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Burkinabè de Côte d’ivoire : A-t-on détourné les fonds de la solidarité ?

Publié le vendredi 3 février 2006 à 07h13min

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La Mutuelle pour le développement économique et social des Burkinabè résidant en Côte d’Ivoire, Faso solidarité Côte d’Ivoire, ne lâche pas prise. Elle revient à la charge dans sa quête de transparence sur la gestion des fonds et biens collectés en faveur des Burkinabè chassés de Tabou en 2000. Et c’est l’ex-conseiller juridique du consulat général du Burkina à Abidjan, Marc Somda, qui continue d’être dans la ligne de mire de l’association.

La crise qui couvait entre l’association Faso Solidarité Côte d’Ivoire (FSCI) et le conseiller juridique du consulat général à Abidjan a éclaté au grand jour et dépassé les frontières ivoiriennes pour rejaillir au Burkina, sur les traces de l’ex-conseiller juridique, en fin de mission.

Tout est parti d’une « lettre de relance » en date du 21 novembre 2005, où FSCI demande des comptes au conseiller qui, selon elle, a été « seul à gérer » les divers dons recueillis pour secourir les populations burkinabè victimes d’exactions à Tabou, en 1999-2000 (Le Pays n°3513 du 1er décembre 2005). Le diplomate incriminé a, dans Le Pays n°3516 du 6 décembre 2005, exercé son droit de réponse en rejetant les accusations de FSCI. Mais, il n’est pas resté sur la défensive. Il a contre-attaqué à travers un long pamphlet dans lequel il remet en cause la légitimité de FSCI et même la nationalité burkinabè du président de FSCI, Moussa Douamba.

Il n’en fallait pas plus pour faire sortir l’association de la relative réserve qu’elle avait observée dans sa lettre du 21 novembre. C’est un volumineux dossier d’environ une centaine de pages qui a été confectionné par FSCI, en guise de réaction au courrier de Marc Somda. En fait, il prend au mot le conseiller juridique, qui écrivait qu’il serait heureux de prendre connaissance des preuves qui indiquent que l’association a tenté de le contacter sur la gestion des divers dons. FSCI a-t-elle interpellé M. Somda bien avant la fin de sa mission ?

Sur cette question, FSCI est catégorique : des échanges de correspondances attestent qu’elle réclame à l’intéressé des comptes « depuis plusieurs années, soit directement, soit par l’intermédiaire de ses supérieurs hiérarchiques ». FSCI indique que « M. Marc Somda se refusera à restituer aux initiateurs de cette opération d’entraide émanant de la société civile burkinabè en Côte d’Ivoire, le sort qui a été réservé à leur action ». En désespoir de cause, elle dit avoir opté pour la méthode actuelle, étant donné que « les démarches amiables n’ont pas eu de suite efficace et révérencieuse ».

L’association de Moussa Douamba se réserve même le droit d’engager des actions administratives ou /et judiciaires contentieuses contre l’ex-conseiller juridique, d’une part pour la gestion de l’opération de solidarité pour les compatriotes expulsés de Tabou et, d’autre part, « pour le déni de nationalité dont s’est rendu coupable l’ex-conseiller juridique ».

Une affaire de nationalité aussi...

M. Somda a, dans sa réponse à l’association, émis des doutes sur la nationalité burkinabè de son président en écrivant qu’il était « ivoirien par naturalisation ».
Faso Solidarité Côte d’Ivoire est-elle habilitée à demander des comptes au conseiller juridique, comme ce dernier le lui reproche ? A-t-elle pris part à l’opération de collecte de dons pour exiger d’y avoir un droit de regard ?

A toutes ces questions, l’association répond par l’affirmative. Elle dit même avoir été l’un des initiateurs du projet qui a vu le jour le 16 septembre 2000. Ce jour-là, le représentant du consul général de l’époque, les présidents d’association, les dirigeants de Faso Solidarité Côte d’Ivoire ont eu à lancer le premier appel à venir en aide aux sinistrés de Tabou. Sur place, explique FSCI, une somme de 455 000 F CFA a été réunie et remise au conseiller juridique Somda avec la « promesse ferme » que la liste des donateurs serait publiée, et la communauté burkinabè tenue informée de l’utilisation des dons.

Mais pour FSCI, la gestion des fruits de la solidarité (près de 5 millions de F CFA et des dons en nature) s’est faite « sans plus associer personne, pas même les initiateurs, encore moins le service social du consulat."

Le conseiller juridique se dit serein

A ce sujet, le conseiller juridique dit avoir la conscience tranquille : « Au niveau du consulat général du Burkina Faso à Abidjan, écrivait-il dans Le pays n°3516, le ministre conseiller, conseiller juridique, avait été chargé par le consul général de la réception des divers dons. Quant à la gestion, elle relevait, comme il se doit, des prérogatives du consul général. La situation a été régulièrement faite à qui de droit et à ce jour, mes autorités hiérarchiques n’ont rien eu à me reprocher ». Pour FSCI, toutefois, c’est parce qu’elle a porté l’affaire sur la place publique « que le mis en cause ose enfin divulguer que le compte rendu a été fait auprès de sa hiérarchie ».

Mais Faso Solidarité n’en veut pas au conseiller juridique que sur l’affaire des dons. Elle lui reproche aussi sa « méconnaissance de la procédure juridique ivoirienne » et « sa pratique prise de conduire systématiquement les usagers qui le sollicitent vers des personnes vivant de leur travail d’intermédiaires avec les auxiliaires de justice ». Des individus qui, selon l’association, « ne se préoccupent pas toujours du sort du plaignant », une fois leurs honoraires perçus.

Au-delà donc de l’opération ponctuelle d’aide de solidarité, FSCI relève des dysfonctionnements au niveau du conseil juridique que le consulat doit apporter aux Burkinabè de Côte d’Ivoire. Et de citer plusieurs dossiers que le conseiller juridique n’a pu traiter et que l’association a eu à connaître et à gérer. En définitive, il s’avère nécessaire que Faso solidarité et le consulat général accordent leurs violons, si tant est qu’ils soient véritablement au service de nos compatriotes.

Et peut-être que l’ambassade, qui s’est montrée discrète tout au long de l’affaire, apparaît comme le médiateur idéal même si elle a refusé, une première fois, de jouer ce rôle à la demande de Faso solidarité Côte d’Ivoire.

Par Mahorou Kanazoé
Le Pays

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