m’a assisté à l’hôpital jusqu’à ce qu’on décide de m’enfermer. Là aussi, elle a entrepris des démarches auprès de la gendarmerie et de la justice qui ont permis ma libération au bout de deux semaines." Sur le corridor béninois, le représentant de l’OTRAF a enregistré, en 2006, 31 cas d’accidents dont 8 mortels avec 14 décès. Chaque fois qu’il en a été informé, le représentant dit avoir fait le déplacement sur les lieux de l’accident. Il recommande cependant aux transporteurs d’être à jour de leurs assurances.

Le port de Téma est à quelques encablures de celui de Lomé (environ 250 km), mais c’est tout un autre monde. Première différence, la barrière linguistique. La langue anglaise est un véritable obstacle pour nombre de chauffeurs et transporteurs burkinabè. Beaucoup de chauffeurs arrivent comme à l’aventure, parce qu’ils ont entendu parler de la présence du fret. En outre, à la différence du Togo, le Burkina n’a pas encore signé d’accord bilatéral avec le Ghana pour la répartition du fret.

C’est sur la base d’une convention entre l’OTRAF et le syndicat des transporteurs ghanéens, que le fret est géré, non sans difficultés. "Il n’ya pas encore d’accord au niveau étatique qui clarifie la coopération entre le Burkina et le Ghana", reconnaît Victor Kassoum Fofana, représentant de la Chambre de commerce à Téma. Lorsqu’un camion burkinabè arrive à Téma, il se présente à l’OTRAF où il est enregistré. "Si nous avons l’information du fret, indique Ismael Cissé, représentant de l’OTRAF à Téma, nous sortons le registre et nous allons à un lieu appelé le Hangar des chauffeurs, pour faire l’appel. Nous établissons un bon de chargement qui les autorise à avoir accès au fret". En principe, le fret est la possession du CBC quand il arrive au port.

L’OTRAF, en tant qu’affréteur, est alors contactée pour une mobilisation des camions pour le transport. Mais il se trouve que des transporteurs, comme à Lomé, contournent le CBC et l’OTRAF, pour s’adresser directement à des transitaires. Pour Ismael Cissé, cette situation ne peut pas durer : "Il faut une organisation entre le CBC et l’OTRAF qui puisse nous amener à contrôler les accès et les chargements à l’intérieur du port. Si nous y parvenons, tout le fret reviendrait au CBC et nous jouerions mieux notre rôle de transporteur officiel". Le représentant de l’UCRB à Téma, Gaston Dembélé, est d’avis qu’une certaine pagaille règne à Téma : "Présentement, le désordre n’arrange personne. Chacun cherche son propre profit de façon égoïste. Or une meilleure organisation permettrait à tous les transporteurs de trouver leur compte".

Dramane L. Zoundi est le représentant du CBC à Téma. Il n’ignore pas la particularité de la gestion du fret au Ghana : "J’avoue que nous rencontrons des problèmes avec les Ghanéens qui arguent du fait qu’aucun accord bilatéral ne leur est opposable. Mais nous nous en tirons grâce à nos bonnes relations avec le Conseil national de la sécurité qui nous appuie beaucoup, la Direction du port et la Douane. Tous ces intervenants nous facilitent quelque peu la tâche.

Actuellement, nous arrivons tant bien que mal à juguler les fraudes. Nous avons mis en place un comité chargé de veiller à ce qu’aucun camion ne puisse avoir accès aux ports de Téma et de Takoradi sans passer par l’OTRAF et le CBC". Cette précaution est d’autant plus indispensable que des cargaisons entières disparaissent parfois dans la nature au grand dam de l’importateur qui a contourné les structures officielles. A titre d’illustration, il faut savoir qu’un camion de 40 tonnes de riz ou de sucre a une valeur d’environ 40 millions de FCFA.

Echanges de bons procédés ghanéo-burkinabè

Les transporteurs ghanéens, eux aussi, se disent victimes du non-respect des accords signés en 1999 entre leur syndicat, le GPRTU (Ghana private road transport union), et l’OTRAF. Le secrétaire général du syndicat, El hadj Karim Idrissou, d’un ton posé et de façon méthodique, égrène ses griefs. D’abord, il estime que les transporteurs ghanéens n’arrivent même plus à obtenir le 1/3 du fret qui leur revient, conformément à la clé de répartition.

