LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Télévision et migration : Quand les images ‘‘dénaturent’’ et nourrissent le rêve d’ailleurs

Publié le jeudi 31 août 2006 à 08h03min

PARTAGER :                          

Les incessantes images sur les milliers de ressortissants subsahariens entassés dans des pirogues de fortune ou défiant des fils barbelés pour rejoindre l’Europe devraient inciter à quelques réflexions.

Devant l’impuissance voire le désintérêt des uns pour contrôler leurs forces vives, dans la détermination des autres pour enrayer cet afflux d’immigrants ‘‘indésirables’’- la dernière en date celle de l’immigration choisie - les pays africains et l’Union européenne au-delà des stratégies affichées devraient tenir compte d’un fait marquant : les ravages des images (télévisions) occidentales dans les pays africains. Celles-ci demeurent démonstratives de ce que disait Rimbaud : “ La vraie vie est ailleurs ! ”. Qu’on le sache, l’image n’est pas seulement dangereuse parce qu’elle peut être truquée ou simplement trompeuse, mais surtout parce qu’elle a un pouvoir anesthésiant : elle porte sa propre évidence et n’a pas besoin d’être prouvée, on la met en mémoire sans examen, sans contestation.

Parvenir à contrebalancer un tel diktat de l’image exige la nécessaire adaptation de nos systèmes d’enseignement où il s’agira d’introduire une formation à la “ culture audiovisuelle ”. C’est ainsi que l’on parviendra à faire des médias et de la télévision en particulier non pas un espace promoteur du monde occidental éclatant et merveilleux, envié et attirant - pour des jeunes et bien d’autres aventuriers obsédés par le rêve de l’Eldorado - mais plutôt un moyen efficace de communication, d’information et d’éducation en Afrique.

La télévision : un média envahissant de plus en plus hégémonique

Depuis l’avènement de la démocratisation amorcée au début des années 90, “ le continent des conteurs ”, dernier bastion de ces fragiles monuments que sont les anciens - sources authentiques de connaissances - est plus que jamais entré en pleines turbulences. Si jadis, les enfants, les jeunes en Afrique se délectaient de leurs récits mettant en scène la vie, les individus et les valeurs, de nos jours c’est autour de la fascinante et déferlante télévision qu’on les retrouve.

Dans les villes africaines, en plus des chaînes locales qui se sont multipliées, fleurissent les antennes paraboliques au grand bonheur des téléspectateurs qui peuvent recevoir nombre de chaînes.

Considérée - à tort ou à raison - comme une “école parallèle” ou une “fenêtre ouverte” sur le monde du fait qu’elle apporte de l’information, montre ce qui se passe ici et là, transmet des connaissances, la télévision s’apparente à un dispositif dominant, hégémonique. Selon Karl Popper, “ La télévision est devenue un pouvoir colossal : on peut même dire qu’il est potentiellement le plus important de tous, comme si elle avait remplacé la voix de Dieu ”. Elle semble en effet avoir volé la vedette à nombre d’activités et de loisirs.

Les salles de cinéma, les stades et autres lieux de rassemblement semblent se désemplir progressivement à cause du petit écran et ses programmations régulières de films et autres retransmissions de matchs et de spectacles. Quant à la radio - qui demeure encore un média privilégié - son utilisation est devenue quasi-épisodique ; à juste titre, on dit que la radio est écoutée quand le petit écran est arrêté. De même, la presse écrite c’est-à-dire les journaux d’information (quotidiens, hebdomadaires et mensuels) sont-ils confrontés à la sévère rivalité des “journaux télévisés” ou J. T. Sans doute, le paysage audiovisuel africain est entré de plain-pied dans les tourbillons des images. Une situation non moins inquiétante.

Quelques pièges dans l’acquisition des programmes étrangers

La diffusion et l’importance des programmes importés dans bon nombre de pays africains demeurent des réponses aux multiples contraintes qui les affectent. Au Burkina Faso, selon une étude, le volume moyen des programmes importés était de 80% en 1983 et de 70% en 1987. Par rapport à la radio où les programmes sont peu coûteux, ceux de la télévision en plus des coûts de fonctionnement et de maintenance des équipements exigent des investissements importants. Peu nombreux sont donc les pays qui peuvent assurer les charges nécessaires. La conséquence, sans doute la plus néfaste, est la proportion importante des productions étrangères diffusées par les télévisions africaines et acquises avec facilité. En effet, si certains programmes (reportages d’actualité, sport, documentaires...) sont obtenus contre un forfait modique (Transtel, Allemagne), d’autres le sont gratuitement à travers les accords de coopération existants (CFI). L’acquisition des fictions télévisées notamment américaines se fait grâce au troc (barter).

