La victoire contre le Sénégal ne qualifie pas les Etalons pour la CAN’2008. Du reste, à l’issue des deux journées, le Burkina se classe en 3e position (3 pts et +0) après la Tanzanie (4 pts) et le Sénégal (3pts+1). C’est une victoire qui fait simplement espérer pour la suite qui s’annonce plus difficile. Les Etalons ont gagné beaucoup de galons dans le jeu tactique. Ils ont maîtrisé un match perdu d’avance sur le papier.

Battre les équipes redoutées et échouer lamentablement devant les petits poucets semble être le fort des Etalons. Il n’y a qu’à se rappeler le Kenya (CAN’2004) et le Cap-Vert (éliminatoires CAN’2006). Le Sénégal et ses stars ont échoué. Les Étalons, enorgueillis par cette belle performance, doivent faire un bilan de ce match, se remettre en cause et se remettre au travail avant la 3e journée prévue en mars 2007.

Saboteur ou l’audace

De ce bilan qui doit être fait sans complaisance, il y a le risque responsable que l’entraîneur national a pris en toute liberté.

"Saboteur nous a tués !". C’est l’exclamation d’un confrère après avoir consulté la feuille de match juste avant le coup d’envoi le 7 octobre dernier. Il n’avait pas tort. Lorsque l’on observe le classement de Saboteur de près, on se rend compte qu’il y a pris un énorme risque. Les juniors Yssouf Sanou du RCB et Bakary Koné (EFO) n’ont été appelés dans la sélection que le 6 octobre, c’est-à-dire la veille du match. Ils sont venus et ils ont donné raison à Saboteur qui a aussi préféré le portier Soulama de l’ASFA-Y à Mohamed Kaboré de l’ASEC d’Abidjan. Il a mis sur le banc Abdoulaye Cissé de Montpellier, Aristide Bancé qui évolue en Ukraine, ou encore Bébé Kambou. Cet entraîneur, connu pour ses choix osés, a encore eu raison. Il est convaincu d’une chose : "Certains professionnels ne le sont que de nom". Alors, le coach burkinabè dope mentalement les locaux, encourage les expatriés qui veulent se donner, et la chance l’accompagne. Le 7 octobre dernier, il a fait confiance à 7 locaux ; rarement vu dans une sélection des Etalons.

S’il est arrivé à appeler des joueurs locaux rien qu’à la veille d’un si important match, c’est certainement parce qu’il n’avait pas trop le choix. Ce fut très curieux et triste de constater que presque tous les défenseurs titulaires aient contracté des blessures au moment où la Nation a le plus besoin d’eux. Etaient-ils sincèrement indisponibles jusqu’au point de ne pouvoir répondre à l’appel ? Nous ne doutons de rien pour certains d’entre eux, mais des informations concordantes nous apprennent que quelques-uns d’entre eux ont simplement simulé ces blessures pour ne pas rejoindre le groupe parce que le capitaine Mahamadou Kéré a été écarté pour "indiscipline". Par solidarité avec un joueur sanctionné ou pour avoir été encouragé par quelqu’un, est-on arrivé à renoncer à un devoir patriotique ? Nous osons croire que non.

Que dire des joueurs qui, malgré leur présence à Ouagadougou, ont déclaré forfait pour ce match pour "blessure" également sans avoir été touchés au cours des entraînements ? Des joueurs ont-ils eu peur d’échouer devant le Sénégal en refusant de jouer ?

A observer de près, quelque chose cloche dans la famille des Etalons. La sincérité n’est visiblement pas la chose la mieux partagée entre les acteurs du foot. Les dirigeants peuvent feindre de ne pas le savoir, mais ils ont les moyens de vérifier la véracité ou non du problème, car il est urgent d’arrêter le mal avant qu’il n ’empire. Les Etalons auraient perdu ce match que l’entraîneur aurait été peut-être indexé pour ces choix osés. Il a été sauvé par ce brillant résultat, mais pour combien de temps encore ? Nous y reviendrons en temps opportun.

Le devoir de chacun

Prompts à vilipender les Etalons lorsque ces derniers galopent mal, la presse et le public sportif doivent travailler à consolider les acquis. Chacun peut faire quelque chose à son niveau. Pour ce match contre le Sénégal, il a été heureux de constater que chacun a fait admirablement son boulot avec, en prime, une grande mobilisation des supporters. Un acte à saluer. Fidèle à sa mission, le département en charge des sports doit continuer de se saigner pour aider la Fédération à obtenir des stages fructueux pour les joueurs.

