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Yako : Le préfet dans de sales affaires de racket et de corruption

Publié le samedi 2 septembre 2006 à 08h35min

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Rackets des populations pour l’établissement d’actes administratifs, perception illégale de taxes, établissement de certificats de non-logement de complaisance à des enseignants, etc., sont devenus le sport favori du préfet du département de Yako.

Indignés par ces actes indignes d’un représentant de l’Etat, des habitants de ladite localité ont alerté le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) parce qu’ils en avaient vraiment marre des agissements de monsieur le préfet.

A la réception de la plainte, et conformément à ses pratiques habituelles, le REN-LAC a dépêché, courant juillet 2006, une équipe d’enquêteurs sur les lieux. Les résultats des investigations de cette enquête de terrain ont amplement confirmé les allégations des plaignants, et sont parfois même allés au-delà.

Les manquements constatés par les enquêteurs sont si graves que le REN-LAC a estimé nécessaire d’introduire une saisine administrative auprès de monsieur le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, ministre de tutelle de l’intéressé. Cette démarche administrative a été effectuée le 14 août 2006. Ayant observé le délai réglementaire légal exigé en la matière, le REN-LAC rend aujourd’hui publics les résultats de ses enquêtes.

Des enquêtes menées par le REN-LAC, il ressort que M. B. Prosper Bassolé, préfet du département de Yako, se sucre sur le dos des populations et du Trésor public dans l’établissement de jugements supplétifs d’acte de naissance (JSAN), celui des certificats de non-logement et la perception illégale de taxes.

En effet, M. Prosper Bassolé, préfet de Yako, est passé maître dans l’art du trop- perçu de frais d’établissement des JSAN. En fixant les frais d’établissement du JSAN à 1000 F CFA au lieu de 600 francs, Prosper Bassolé viole sciemment les instructions données par ses responsables hiérarchiques. En effet, par message RAT n° 2006 - 00027 /MATD/SG/DGCAT/ du 22/02/06, le ministère rappelle aux autorités compétentes la nécessité de respecter scrupuleusement le montant de 600 francs pour l’établissement de cette pièce indispensable à tout citoyen.

Selon le ministère, cette somme se répartit comme suit : 400 F de timbres à coller sur deux copies de JSAN, et 200 francs de timbres à coller sur la demande adressée au préfet. Mais, comment fait le préfet de Yako avec les 1000 francs perçus par JSAN ? 400 F de timbres pour deux copies JSAN, ce qui est conforme à la loi ; les 200 francs destinés à l’achat de timbre à coller sur la demande de JSAN sont purement et simplement détournés par le préfet au détriment du Trésor public. A cela il faut ajouter 400 francs de racket opérés par usager.

Plus de 4 millions de F CFA impunément détournés

Au total, ce sont 600 francs par JSAN qui vont dans les poches de M. Bassolé Prosper. Quand on sait qu’en 18 mois (janvier 2005 - juillet 2006), le nombre de JSAN établis à la préfecture de Yako est estimé à 7000, un calcul rapide donne la bagatelle de quatre millions deux cent mille (4 200 000) F CFA impunément détournés par le préfet de Yako.

Et ce n’est pas tout. M. Bassolé Prosper a choisi, par ailleurs, de faire son beurre dans l’établissement de faux certificats de non-logement qu’il délivre à des enseignants. Lui-même instituteur certifié de profession, il délivre allègrement des attestations de non-logement à des enseignants bien logés dans des bâtiments administratifs, probablement contre des ristournes.

Le marché semble simple à comprendre : les enseignants qui se prêtent au jeu perçoivent indûment des indemnités de logement de près de vingt mille (20 000) francs CFA par mois. Mais, comme "il n’y a rien sans rien", ils pourraient lui rétrocéder une partie de ce gain sans risque, et le tour est joué. Parmi les enseignants bénéficiaires de cette manne tombée du ciel, on peut citer : Félix Tiono, instituteur certifié à l’école primaire publique de Nagséné depuis septembre 2005 ; Alassane Roland Kondombo, instituteur certifié à l’école primaire de Song-Naba depuis octobre 2003. Ces deux enseignants occupent bel et bien des bâtiments administratifs qui leur ont été attribués, mais détiennent des certificats de non-logement signés de M. Bassolé, préfet de Yako, lesquels certificats leur permettent de percevoir indûment des indemnités de logement.