Une étude indique qu’en général, ces importations sont peu coûteuses et s’effectuent de trois manières. En premier lieu, elles sont fournies gratuitement dans le cadre des accords de coopération avec les chaînes et organismes occidentaux. En deuxième lieu, les programmes et (surtout certaines séries américaines) sont achetés à des prix modiques. A titre d’exemple, le prix de la série Dallas estimé à 6250 dollars US par projection pour une station européenne peutêtre proposé à 312 dollars US pour une télévision africaine. Enfin, les publicistes et sponsors achètent souvent des droits de retransmission de certains programmes étrangers pour pouvoir intercaler des spots publicitaires. C’était le cas de Dallas en Côte d’Ivoire ou pour Dynastie au Sénégal. Par ailleurs, on s’aperçoit en survolant le tableau de la “Reprise des programmes de CFI ” que la Télévision du Burkina puise considérablement dans la banque des programmes de cette chaîne française (en moyenne 103h/mois).

L’importation massive des programmes étrangers qui condamne nos productions nationales apparaît inévitablement comme une bouée de sauvetage pour meubler les temps d’antenne. Il s’agit principalement des émissions de distraction (films, téléfilms, feuilletons, séries, sitcoms et des retransmissions émissions sportives, etc.)

Un succès populaire et indéniable des fictions télévisées...

De « Dynastie » à « Santa Barbara » en passant par « Dallas » ou « Falcon Crest », la programmation des chaînes africaines intègre de plus en plus les « télé-novélas » : Dona Béija, Le cercle de feu, Femmes de sable, Rose sauvage, Terra Nostra, L. Clarita, Destin de femme, Monica brava, Sublime mensonge, Ruby, etc. Le constat est hallucinant : pendant les moments de diffusion de ces feuilletons qui font étalage de bien des récits d’amours contrariés et autres intrigues de famille, inutile de rendre visite. Après ces rendez-vous solennels, les retrouvailles sur les places publiques, dans les cours d’école, au bureau, sont des occasions pour évoquer les dernières frasques de tel ou tel acteur, pour fantasmer sur la pulpeuse héroïne. Autant dire qu’on se laisse aller à toutes sortes de commentaires, qu’on replante le décor des sensations refoulées que les belles “gos” et autres nanas blondes ramènent en surface. Et comme le public aime çà (a-t-il d’ailleurs le choix ?), les chaînes se donnent à cœur joie pour rediffuser.

... qui suscite quelques interrogations : la télévision, lieu d’acculturation et d’aliénation ?

“Les belles maliennes habillées dernier cri, ne jurent plus que par le style Alexis. Chez les filles nées depuis 1993, le prénom à la mode c’est Christelle. Dans tous les quartiers, les adolescents veulent qu’on les appelle Blake plutôt que Modibo ou Seydou. Plus de dix ans après avoir conquis l’Amérique et fasciné l’Europe, le feuilleton américain « Dynastie » fait des ravages au Mali.”

Il ne serait pas exagéré d’étendre un tel constat à tout un continent noir dont on raffole de fictions télévisées (feuilletons, séries) généreusement acquises auprès des pays occidentaux et bien d’autres comme le Brésil. Il est tout aussi légitime de s’interroger sur les effets de la télévision, sur les valeurs qui y sont véhiculées. A travers les différentes perceptions et interprétations qui peuvent en découler, c’est une problématique de l’identité culturelle qui se voit ainsi poser.

Si l’auteur de Richesse et pauvreté des nations, David Landes, peut définir la culture comme la somme des attitudes, des valeurs, des ambitions, des rapports entre membres de la société, au sein de la famille, entre hommes et femmes, etc., que nous montre la télévision ? Quel (s) besoin (s) vient-on y satisfaire ? Comment expliquer cette attraction ? Au fait, qu’est-ce qu’on y gagne à travers sa compagnie ? Apporte-t-elle des réponses aux préoccupations quotidiennes des téléspectateurs ? Quelle part d’imaginaire et de créativité leur apporte-t-elle ? Que nous réserve la percée inéluctable des antennes para(dia)boliques ?

