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Politique : A la recherche du mérite...

Publié le lundi 4 décembre 2006 à 07h42min

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Depuis quelques années, l’idée de candidatures indépendantes aux différents scrutins est dans l’air, objet de débats dans l’opinion publique. Des comportements d’élus sont, parfois, fortement décriés, mettant à mal la notion même du choix véritablement démocratique.

Il est vrai que le mode de désignation des candidats reste l’apanage des bureaux politiques, ce qui ouvre la voie à toutes sortes de supputations et critiques acerbes. Souvent, la représentation est loin d’être conforme à la volonté du corps des citoyens.

Dans un pays où la stratification sociale impose très souvent le respect de certaines valeurs et considérations, la question ne pouvait rester longtemps simple objet de discutions, et c’est sans doute la raison pour laquelle le Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples a jeté ce pavé dans le jardin des citoyens pour recueillir 15 000 signatures, afin de lever certaines dispositions du Code électoral, notamment ses articles 154 et 246, stipulant que ‘’... ne peut se présenter aux élections municipales et législatives que toute personne étant dans un parti politique’’...

Comment les concepteurs de cette idée la voient-ils ? Comme une simple proposition logique, ou un concept juridico-politique indiscutable ? Il s’agit, selon eux, d’amener le Burkina Faso à respecter ses engagements contenus dans les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui consacrent le droit reconnu à tout citoyen de prendre part à la gestion des affaires publiques de son pays, et de militer ou non dans un parti politique ; de soutenir et traduire dans les faits les principes fondamentaux de la démocratie.

La pétition en faveur de candidatures indépendantes et ce qui se dit autour fait sortir de l’ombre la notion de parti politique, laquelle, tous constats faits, tend de jour en jour à devenir importante : pour certains, le parti constitue un refuge sûr, une entité quasi infaillible qui pense pour eux et dit : ‘’Inutile, c’est comme ça qu’il faut faire !’’

Il faut dire qu’au lieu de se bonifier, à l’instar du vin au fil des ans, la classe politique et ses partis semblent offrir d’année en année une image peu reluisante. Et, pour certains individus, qui en savent sans doute un peu trop sur le sujet pour ne pas s’en mêler, les partis politiques constituent simplement un désastre, une espèce de tyrannie moderne qui noie l’individu dans une masse en lui ôtant sa personnalité. Mais, comme d’autres ‘’francomanies’’, qui tiennent souvent lieu d’imagination à la classe politique francophone, le système de partis est fortement ancrée dans la tradition burkinabè...

Faire évoluer les choses, exorciser les mauvais esprits en purifiant la classe politique, c’est là, dit-on, le vœu des défenseurs de la pétition qui trouvent dans le principe des candidatures indépendantes la reconnaissance du mérite intrinsèque du citoyen, un moyen de révéler certaines personnalités à l’esprit plus rassembleur. Pour eux, la conception des Droits, qui ne saurait être limitée par quelque autorité légitime, reste intangible.

Au sein des partis politiques, la ‘’généreuse’’ idée du Mouvement des droits de l’Homme anime des débats plutôt ambigus : la création de partis étant, généralement, l’œuvre d’un individu, ou d’un groupe qui y mettent leur énergie et leur argent, il n’y est souvent pas aisé de laisser fuser ses pensées profondes. Du reste, certains partis semblent bien trop sûrs d’eux pour se laisser enfermer dans les limites de la logique et de pétitions...

À quelques mois des élections législatives et face à un certain silence, on croyait enterrées les discussions qui avaient entouré le renouvellement du bureau de la Commission électorale nationale indépendante. Il n’en est rien et certains cercles continuent de penser qu’il faudrait remettre ce ‘’travail’’ à l’Administration ; comme par le passé. Ne serait-ce pas là une tendance purement juvénile à vouloir d’une chose et son contraire ? Chacun sait ce que la mise en place de cette commission aura coûté, en débats et en énergie.

Les Burkinabè seraient-ils de ceux qui aiment le changement pour le changement ?
À dire vrai, l’idée d’une neutralité de l’Administration ne serait qu’une simple vue de l’esprit, presqu’un leurre : on ne peut que difficilement tracer une ligne rouge entre le politique et l’administratif. À preuve, dans tous les États, il existe certains postes qu’aucun gouvernement ne saurait céder à des adversaires ou à des éléments prétendument neutres. En tout, l’important serait plutôt de s’armer de vigilance...

Dans certaines provinces, déjà, la pétition du MBDHP connaîtrait un écho assez favorable pour des raisons diverses : combien d’élus sont-ils fréquemment en contact avec leurs électeurs ; mieux, combien d’agents de l’État se réinstallent-ils dans leurs terroirs à la fin de leur carrière ? Des questions assez troublantes pour des hommes et femmes qui ne voudraient plus passer pour du simple ‘’bétail électoral’’...

À l’étape actuelle de la démocratie au Burkina Faso, beaucoup pensent cependant que la pétition, considérée par certains comme une pression à visées multiples, ne puisse, pour l’heure, constituer une thérapeutique efficace pour un ancrage plus solide de la démocratie au Burkina Faso. Mais les Burkinabè sont loin d’être des aveugles de l’histoire qui se donnent de bonnes raisons de ne rien voir de ce qui se passe autour, alors laissons faire le temps !

A. Pazoté

Journal du jeudi

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