Ensuite, son syndicat est confronté à un problème de cotisations : les transporteurs burkinabè refusent de lui verser 2 000 F CFA à chaque chargement et convoient des marchandises à son insu. Enfin, il reproche aux Burkinabè de ne pas appliquer la réciprocité en matière de transport intérieur. Ainsi, des Burkinabè chargent au Ghana pour le marché intérieur alors que cette pratique est interdite aux Ghanéens de passage au Burkina.

L’OTRAF est en activité à Téma et à Takoradi, sous la houlette de Sayouba Dianda, un pionnier qui a ouvert le chemin du Ghana aux transporteurs burkinabè. Son représentant à Téma, Ismael Cissé, explique : "Notre rôle principal est de défendre les intérêts matériels et moraux des transporteurs du Burkina et de leur assurer le plus grand trafic par rapport aux marchandises. L’OTRAF n’est pas une association à but lucratif.

Les 10 000 F CFA que chaque transporteur verse sont réutilisés au profit des chauffeurs en difficulté. Nous sommes une association qui prend en compte tous les problèmes des transporteurs représentés par leurs chauffeurs". Il ya quelques semaines, l’OTRAF est intervenue pour éviter à un chauffeur de citerne burkinabè d’aller en prison. La pratique au Ghana, c’est qu’en cas d’accident, le chauffeur est gardé en prison jusqu’à ce qu’il comparaisse devant le juge. L’OTRAF intervient en signant une caution pour la libération du chauffeur, tout en promettant de le présenter au cas où on aurait besoin de lui.

Cette caution engage l’OTRAF. "Et nous prenons ce risque quelle que soit la nature du problème pour qu’on ne jette pas le chauffeur en prison", ajoute M. Cissé. Plusieurs cas se posent aux responsables de l’OTRAF comme des chauffeurs sans ressources dont il faut assurer l’alimentation, des chauffeurs malades qu’il faut soigner, etc. Il ya même des cas de décès avec leur lot de procédures compliquées, comme l’explique M. Cissé : "S’il y a un décès, le corps est forcément transféré à la morgue ; il faut aller chez le juge et à la police. Il faut payer une tombe pour l’inhumation. Tout cela, nous le faisons ici au profit des Burkinabè. Nous avons un rôle social très important.

Si nous demandons les 10 000 F CFA, c’est pour tout cela. Mais nous ne refusons pas d’aider un chauffeur parce qu’il n’a pas payé. Nous ne faisons pas de distinction ; tous ceux qui viennent ici sont des Burkinabè et nous les traitons au même niveau". Structure centrale de mobilisation des moyens de transport dans les ports togolais et ghanéens, l’OTRAF, comme l’affirme Abel Sanou de la SAGA/SDV Togo, est une structure "qui assume ses responsabilités". Et, avec ses partenaires, elle œuvre au quotidien à servir le transport et l’économie burkinabè.


SAGA-SDV-OTRAF : partenaires pour le Burkina

SAGA et SDV, deux filiales du groupe Bolloré spécialisées dans le transport et la logistique, ne jurent que par l’OTRAF et le Burkina. A Lomé et à Téma où elles sont solidement implantées, elles se font un devoir de traiter avec le plus d’efficacité possible le fret à destination du Burkina. Le coton burkinabè est entièrement géré par le groupe qui dispose d’entrepôts d’une capacité de stockage de plus de 40 000 tonnes. Jour et nuit, 300 agents travaillent à empoter le coton (mettre dans les conteneurs). Avec une capacité d’empotage de 2 000 tonnes jour, la SAGA arrive à éviter tout engorgement, de sorte que le coton est vite évacué.

Des mesures de sécurité draconiennes ont été prises pour protéger le coton qui arrive par balles. Outre un terre-plein aménagé et gardé par des militaires pour accueillir les camions en attente, des pompiers sont en permanence postés au niveau des immenses magasins où est stocké le coton. Pour Jean-Luc Pallix, un des responsables du fret à Saga, il y a une histoire d’amour entre son groupe et le Burkina. Au-delà des affaires, tous les cadres de SAGA et de SDV militent pour la remontée du cours du coton et surtout pour la suppression des subventions américaines.