Taxes illégales

De sources concordantes, il y aurait près d’une vingtaine d’enseignants qui bénéficieraient indûment des indemnités de logement avec la complicité du préfet. Ce sont donc environ quatre millions huit cent mille (4 800 000) F CFA par an de fausses indemnités de logement qui sont extorqués au Trésor public par la faute de monsieur le préfet.

Enfin, profitant aussi de l’analphabétisme des paysans, le préfet n’hésite pas à leur imposer des taxes illégales. Pire, certaines taxes qui devraient normalement être versées au Trésor provincial sont purement et simplement détournées par le préfet. A ce titre, les enquêteurs du REN-LAC ont noté les faits suivants :

- le 12 juin 2006, 65 000 francs CFA représentant une contravention pour divagation de 22 bœufs ont été versés à la préfecture par M. Adama Ouandé du village de Gollo contre un faux reçu en lieu et place d’une quittance du Trésor provincial ;

- le 27 juin 2006, 50 000 francs CFA ont été versés à la préfecture par M. Eladji Kassoum Rabo du village de Song-Naba pour une contravention ayant pour motif "divagation de 32 bœufs" contre un faux reçu ;

- M. Hamando Sawadogo, cultivateur à Petit-Sambo, non loin de Yako, a versé la somme de 30 000 francs CFA sans reçu représentant la contravention pour divagation de ses bœufs.

Monsieur le préfet use parfois de pressions pour obliger ses administrés à payer les contraventions dans l’unique but de lui permettre d’entrer au plus vite en possession de son jackpot personnel.

Comme on peut le constater, le préfet de Yako semble baigner dans une ambiance d’impunité totale si bien qu’il se croyait tout permis. N’eût été la dénonciation faite par certains de ses administrés auprès du REN-LAC, rien ne semblait pouvoir l’empêcher de persister dans ces pratiques indignes d’une autorité de son rang, et préjudiciables aux populations et à l’Etat qu’il est censé représenter.

Panique du préfet

La saisine administrative formulée par le REN-LAC à l’adresse du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD) semble avoir provoqué un remue-ménage. En effet, les agitations fébriles et les gesticulations actuelles de M. Bassolé nous autorisent à penser qu’un contrôle a dû être fait à son niveau. En effet, à Yako, on a remarqué depuis un certain temps que monsieur le préfet est rentré dans une panique totale et multiplie les actes qui le compromettent davantage. Il nous est revenu qu’il tente certaines régularisations ; c’est ainsi qu’il a reversé au Trésor provincial, contre quittance, des sommes qu’il avait indûment perçues depuis longtemps. Il a également procédé à des remboursements de certaines sommes escroquées à ses administrés. Comme quoi la dénonciation peut donner des résultats tangibles si chacun y met du sien.

Mais nous ne devons pas nous limiter là. Il est impératif que le cas de Yako serve d’exemple à tous les administrateurs qui prennent le malin plaisir à se servir des populations au lieu de les servir. Le REN-LAC veillera à ce que toute la lumière soit faite sur ces mauvaises pratiques qui discréditent l’Etat et pénalisent les populations. Il tient à saluer le courage et l’abnégation des citoyens qui ont bravé la peur, les intimidations, les menaces de toutes sortes pour oser dénoncer les faits et pratiques de corruption.

C’est avant tout grâce à eux que le REN-LAC a pu conduire à terme cette enquête dont les résultats ont servi à la saisine administrative et à la publication du présent article. Il rappelle aux uns et aux autres que seule une mobilisation des citoyens, des communautés et de l’administration peut contribuer à barrer la route à la corruption dans nos cités et dans notre pays. En refusant de dénoncer les actes de corruption avérés dont nous sommes témoins, nous nous rendons complices, consciemment ou inconsciemment des pratiques corruptrices dans les institutions publiques ou privées.

Le REN-LAC se propose de publier vos réactions, vos suggestions, vos dénonciations, si cela est conforme à la déontologie et à l’éthique professionnelle. Vos critiques et suggestions sont les bienvenues. Pour toutes informations et suggestions, contactez-nous à l’adresse suivante : Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) 01 BP : 2056 Ouagadougou 01 ;

Fax (226) 50 30 59 91 ;

Tél. : (226) 50 33 04 73 ;

Email : info@renlac.org, site : http: //www.renlac.org. Tél. vert : 80 00 11 22. Le téléphone vert est gratuit.

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