Autant de questions qui amènent à constater que le quotidien du téléspectateur africain est de plus en plus balisé par toutes sortes de fictions télévisées. Des productions très prisées dénoncées à travers leurs “intrigues cigognes qui font la promotion d’un mode de vie à l’américaine avec belles villas, grosses voitures et mœurs dissolues...(où) certaines scènes ou situations choquent, comme l’infidélité érigée en style de vie ou l’homosexualité ”(T. Perret). Pour d’autres encore ce sont “des modèles, des mythes et des stéréotypes aliénants ; ceux du héros individualiste, de la violence gratuite, du faux luxe, de l’argent tout puissant, de la sexualité débridée...” (C.Houeto). Certaines critiques soulignent que ces fictions étrangères ne reflètent en rien les valeurs socioculturelles dans les contrées africaines car ce sont des instruments par excellence de la dépendance culturelle des pays du Tiers monde à l’égard des pays riches.

L’observateur attentif peut relever quelques attitudes et comportements au sein de la jeunesse africaine assoiffée de modèles. Le mimétisme est complet lorsque des jeunes tentent de reproduire l’idéal esthétique véhiculé par les médias. A travers tel style vestimentaire, tel modèle en coiffure, etc., certaines jeunes filles voudraient s’identifier à leur héroïne préférée. Ainsi, ont été créés la mode Dona Béija, le style Estelle, héroïnes de feuilletons. Idem chez certains jeunes garçons qui voudraient reproduire les forces de séduction, de caractère, de puissance, d’un tel personnage populaire. Il n’est pas non plus exagéré de dire que certains se “dépigmentent ” la peau - à travers le recours à toutes sortes de produits cosmétiques et bien d’autres recettes ‘‘miracles’’ sans se soucier de leurs éventuelles conséquences destructrices, dramatiques - pour avoir l’air plus ‘‘blanches”. Avoir un teint de peau claire serait un atout pour mieux se distinguer, pour ‘‘avoir la côte’’ et pour plaire aux mortels lesquels, dit-on, auraient une préférence pour les “mousso gwê ” ; les “ poug zinsé ”, les “dèbô danè yô”.

Frantz Fanon a certes replacé ce désir d’avoir une peau blanche (Peau noire, masques blancs) dans un contexte historique, mais force est de reconnaître que les médias et en particulier la télévision contribuent à accentuer les attitudes vis-à-vis de la beauté et les concepts de beauté. On peut évoquer une réelle aliénation à vouloir se décolorer la peau ; il y a perte d’identité et de personnalité quand certains n’éprouvent plus cet attachement sentimental et culturel à donner les prénoms courants et significatifs à leurs progénitures, leur préférant ceux de leurs héros (présents à l’écran, dans le roman, etc.)

Cette identification aux héros des films et autres genres aboutirait selon E. Morin à une sorte de “déréalisation”, à une perte du sens des réalités. Pour Abdoul Bâ, les références culturelles des enfants africains se limitent, de plus en plus, à Rick Hunter, à Santa Barbara, à Dallas et à Dynastie et les programmes satellisés contribuent à véhiculer des modes étrangers et des genres de vie étrangers aux sociétés africaines, entraînant ainsi de profondes frustrations. De son côté, Henri Lopès partage les mêmes inquiétudes, affirmant que l’on peut déjà mesurer les effets d’un régime constitué de nourritures spirituelles composées exclusivement de produits étrangers. Des populations et des jeunes notamment qui se prennent à rêver d’ailleurs. Dans ces conditions, parler du rôle que doit jouer la télévision dans une dynamique de transformations sociales est particulièrement difficile.

Ne diabolisons pas la télévision : ce n’est qu’un média mettant en relief...

Faut-il bouter le petit écran hors de nos murs ? La télévision en tant que telle ne constitue pas un danger.