A l’export, ces deux sociétés évacuent d’autres produits venant du Burkina, notamment le sésame. A l’import, l’aide alimentaire vient au premier rang, suivie du ciment, du vrac (riz, huile, blé, etc) et des engrais dont plus de 15 000 tonnes étaient attendues au port de Lomé. Tout ce fret, SAGA et SDV le gèrent exclusivement avec l’OTRAF. "Nous travaillons avec l’OTRAF pour le respect de la clé de répartition, explique Jean-Luc Pallix. Nous la connaissons depuis longtemps et il n’ya pas de raison que les choses changent".

A 250 km de là, Laurent Puerta de SDV Ghana a exactement la même considération pour l’OTRAF : "Nos relations avec l’OTRAF se sont développées et se sont améliorées depuis la crise ivoirienne". Pour M. Puerta, il existe "un accord de confiance réciproque" entre la SDV et l’organisation de transporteurs. Il ne manque pas d’évoquer, en souriant, les pressions que Sayouba Dianda, le coordonnateur pour Téma et Takoradi, exerce sur lui pour le déblocage rapide des fonds à remettre aux propriétaires de camions.

"On a en face de nous des gens qui connaissent leur métier, ce qui permet d’atteindre les buts qu’on se fixe", ajoute-t-il. Le port de Téma connaît en effet une fréquentation plus accrue des pays de l’hinterland depuis l’éclatement de la crise ivoirienne. Il est devenu un axe majeur d’acheminement des marchandises du Burkina. Un exemple concret : la SDV a actuellement un marché de transport d’environ 1 200 tracteurs commandés par le Burkina. Elle le fait en collaboration avec l’OTRAF.


Vétusté des véhicules : un danger pour les Burkinabè

Tous les professionnels du transport à Lomé et Téma sont unanimes : le parc automobile burkinabè est très vétuste. La concurrence se fait aussi sur la qualité du matériel roulant. Or sur ce terrain, le Burkina part perdant. C’est ce qui justifie d’ailleurs que certains transporteurs et transitaires aient recours à des véhicules ghanéens et togolais bien meilleurs, quitte à violer le sacro-saint principe du 2/3, 1/3. Au contraire des Ghanéens qui ont la culture du transport routier, Laurent Puerta de SDV Ghana estime que les francophones et en particulier les Burkinabè ont un parc vieillissant. Le représentant de l’OTRAF à Téma, Ismael Cissé, parle de manque de professionnalisme chez nos transporteurs : "J’avoue que les transporteurs ne nous rendent pas la tâche facile.

On aurait souhaité qu’ils soient beaucoup plus professionnels. Beaucoup de transporteurs semblent avoir démissionné. Ils se contentent de ce que le chauffeur vient leur remettre alors qu’ils devraient exercer un contrôle plus strict à partir de Téma jusqu’au lieu de déchargement. Ce laxisme ne permet pas un bon entretien des camions car les recettes ne sont pas à la hauteur des attentes". Face à des véhicules en mauvais état, certains opérateurs économiques font appel à des transporteurs ghanéens même quand le fret revient aux Burkinabè.

De même, les camions BF sont disqualifiés quand on veut des véhicules de grand tonnage ou adaptés pour le transport de produits spécifiques comme les conteneurs ou le goudron. La tendance chez certains opérateurs économiques est d’exiger des véhicules pouvant charger jusqu’à 70 tonnes, ce qui va à l’encontre des limites imposées par la carte grise au Burkina. Bien entretenir et renouveler le parc, tels sont les défis qui se posent aux transporteurs du pays des hommes intègres largement submergés par la vague de la mondialisation.

Le représentant de la Chambre de commerce à Téma est aussi d’avis que les Burkinabè gagneraient à améliorer l’état physique de leurs véhicules : "Si l’OTRAF peut inviter les propriétaires des camions à les entretenir, cela nous permettra de transporter nos marchandises avec nos propres moyens". A Lomé, Abel Sanou de la SAGA/SDV donne le même conseil à l’OTRAF en lui suggérant d’être beaucoup plus regardante sur la qualité des véhicules. Comme quoi, pour espérer rivaliser avec leurs collègues des pays côtiers, les transporteurs burkinabè n’ont d’autre alternative que de moderniser leur parc de camions.

Par Mahorou KANAZOE Envoyé spécial

LE Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)