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Affrontements militaires/policiers : Les deux policiers dorment depuis hier au cimetière de Taab-tenga

Publié le mercredi 27 décembre 2006 à 08h23min

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Les deux policiers morts au cours des affrontements armés entre forces de sécurité et militaires dans la nuit du 20 au 21 décembre 2006 ont été inhumés hier dans la soirée au cimetière de Taabtenga. C’est dans la sobriété et la consternation que de nombreux frères d’armes ont rendu un dernier hommage à leurs ex-compagnons « morts les armes à la mains ».

14h30, à la morgue de l’hôpital Yalgado. Une foule, constituée à majorité d’hommes en tenue, occupe, silencieux, les locaux abritant la morgue. Au fond de la cours, des éléments de la compagnie républicaine de sécurité (CRS), Kalachnikovs, en main, forment une haie. On distinguent par ci, des gendarmes et des douaniers, par là, des policiers (nationaux et municipaux) et des gardes de sécurité pénitentiaires. Sont également là, en civil, tous les treize directeurs régionaux de police, présents dans la capitale au moment de la canonnade.

Dans une petite salle, sont disposés en face d’une petite rangée de chaises, deux cercueils en bois tous peints en vernis rouge. L’un est frappé d’une croix à la couleur dorée et l’autre, d’une étoile qui semble logée dans un croissant lunaire. Y sont mis en bière, l’assistant stagiaire de police Laurent Tiendrébeogo et l’agent de police Sayouba Ouédraogo, tous deux morts à la direction générale police nationale au cours de la fameuse nuit des longs canons.

Arrive à 14h45, vêtu d’un costume sombre, le ministre de la Sécurité Djibril Bassolet, précédé quelques minutes plus tard du directeur général de la police Thomas Dakouré et de ses proches collaborateurs. Après une brève prière séparée faite aux morts, les deux cercueils sont immédiatement placés dans deux véhicules 4x4.

15h00. Vrombissement des moteurs de véhicules et d’engins. Rapidement, l’équipe de reportage s’engouffre elle aussi, dans sa fourgonnette. A l’opposé du cortège funèbre, nous prenons, dans un premier temps, la direction du cimetière de Goughin, lieu de l’inhumation comme cela nous a été précédemment annoncé, avant de rallier, par voies détournées, le quartier Taabtenga. Selon une source émanant de la police l’enterrement, initialement prévu pour le cimetière militaire de Gonghin ne s’ y est finalement déroulé à cause des risques palpables de nouveaux affrontements.

16h20, au cimetière de Taabtenga. La longue file de véhicules arrive sur l’aire de sépulture. Quelques policiers assurent l’ordre. Les deux véhicules mortuaires après moult manœuvres, stationnent l’un à côté de l’autre. Des coups de pioches continuent de retentir du fonds des tombes. Les... ne sont toujours pas prêts. Comment alors une longue attente d’environ une heure et demi.

Soudain, des CRS se mettent au garde à vous. Les deux cercueils, porté par d’autres hommes de tenues sont déposés sur des bancs en face des tombes. Le directeur général de la police, représentant le ministre de la sécurité avance. A côté de lui, un officier de police tient en main son discours. Silence dans la foule. D’une voix pathétique, le chef de bureau des opérations Justin Kondé entame son oraison funèbre : « Une fois de plus, la famille policière vient d’être plongée dans le deuil... ». Sanglots de femmes dans l’assistance. La voie monocorde de policier se poursuit

« En effet, c’est suite comme nous le savons tous, à une expédition, semble-t-il, punitive contre des fonctionnaires de la police et ses installations, qu’ils sont tombés, les armes à la main ». Après un bref rappel de la très courte carrière des défunts policiers (5mois pour Sayouba Ouédraogo et simple période de stage pour Laurent Tiendrebeogo), le son d’une trompette retentit. Honneurs aux morts. Place ensuite à la mise en terre. Le cercueil de l’assistant stagiaire descend sans grandes difficultés, contrairement à celui de l’agent dont les dimensions obligent à un réajustement de la creusure du fonds.

A la fin de la sépulture, un jeune homme pleure à se fondre les yeux. C’est le frère cadet de Sayouba Ouédraogo. Instituteur dans la province du Boulkiemdé, il était en congé à Ouaga lorsqu’il a été informé par direction de la police, le samedi 23 décembre de la mort de son aîné. « Au lendemain des affrontements, lorsque nous avons commencé à nous inquiété parce qu’il n’est pas rentré, on nous a dit qu’il était en mission.

C’est trois jours après que l’on nous a annoncé au téléphone que Sayouba a été tué », explique Hassane Ouédraogo, les yeux embués de larmes .Puis d’ajouter le regard tourné vers la dernière demeure de son frère : « A la morgue, nous avons constaté que son corps a été criblé de balles et portait des traces de tortures ». Cette dernière versions sera d’ailleurs, confirmée par source policière évoquée plus haut et qui nous apprendra par la suite que le bilan macabre serait en réalité de cinq morts côté militaire, deux chez les policiers et au moins trois civils tués.

Alain Saint Robespierre
Adama Ouédraogo Damiss

L’Observateur

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