Le vrai danger est dans nos façons de faire, de voir les choses. Il paraît évident que les échecs de la télévision sont liés à la crise que traversent les sociétés africaines (politique, économique, institutionnel, incompétence, analphabétisme...). Des échecs qui sont la résultante des politiques de gestion du développement menées depuis des décennies et notre manque de vision et d’ambition.

Qu’on le sache, la télévision ne peut être et ne pourra être un “raccourci” au développement ; à elle seule, elle ne peut résoudre les problèmes d’une société. Aussi “révolutionnaire” soit-elle, la télévision ne peut par elle-même déclencher ni entretenir de quelconques transformations sociales. Qu’on se rappelle, les incessantes campagnes télévisées de sensibilisation sur la drogue, sur l’insécurité routière, etc. en Europe sont souvent restées loin des attentes. Ailleurs, en dépit d’une large diffusion médiatique, au travers des reportages et documentaires, il semble qu’on assiste de manière impuissante aux conflits à répétition, à la montée des fanatisme et extrémisme religieux, à la persistance de fléaux comme le SIDA, la prostitution, etc.

La télévision se distingue surtout par son pouvoir de large diffusion et de mise en relief ; elle ne peut favoriser une prise de conscience qu’à travers certaines conditions.

... mais qui peut constituer, de fait, un outil de transformation sociale

Qu’on se rassure, il n’est pas question ici de faire une quelconque apologie de la télévision, d’être un fervent avocat de la cause cathodique ; non plus, il ne s’agit pas de la dénigrer urbi et orbi, d’être un partisan du non-vouloir du petit écran en Afrique. Chose d’ailleurs illusoire. Nous pensons qu’il est essentiel de faire la part des choses ; puisque la télévision existe et continuera sans doute d’exister, mieux, puisqu’elle prend de l’ampleur, il importe de composer avec... Autrement, d’apprendre à vivre avec, d’apprendre à la connaître et à reconnaître qu’elle n’est pas un média comme les autres.

Plutôt que de vouloir chasser l’ennemi (la télé) - ce qui reviendrait à laisser faire - ne serait-il pas temps, dit Marc Dupuis, d’essayer de joindre le plaisir que les images nous procurent à la compréhension de leur fabrication, de leur réception et de leur influence ? La télévision pourrait devenir véritablement distrayante, plaisante, captivante et indépendante, bref, enfin fréquentable, pourvu qu’on sache s’en servir.

Cette réflexion cherche surtout à provoquer un débat, une prise de conscience de l’importance de la “culture audiovisuelle ” comme alternative à l’avènement d’une ‘‘société médiatique’’ par trop envahissante et manipulatrice. N’est-il pas urgent de cerner et de définir un projet qui puisse fournir aux populations et aux jeunes générations notamment - qui passent de plus en plus de temps devant la télévision et les médias - d’autres perspectives pratiques, d’autres moyens de résistance où les réalités et les vraies valeurs soient mises en évidence, comprises et où ils peuvent être des êtres actifs, c’est-à-dire “créativement pensants” ?

In fine, qu’on le sache, la télévision comme dit M.Souchon, n’est qu’une pièce dans un ensemble où elle trouve son efficacité et sans lequel elle n’est qu’une voix prêchant dans le désert ou pis encore, un instrument servant à élargir les écarts culturels. Plus que jamais, les problèmes ne peuvent être résolus que s’ils sont connus et compris. Si le rôle de la télévision et des médias est de rapporter et de présenter les faits, de favoriser le débat en étant un espace ouvert, on ne peut certainement pas leur reprocher de ne pas les résoudre.

De la nécessité d’une “éducation aux médias”

“ Le principal enjeu de ce siècle, sera l’éducation”, déclare Orson Welles. Pour sa part, le Pr J. Ki-Zerbo relève que l’avenir du continent africain réside dans sa capacité à remettre vite en place toute une structure d’enseignement adaptée à ses besoins. L’un des thèmes à développer concerne l’éducation aux médias en tant que dimension nouvelle dans la formation des jeunes et qui devrait, à notre sens, intégrer le système d’enseignement non pas uniquement en tant que support - dans l’accompagnement et l’illustration des matières du programme scolaire comme le préconisent certains, mais aussi en tant qu’objet d’analyse. C’est-à-dire comme une matière spécifique qui permet entre autres, la lecture critique des médias et qui initie aux conditions de production et de réception des médias. Sur un plan pédagogique, il s’agit d’éduquer le regard, d’enrichir la sensibilité, de stimuler la créativité et l’imagination (chère à Hitchcock), d’éveiller l’esprit critique et de développer l’expression.