Cinq mois se présentent comme lointains mais bien proches surtout en matière de préparation. Qui veut aller loin ménage sa monture. Continuons la détection car les oiseaux rares comme Jonathan Pitroipa, Yssouf Koné, Joël Kouassi ou autre Bakary Koné,peuvent encore être dénichés. Bien d’autres talents sont cachés tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Burkina.

Par Alexandre Le Grand ROUAMBA

Pitroipa la lumière, Koné le lion

Beaucoup ont certainement crié au scandale lorsqu’ils n’ont pas vu des joueurs comme Aziz Nikiéma, Yahia Kébé, Abdoulaye Cissé (présents à Ouaga) sur le terrain. Sur les 11 joueurs qui ont débuté le match, il y avait seulement 4 noms connus : Soulama, Bamogo, Tall et Alassane. Les 7 autres sont tous nouveaux. D’où viennent-ils ? "C’est encore du Saboteur", murmurait-on dans les tribunes.

Parmi ces nouveaux, il y avait un certain Jonathan Pitroipa qui signait son tout premier match avec les Etalons. Génial comme garçon, ce faux lent au débordement de gagneur et à la pointe de vitesse des plus déroutantes, est doté d’une technique à l’image de son frêle physique. Il a donné du fil à retordre à tous les joueurs sénégalais à l’image de son complice de Rosenborg, Yssouf Koné.

Ce dernier a une force et un courage de lion. Il a tout essayé en attaque, il a presque tout réussi. Le duo Pitroipa-Koné a bien fonctionné et on n’a senti en aucun moment que des attaquants comme Moumouni Dagano étaient absents. Pitroipa fut véritablement l’homme du match.

A.L.G.

Ils ont dit...

Habib Beye (Lion du Sénégal) : Je n’ai rien compris sur le penalty. L’arbitre dit d’abord qu’il n’y a pas de penalty avant de revenir sur sa décision. Avec l’expulsion de notre joueur, il nous était difficile de revenir dans le match. Le Burkina a fait son match, le Sénégal n’a pas joué à sa hauteur. C’est bien pour le Burkina. Le Sénégal va devoir se reconcentrer.

Joël Kouassi (Etalons) : Ce fut une victoire dans la douleur. On savait que ça n’allait pas être facile. Il fallait se surpasser. C’est ce que nous avons fait. Nous avons fait ça pour le peuple burkinabè. Nous sommes fiers de ce match. Le Sénégal est un grand. C’est une grande équipe. Ce n’est pas parce que nous avons gagné que nous allons la minimiser.

Narcisse Yaméogo (Etalons, buteur) : Je suis déjà content de signer mon retour dans cette sélection. Je dédie le but à tout ce chaleureux public. Je lui demande de nous accompagner tout le reste de notre parcours.

Yssouf Koné (Etalons, attaquant) : Il fallait remercier ce beau public par une victoire. Je suis vraiment fier de nous, fier de tous les supporters. Nous sommes vraiment contents et espérons faire mieux la prochaine fois parce que ce n’est pas encore fini.

Abdoulaye Soulama (Etalons, gardien de but) : La partie a été belle. Nous avons démontré que nous sommes aussi une grande équipe. Nous gardons nos chances car les 3 points sont importants.

Jonathan Pitoipa (Etalons) : Le Sénégal est une bonne équipe mais nous aussi on n’est pas mal. Avec mes coéquipiers, nous nous sommes donnés et ça a payé. On est heureux. Le fait de gagner le Sénégal est une très bonne chose pour nous. Ça m’a fait beaucoup plaisir de jouer devant mon papa.

Henri Kasperzak (entraîneur du Sénégal) : Nous nous sommes créé aussi des occasions qu’on n’a malheureusement pas pu concrétiser. On a joué à dix et ce n’est pas toujours facile de jouer dans ces conditions. On est déçu par le résultat. On va essayer de réajuster la prochaine fois. Ce qui nous a manqué, c’est la finition. Cette efficacité offensive nous a manqué. Avec l’expulsion de notre joueur, tout s’est mal passé, en plus du penalty. Cette défaite ne nous arrange pas.

Drissa Traoré Saboteur (entraîneur des Etalons) : Vous avez vu comment les enfants ont joué. Ce n’est pas la même équipe qui est allée en Tanzanie. Ils ont joué le jeu que j’attendais, c’est-à-dire le football total. Ce fut un match tactique.

Propos recueillis par A.L.G

Le Pays