Il est indéniable que l’éducation ne peut être performante qu’en entretenant une relation constante et étroite avec le monde extérieur, avec les pratiques quotidiennes des gens et surtout dans sa vocation à apporter des réponses à leurs préoccupations.

Eduquer aux médias c’est faire en sorte que chacun, comme le soutient S. Tisseron, puisse devenir son propre pilote dans l’image en étant capable d’en identifier les mécanismes et les effets. Il convient donc de rechercher une certaine lisibilité dans les informations véhiculées, de parvenir enfin à un décodage des messages télévisuels, de privilégier les choix d’expliquer, de faire comprendre, de répandre cette culture - au sens de la construction et de la formation des populations afin qu’elles s’insèrent paisiblement et dignement dans la société, afin qu’elles soient riches culturellement et spirituellement en étant autonomes et libres dans leurs choix, sans perdre leur tête.

La recherche et la culture de la paix, de la tolérance, l’inculcation des valeurs humaines et principes les plus élémentaires tels que le respect, la solidarité, le sens du “vivre ensemble”, le sens du “bien commun ou privé” etc. ne se décrètent et ne se postulent pas. Ils se construisent et se consolident en partie sur le chemin de l’école - el camino de la scuela. C’est à l’école - lieu de “ structuration du champ des connaissances qui transforme une culture mosaïque en une culture efficace ” (A. Moles) et espace idéal permettant “une activité intellectuelle qui fabrique du mémorable et qui, par conséquent, contribue à cimenter une société, à ériger son identité ” (G.Chapouillié) - que l’on pourrait apprendre à se servir des médias et de la télévision. “De même que l’on apprend à lire, à écrire et à compter pour avoir accès à une vie autonome, on apprendra demain les médias parce qu’ils sont source de savoirs mais aussi de manipulations. Apprendre les médias est le prolongement ‘‘naturel’’ des savoirs de base.”L’école est ce qui favorise la confrontation, le dialogue, l’échange et la complémentarité. Elle est un lieu permettant “la circularité de la parole qui fertilise la pensée ”. Parole qui n’est pas “le mot rituel, la formule juste, mais le débat contradictoire, la discussion, l’argumentation ”.

La formation à la culture audiovisuelle va donc dans le droit fil d’une vision globale et ambitieuse du processus éducatif en tant qu’élément constitutif du développement personnel et de la cohésion de la société. C’est une démarche qui finalement vise non seulement à réduire le danger des “tentations interprétatives” et des “idées fausses” mais aussi et surtout à donner des repères, à sensibiliser et à prendre conscience.

La contribution et l’efficacité de la télévision dans la socialisation des individus résident dans une conjonction dynamique de comportements, d’institutions et de valeurs. L’invasion audiovisuelle semble dorénavant inéluctable - “Après le désert, la profusion” (H.Bourges) et mondialisation oblige- elle ne sera une fatalité que si les Etats africains jouent les absents en persévérant dans la mal-gouvernance où l’on retrouve tous les ingrédients du sous-développement, en occultant cet effort d’accompagnement de la relation des jeunes aux médias.

C’est en ces termes que la télévision et les médias en général réussiront à répondre à leur mission socialisatrice, à savoir : “faire des élèves des adultes maîtres de leur environnement médiatique, conscients des manipulations qui les guettent et des richesses qui leur sont proposées ” comme l’affirmait Fabienne Thomas dans la revue Communication (1995). Qu’on se rappelle, ad vitam aeternam, ses dires du Professeur J.Ki-Zerbo : “nan laara, an saara”.

Dr T. BANGRE,
CERAM - Centre d’Etude et de Recherche
sur les Médias en Afrique,
Université de Ouagadoudou

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 1er septembre 2006 à 08:11, par Pilmiko En réponse à : > Télévision et migration : Quand les images ‘‘dénaturent’’ et nourrissent le rêve d’ailleurs

    Rimbaud n’a pas écrit "La vraie vie est ailleurs", mais "La vraie vie es absente".
    Merci. Vérifiez avant de citer n’importe quoi !

    • Le 1er septembre 2006 à 11:55, par jige En réponse à : > Télévision et migration : Quand les images ‘‘dénaturent’’ et nourrissent le rêve d’ailleurs

      Docteur BANGRE, merci pour cet article salvateur !!! Je partage complètement le fond de votre pensée ... j’habite en France (à Lille) et je pense que la télévision à vraiment un effet hypnotique. J’avais lu un article qui parlé de "l’opium du peuple", la grande force de la Télé c’est d’accaparer toute l’attention du spectateur de manière instantanée. Je vois les dégâts que peut provoquer la télé au quotidien tout comme vous nous avons eu une évolution des prénoms donnés beaucoup de Brandon/ Brenda et Steeve pendant la diffusion de Beverly Hills. J’apporte un petit bémol sans vouloir généraliser les prénoms américanisant sont l’apanage de classes sociales peu éduqués et défavorisés ... Ma théorie c’est que la télé réussi à flatter leur égo leur permet de croire que la vie est aussi simple que dans un feuilleton ou qu’il suffit de répondre à 3 questions débiles pour gagner de l’argent (dixit tous les jeux TV de TF1), enfin la TV permets de se reconnaitre et à un coté identitaire... c’est-à-dire de créer une sous-culture complément artificielle basée sur les derniers rebondissements complément inintéressant de la dernière TV-réalité à la mode (d’ailleurs la TV réalité à t’elle traversée la méditerranée ? ) .
      Au fond pour moi la TV à vraiment un coté dangereux car c’est un média vraiment trop puissant qui se suffit à lui-même, en France les ventes des journaux sont en berne, la télé n’est pas le seul coupable mais permet pour la plus part des gens d’avoir de l’information et de donner leur avis sur un sujet même si le traitement est complément superficiel ou pire erroné.
      Dans votre article vous sembler dire que la TV ne peut changer la société, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Pour moi elle le peut et le fait, le problème c’est qu’il s’agit d’un nivellement par le bas, la télé rend inerte et vraiment peu de programmes ont une vrai valeur informative et culturel. La télé est aussi un très bon outil de propagande en France un an avant les dernières élections toutes les chaines ont diffusés des reportages sur les banlieues, l’insécurité ou la police dans les quartiers chauds, un an après l’insécurité et devenu LE thème de la campagne électoral et un LE PEN réussi à arriver au second tour.
      La télé à déjà fait pas mal de dégâts en Europe mais j’ai vraiment peur des conséquences sur des pays moins riches, moins éduqués et en proie à des problèmes de société ou d’instabilité politique.
      Aussi vous avez vraiment raison de vous interroger sur l’intérêt de la télé, même si votre voix ne portera jamais plus que les ondes hertziennes.

      Bien cordialement.
      DEBUIRE Jean-Guillaume.
      Si vous rédiger d’autres articles portant sur les médias n’hésitez pas à me les faire parvenir.

      • Le 3 septembre 2006 à 18:04, par Lolita En réponse à : > Télévision et migration : Quand les images ‘‘dénaturent’’ et nourrissent le rêve d’ailleurs

        Salut Dr Bangré,
        Je réagissais à une interview sur ce site dans laquelle l’interviewé semblait faire valoir que les Etats-Unis, il suffit d’y arriver et tous ses problèmes seront reglés.

        Je relevait que ces genres de déclarations rendaient fallacieusement plausible l’existennce des univers exposés par la flatterie des images télévisuelles.

        Nous tombons donc des nues une fois sur place dans l’eldorado au sujet duquel on a tant fantasmé, puisqu’il demeure aussi lointain et inatteignable que naguère.

        Je suis content de remarquer qu’un scientifique de la chose médiatique me confirme dans ce que j’ai pu moi même constaté et que j’avais du mal à faire accepter.

        "Professuer, il faut bisser", comme on le dirait au campus de l’UO.

    • Le 3 septembre 2006 à 17:51, par Lolita En réponse à : > Télévision et migration : Quand les images ‘‘dénaturent’’ et nourrissent le rêve d’ailleurs

      Vous qui vérifiez avant de citer, allez jusqu’au bout et dites-nous ou Rimbaud a écrit que "la vraie vie est absente."

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina/médias : BBC et VOA suspendus pour deux semaines